La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/07/2024 | LUXEMBOURG | N°50597

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 juillet 2024, 50597


Tribunal administratif N° 50597 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024 :50597 2e chambre Inscrit le 14 juin 2024 Audience publique du 8 juillet 2024 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière de protection internationale (art. 35 (4), L.18.12.2015)

___________________________________________________________________________


JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 50597 du rôle et déposée le 14 juin 2024 au greffe du tribunal administratif par Maître Marcel Marigo, avocat à

la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, n...

Tribunal administratif N° 50597 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024 :50597 2e chambre Inscrit le 14 juin 2024 Audience publique du 8 juillet 2024 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du ministre des Affaires intérieures en matière de protection internationale (art. 35 (4), L.18.12.2015)

___________________________________________________________________________

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 50597 du rôle et déposée le 14 juin 2024 au greffe du tribunal administratif par Maître Marcel Marigo, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … à … (Sénégal), de nationalité sénégalaise, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires intérieures du 7 juin 2024 de la transférer vers l’Espagne comme étant l’Etat membre responsable pour connaître de sa demande de protection internationale ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 juin 2024 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Marcel Marigo et Madame le délégué du gouvernement Pascale Millim en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 1er juillet 2024.

___________________________________________________________________________

Le 26 mars 2024, Madame … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires intérieures, direction générale de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministère », une demande en obtention d’une protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Le même jour, Madame … fut entendue par un agent du service criminalité organisée, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Toujours le même jour, une recherche effectuée dans la base de données EURODAC révéla que Madame … avait franchi illégalement la frontière espagnole en date du 19 décembre 2023.

Le 2 avril 2024, Madame … fut encore entendue par un agent du ministère en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 1établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par « le règlement Dublin III ».

Le même jour, les autorités luxembourgeoises contactèrent les autorités espagnoles en vue de la prise en charge de Madame … sur base de l’article 13, paragraphe (1) du règlement Dublin III, demande qui fut tacitement acceptée par lesdites autorités sur base du même fondement légal.

Par décision du 7 juin 2024, notifiée à l’intéressée par lettre recommandée expédiée le 13 juin 2024, le ministre informa Madame … que le Grand-Duché de Luxembourg avait pris la décision de la transférer dans les meilleurs délais vers l’Espagne sur base de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 et des articles 13, paragraphe (1) et 22, paragraphe (7) du règlement Dublin III, la décision étant libellée comme suit :

« […] Vous avez introduit une demande de protection internationale au Luxembourg en date du 26 mars 2024 au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire (ci-après « la loi modifiée du 18 décembre 2015 »). En vertu des dispositions de l'article 28(1) de la loi précitée et des dispositions des articles 13(1) et 22(7) du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 (ci-après « le règlement DIII »), le Grand-Duché de Luxembourg n'examinera pas votre demande de protection internationale et vous serez transférée vers l'Espagne qui est l'Etat membre responsable pour traiter cette demande.

Les faits concernant votre demande, la motivation à la base de la présente décision, les bases légales sur lesquelles elle s'appuie, de même que les informations quant aux voies de recours ouvertes sont précisés ci-après.

En mains le rapport de Police Judiciaire du 26 mars 2024 et le rapport d'entretien Dublin III sur votre demande de protection internationale du 2 avril 2024.

1. Quant aux faits à la base de votre demande de protection internationale En date du 26 mars 2024, vous avez introduit une demande de protection internationale auprès du service compétent de la Direction générale de l'immigration.

La comparaison de vos empreintes dactyloscopiques avec la base de données Eurodac a révélé que vous avez franchi irrégulièrement la frontière espagnole en date du 19 décembre 2023.

Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat responsable, un entretien Dublin III a été mené en date du 2 avril 2024.

Sur cette base, la Direction générale de l'immigration a adressé en date du 2 avril 2024 une demande de prise en charge aux autorités espagnoles sur base de l'article 13(1) du règlement DIII, demande qui fut tacitement acceptée par lesdites autorités espagnoles en date du 3 juin 2024, conformément à l'article 22(7) du règlement DIII.

2.

Quant aux bases légales 2 En tant qu'Etat membre de l'Union européenne, l'Etat luxembourgeois est tenu de mener un examen aux fins de déterminer l'Etat responsable conformément aux dispositions du règlement DIII établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride.

S'il ressort de cet examen qu'un autre Etat est responsable du traitement de la demande de protection internationale, la Direction générale de l'immigration rend une décision de transfert après que l'Etat requis a accepté la prise ou la reprise en charge du demandeur.

Aux termes de l'article 28(1) de la loi modifiée du 18 décembre 2015, le Luxembourg n'est pas responsable pour le traitement d'une demande de protection internationale si cette responsabilité revient à un autre Etat.

Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, du règlement DIII, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un Etat membre dans lequel il est entré en venant d'un Etat tiers, cet Etat membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale, conformément à l'article 13(1) du règlement DIII.

La responsabilité de l'Espagne est acquise suivant l'article 22(7) du règlement DIII en ce que l'absence de réponse à l'expiration d'un délai de deux mois équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de prendre en charge la personne concernée.

Un Etat n'est pas autorisé à transférer un demandeur vers l'Etat normalement responsable lorsqu'il existe des preuves ou indices avérés qu'un demandeur risquerait dans son cas particulier d'être soumis dans cet Etat à un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (ci-après la « CEDH ») ou 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (ci-après « la Charte UE »).

3.

Quant à la motivation de la présente décision de transfert En l'espèce, il ressort des résultats du 26 mars 2024 de la comparaison de vos données dactyloscopiques avec celles enregistrées dans la base de données Eurodac que vous avez franchi irrégulièrement la frontière espagnole en date du 19 décembre 2023.

Selon vos déclarations, vous auriez quitté le Sénégal en octobre 2023 dans une traversée illégale vers l'Espagne. Vous seriez restée en Espagne pendant quatre mois et demi sans introduire une demande de protection internationale. Par la suite, vous auriez traversé la France afin de vous rendre au Luxembourg. Vous déclarez être arrivée en bus en date du 11 mars 2024.

Lors de votre entretien Dublin III, en date du 2 avril 2024, vous déclarez être enceinte.

Madame, vous déclarez avoir quitté l'Espagne sans introduire une demande de protection internationale en raison des conditions inadéquates concernant votre suivi gynécologique.

3 Rappelons à cet égard que l'Espagne est liée à la Charte UE et est partie à la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ci-après « la Convention de Genève »), à la CEDH et à la Convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (« Conv. torture »).

Il y a également lieu de soulever que l'Espagne est liée par la Directive (UE) n° 2013/32 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale [refonte] (« directive Procédure ») et par la Directive (UE) n° 2013/33 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale [refonte] (« directive Accueil »).

Soulignons en outre que l'Espagne profite, comme tout autre Etat membre, de la confiance mutuelle qu'elle respecte ses obligations découlant du droit international et européen en la matière.

Par conséquent, l'Espagne est présumée respecter ses obligations tirées du droit international public, en particulier le principe de non-refoulement énoncé expressément à l'article 33 de la Convention de Genève, ainsi que l'interdiction des mauvais traitements ancrée à l'article 3 CEDH et à l'article 3 Conv. torture.

Par ailleurs, il n'existe en particulier aucune jurisprudence de la Cour EDH ou de la CJUE, de même qu'il n'existe aucune recommandation de l'UNHCR visant de façon générale à suspendre les transferts vers l'Espagne sur base du règlement (UE) n° 604/2013.

Madame, vous n'avez pas non plus démontré que, dans votre cas concret, vos conditions d'existence en Espagne revêtiraient un tel degré de pénibilité et de gravité qu'elles seraient constitutives d'un traitement contraire à l'article 3 CEDH ou encore à l'article 3 Conv. torture.

Relevons dans ce contexte que vous avez la possibilité, dès votre arrivée en Espagne, d'introduire une demande de protection internationale et si vous deviez estimer que les autorités espagnoles ne respectent pas vos droits élémentaires, il vous appartient de saisir les autorités compétentes espagnoles, notamment judiciaires.

Aussi, les informations à ma disposition ne sauraient donner lieu à l'application des articles 8, 9, 10 et 11 du règlement DIII.

Il n'existe en outre pas non plus de raisons pour une application de l'article 16(1) du règlement DIII pouvant amener le Luxembourg à assumer la responsabilité de l'examen au fond de votre demande de protection internationale.

Il convient encore de souligner qu'en vertu de l'article 17(1) du règlement DIII (clause de souveraineté), chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par le ressortissant d'un pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement, pour des raisons humanitaires ou exceptionnelles. Les autorités luxembourgeoises disposent d'un pouvoir discrétionnaire à cet égard, et l'application de la clause de souveraineté ne constitue pas une obligation.

4Il ne ressort pas de l'ensemble des éléments de votre dossier que les autorités luxembourgeoises auraient dû faire application de la clause de souveraineté prévue à l'article 17(1) du règlement DIII. En effet, vous ne faites valoir aucun élément humanitaire ou exceptionnel qui ne serait pas couvert par les dispositions du règlement DIII et qui devrait amener les autorités luxembourgeoises à se déclarer responsables pour le traitement de votre demande de protection internationale.

Pour l'exécution du transfert vers l'Espagne, seule votre capacité de voyager est déterminante et fera l'objet d'une détermination définitive dans un délai raisonnable avant le transfert.

Si votre état de santé devait temporairement constituer un obstacle à l'exécution de votre renvoi vers l'Espagne, l'exécution du transfert serait suspendue jusqu'à ce que vous seriez à nouveau apte à être transférée. Par ailleurs, si cela devait s'avérer nécessaire, la Direction générale de l'immigration prendra en compte votre état de santé lors de l'organisation du transfert vers l'Espagne en informant les autorités Espagnoles conformément aux articles 31 et 32 du règlement DIII à condition que vous exprimiez votre consentement explicite à cette fin.

D'autres raisons individuelles pouvant éventuellement entraver la remise aux autorités espagnoles n'ont pas été constatées. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 14 juin 2024, inscrite sous le numéro 50597 du rôle, Madame … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 7 juin 2024.

Etant donné que l’article 35, paragraphe (4) de la loi du 18 décembre 2015 prévoit un recours en réformation contre les décisions visées à l’article 28, paragraphe (1), de la même loi, le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation sous analyse lequel est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il n’y a dès lors pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

A l’appui de son recours et en fait, la demanderesse retrace les faits et rétroactes ayant mené à la décision déférée du 7 juin 2024, en insistant, d’une part, sur le fait qu’elle aurait été contrainte de quitter son pays d’origine après y avoir subi les actes de persécution dont elle aurait fait état dans le cadre de sa demande de protection internationale. Elle ajoute qu’il se dégagerait à suffisance des éléments médicaux versés en cause qu’elle aurait besoin d’être prise en charge en raison de son état de grossesse très avancé qui empêcherait en toute logique son transfert vers l’Espagne. Elle affirme, à cet égard, avoir été livrée à elle-même pendant son séjour dans ce pays et qu’elle aurait notamment été obligée « de travailler par des individus qui n’avaient aucune considération pour son intégrité physique et morale », de sorte qu’elle n’aurait pas eu d’autre choix que de quitter l’Espagne sans y avoir introduit une demande de protection internationale.

En droit, elle se prévaut d’une violation des articles 3 de la Convention de sauvegarde de droits de l’Homme et des libertés fondamentales (« la CEDH »), 4 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (« la Charte »), 3, paragraphe (2), alinéa 2, et 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III, ainsi que 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (« la Convention de Genève »).

5 Quant à la violation alléguée des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte, elle fait valoir que même si l’Espagne était liée par divers instruments juridiques internationaux ou communautaires garantissant le respect des droits de l’Homme, tels la CEDH, la Charte, la Convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ci-après désignée par « la Convention torture », de même que par la directive (UE) n°2013/32 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale, ci-après désignée par « la directive Procédure », et la directive (UE) n°2013/33 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale, ci-après désignée par « la directive Accueil », cela n’impliquerait pas ipso facto que ce pays les observe effectivement, notamment dans le contexte de l’accueil des demandeurs de protection internationale. Elle s’appuie, à cet égard, sur un article publié sur le site internet « Vatican News », intitulé « En Espagne, l’Église de Malaga condamne le refoulement des migrants à la frontière », reprenant la prise de position adoptée par la délégation diocésaine et l’association Caritas de Malaga en réaction au refoulement des migrants à la frontière espagnole vers l’Afrique dont se dégagerait à suffisance le non-respect par l’Etat espagnol des prescriptions découlant des différents instruments juridiques précités.

Il s’ensuivrait que l’Espagne ne pourrait raisonnablement et utilement profiter de la confiance mutuelle découlant du droit international et du droit européen.

Elle ajoute que même s’il n’existait pas de jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme (« CourEDH ») ou de la Cour de Justice de l’Union européenne (« CJUE »), ni de recommandation de l’UNHCR indiquant de suspendre les transferts vers l’Espagne, il ne pourrait pas être affirmé avec une certitude absolue que ledit pays respecte ses obligations internationales et européennes en matière d’accueil des demandeurs de protection internationale.

Ce serait ensuite à tort que le ministre aurait indiqué qu’elle n’avait pas démontré que ses conditions d’existence en Espagne avaient revêtu un degré de pénibilité et de gravité tel qu’elles seraient constitutives d’une violation des articles 3 de la CEDH et 3 de la Convention torture. Elle donne, à cet égard, à considérer que les autorités espagnoles l’auraient laissée livrée à elle-même et ce, en dépit du fait qu’elle aurait d’urgence eu besoin d’une prise en charge médicale en raison de son état de santé. Ce ne serait qu’à son arrivée au Luxembourg qu’elle aurait pu bénéficier en urgence d’une prise en charge médicale.

Elle ajoute se trouver toujours sous traitement médical, de sorte que son transfert serait matériellement impossible.

La demanderesse est dès lors d’avis qu’eu égard à ces considérations, et plus particulièrement au défaut d’assistance médicale adéquate et effective lui procurée, il serait constant que les autorités espagnoles n’auraient pas respecté les prescriptions de la directive Accueil, telles que se dégageant plus particulièrement de ses articles 17, 19 et 21.

Au vu de ces éléments, il devrait être admis que son transfert vers l’Espagne, en ce qu’il serait dépourvu de toute perspective d’une prise en charge médicale appropriée, constituerait une violation manifeste des dispositions des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte, lus en combinaison avec l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2, du règlement Dublin III.

Il s’ensuivrait que la décision ministérielle déférée serait à réformer pour résulter non 6seulement d’une appréciation erronée de la situation individuelle et réelle de la demanderesse, mais pour avoir, par ailleurs, été prise en méconnaissance des instruments juridiques, prévisés.

Quant à la violation alléguée de l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III, la demanderesse se prévaut de sa situation de vulnérabilité particulière, respectivement de son état de santé, ainsi que des raisons l’ayant amenée à fuir son pays d’origine, pour faire valoir que ces éléments, tels que portés à la connaissance de l’autorité ministérielle, auraient dû amener celle-ci à examiner sa demande de protection internationale en lieu et place des autorités espagnoles.

Enfin, la demanderesse estime que les autorités luxembourgeoises ne disposeraient pas de suffisamment de garanties de la part des autorités espagnoles au sujet de la prise, par celles-

ci, d’une décision de refoulement vers le Sénégal. Elle renvoie, à cet égard, à un arrêt de la CourEDH du 23 février 2012 rendu dans l’affaire Hirsi Jamaa et al. c. Italie.

Elle soutient, dans ce contexte, que les autorités espagnoles procéderaient au refoulement de demandeurs de protection internationale, tout en se référant, à l’appui de cette affirmation, à nouveau à l’article publié sur le site internet « Vatican News », prévisé.

Il s’ensuivrait que la décision ministérielle litigieuse encourrait encore la réformation pour non-respect du principe de non-refoulement prévu à l’article 33 de la Convention de Genève.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours pour ne pas être fondé.

Aux termes de l’article 28, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 : « Si, en application du règlement (UE) n°604/2013, le ministre estime qu’un autre Etat membre est responsable de la demande, il sursoit à statuer sur la demande jusqu’à la décision du pays responsable sur la requête de prise ou de reprise en charge. Lorsque l’Etat membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge du demandeur, le ministre notifie à la personne concernée la décision de la transférer vers l’Etat membre responsable et de ne pas examiner sa demande de protection internationale. ».

Il s’ensuit que si le ministre estime qu’en application du règlement Dublin III, un autre pays est responsable de l’examen de la demande de protection internationale et si ce pays accepte formellement ou tacitement la prise ou la reprise en charge de l’intéressé, le ministre décide de transférer la personne concernée vers l’Etat membre responsable sans examiner la demande de protection internationale introduite au Luxembourg.

L’article 13, paragraphe (1) du règlement Dublin III, sur lequel le ministre s’est basé pour conclure à la responsabilité des autorités espagnoles pour prendre en charge Madame …, prévoit que « Lorsqu’il est établi, sur la base de preuves ou d’indices tels qu’ils figurent dans les deux listes mentionnées à l’article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n°603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d’un Etat membre dans lequel il est entré en venant d’un Etat tiers, cet Etat membre est responsable de l’examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. ».

7 Il suit de cette disposition que l’Etat responsable du traitement de la demande de protection internationale est celui dont le demandeur a franchi irrégulièrement la frontière en provenance d’un pays tiers, cette responsabilité prenant fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière.

Enfin, l’article 22, paragraphe (7) du règlement Dublin III prévoit que « L’absence de réponse à l’expiration du délai de deux mois [à compter de la date de réception de la requête de prise en charge] et du délai d’un mois [lorsque l’Etat membre requérant a invoqué l’urgence] équivaut à l’acceptation de la requête et entraîne l’obligation de prendre en charge la personne concernée, y compris l’obligation d’assurer une bonne organisation de son arrivée. ».

Le tribunal constate qu’en l’espèce, à la lecture de la décision ministérielle déférée, celle-ci est motivée, d’une part, par le fait que la demanderesse a irrégulièrement franchi la frontière espagnole le 19 décembre 2023 et, d’autre part, par le fait que les autorités espagnoles ont tacitement accepté de la prendre en charge conformément à l’article 22, paragraphe (7) du règlement Dublin III.

Le tribunal constate ensuite que le bien-fondé de la motivation invoquée à la base de cette décision ressort des recherches effectuées dans la base de données EURODAC, de même que du récit de la demanderesse.

C’est dès lors a priori à bon droit que le ministre a décidé de la transférer vers l’Espagne et de ne pas examiner sa demande de protection internationale, étant relevé que l’intéressée ne conteste pas la compétence de principe de l’Espagne, respectivement l’incompétence de principe de l’Etat luxembourgeois pour connaître de sa demande de protection internationale.

Il y a ensuite lieu de relever que les possibilités légales pour le ministre de ne pas procéder au transfert d’un demandeur de protection internationale, malgré la compétence de principe d’un autre Etat membre, et d’examiner, le cas échéant, sa demande sont prévues, d’une part, par l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2, du règlement Dublin III, lequel présuppose l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la Charte, auquel cas le ministre ne peut pas transférer l’intéressé dans cet Etat tout en poursuivant la procédure de détermination de l’Etat membre responsable, ainsi que, d’autre part, par l’article 17, paragraphe (1) du même règlement, accordant au ministre la simple faculté d’examiner la demande de protection internationale nonobstant la compétence de principe d’un autre Etat membre pour ce faire.

En l’espèce, la demanderesse soutient que la décision déférée serait contraire aux articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte, lus en combinaison avec l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2, du règlement Dublin III, ainsi qu’aux articles 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III et 33 de la Convention de Genève.

L’article 3, paragraphe (2), alinéa 2, du règlement Dublin III dispose que « Lorsqu’il est impossible de transférer un demandeur vers l’Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu’il y a de sérieuses raisons de croire qu’il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et des conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 84 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’Etat membre procédant à la détermination de l’Etat membre responsable poursuit l’examen des critères énoncés au chapitre III afin d’établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ».

Le tribunal est amené à constater que, dans le cadre de son argumentation ayant trait au prédit article 3, paragraphe (2), alinéa 2, du règlement Dublin III, la demanderesse invoque surtout le risque de subir en Espagne des mauvais traitements au sens des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte faute de pouvoir y disposer d’une perspective de prise en charge médicale appropriée.

S’agissant d’abord de l’existence de défaillances systémiques au sein de la procédure d’asile, respectivement du système d’accueil espagnol et d’une possible violation de l’article 4 de la Charte - similaire à l’article 3 de la CEDH -, le tribunal est amené à rappeler que l’Espagne est tenue au respect, en tant que membre de l’Union européenne et signataire de ces conventions, des droits et libertés prévus par la CEDH, le Pacte international des droits civils et politiques ou la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que du principe de non-refoulement prévu par la Convention de Genève et dispose a priori d’un système de recours efficace contre les violations de ces droits et libertés. Il y a encore lieu de souligner, dans ce contexte, que le système européen commun d’asile a été conçu dans un contexte permettant de supposer que l’ensemble des Etats y participant qu’ils soient Etats membres ou Etats tiers, respectent les droits fondamentaux, en ce compris les droits trouvant leur fondement dans la Convention de Genève, ainsi que dans la CEDH, et que les Etats membres peuvent s’accorder une confiance mutuelle à cet égard1. C’est précisément en raison de ce principe de confiance mutuelle que le législateur de l’Union a adopté le règlement Dublin III en vue de rationaliser le traitement des demandes d’asile et d’éviter l’engorgement du système par l’obligation, pour les autorités des Etats membres, de traiter des demandes multiples introduites par un même demandeur, d’accroître la sécurité juridique en ce qui concerne la détermination de l’Etat responsable du traitement de la demande d’asile et ainsi d’éviter le « forum shopping », l’ensemble ayant pour objectif principal d’accélérer le traitement des demandes tant dans l’intérêt des demandeurs d’asile que des Etats participants.

Il doit dès lors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs de protection internationale dans cet Etat membre est conforme aux exigences de la Convention de Genève ainsi qu’à la CEDH. Cette présomption peut toutefois être renversée lorsqu’il y a lieu de craindre qu’il existe des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs d’asile dans l’Etat membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant. Dans cette hypothèse, il y a lieu d’apprécier dans chaque cas, au vu des pièces communiquées, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités répondent à l’ensemble des garanties exigées par le respect du droit d’asile.

Le tribunal est encore amené à souligner que le système Dublin III est basé sur l’hypothèse que tous les Etats membres de l’Union européenne sont des Etats de droit dans lesquels les demandeurs de protection internationale peuvent faire valoir leurs droits et requérir l’aide des organes étatiques, notamment judiciaires, au cas où ils estiment que leurs droits ont été lésés. S’il est exact qu’il est admis qu’une acceptation de prise en charge par un Etat membre peut être remise en cause par un demandeur de protection internationale lorsqu’il existe des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs 1 CJUE, 21 décembre 2011, N.S. c. Secretary of State for the Home Department, C-411/10, pt. 78.

9de protection internationale dans cet Etat membre, il n’en reste pas moins que suivant la jurisprudence des juridictions administratives2, reposant elle-même sur un arrêt de la CJUE3, des défaillances systémiques au sens de l’article 3, précité, requièrent, pour être de nature à s’opposer à un transfert, d’être qualifiées de traitements inhumains et dégradants au sens de l’article 4 de la Charte. Telle est encore la conclusion à laquelle arrive la CJUE dans son arrêt du 16 février 20174.

Quant à la preuve à rapporter par le demandeur de protection internationale, il se dégage d’un arrêt de la CJUE du 19 mars 20195 que pour relever de l’article 4 de la Charte, auquel l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2, précité, du règlement Dublin III renvoie, des défaillances existant dans l’Etat membre responsable, au sens dudit règlement, doivent atteindre un seuil particulièrement élevé de gravité, qui dépend de l’ensemble des données de la cause. Aux termes de ce même arrêt, ce seuil particulièrement élevé de gravité serait atteint lorsque l’indifférence des autorités d’un Etat membre aurait pour conséquence qu’une personne entièrement dépendante de l’aide publique se trouverait, indépendamment de sa volonté et de ses choix personnels, dans une situation de dénuement matériel extrême, qui ne lui permettrait pas de faire face à ses besoins les plus élémentaires, tels que notamment ceux de se nourrir, de se laver et de se loger, et qui porterait atteinte à sa santé physique ou mentale ou la mettrait dans un état de dégradation incompatible avec la dignité humaine6. Ledit seuil ne saurait donc couvrir des situations caractérisées même par une grande précarité ou une forte dégradation des conditions de vie de la personne concernée, lorsque celles-ci n’impliquent pas un dénuement matériel extrême plaçant cette personne dans une situation d’une gravité telle qu’elle peut être assimilée à un traitement inhumain ou dégradant7.

En l’espèce, la demanderesse remettant en question la présomption du respect par l’Espagne des droits fondamentaux, puisqu’elle fait état de défaillances systémiques dans ce pays, il lui incombe de fournir des éléments concrets permettant de la renverser en présentant des éléments permettant de retenir que la situation en Espagne telle que décrite par elle atteint le degré de gravité requis par la jurisprudence précitée de la CJUE et des principes dégagés ci-

avant.

Or, force est de relever que pareilles défaillances systémiques atteignant un tel seuil particulièrement élevé de gravité ne résultent pas des éléments soumis à l’appréciation du tribunal.

Le tribunal constate, en effet, que la demanderesse se limite à affirmer de manière péremptoire qu’il existerait des défaillances systémiques dans les conditions d’accueil en Espagne, voire que le principe de confiance mutuelle ne pourrait pas jouer, sans préciser en quoi consisteraient concrètement ces défaillances, respectivement pour quelle raison le principe de confiance mutuelle ne pourrait pas jouer dans le chef de l’Espagne.

Elle n’apporte plus particulièrement aucun élément de nature à établir qu’elle risquerait des mauvais traitements en cas de transfert en Espagne, de même qu’elle n’apporte pas non 2 Trib. adm., 26 avril 2016, n° 37591, disponible sur: www.jurad.etat.lu.

3 CJUE, 10 décembre 2013, C-394/12, Shamso Abdullahi c. Bundesasylamt, point 62 4 CJUE, 16 février 2017, C.K., H.F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16.

5 CJUE, grande chambre, 19 mars 2019, affaire C-163/17, Abubacarr Jawo c. Bundesrepublik Deutschland, pt.

91.

6 Ibid., pt. 92 7 Ibid., pt. 93.

10plus la preuve que, personnellement, ses droits ne seraient pas garantis en Espagne, étant relevé que lors de son entretien Dublin III, la demanderesse n’a pas affirmé que ses droits n’auraient pas été respectés en Espagne lors de son arrivée sur le territoire espagnol.

Ainsi, il convient tout d’abord de constater que la demanderesse n’a elle-même fait état auprès des services du ministère, hormis de son état de grossesse, d’aucun problème de santé en particulier qu’elle aurait eu en Espagne et par rapport auquel elle aurait infructueusement sollicité l’assistance des autorités espagnoles. La demanderesse a, au contraire, déclaré auprès de la direction générale de l’Immigration lors de son entretien Dublin III, donc quelques jours seulement après le dépôt de sa demande de protection internationale au Luxembourg, qu’elle ne suivait pas de traitement médical et qu’elle était « juste suivie par un médecin par rapport à [sa] grossesse »8, étant encore relevé qu’elle reste en défaut d’expliquer concrètement en quoi aurait consisté son besoin urgent de prise en charge médicale qui n’aurait pas été assuré par les autorités espagnoles. La seule affirmation non autrement étayée suivant laquelle elle n’aurait pas été « bien suivie au niveau de [s]es rendez-vous gynécologiques »9 est, en tout état de cause, insuffisante à cet égard puisqu’elle vient au contraire confirmer que la demanderesse a bien eu accès à des contrôles gynécologiques en Espagne.

L’affirmation contenue dans le recours sous analyse suivant laquelle la demanderesse aurait été confrontée en Espagne à des conditions d’existence pénibles et graves en raison de l’absence de prise en charge médicale en dépit du fait qu’elle aurait eu besoin d’urgence d’une telle prise en charge reste dès lors à l’état de pure allégation.

Il se dégage ensuite des propres déclarations faites par la demanderesse dans le cadre de son entretien Dublin III qu’elle a été logée dans un foyer en Espagne alors même qu’elle n’avait pas la qualité de demandeur de protection internationale et que c’est elle-même qui a décidé d’aller « chez des Sénégalaises » parce qu’elle voulait travailler, ce qui ne se serait toutefois pas bien passé10. Les mauvais traitements, voire les conditions d’existence difficiles auxquels elle déclare avoir été confrontée en Espagne ne sont dès lors pas le fait des autorités espagnoles, la demanderesse restant plus particulièrement en défaut d’expliquer de manière plausible pour quelle raison elle ne s’est pas adressée auxdites autorités pour dénoncer les agissements dont elle a été victime de personnes privées. De ce point de vue non plus aucun reproche ne saurait être adressé aux autorités espagnoles.

Ensuite et de manière générale, le tribunal ne s’est pas non plus vu soumettre un quelconque élément de preuve, tel que notamment des rapports internationaux, relatif aux difficultés que rencontreraient de manière générale les autorités espagnoles dans le traitement des demandes de protection internationale et dans les conditions d’accueil des demandeurs d’asile, de même qu’il ne se dégage pas davantage des éléments de la cause que concrètement les autorités espagnoles compétentes risquent de violer le droit de la demanderesse à l’examen, selon une procédure juste et équitable, de sa demande de protection internationale ou qu’elles risquent de refuser de lui garantir une protection conforme au droit international et au droit européen, la demanderesse n’ayant, en effet, avancé aucun élément concret permettant de conclure que sa procédure d’asile ne serait pas conduite conformément aux normes imposées par la directive Accueil. Il y a plus particulièrement lieu de relever qu’outre le fait que la demanderesse n’a pas eu la qualité de demandeur de protection internationale lors de son séjour en Espagne, de sorte qu’elle ne saurait, en tout état de cause, se prévaloir de défaillances 8 Page 2 du rapport d’entretien Dublin III.

9 Page 5 du rapport d’entretien Dublin III.

10 Page 4 du rapport d’entretien Dublin III.

11systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale en Espagne au sens de l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2, du règlement Dublin III qu’elle aurait personnellement pu y rencontrer, elle n’a, qui plus est, ni dans le cadre de son entretien Dublin III, ni dans le recours sous examen, fait état de problèmes particuliers qu’elle aurait personnellement rencontrés en Espagne avec les autorités dudit pays, notamment pour y déposer une demande de protection internationale.

Elle s’est, en effet, contentée de dénoncer de manière péremptoire dans le cadre de son recours « l’attitude des autorités espagnoles à l’égard des demandeurs de protection internationale telle que constatée et critiquée par la délégation diocésaine et de Caritas de Malaga », sans donner les moindres détails de nature à étayer cette affirmation, ni plus particulièrement expliquer dans quelle mesure, alors même qu’elle aurait tenté de déposer une demande de protection internationale, un tel dépôt lui aurait été refusé par les autorités espagnoles. Il se dégage, au contraire, de ses déclarations faites dans le cadre de son entretien Dublin III, qu’elle n’a jamais cherché à déposer une demande de protection internationale en Espagne au motif que « [l]a distance entre le Sénégal et l’Espagne n’était pas si loin que cela » et qu’elle « avai[t] beaucoup entendu parler du Luxembourg », ce qui aurait été « aussi une des raisons qui [l]’ont poussé à venir ici »11.

Le tribunal relève ensuite que l’article auquel se réfère la demanderesse à l’appui de son recours afin de sous-tendre son affirmation suivant laquelle l’Espagne serait confrontée dans ses conditions d’accueil à des défaillances systémiques au sens de l’article 3, paragraphe (3), alinéa 2, du règlement Dublin III a trait à la situation très spécifique des migrants qui sont arrivés en mars 2022 de manière massive en provenance du Maroc dans l’enclave espagnole de Melilla. Or, cette situation est néanmoins totalement étrangère à celle de la demanderesse et doit partant être considérée comme étant dépourvue de pertinence dans le cadre de l’analyse du bien-fondé des critiques générales dirigées par celle-ci à l’encontre plus particulièrement des conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale en Espagne, dans la mesure où il se dégage des déclarations de celle-ci auprès de la police judiciaire, ainsi qu’auprès de la direction générale de l’Immigration lors de son entretien Dublin III qu’elle est entrée sur le territoire espagnol par le biais des Iles Canaries, où elle est restée pendant une semaine, avant d’être transférée à Cadiz, où elle est restée pendant environ trois mois, avant de se rendre au Luxembourg tout en ayant choisi de ne pas déposer de demande de protection internationale en Espagne.

Le tribunal relève également que la demanderesse n’établit pas non plus que, de manière générale, les droits des demandeurs de protection internationale en Espagne ne seraient systématiquement pas respectés, ou encore qu’ils n’y auraient aucun droit ou aucune possibilité de les faire valoir en usant des voies de droit adéquates, étant encore relevé que l’Espagne est signataire de la Charte, de la CEDH et de la Convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, de la Convention de Genève -

comprenant le principe de non-refoulement y inscrit à l’article 33 - ainsi que du Protocole additionnel du 31 janvier 1967 relatif aux réfugiés et, à ce titre, devrait en appliquer les dispositions.

La demanderesse ne fournit pas non plus de précisions quant à la situation des personnes transférées vers l’Espagne dans le cadre du règlement Dublin III, ni n’invoque-t-elle une jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme (« CourEDH ») relative à une 11 Page 5 du rapport d’entretien Dublin III.

12suspension générale des transferts vers l’Espagne, voire une demande en ce sens de la part de l’UNHCR. La demanderesse ne fait pas non plus état de l’existence d’un rapport ou avis de l’UNHCR interdisant les transferts vers l’Espagne dans le cadre du règlement Dublin III, en raison plus particulièrement de la politique d’asile espagnole.

Au regard de l’ensemble de ces considérations, il ne saurait être reproché aux autorités espagnoles des défaillances systémiques dans le cadre de la procédure d’asile et des conditions d’accueil des demandeurs de protection internationale empêchant un transfert de la demanderesse vers ce pays, de sorte que le moyen de celle-ci fondé sur une violation de l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2, du règlement Dublin III, lu en combinaison avec les articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte, encourt le rejet pour ne pas être fondé.

Néanmoins, il convient encore de relever dans ce cadre que si les Etats membres sont dans l’obligation d’appliquer les règlements européens, il ressort de la jurisprudence de la CourEDH que, dans certains cas, il ne peut être exclu que l’application des règles prescrites par le règlement Dublin III puisse entraîner un risque de violation de l’article 3 de la CEDH, corollaire de l’article 4 de la Charte, la présomption selon laquelle les Etats participants respectent les droits fondamentaux prévus par la CEDH n’étant en effet pas irréfragable12.

Dans ce contexte, la CJUE a suivi le raisonnement de la CourEDH en décidant que, même en l’absence de raisons sérieuses de croire à l’existence de défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs dans l’Etat membre responsable de l’examen de la demande d’asile, le transfert d’un demandeur d’asile dans le cadre du règlement Dublin III ne peut être opéré que dans des conditions excluant que ce transfert entraîne un risque réel et avéré que l’intéressé subisse des traitements inhumains ou dégradants, au sens de l’article 4 de la Charte13, et qu’il est indifférent, aux fins de l’application dudit article 4 de la Charte, que ce soit au moment même du transfert, lors de la procédure d’asile ou à l’issue de celle-ci que la personne concernée encourrait, en raison de son transfert vers l’Etat membre responsable, au sens du règlement Dublin III, un risque sérieux de subir un traitement inhumain et dégradant14.

Il ne se dégage cependant pas de l’arrêt de la CJUE du 16 février 2017, précité, que l’Etat membre procédant à la détermination de l’Etat responsable pour l’examen de la demande de protection internationale d’un demandeur de protection internationale doit, en tout état de cause et préalablement à la prise d’une décision de transfert et par avis médical, s’assurer automatiquement que le transfert n’entraîne pas une détérioration significative et irrémédiable de l’état de santé de l’intéressé pour toute personne déclarant avoir un quelconque problème de santé.

En effet, dans l’arrêt en question, la CJUE a d’abord mis en évidence le fait, en ce qui concerne les conditions d’accueil et les soins disponibles dans l’Etat membre responsable, que les Etats membres liés par la directive Accueil sont tenus, y compris dans le cadre de la procédure au titre du règlement Dublin III, conformément aux articles 17 à 19 de cette directive, de fournir aux demandeurs d’asile les soins médicaux et l’assistance médicale nécessaires comportant, au minimum, les soins urgents et le traitement essentiel des maladies et des troubles mentaux graves: « Dans ces conditions, et conformément à la confiance mutuelle que 12 CourEDH, grande chambre, 4 novembre 2014, Tarakhel c. Suisse, n°29217/12; CourEDH, grande chambre, 21 janvier 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce, n°30696/09.

13 CJUE, 16 février 2017, C.K., H.F., A.S. c. Republika Slovenija, C-578/16, pts. 65 et 96 14 CJUE, 19 mars 2019, Jawo c/ Bundesrepublik Deutschland, C-163/17.

13s’accordent les États membres, il existe une forte présomption que les traitements médicaux offerts aux demandeurs d’asile dans les États membres seront adéquats ». Elle a retenu ensuite que « […] dans des circonstances dans lesquelles le transfert d’un demandeur d’asile, présentant une affection mentale ou physique particulièrement grave, entraînerait le risque réel et avéré d’une détérioration significative et irrémédiable de son état de santé, ce transfert constituerait un traitement inhumain et dégradant, au sens [de l’article 4 de la Charte]. En conséquence, dès lors qu’un demandeur d’asile produit, en particulier dans le cadre du recours effectif que lui garantit l’article 27 du règlement Dublin III, des éléments objectifs, tels que des attestations médicales établies au sujet de sa personne, de nature à démontrer la gravité particulière de son état de santé et les conséquences significatives et irrémédiables que pourrait entraîner un transfert sur celui-ci, les autorités de l’État membre concerné, y compris ses juridictions, ne sauraient ignorer ces éléments. Elles sont, au contraire, tenues d’apprécier le risque que de telles conséquences se réalisent lorsqu’elles décident du transfert de l’intéressé ou, s’agissant d’une juridiction, de la légalité d’une décision de transfert, dès lors que l’exécution de cette décision pourrait conduire à un traitement inhumain ou dégradant de celui-ci. […]15 ».

Dans une telle situation, il appartiendra aux autorités concernées « […] d’éliminer tout doute sérieux concernant l’impact du transfert sur l’état de santé de l’intéressé, en prenant les précautions nécessaires pour que son transfert ait lieu dans des conditions permettant de sauvegarder de manière appropriée et suffisante l’état de santé de cette personne. Dans l’hypothèse où, compte tenu de la particulière gravité de l’affection du demandeur d’asile concerné, la prise desdites précautions ne suffirait pas à assurer que son transfert n’entraînera pas de risque réel d’une aggravation significative et irrémédiable de son état de santé, il incombe aux autorités de l’État membre concerné de suspendre l’exécution du transfert de l’intéressé, et ce aussi longtemps que son état ne le rend pas apte à un tel transfert […]16 ».

Cette jurisprudence vise dès lors l’hypothèse particulière suivant laquelle un demandeur de protection internationale produit des éléments objectifs, tels que des attestations médicales établies au sujet de sa personne, de nature à démontrer la gravité particulière de son état de santé et les conséquences significatives et irrémédiables que pourrait entraîner un transfert sur celui-ci, hypothèse dans laquelle les autorités de l’Etat membre procédant au transfert doivent prendre les précautions spécifiques afin de sauvegarder de manière appropriée et suffisante l’état de santé de la personne concernée, telles que, par exemple, l’obtention, de la part de l’Etat membre responsable, de la confirmation que les soins indispensables seront disponibles à l’arrivée17.

En ce qui concerne l’état de grossesse de la demanderesse, le tribunal relève tout d’abord qu’il ne se dégage d’aucun élément du dossier qu’au moment où il est amené à statuer, il s’agit d’une grossesse à risque, de même qu’il ne se dégage pas des pièces versées en cause que la demanderesse connaît actuellement des problèmes de santé particuliers liés à sa grossesse. La demanderesse ne verse pas non plus une quelconque attestation médicale suivant laquelle des déplacements seraient interdits voire simplement déconseillés. A cet égard, il y a encore lieu de préciser qu’outre le fait que le délégué du gouvernement a précisé à l’audience des plaidoiries que les services du ministre ont bien connaissance de l’état de grossesse de la demanderesse et qu’il en serait tenu compte dans le cadre de l’organisation du transfert, il se dégage, par ailleurs, de la décision déférée que « Pour l'exécution du transfert vers l'Espagne, 15 CJUE, 16 février 2017, C.K., H.F., A.S. c. Republika Slovenija, n° C-578/16, points 74 et 75.

16 Ibidem, points 76 à 85 et point 96.

17 Trib. adm., 8 janvier 2020, n° 43800 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu, ayant repris ces principes.

14seule votre capacité de voyager est déterminante et fera l'objet d'une détermination définitive dans un délai raisonnable avant le transfert.

Si votre état de santé devait temporairement constituer un obstacle à l'exécution de votre renvoi vers l'Espagne, l'exécution du transfert serait suspendue jusqu'à ce que vous seriez à nouveau apte à être transférée. Par ailleurs, si cela s'avère être nécessaire, la Direction générale de l'immigration prendra en compte votre état de santé lors de l'organisation du transfert vers l'Espagne en informant les autorités espagnoles conformément aux articles 31 et 32 du règlement DIII à condition que vous exprimiez votre consentement explicite à cette fin. », de sorte qu’avant l’exécution de la décision de transfert le ministre évaluera l’état de santé de la demanderesse et en informera les autorités espagnoles. Ensuite, la demanderesse reste en défaut de verser une quelconque pièce, voire un quelconque indice concret, susceptible de laisser conclure qu’elle ne pourrait pas bénéficier en Espagne des soins médicaux, notamment liés à sa grossesse, dont elle pourrait avoir besoin, respectivement que ce même pays ne respecterait pas ses obligations découlant du droit international et européen en la matière.

A toutes fins utiles, il convient encore de souligner que le règlement Dublin III ne s’oppose pas au transfert des personnes vulnérables, à savoir les personnes handicapées, les personnes âgées, les femmes enceintes, les mineurs et les personnes ayant été victimes d’actes de torture, de viol ou d’autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, mais prévoit dans son article 32, paragraphe (1), premier alinéa, une obligation à charge de l’Etat membre procédant au transfert de transmettre à l’Etat membre responsable des informations relatives aux besoins particuliers de la personne à transférer aux seules fins de l’administration de soins ou de traitements médicaux, et avec le consentement explicite de la personne concernée, de sorte qu’en cas de besoin, il pourra être tenu compte de l’état de santé de la demanderesse lors de l’organisation du transfert vers l’Espagne par le biais de la communication aux autorités espagnoles des informations adéquates, pertinentes et raisonnables les concernant conformément aux articles 31 et 32 du règlement Dublin III, à condition que l’intéressée exprime son consentement explicite à cet égard.

Enfin, si la demanderesse devait estimer que le système d’aide espagnol était à tel point avilissant qu’il impliquerait per se un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 3 de la CEDH, respectivement 4 de la Charte, il lui appartiendra de faire valoir ses droits directement auprès des autorités espagnoles en usant des voies de droit adéquates, respectivement devant les instances européennes adéquates.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il n’est pas démontré qu’il existe un risque réel et avéré que le transfert de la demanderesse s’opère en violation des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte.

Pour ce qui est enfin de la crainte mise en avant par la demanderesse de se voir renvoyer arbitrairement par les autorités espagnoles vers son pays d’origine, force est au tribunal de relever qu’elle reste en défaut d’étayer concrètement l’existence d’un tel risque dans son chef, la demanderesse ne fournissant pas d’éléments susceptibles de démontrer que l’Espagne ne respecterait pas le principe du non-refoulement et faillirait dès lors à ses obligations internationales en la renvoyant, après l’examen de sa demande de protection internationale, dans un pays où sa vie, son intégrité physique ou sa liberté seraient mises sérieusement en danger ou encore qu’elle risquerait d’être forcée de se rendre dans un tel pays. Le renvoi à l’article publié sur le site internet « Vatican News », prévisé, n’est, en effet, pas pertinent dans ce contexte puisque, tel que relevé ci-avant, cet article a trait à la situation spécifique de 15migrants ayant tenté en mars 2022 de rejoindre par milliers l’enclave espagnole de Melilla depuis le territoire africain, situation qui est étrangère à celle de la demanderesse qui sera transférée en Espagne dans le cadre du règlement Dublin III. Par ailleurs, il ne se dégage pas des éléments fournis par la demanderesse que si les autorités espagnoles devaient néanmoins décider de la rapatrier dans son pays d’origine en violation des articles 3 de la CEDH, 4 de la Charte et 33 de la Convention de Genève, alors même qu’elle y serait exposée à un risque concret et grave pour sa vie, il ne lui serait pas possible de faire valoir ses droits directement auprès des autorités espagnoles en usant des voies de droit adéquates.

Il ne ressort dès lors pas des éléments versés par la demanderesse que son transfert vers l’Espagne l’exposerait à un retour forcé au Sénégal, qui serait contraire au principe de non-

refoulement ancré dans l’article 33 de la Convention de Genève ou découlant des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte.

Dans ces circonstances et au vu de toutes les considérations qui précèdent, les moyens fondés sur une violation de l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2, du règlement Dublin III, des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte, ainsi que de l’article 33 de la Convention de Genève, sont à rejeter pour ne pas être fondés.

En ce qui concerne finalement le moyen de la demanderesse selon lequel il aurait appartenu au ministre de faire usage de la clause discrétionnaire inscrite à l’article 17, paragraphe (1), du règlement Dublin III, aux termes duquel : « Par dérogation à l’article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d’examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement.[…]», le tribunal précise que la possibilité, pour le ministre, d’appliquer cette disposition du règlement Dublin III relève de son pouvoir discrétionnaire, s’agissant d’une disposition facultative qui accorde un pouvoir d’appréciation étendu aux Etats membres, le caractère facultatif du recours à la disposition en question ayant encore été souligné dans l’arrêt, précité, de la CJUE du 16 février 201718. Un pouvoir discrétionnaire des autorités administratives ne s’entend toutefois pas comme un pouvoir absolu, inconditionné ou à tout égard arbitraire, mais comme la faculté qu’elles ont de choisir, dans le cadre des lois, la solution qui leur paraît préférable pour la satisfaction des intérêts publics dont elles ont la charge19, le juge administratif étant appelé, en matière de recours en réformation, non pas à examiner si l’administration est restée à l’intérieur de sa marge d’appréciation, une telle démarche s’imposant en matière de recours en annulation, mais à vérifier si son appréciation se couvre avec celle de l’administration et, dans la négative, à substituer sa propre décision à celle de l’administration20.

Dans la mesure où le tribunal vient de retenir ci-avant dans le cadre de l’examen du bien-fondé de la décision entreprise par rapport à l’article 3, paragraphe (2), alinéa 2, du règlement Dublin III, aux articles 4 de la Charte et 3 de la CEDH, ainsi que par rapport à l’article 33 de la Convention de Genève, que les prétentions de la demanderesse ne sont pas fondées, et que c’est sur base de cette même argumentation qu’elle estime que le ministre aurait dû appliquer la clause de souveraineté discrétionnaire, il y a lieu de conclure que les problèmes mis en avant ne sauraient pas davantage s’analyser en des raisons humanitaires ou 18 CJUE, 16 février 2017, C.K., H.F., A.S. c. Republika Slovenija, n°C-578/16, pts 88 et 97.

19 Trib. adm., 10 octobre 2007, n°22641 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en annulation, n° 60 (3e volet) et les autres références y citées.

20 Cour adm., 23 novembre 2010, n°26851C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en réformation, n°12 (2e volet) et les autres références y citées 16exceptionnelles justifiant le recours à la clause discrétionnaire prévue à l’article 17, paragraphe (1) du règlement Dublin III, de sorte que le moyen afférent est à rejeter pour ne pas être fondé.

En l’absence d’autres moyens, le tribunal est amené à conclure que le recours en réformation est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours principal en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

condamne la demanderesse aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Annemarie Theis, premier juge, Caroline Weyland, juge, et lu à l’audience publique du 8 juillet 2024 par le vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 8 juillet 2024 Le greffier du tribunal administratif 17


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 50597
Date de la décision : 08/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2024-07-08;50597 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award