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15/07/2024 | LUXEMBOURG | N°49822a

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 juillet 2024, 49822a


Tribunal administratif N° 49822a du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:49822a 2e chambre Inscrit le 20 décembre 2023 Audience publique du 15 juillet 2024 Recours formé par Monsieur …, …, contre des décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 27, L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 49822a du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 20 décembre 2023 par Maî

tre Radu Alain Duta, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembo...

Tribunal administratif N° 49822a du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:49822a 2e chambre Inscrit le 20 décembre 2023 Audience publique du 15 juillet 2024 Recours formé par Monsieur …, …, contre des décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 27, L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 49822a du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 20 décembre 2023 par Maître Radu Alain Duta, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né … à … (Pakistan), de nationalité pakistanaise, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 11 décembre 2023 de recourir à la procédure accélérée, de celle du même jour portant refus de faire droit à sa demande en obtention d’une protection internationale et de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 28 décembre 2023 ;

Vu le jugement du 15 janvier 2024, inscrit sous le numéro 49822 du rôle, rendu par le juge siégeant en remplacement du vice-président présidant la deuxième chambre du tribunal administratif ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Radu Alain Duta et Madame le délégué du gouvernement Tara Desorbay en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 4 mars 2024.

Le 13 septembre 2023, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, désigné ci-après par « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Le même jour, Monsieur … fut entendu par un agent de la police grand-ducale, service de police judiciaire, section criminalité organisée, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Le 25 octobre 2023, Monsieur … fut entendu par un agent du ministère sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.

Par décision du 11 décembre 2023, notifiée à l’intéressé par courrier recommandé expédié le même jour, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », informa Monsieur … qu’il avait statué sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée en se basant sur les dispositions de l’article 27 (1) a) de la loi du 18 décembre 2015 et que sa demande avait été refusée comme non fondée, tout en lui ordonnant de quitter le territoire.

Le ministre résuma les déclarations de Monsieur … comme suit : « […] En mains votre fiche des motifs manuscrite ainsi que le rapport du Service de Police Judiciaire du 13 septembre 2023, le rapport d’entretien du 25 octobre 2023 sur les motifs sous-tendant votre demande de protection internationale ainsi que le document versé à l’appui de votre demande.

Monsieur, il ressort de votre dossier administratif que vous vous nommez …, que vous êtes né le … à … au Pakistan, que vous êtes de nationalité pakistanaise, d’ethnie Punjabi et de confession musulmane sunnite. Vous expliquez être originaire de …, où vous auriez vécu avec votre famille depuis votre naissance (p.2/12 du rapport d’entretien).

Lors de l’ouverture de votre demande de protection internationale, vous expliquez avoir fui votre pays d’origine, le Pakistan en raison de la mauvaise situation. Vous aimeriez également avoir un meilleur avenir et trouver un travail.

Le même jour vous confirmez lesdites raisons lors de votre entretien avec le Service de Police Judiciaire en affirmant avoir « quitté le Pakistan parce que la situation n’est pas bonne.

Il n’y a pas de travail. (…) C’est juste que je n’ai pas une bonne situation. J’étais étudiant là-

bas ». Vous précisez également explicitement que « Ma vie n’est pas en danger » au Pakistan (p.2/3 du rapport de police).

En revanche, lors de votre entretien individuel en date du 25 octobre 2023 vous affirmez dorénavant avoir quitté votre pays d’origine en raison de votre homosexualité (p.6/12 du rapport d’entretien). De manière générale, vous expliquez que vous auriez eu une relation avec un homme, le dénommé …, sans pouvoir préciser depuis quand vous entreteniez une relation avec ce dernier et sans être en mesure de fournir un quelconque autre détail (p.7/12 du rapport d’entretien). Votre homosexualité aurait été révélée lors d’un incident survenu le 6 août 2023 au domicile familial de votre petit-copain, alors que vous déclarez, vaguement, que le frère d’… vous aurait surpris lorsque vous auriez « commencé à [le] caresser et à l’embrasser » (p.6/12 du rapport d’entretien). Ce dernier vous aurait alors frappé et aurait menacé de vous tuer avec son arme. Votre petit-ami vous aurait alors conseillé de partir et vous auriez immédiatement quitté la ville.

Au cours de votre fuite, vous auriez réussi à entrer en contact avec votre père, qui aurait désormais également été au courant de votre orientation sexuelle et qui vous aurait conseillé de ne plus revenir, étant donné que votre vie serait en danger. En effet, il vous aurait informé que le frère de votre petit-copain se serait présenté à votre domicile et aurait menacé de vous tuer.

Finalement, lorsque l’agent ministériel vous interroge si vous aviez également d’autres raisons pour lesquelles vous auriez quitté le Pakistan, vous répondez qu’à « … il y a beaucoup de problèmes entre chiites et sunnites » (p.10/12 du rapport d’entretien).

2 Le jour de votre entretien avec les agents du Service de Police Judiciaire vous avez déclaré ne jamais avoir « eu le moindre document d’identité » (p.2/3 du rapport de police).

Or, lors de votre entretien individuel vous remettez l’original de votre carte d’identité à l’agent ministériel et précisez ne pas être en possession de votre passeport parce que le passeur l’aurait déchiré (p.3/12 du rapport d’entretien), or, lors de votre Le 13 novembre 2023, vous remettez également une photo de l’enveloppe d’envoi de votre carte d’identité.

Ladite carte d’identité a été envoyée pour authentification à l’Unité de Police de l’Aéroport, qui, en date du 2 novembre 2023, a déclaré qu’il s’agissait d’un document authentique. […] ».

Le ministre estima, ensuite, que la demande de protection internationale serait basée sur des motifs économiques et de pure convenance personnelle que Monsieur … essayerait d’étoffer par une histoire fictive concernant des persécutions qu’il risquerait de subir au Pakistan à cause de son orientation sexuelle. Le ministre retint également que le caractère fictif de son orientation sexuelle serait confirmé par le fait qu’il aurait menti en affirmant en premier lieu n’avoir jamais possédé de document d’identité puis en versant l’original de sa carte d’identité, tout en précisant que son passeport aurait été déchiré par un passeur. De même, le ministre soutint que la version du demandeur selon laquelle il aurait passé cinq jours dans la rue à dormir dans le parc à Luxembourg avec les mêmes vêtements qu’il aurait portés lors du dépôt de sa demande de protection internationale, et qui auraient été propres et soignés, démontrerait qu’il ne jouerait pas franc-jeu avec les autorités luxembourgeoises. Ce manque de sincérité ressortirait, en outre, de son récit concernant son voyage depuis le Pakistan jusqu’au Luxembourg. Enfin, le ministre ajouta que l’invocation par Monsieur … des conflits entre sunnites et chiites dans sa ville d’origine serait une nouvelle tentative de sa part d’augmenter ses chances d’obtenir une protection internationale.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 20 décembre 2023, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du ministre du 11 décembre 2023 d’opter pour la procédure accélérée, de celle du même jour ayant refusé de faire droit à sa demande de protection internationale, et de l’ordre de quitter le territoire prononcé à son encontre.

En application de l’article 35 (2) de la loi du 18 décembre 2015, le juge siégeant en remplacement du vice-président présidant la deuxième chambre du tribunal administratif a, par jugement rendu en date du 15 janvier 2024, inscrit sous le numéro 49822 du rôle, retenu que le recours n’est pas manifestement infondé, et a renvoyé l’affaire en chambre collégiale du tribunal administratif pour statuer sur ledit recours.

A titre liminaire, le tribunal tient à relever que tout jugement non susceptible d’appel est frappé de l’autorité de chose jugée et que cette dernière s’attache tant au dispositif d’un jugement, qu’aux motifs qui en sont le soutien nécessaire. Par contre, les considérations qui ne sont pas nécessaires à la solution- les obiter dicta- ne sont pas revêtues de l’autorité de la chose jugée1.

De même, le tribunal relève que la recevabilité des recours principaux en réformation a été tranchée par le jugement précité du 15 janvier 2024, dans lequel il a été également retenu qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur les recours subsidiaires en annulation.

1 Voir M. Leroy, Contentieux administratif, 4e éd., Bruylant, p.759.

Il convient ensuite de constater qu’il résulte des enseignements de la Cour administrative que : « La Cour estime qu’il se dégage de la systémique instituée par l’article 35, paragraphe (2), alinéa 2, de la loi du 18 décembre 2015 que l’autorité de chose jugée attachée au jugement rendu dans une première phase par le juge unique vise sa seule appréciation quant au caractère manifestement infondé ou non du recours introduit par le demandeur de protection internationale. Il est évident qu’en cas d’un débouté de pareille demande, le juge unique doit rejeter tous les moyens présentés par le demandeur. Si, par contre, il estime que le recours n’est pas manifestement infondé, il renvoie l’affaire devant la formation collégiale qui elle est appelée à statuer sur le fond du litige et non plus à refaire une nouvelle fois l’appréciation quant à la question de savoir si c’était à bon droit que le ministre a statué dans le cadre d’une procédure accélérée, cet examen étant épuisé par le jugement rendu par le juge unique. » 2.

Il s’ensuit que le tribunal n’examinera plus la question de savoir si c’était à bon droit que le ministre a statué sur la demande de protection internationale de Monsieur … dans le cadre d’une procédure accélérée et limitera par conséquent son analyse au fond du litige, à savoir le rejet de sa demande de protection internationale dans son double volet, ainsi que l’ordre de quitter le territoire.

1) Quant au recours visant la décision du ministre portant refus d’une protection internationale A l’appui de son recours et en fait, le demandeur explique avoir quitté son pays d’origine en raison de son homosexualité, qu’il aurait découverte à son adolescence. Il aurait entretenu une relation homosexuelle cachée avec un étudiant fréquentant son université. Le 6 août 2023, il aurait été surpris avec cet étudiant par le frère de ce dernier. Pris de rage, le frère de cet étudiant l’aurait violemment frappé et l’aurait menacé de le tuer avec une arme. Il n’aurait alors pas eu d’autres choix que de quitter la ville. Son père lui aurait conseillé de ne plus revenir, étant donné que sa vie aurait été en danger non seulement en raison de la famille de son ami, l’étudiant, mais aussi de la sévère répression de l’homosexualité au Pakistan. La confession chiite de son ami aurait encore exacerbé les tensions, lui-même étant de confession sunnite. Après avoir précisé que l’homosexualité serait taboue et réprimée par le Code pénal pakistanais, le demandeur ajoute que son orientation sexuelle ferait l’objet d’une forte réprobation sur les plans social et moral et serait considérée comme une atteinte à l’honneur des familles, ce qui autoriserait de facto la vengeance privée. Par ailleurs, son homosexualité l’aurait empêché de s’adresser aux autorités pakistanaises pour requérir une protection contre la famille de son ami.

En droit, le demandeur critique tout d’abord la décision ministérielle en ce qu’elle contreviendrait au principe de proportionnalité. En effet, il estime avoir fait l’objet de considérations arbitraires dans le traitement de sa demande de protection internationale qui relèverait de l’erreur manifeste d’appréciation. Ainsi, la décision litigieuse reposerait sur une contradiction entre les motifs exposés lors du dépôt de sa demande de protection internationale et ceux exposés lors de son entretien du 25 octobre 2023.

Il reproche, dans ce contexte, au ministre de ne pas avoir fait preuve d’empathie à son égard, notamment au vu de son jeune âge, du fait qu’il viendrait d’un pays musulman qui 2 Cour adm., 11 février 2020, n° 43796C du rôle, disponible sur www.ja.etat.lu. condamnerait pénalement l’homosexualité et où il ne serait pas possible de l’évoquer ouvertement, et du fait qu’il n’assumerait pas son orientation sexuelle. Il aurait ainsi peiné à s’exprimer clairement sur son homosexualité lors de son entretien avec un agent du ministère, en raison de sa pudeur, de sa honte et de sa naïveté. Il estime que, de ce fait, il ne pourrait pas lui être reproché de ne pas savoir ce que le mot « homosexualité » signifierait, dans la mesure où il n’aurait nourri de sentiment amoureux qu’à l’égard de son ami sans devoir « se mettre lui-même une étiquette ». Il explique qu’il se serait senti coupable, anormal, voire « monstrueux », d’éprouver du désir envers une personne du même sexe et que, provenant d’un pays musulman, il aurait été normal qu’il ne puisse pas s’exprimer correctement, notamment face aux policiers luxembourgeois. Par ailleurs, il indique que, lors de cet entretien, il n’aurait pas été assuré de la confidentialité de ses propos et il n’aurait pas été assisté par un avocat, ce qui aurait eu pour conséquence qu’il n’aurait pas eu la force de caractère nécessaire pour exposer les motifs réels à la base de sa demande de protection internationale. Il affirme, à ce propos, que le courrier de son litismandataire du 1er octobre 2023 aurait précisé que d’autres motifs, plus intimes, sous-tendaient ladite demande.

Le demandeur fait encore valoir qu’au vu du délai extrêmement bref entre le dépôt de sa demande de protection internationale et de son audition, la décision de recourir à la procédure accélérée par le ministre aurait été prise par avance, sans analyse sérieuse des motifs invoqués à la base de cette demande, et que l’entretien avec un agent du ministère sur lesdits motifs aurait été une formalité.

Enfin, en s’emparant de divers articles de presse concernant la répression des relations homosexuelles au Pakistan, le demandeur soutient que ses craintes de persécutions seraient réelles et sérieuses, tout en insistant sur le fait que le ministre n’aurait pas procédé à une analyse rigoureuse des motifs à la base de sa demande de protection internationale, avant de conclure à la réformation des trois décisions litigieuses.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours en reprenant en substance les motifs de refus à la base des décisions déférées, notamment en ce qui concerne les différents points de crédibilité, tout en réfutant comme non pertinentes les explications complémentaires contenues dans la requête introductive d’instance.

En ce qui concerne, tout d’abord, le moyen du demandeur ayant trait à l’absence d’analyse sérieuse de sa demande de protection internationale par le ministre, il échet de relever qu’il reproche à celui-ci de s’être basé sur la contradiction entre les motifs évoqués lors du dépôt de sa demande de protection internationale et ceux évoqués en audition pour faire abstraction de son homosexualité, et d’avoir, en conséquence, analysé sa demande de manière rapide et arbitraire, Monsieur … invoquant encore, à cet égard, une violation du principe de proportionnalité.

Si, de l’entendement du tribunal, Monsieur … a entendu se prévaloir, à cet effet, de l’article 10 (3) de la loi du 18 décembre 2015, cet article dispose que « (3) Le ministre fait en sorte que les décisions sur les demandes de protection internationale soient prises à l’issue d’un examen approprié. A cet effet, il veille à ce que:

a) les demandes soient examinées et les décisions soient prises individuellement, objectivement et impartialement ; […] ».

Or, force est au tribunal de constater que l’argumentation du demandeur à ce sujet se limite à contester la remise en cause de la crédibilité de son récit par le ministre des motifs liésà son orientation sexuelle et à reprocher la rapidité avec laquelle la décision ministérielle a été prise, sans cependant fournir un quelconque élément concret duquel ressortirait une violation de la prédite disposition légale. Il échet, en effet, de constater qu’il ressort des éléments du dossier que le ministre a pris en considération l’intégralité des déclarations et documents fournis par Monsieur … pour en tirer la conclusion que les motifs liés à son homosexualité ne seraient pas crédibles et que sa demande ne serait pas justifiée, sans qu’il ne ressorte des éléments soumis à l’examen du tribunal que l’analyse ministérielle n’aurait pas été individuelle, objective, appropriée et impartiale.

Il s’ensuit que le moyen fondé sur une violation de l’article 10 (3) a) de la loi du 18 décembre 2015 est à rejeter pour être non fondé.

Pour les mêmes motifs, le tribunal ne saurait déceler une violation du principe de proportionnalité, de sorte que le moyen afférent encourt également le rejet pour être non fondé.

S’agissant ensuite du refus d’octroi du statut de réfugié, le tribunal relève qu’en vertu de l’article 2 h) de la loi du 18 décembre 2015, la notion de « protection internationale » se définit comme correspondant au statut de réfugié et au statut conféré par la protection subsidiaire.

La notion de « réfugié » est définie par l’article 2 f) de la même loi comme étant « […] tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner […] », tandis que celle de « personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire » est définie par l’article 2 g) de la même loi comme « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 48, l’article 50, paragraphes (1) et (2), n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays ».

Force est au tribunal de constater que tant la notion de « réfugié » que celle de « personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire » impliquent nécessairement des persécutions ou des atteintes graves, ou à tout le moins un risque de persécution ou d’atteintes graves dans le pays d’origine.

Par ailleurs, l’article 42 de la loi du 18 décembre 2015 dispose que « (1) Les actes considérés comme une persécution au sens de l’article 1A de la Convention de Genève doivent:

a) être suffisamment graves du fait de leur nature ou de leur caractère répété pour constituer une violation grave des droits fondamentaux de l’homme, en particulier des droits auxquels aucune dérogation n’est possible en vertu de l’article 15, paragraphe 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales;

ou 6 b) être une accumulation de diverses mesures, y compris des violations des droits de l’homme, qui soit suffisamment grave pour affecter un individu d’une manière comparable à ce qui est indiqué au point a). […] ».

Quant aux atteintes graves, l’article 48 de loi du 18 décembre 2015 les énumère sous ses points a), b) et c), comme étant respectivement « la peine de mort ou l’exécution ; ou la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine ; ou des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international. ».

Dans les deux hypothèses, les faits dénoncés doivent être perpétrés par un acteur de persécutions ou d’atteintes graves au sens de l’article 39 de la loi du 18 décembre 2015, lesquels peuvent être :

« […] a) l’Etat;

b) des partis ou organisations qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci;

c) des acteurs non étatiques, s’il peut être démontré que les acteurs visés aux points a) et b), y compris les organisations internationales, ne peuvent pas ou ne veulent pas accorder une protection contre les persécutions ou les atteintes graves. » Aux termes de l’article 40 de la même loi « (1) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves ne peut être accordée que par:

a) l’Etat, ou b) des partis ou organisations, y compris des organisations internationales, qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci, pour autant qu’ils soient disposés à offrir une protection au sens du paragraphe (2) et en mesure de le faire.

(2) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves doit être effective et non temporaire. Une telle protection est généralement accordée lorsque les acteurs visés au paragraphe (1) points a) et b) prennent des mesures raisonnables pour empêcher la persécution ou des atteintes graves, entre autres lorsqu’ils disposent d’un système judiciaire effectif permettant de déceler, de poursuivre et de sanctionner les actes constituant une persécution ou une atteinte grave, et lorsque le demandeur a accès à cette protection. […] ».

Il suit des articles précités de la loi du 18 décembre 2015 que l’octroi du statut de réfugié est notamment soumis à la triple condition que les actes invoqués sont motivés par un des critères de fond définis à l’article 2 f) de la loi du 18 décembre 2015 précitée, à savoir la race, la religion, la nationalité, les opinions politiques ou l’appartenance à un certain groupe social, que ces actes sont d’une gravité suffisante au sens de l’article 42 (1) de la même loi, et qu’ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes des articles 39 et 40 de la loi du 18 décembre 2015, étant entendu qu’au cas où les auteurs des actes sont des personnes privées, elles ne sont à qualifier comme acteurs seulement dans le cas où les acteurs visés aux points a) et b) de l’article 39 de la loi du 18 décembre 2015 ne peuvent ou ne veulent pas accorder une protection contre les persécutions et, enfin, que le demandeur ne peut ou ne veut pas se réclamer de la protection de son pays d’origine. Cette dernière condition s’applique également au niveaude la demande de protection subsidiaire, conjuguée avec les exigences liées à la définition de l’atteinte grave reprises à l’article 48 de la loi du 18 décembre 2015 et rappelées précédemment.

Ces conditions devant être réunies cumulativement, le fait que l’une d’elles ne soit pas valablement remplie est suffisant pour conclure que le demandeur ne saurait bénéficier du statut de réfugié ou de celui conféré par la protection subsidiaire.

Le tribunal, statuant en tant que juge du fond en matière de demandes de protection internationale, doit procéder à l’évaluation de la situation personnelle du demandeur de protection internationale, tout en prenant en considération la situation générale, telle qu’elle se présente à l’heure actuelle dans le pays de provenance. Cet examen ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais il s’agit également d’apprécier la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations du demandeur.

A cet égard, il y a lieu de rappeler que si, comme en l’espèce, des éléments de preuve manquent pour étayer les déclarations du demandeur de protection internationale, celui-ci doit bénéficier du doute en application de l’article 37 (5) de la loi du 18 décembre 2015, si, de manière générale, son récit peut être considéré comme crédible, s’il s’est réellement efforcé d’étayer sa demande, s’il a livré tous les éléments dont il disposait et si ses déclarations sont cohérentes et ne sont pas en contradiction avec l’information générale et spécifique disponible, le principe du bénéfice du doute étant, en droit des réfugiés, d’une très grande importance alors qu’il est souvent impossible pour les réfugiés d’apporter des preuves formelles à l’appui de leur demande de protection internationale et de leur crainte de persécution ou d’atteintes graves3.

Or, le tribunal partage les doutes du ministre et du délégué du gouvernement quant à la crédibilité du récit du demandeur concernant son orientation sexuelle.

En effet, le tribunal constate que si le demandeur prend position dans sa requête introductive d’instance par rapport aux raisons pour lesquelles il n’a pas indiqué les motifs liés à son orientation sexuelle lors du dépôt de sa demande de protection internationale et lors de son entretien devant les policiers luxembourgeois, il ne fournit néanmoins aucune précision concernant son homosexualité.

A ce propos, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a été amenée à retenir, dans un arrêt du 2 décembre 2014, A (C‑148/13), B (C‑149/13), C (C‑150/13) contre Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie, concernant les éléments de crédibilité d’un demandeur de protection internationale se déclarant homosexuel que « […] contrairement aux allégations des requérants au principal, selon lesquelles les autorités compétentes chargées de l’examen d’une demande d’asile fondée sur une crainte de persécution en raison de l’orientation sexuelle du demandeur d’asile devraient considérer sa prétendue orientation comme un fait établi sur la base des seules déclarations de ce demandeur, lesdites déclarations ne sauraient constituer, compte tenu du contexte particulier dans lequel s’inscrivent les demandes d’asile, que le point de départ dans le processus d’examen des faits et des circonstances prévu à l’article 4 de la directive 2004/83. »4, qu’ « […] il résulte de l’article 4, paragraphe 5, de la directive 2004/83 [transposé en droit national à l’article 37 (5) de la loi du 18 décembre 2015] que, lorsque les conditions énumérées aux points a) à e) 3 Trib. adm., 16 avril 2008, n° 23855, Pas. adm. 2023, V° Etrangers, n° 140 et les autres références y citées.

4 CJUE, 2 décembre 2014, A (C‑148/13), B (C‑149/13), C (C‑150/13) contre Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie, point 49.de cette disposition ne sont pas remplies, les déclarations des demandeurs d’asile relatives à leur prétendue orientation sexuelle peuvent nécessiter confirmation. »5, et qu’« Il s’ensuit que, bien qu’il appartienne au demandeur d’asile d’identifier cette orientation, qui constitue un élément relevant de sa sphère personnelle, les demandes d’octroi du statut de réfugié motivées par une crainte de persécution en raison de cette orientation, tout comme les demandes fondées sur d’autres motifs de persécution, peuvent faire l’objet d’un processus d’évaluation, prévu à l’article 4 de la même directive. »6.

Il ressort de cet arrêt que les seules déclarations du demandeur de protection internationale concernant son orientation sexuelle peuvent ne pas être suffisantes et peuvent nécessiter confirmation lorsque l’une des conditions prévues à l’article 37 (5) de la loi du 18 décembre 2015 n’est pas remplie, à savoir que le demandeur ne s’est pas réellement efforcé d’étayer sa demande, qu’il n’a pas fourni tous les éléments pertinents à sa disposition et une explication satisfaisante quant à l’absence d’autres éléments probants, que ses déclarations sont jugées incohérentes et non plausibles ou qu’elles sont contredites par les informations générales et particulières connues et pertinentes pour sa demande, qu’il n’a pas présenté sa demande de protection internationale dès que possible, à moins qu’il puisse avancer de bonnes raisons pour ne pas l’avoir fait, ou que sa crédibilité générale n’a pas pu être établie.

Or, force est de constater, tout d’abord, et outre le fait qu’il n’ait pas fourni le motif ayant trait à son orientation sexuelle ni dans la fiche rédigée lors du dépôt de sa demande de protection internationale ni devant les policiers qui l’ont entendu subséquemment, que le demandeur ne s’est pas réellement efforcé d’étayer sa demande : son récit concernant la découverte de son homosexualité et sa relation avec son partenaire, qui aurait pourtant duré de nombreuses années, est en effet très peu détaillé.

Ainsi, face aux questions sur la réalité de sa relation homosexuelle, il échet de relever que Monsieur … s’est contenté d’affirmer qu’il aurait seulement « été en relation d’amour »7 avec cet ami rencontré à l’université et que cela signifierait « qu’il est [s]on amoureux »8. Il reste, de ce fait, en défaut de fournir des éléments concrets sur la relation amoureuse qu’il aurait prétendument entretenue pendant « à peu près deux ou trois ans »9, concernant, notamment, les caractéristiques de son partenaire10, des souvenirs partagés avec lui, ou un quelconque autre élément qui permettrait de penser que cette relation a réellement existé.

A cela s’ajoute que les réponses du demandeur aux questions de l’agent du ministère sur son orientation sexuelle restent essentiellement évasives et sommaires. En effet, il échet de relever qu’il définit son orientation sexuelle comme « quelque chose de normal quand vous aimez quelqu’un »11, qu’il affirme n’avoir aimé aucun autre homme ou une femme dans sa vie, qu’il n’a jamais été attiré par un autre homme que son ami, qu’il ne s’est jamais posé de question sur sa sexualité, qu’il ne sait pas ce que signifie l’homosexualité. Il précise pourtant au cours de son entretien que, concernant les relations amoureuses entre hommes, « La loi 5 Ibid., point 51.

6 Ibid., point 52.

7 Page 6 de son rapport d’audition.

8 Page 7 de son rapport d’audition.

9 Ibid.

10 « - Qu’est-ce qui vous a plu chez lui ? Il était beau, je l’ai aimé.

- Décrivez-moi la personnalité de ….

Il était beau, il avait le même âge que moi. », page 8 de son rapport d’audition.

11 Page 8 de son rapport d’audition.Pakistanaise prévoit un emprisonnement de 20 ans ou à vie. […] »12 et que « […] Dans notre communauté ce n’est pas acceptable. »13, ce qui rend peu vraisemblable le fait qu’il ne se soit jamais posé de questions sur son orientation sexuelle.

A cet égard, force est également de constater que, dans le cadre de sa requête introductive d’instance, il contredit les prédites déclarations en affirmant qu’il aurait pu sentir « une attirance homosexuelle inavouable dans son pays d’origine » depuis son adolescence, et ce, sans fournir, de nouveau, de plus amples explications à ce propos.

Au vu de ces considérations, et à défaut pour le demandeur d’apporter la moindre précision dans sa requête introductive d’instance, l’absence de crédibilité du récit du demandeur en relation avec les problèmes qu’il aurait prétendument rencontrés au Pakistan en raison de son orientation sexuelle, telle que valablement soulevée par le ministre, est à confirmer.

Le tribunal est encore amené à relever que la volonté d’ajouter des éléments à son récit en vue d’augmenter ses chances de se voir attribuer une protection internationale ressort également de la dimension religieuse que Monsieur … a tenté d’apporter à son récit par l’affirmation, faite pour la première fois à la fin de son entretien avec l’agent du ministère, que son partenaire serait de religion chiite, ce qui aggraverait son cas en tant que sunnite, dans la mesure où les relations entre chiites et sunnites seraient conflictuelles à …. Or, cette simple affirmation, non autrement étayée, est non seulement insuffisante, mais conforte au contraire le manque de crédibilité du récit du demandeur concernant son homosexualité.

Partant, il ressort de ces considérations que la crédibilité relative à l’élément essentiel du récit du demandeur sur lequel il base sa demande de protection internationale, à savoir son orientation sexuelle, est compromise.

Eu égard à ces constatations, le tribunal est amené à retenir que les conditions visées à l’article 37 (5) de la loi du 18 décembre 2015, à savoir que le demandeur s’est réellement efforcé d’étayer sa demande, qu’il a livré tous les éléments dont il disposait et que ses déclarations sont cohérentes, ne sont pas remplies, de sorte que son récit doit être considéré comme n’étant pas crédible dans son intégralité.

Par conséquent, force est de constater que les motifs à la base de la demande de protection internationale de Monsieur … sont essentiellement économiques et de convenance personnelle. Il ressort, en effet, de la fiche des motifs remplie lors de l’introduction de la demande de protection internationale que le demandeur souhaite obtenir une protection internationale au Luxembourg pour avoir un meilleur avenir et y trouver un emploi, motivations qu’il a confirmées devant les policiers luxembourgeois en affirmant avoir quitté le Pakistan, où la situation ne serait pas bonne et où il n’y aurait pas de travail, tout en ajoutant que sa vie ne serait pas en danger au Pakistan.

Or, de tels motifs d’ordre économique ou de convenance personnelle ne sauraient manifestement justifier l’octroi ni du statut de réfugié, pour ne pas être fondés sur un des critères visés par la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, ni 12 Page 9 de son rapport d’audition.

13 Ibid.de celui conféré par la protection subsidiaire pour ne pas entrer dans le champ d’application de l’article 48, précité, de la loi du 18 décembre 2015.

C’est dès lors à bon droit que le ministre a refusé d’octroyer une protection internationale au demandeur, de sorte que le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle lui refusant ladite protection encourt le rejet pour être non fondé.

2) Quant au recours visant la décision ministérielle portant ordre de quitter le territoire Le demandeur estime que ce volet de la décision ministérielle devrait encourir la réformation en conséquence de la réformation du premier volet de la décision portant refus de l’octroi d’une protection internationale dans son chef.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours, dans la mesure où l’ordre de quitter le territoire découlerait directement de la décision rejetant l’octroi d’une protection internationale.

Aux termes de l’article 34 (2) de la loi du 18 décembre 2015, « […] Une décision du ministre vaut décision de retour […] », cette dernière notion étant définie par l’article 2 q) de la même loi comme « la décision négative du ministre déclarant illégal le séjour et imposant l’ordre de quitter le territoire », étant encore relevé, à cet égard, que si le législateur n’a pas expressément précisé que la décision du ministre visée à l’article 34 (2), précité, de la loi du 18 décembre 2015 est une décision négative, il y a lieu d’admettre, sous peine de vider la disposition légale afférente de tout sens, que sont visées les décisions négatives du ministre. Il suit dès lors des dispositions qui précèdent que l’ordre de quitter le territoire est la conséquence automatique du refus de protection internationale.

Dans la mesure où le tribunal vient de retenir que c’est à juste titre que le ministre a rejeté la demande de protection internationale du demandeur, il a valablement pu assortir cette décision d’un ordre de quitter le territoire.

Il suit des considérations qui précèdent que le recours en réformation introduit à l’encontre de l’ordre de quitter le territoire est à rejeter pour être également non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement et sur renvoi par le jugement du 15 janvier 2024, inscrit sous le numéro 49822 du rôle, rendu par le juge siégeant en remplacement du vice-président présidant la deuxième chambre du tribunal administratif ;

vidant ledit jugement du 15 janvier 2024 ;

déclare non fondé le recours en réformation introduit à l’encontre de la décision ministérielle du 11 décembre 2023 portant refus d’une protection internationale, partant en déboute ;

déclare non fondé le recours en réformation introduit à l’encontre de la décision ministérielle du 11 décembre 2023 portant ordre de quitter le territoire, partant en déboute ;

condamne le demandeur aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Annemarie Theis, premier juge, Caroline Weyland, juge, et lu à l’audience publique du 15 juillet 2024 par le vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 15 juillet 2024 Le greffier du tribunal administratif 12


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 49822a
Date de la décision : 15/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2024-07-15;49822a ?

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