Tribunal administratif N° 47446 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47446 5e chambre Inscrit le 17 mai 2022 Audience publique extraordinaire du 9 août 2024 Recours formé par Monsieur A, …, contre un bulletin d’impôt émis par l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 47446 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 17 mai 2022 par Monsieur A, demeurant à L-…, tendant à la réformation du bulletin d’impôt sur le revenu pour l’année 2020 émis en date du 13 janvier 2022 ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 12 octobre 2022 ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour de Maître Paul JASSENK, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre de avocats de Luxembourg, demeurant professionnellement à L-
9047 Ettelbruck, 23-25, rue Prince Henri, déposée le 23 février 2024 au greffe du tribunal administratif pour le compte de Monsieur A, préqualifié ;
Vu les pièces versées en cause et notamment le bulletin d’impôt critiqué ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Paul JASSENK et Monsieur le délégué du gouvernement Steve COLLART en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 20 mars 2024.
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En date du 22 novembre 2021, conformément au § 205, alinéa (3) de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », l’administration des Contributions directes, ci-après désignée par l’« administration », fit part par courrier à Monsieur A, ci-après désigné par le « requérant », de son intention de diverger sur différents points de sa déclaration d’impôt sur le revenu relative à l’année 2020.
En date du 13 janvier 2022, l’administration émit à l’égard du requérant le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2020.
En date du 13 avril 2022, le requérant adressa une requête à l’administration qui la réceptionna le 27 avril 2022 et la qualifia de « réclamation ». Elle fut portée au rôle du contentieux le même jour sous le numéro C30963.
Par requête déposée le 17 mai 2022 au greffe du tribunal administratif, le requérant a introduit un recours tendant à la réformation du « bulletin ».
1 En date du 10 juin 2022, le directeur de l’administration, ci-après désigné par le « directeur », rendit une décision faisant suite à la réclamation du requérant déposée en date du 19 avril 2022.
Dans son mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 12 octobre 2022, le délégué du gouvernement donne à considérer que le recours serait irrecevable pour plusieurs raisons : (i) le recours en réformation serait dirigé contre un accusé de réception émis par l’administration en date du « 19 avril 2022 » suite à la réclamation du requérant, (ii) le recours ne contiendrait aucun développement circonstancié en droit, (iii) la requête serait libellée de manière obscure et enfin, (iv) le recours devrait être considéré comme prématuré puisque les six mois endéans lesquels le directeur serait censé prendre une décision ne seraient pas écoulés.
I) Compétence du tribunal Conformément aux dispositions combinées du § 228 AO et de l’article 8, § (3), point 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, dénommée ci-après la « loi du 7 novembre 1996 », le tribunal administratif est compétent pour connaître des recours en réformation dirigés contre une décision du directeur ou contre un bulletin d’imposition sous condition que le directeur n’ait pas pris de décision dans un délai de six mois.
En l’espèce, le tribunal relève que tant la réclamation introduite par courrier du 13 avril 2022 auprès du directeur, que le présent recours en réformation, sont formulés de manière peu claire et restent équivoques quant à leurs objets. Toutefois, par application du principe de l’effet utile selon lequel la jurisprudence tend, sur le fondement du § 249, alinéas (1) et (2) AO, à interpréter les requêtes des contribuables selon l’intention qu’elles manifestent plutôt que de s’arrêter au sens littéral des termes employés et après une analyse approfondie des termes employés par le requérant au sein de ses requêtes et des pièces jointes se référant explicitement au « BULLETIN », le tribunal est amené à conclure que la réclamation datée du 13 avril 2022 et le recours en réformation sous examen sont dirigés contre le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2020 émis en date du 13 janvier 2022.
Partant, il y a lieu de rejeter le moyen du directeur tendant à une irrecevabilité du recours pour libellé obscur, sinon pour être dirigé contre un accusé de réception émis en date du « 19 avril 2022 » par l’administration.
De surcroît, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation sous examen.
II) Recevabilité du recours Conformément à l’article 8, § (3), point 3. de la loi du 7 novembre 1996, un recours dirigé directement contre un bulletin d’imposition n’est prévu que dans l’hypothèse où une réclamation a été introduite par le contribuable et qu’aucune réponse n’est intervenue dans un délai de six mois. Étant entendu que l’observation dudit délai de six mois, qui court à partir de l’introduction du recours, doit être considérée comme une condition de recevabilité, un recours déposé alors que le délai de six mois n’est pas encore révolu est à déclarer 2irrecevable pour avoir été introduit prématurément1.
En l’espèce, force est au tribunal de constater que la réclamation devant le directeur a été introduite le 13 avril 2022. Or, le délai de six mois au sens de l’article 8, § (3), point 3. de la loi du 7 novembre 1996 n’expire que le 13 octobre 2022.
Partant, le recours introduit en date du 17 mai 2022 est à déclarer irrecevable pour avoir été introduit prématurément Par ces motifs, le tribunal administratif, cinquième chambre, statuant contradictoirement ;
déclare le recours en réformation irrecevable ;
condamne le demandeur aux frais et dépens.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique extraordinaire du 9 août 2024 par :
Françoise EBERHARD, premier vice-président, Benoît HUPPERICH, juge, Nicolas GRIEHSER SCHWERSTEIN, attaché de justice délégué, en présence du greffier Lejila ADROVIC.
s.Lejila ADROVIC s.Françoise EBERHARD Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 9 août 2024 Le greffier du tribunal administratif 1 Trib. adm., 23 mars 2011, n° 27128 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 1295.