Tribunal administratif N° 47985 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47985 2e chambre Inscrit le 28 septembre 2022 Audience publique du 16 septembre 2024 Recours formé par Monsieur … et consorts, …, contre une décision du conseil communal de Mersch et une décision du ministre de l’Intérieur, en présence de la société à responsabilité limitée “A” SARL en matière de plan d’aménagement particulier
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 47985 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 28 septembre 2022 par Maître Pierre Goerens, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de 1) Monsieur …, demeurant à L-…, 2) Monsieur …, demeurant à L-…, 3) Monsieur …, demeurant à L-…, et 4) Monsieur …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation 1) de la « […] décision du Conseil communal de MERSCH du 28 février 2022 portant approbation du projet d’aménagement particulier n° …, dénommé « … » sis à Mersch au lieu-dit « … », pour le compte de la société à responsabilité limitée “A” S. à r.l. de … » et 2) de la « […] décision de la ministre de l’Intérieur du 15.6.2022, référence M… portant approbation de la délibération du conseil communal du 28 février 2022, portant adoption du projet d’aménagement particulier concernant des fonds sis à Mersch, commune de Mersch, au lieu-dit « … », présenté par le collège des bourgmestre et échevins pour le compte de la société “A” s.à r.l. » ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Geoffrey Gallé, demeurant à Luxembourg, du 4 octobre 2022, portant signification de ce recours à l’administration communale de Mersch, ayant sa maison communale à L-7501 Mersch, Château de Mersch, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions, ainsi qu’à la société à responsabilité limitée “A” SARL, établie et ayant son siège social à L-…, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son gérant actuellement en fonctions ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 7 octobre 2022 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F. Kennedy, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B186371, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Christian Point, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 12 octobre 2022 par Maître Steve Helminger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Mersch, préqualifiée ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 19 octobre 2022 par Maître Anne-Laure Jabin, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée “A” SARL, préqualifiée ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 20 décembre 2022 par Maître Steve Helminger, au nom de l’administration communale de Mersch, préqualifiée ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 23 décembre 2022 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 4 janvier 2023 par Maître Anne-Laure Jabin, au nom de la société à responsabilité limitée “A” SARL, préqualifiée ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 6 février 2023 par Maître Pierre Goerens, au nom de Messieurs …, …, … et …, préqualifiés ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 6 mars 2023 par Maître Steve Helminger, au nom de l’administration communale de Mersch, préqualifiée ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 6 mars 2023 par la société anonyme Arendt & Medernach SA, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 6 mars 2023 par Maître Anne-Laure Jabin, au nom de la société à responsabilité limitée “A” SARL, préqualifiée ;
Vu les pièces versées en cause ainsi que les actes critiqués ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Pierre Goerens, Maître Steve Helminger, Maître Martial Barbian, en remplacement de Maître Christian Point, et Maître Anne-Laure Jabin, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 3 juin 2024.
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Il est constant en cause qu’en date du 15 décembre 2021, le bureau d’architectes “B” SARL, ci-après désigné par « le bureau d’architectes “B” », présenta auprès de la commune de Mersch, pour le compte de la société à responsabilité limitée “A” SARL, ci-après désignée par « la société “A” », un projet de plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » (« PAP NQ »), dénommé « … », en vue de l’aménagement sur les parcelles inscrites au cadastre de la commune de Mersch sous les numéros … et … et pour partie sur celle inscrite sous le numéro …, au lieu-dit « … », d’un immeuble résidentiel comprenant 4 unités de logement et de 12 maisons unifamiliales.
En date du 20 décembre 2021, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Mersch, ci-après désigné par « le collège échevinal », constata, conformément aux dispositions de l’article 30, alinéa 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par « la loi du 19 juillet 2004 », la conformité dudit projet de PAP NQ par rapport aux dispositions du plan d’aménagement général (« PAG ») en vigueur dans la commune de Mersch.
Suite au dépôt et à la publication du projet de PAP NQ à la maison communale à compter du 28 décembre 2021 jusqu’au 27 janvier 2022, Messieurs …, …, … et …, ci-après désignés par « les parties requérantes », s’adressèrent au collège échevinal par courriers datés respectivement des 18, 20 et 25 janvier 2022, pour faire valoir leurs observations et objections « relatives au projet de Plan d’Aménagement Particulier (PAP) « … » sis dans la section … de Mersch ».
Lors de sa séance publique du 28 février 2022, le conseil communal adopta le PAP NQ, tel que modifié en tenant compte de l’avis de la cellule d’évaluation délivré le 12 janvier 2022 et de certaines objections ayant été considérées comme partiellement justifiées.
Par décision du 15 juin 2022, le ministre de l’Intérieur approuva la délibération du conseil communal du 28 février 2022 ayant porté adoption du projet de PAP NQ litigieux tant dans sa partie graphique qu’écrite.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 28 septembre 2022, les parties requérantes ont fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation 1) de la « […] décision du Conseil communal de MERSCH du 28 février 2022 portant approbation du projet d’aménagement particulier n° …, dénommé « … » sis à Mersch au lieu-dit « … », pour le compte de la société à responsabilité limitée “A” S. à r.l. de … » et 2) de la « […] décision de la ministre de l’Intérieur du 15.6.2022, référence …, portant approbation de la délibération du conseil communal du 28 février 2022 portant adoption du projet d’aménagement particulier concernant des fonds sis à Mersch, commune de Mersch, au lieu-dit « … », présenté par le collège des bourgmestre et échevins pour le compte de la société “A” s.à r.l. ».
I. Quant à la compétence du tribunal Le tribunal relève que les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre de l’Intérieur participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé1.
Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire.
Il s’ensuit que le tribunal n’est pas compétent pour connaître du recours principal en réformation introduit en l’espèce.
1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Actes réglementaires, n° 59 et les autres références y citées.
Il est en revanche compétent pour connaître du recours subsidiaire en annulation.
II. Quant à la loi applicable La procédure d’adoption d’un plan d’aménagement particulier (« PAP ») est prévue par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire, (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, (vii) par la loi du 30 juillet 2021 relative au Pacte logement 2.0, entrée en vigueur en date du 1er janvier 2021 par application de l’article 16 de la loi en question et (viii) par la loi du 7 août 2023 relative au logement abordable.
Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des actes déférés et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à en apprécier la légalité en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où ils ont été pris2, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par la loi précitée du 7 août 2023, entrée en vigueur postérieurement à la délibération du 28 février 2022 ne sont pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement précisé à cet égard que les actes de tutelle administrative, tels que la décision ministérielle litigieuse, rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.
Il s’ensuit que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015, 3 mars 2017, 17 avril 2018, 18 juillet 2018 et 30 juillet 2021.
III. Quant à la recevabilité du recours subsidiaire en annulation 1. Quant à l’irrecevabilité omisso medio du recours en ce qu’il a été introduit par les parties requérantes sub 2) à 4) Le tribunal se doit de relever qu’encore que dans son mémoire en réponse la partie étatique a soulevé l’irrecevabilité omisso medio du recours sous analyse dans le chef des parties requérantes sub 2) à 4) au motif que, d’après les éléments portés à sa connaissance, seule la partie requérante sub 1) avait introduit des objections auprès du collège échevinal contre le 2 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en annulation, n° 22 et les autres références y citées.
projet de PAP NQ litigieux, elle a demandé acte dans son mémoire en duplique qu’elle renonçait à ce moyen d’irrecevabilité étant donné que des recherches effectuées en ce sens avaient permis de constater que les parties requérantes sub 2) à 4) avaient bien introduit des objections contre le projet de PAP NQ en question lors de l’enquête publique. Il convient dès lors de lui en donner acte.
2. Quant à l’intérêt à agir des parties requérantes Moyens et arguments des parties Dans leurs mémoires en réponse respectifs, les parties défenderesses, ainsi que la partie tierce-intéressée concluent à l’irrecevabilité du recours sous analyse pour défaut d’intérêt à agir dans le chef des parties requérantes.
Elles font, en substance, valoir que si les parties requérantes essayaient de justifier leur intérêt à agir en invoquant leur prétendue qualité de voisins directs ou indirects des parcelles formant l’assiette du PAP NQ litigieux, ainsi que le fait qu’elles ont introduit des recours contentieux contre des décisions délivrées par le ministre ayant l’Environnement dans ses attributions en relation avec l’urbanisation du site litigieux, tout en faisant valoir qu’elles auraient un intérêt à ce que « l’habitat naturel pour les chauves-souris que représente le site du PAP, soit préservé, et qu’en outre le site en question continuera à abriter les espèces de chauves-souris protégés », elles manqueraient toutefois de démontrer en quoi le PAP NQ litigieux serait susceptible de leur causer un quelconque grief, respectivement en quoi son annulation serait susceptible de leur profiter personnellement et directement. Elles resteraient ainsi plus particulièrement en défaut d’établir qu’elles disposent d’un intérêt personnel distinct de l’intérêt général à agir contre le PAP NQ, voire que leur intérêt à agir est suffisamment direct, né et actuel. Ce constat s’imposerait d’autant plus que les parties requérantes sembleraient davantage guidées par leur volonté d’éviter que des maisons ne soient construites sur des terrains arborés sur lesquels certaines d’entre elles ont une vue. Or, le caractère urbanisable du site en cause et plus particulièrement le classement des parcelles concernées en zone soumise à un PAP NQ aurait été prévu par le PAG depuis sa refonte approuvée en 2017 sans que les parties requérantes n’aient introduit à un stade précontentieux des objections ou observations en relation avec ce classement. Comme le PAP NQ ne constituerait qu’une mesure d’exécution du classement prévu par le PAG en zone destinée à être urbanisée, il n’apparaîtrait pas en quoi concrètement ledit PAP pourrait causer per se grief aux parties requérantes.
La société tierce-intéressée insiste, quant à elle, par ailleurs et plus spécifiquement sur le fait que si Monsieur … se prévalait de sa prétendue situation particulière en relation avec le fait que « la nouvelle route sortira juste en face de sa maison d’habitation », il y aurait lieu de constater qu’un amalgame serait fait entre deux PAP, à savoir, d’un côté le PAP NQ actuellement litigieux et, de l’autre côté, le PAP NQ dit « … ». Or, comme la rue dont se prévaut Monsieur … pour justifier son intérêt à agir serait réalisée dans le cadre du PAP NQ « … » et non pas dans le cadre du PAP NQ « … », il n’aurait, à l’instar des autres parties requérantes, pas d’intérêt à agir contre les décisions déférées.
Dans leur mémoire en réplique, les parties requérantes relèvent tout d’abord qu’il ne serait pas contesté qu’elles ont une vue directe « sur la parcelle du PAP » sur laquelle se trouveraient de nombreux et très vieux arbres, qui ferait dès lors partie de leur voisinage direct, et abriterait les chiroptères dont il serait principalement question dans le cadre du présent recours.
Elles ajoutent que l’exécution du PAP NQ tel qu’il a été voté aurait pour conséquence que les arbres en question seraient abattus impliquant que non seulement les parcelles en question ne pourraient plus remplir leur fonction écologique mais encore que les voisins directs du projet ne pourraient plus profiter de la présence de ceux-ci.
Les parties requérantes sont ensuite d’avis que le fait qu’elles n’aient pas agi judiciairement contre le PAG ne les priverait pas de leur droit d’introduire un recours contre un PAP pris en exécution de ce PAG. Elles expliquent, à titre purement informatif, que si elles n’avaient pas agi dans le cadre de la procédure de refonte du PAG ce serait parce qu’initialement le terrain en question n’aurait pas été directement constructible pour avoir été superposé d’une servitude de type « zone d’aménagement différé ». De ce fait, elles n’auraient pas jugé utile d’introduire des réclamations. Tout en admettant que par la suite, et après l’avis du ministère de l’Intérieur, la servitude urbanistique en cause aurait été enlevée, elles précisent ne pas avoir remarqué cette suppression et estiment qu’il ne pourrait pas être reproché « à des administrés de ne pas suivre et de ne pas comprendre l’ensemble de la procédure complexe d’adoption d’un PAG ». Elles sont, par ailleurs, d’avis que, de toute façon, les moyens développés à l’appui du présent recours n’auraient pas pu être présentés dans le cadre de l’adoption du PAG lequel ne prévoirait que le principe abstrait d’une viabilisation de la parcelle en cause par le biais de l’adoption d’un PAP NQ. Ce serait dès lors in fine le PAP NQ litigieux qui fixerait concrètement l’étendu des constructions autorisées sur le terrain en cause et ce nécessairement en tenant compte des objectifs environnementaux. Comme la destruction des arbres et du système écologique serait donc la conséquence du PAP NQ, et plus particulièrement du nombre de constructions y prévues, et non pas du PAG, elles auraient un intérêt à agir contre les décisions portant adoption respectivement approbation de celui-ci.
Dans leurs mémoires en duplique respectifs, les parties défenderesses et tierce-
intéressée maintiennent leur moyen d’irrecevabilité en réitérant, en substance, leurs développements antérieurs.
La partie étatique insiste, dans ce contexte, sur le fait que pour ce qui est des « nombreux et très vieux arbres » qui seraient situés sur les parcelles formant l’assiette du PAP NQ litigieux, il y aurait lieu de constater qu’il se dégagerait d’une orthophoto du site en question, telle que reproduite dans son mémoire en duplique, que si certes ledit site était végétalisé, les parties requérantes ne donneraient aucune explication quant au nombre de végétaux présents sur le site et leurs caractéristiques. A cela s’ajouterait que le site en question se situerait au centre de la localité dans un milieu d’ores et déjà fortement urbanisé et comprenant de nombreux immeubles d’habitation, dont les leurs.
Il s’ensuivrait qu’au vu de la situation de fait, les parties requérantes ne pourraient valablement se contenter d’invoquer vaguement la présence d’arbres pour essayer de justifier d’un intérêt à agir dans leur chef. Ce constat s’imposerait d’autant plus qu’elles passeraient sous silence qu’il se dégagerait de la partie graphique du PAP NQ que le projet adopté prévoirait justement la mise en place de généreux espaces verts publics et privés, une rétention d’eau à ciel ouvert à l’ouest sur une partie végétalisée du site, de même que la plantation de haies et de nombreux arbres, de sorte que plus particulièrement les parties requérantes sub 1), 2) et 4) continueraient à profiter dans leur champ de vision de surfaces végétalisées à l’arrière de leurs terrains en complément de leurs jardins privatifs.
La partie étatique continue en faisant valoir que la seule circonstance que la présence de zones de chasse de chiroptères ait été décelée sur le site du PAP NQ litigieux ne serait pas suffisante à elle seule pour justifier un intérêt à agir étant donné qu’en s’emparant de cet argument, les parties requérantes se borneraient à justifier leur action par des motifs tendant à la défense de l’intérêt général.
Enfin, la partie étatique est d’avis que les explications avancées par les parties requérantes pour justifier l’absence d’objections écrites contre le projet de refonte du PAG qui envisageait de classer les terrains litigieux dans une zone destinée à être urbanisée par le biais de l’adoption d’un PAP NQ manqueraient de convaincre.
La partie tierce-intéressée met, quant à elle, encore en évidence que la question de la destruction des arbres ne serait pas la conséquence du PAP NQ litigieux mais de l’autorisation future à délivrer par le ministre ayant l’Environnement dans ses attributions et qu’aussi longtemps qu’une telle autorisation ne serait pas délivrée aucun arbre ne serait abattu.
Elle réfute encore l’affirmation suivant laquelle l’absence de prise en considération des critères écologiques n’aurait pas pu être invoquée dans le cadre d’un recours dirigé contre le PAG en donnant à considérer que si les parties requérantes avaient estimé que l’urbanisation des parcelles était contraire à des considérations environnementales en particulier, elles auraient pu déposer une réclamation auprès du ministère de l’Intérieur et, le cas échéant, introduire un recours contentieux contre le PAG. Comme elles n’auraient protesté contre l’urbanisation des parcelles litigieuses ni à un stade précontentieux ni à un stade contentieux, elles seraient aujourd’hui forcloses à remettre en cause le principe-même de l’urbanisation de celles-ci. Etant donné que la question du nombre d’unités de logement serait issue directement et exclusivement de la densité de logement renseignée dans la partie graphique du PAG et que le PAP NQ, en tant qu’instrument d’exécution du PAG devrait respecter non seulement le schéma directeur mais surtout les coefficients prévus par ladite partie graphique, ce serait encore en vain que les parties requérantes justifieraient leur intérêt à agir seulement au stade de l’adoption et de l’approbation du PAP NQ litigieux en affirmant que celui-ci aurait tout aussi bien pu prévoir la construction de seulement deux ou trois maisons au lieu des seize unités autorisées.
Analyse du tribunal Le tribunal rappelle que concernant la question de l’intérêt à agir en matière de PAG, il ressort d’une jurisprudence constante des juridictions administratives3 que le recours introduit devant le juge administratif contre un projet d’aménagement général communal n’est recevable qu’à condition de l’épuisement de la procédure non contentieuse de réclamation, entraînant qu’en particulier l’omission d’emprunter la voie de la réclamation à adresser au gouvernement à l’encontre de la délibération portant adoption d’un projet entraîne l’irrecevabilité omisso medio du recours devant le juge administratif. Il ressort de cette même jurisprudence qu’en contrepartie, peu importe que cette réclamation ait été déclarée irrecevable ou non fondée par le ministre, le réclamant en question dispose d’un intérêt à voir vérifier la légalité de la décision ministérielle prise à son encontre et, plus loin, de la délibération communale ainsi approuvée, de sorte que son recours en annulation est recevable sous l’aspect de l’intérêt à agir au-delà de toutes autres considérations fussent-elles du domaine politique.
3 Cour adm., 17 avril 2008, n° 23846C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 416 (1er volet) et les autres références y citées, ainsi que trib. adm., 24 mars 2004, n° 16556 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 127 (1er volet) et les autres références y citées.
Dès lors, le fait même pour le ministre d’avoir statué sur une réclamation en la déclarant recevable mais en l’écartant au fond, suffit pour fonder l’intérêt à agir dudit réclamant. Celui-
ci doit pouvoir faire contrôler la légalité de la décision ministérielle prise à son égard, à l’aboutissement de la procédure non contentieuse d’adoption sinon de modification du PAG dont s’agit sous peine de ne pas disposer d’un recours effectif en la matière. Dès lors, la simple qualité de réclamant débouté suffit en la matière pour le demandeur, pour fonder son intérêt à agir au contentieux4.
Cette même jurisprudence constante en matière de PAG a été retenue en matière de PAP5.
En effet, dans un arrêt du 20 juin 20196, inscrit sous le numéro 42280C du rôle, la Cour administrative a retenu qu’« En matière de PAP, la procédure d’aplanissement des difficultés a été simplifiée par la loi du 28 juillet 2011, essentiellement pour des raisons de rapidité et de simplification administrative, de sorte à ne plus comporter qu’une objection devant le conseil communal sans passage par une réclamation devant le ministre de l’Intérieur. Même en présence de cette procédure d’aplanissement des difficultés simplifiée, il y a lieu de maintenir le lien systémique entre celle-ci et l’appréciation de l’intérêt à agir au niveau contentieux.
Ainsi, il faut et il suffit que l’administré ait parcouru toute la procédure d’aplanissement des difficultés devant le conseil communal pour qu’au niveau contentieux un intérêt à agir suffisant lui soit reconnu de ce seul fait, ses doléances n’ayant, par hypothèse, pas été entièrement accueillies au niveau précontentieux. ».
En l’espèce, il est constant qu’à travers quatre courriers portant respectivement les dates des 18, 20 et 25 janvier 2022, les parties requérantes ont adressé au collège échevinal leurs observations et objections « relatives au projet de Plan d’Aménagement Particulier (PAP) « … » sis dans la section … de Mersch » en vue de convaincre les autorités communales à « renoncer à une urbanisation du terrain concerné par le PAP « … » » et « au contraire de tout faire pour protéger une zone naturelle si précieuse pour Mersch en ligne avec les objectifs de la loi du 19 juillet 2004 » et qu’en date du 28 février 2022, le conseil communal a adopté le projet de PAP NQ litigieux, tout en déclarant recevables en la forme mais non fondées les objections des parties requérantes, le conseil communal n’ayant, en effet, adopté le projet de PAP NQ que partiellement en faisant uniquement droit aux observations ayant visé à voir « imposer la réalisation d’une partie des toitures des constructions destinées au séjour prolongé en toiture verte et la diminution des surfaces scellées », respectivement à voir « prescrire la réalisation d’un emplacement de stationnement par unité d’habitation », tout en décidant plus particulièrement que « les objections concernant le volet environnemental invoquées […] [seraient] traitées dans le cadre des procédures d’autorisations environnementales respectivement au niveau de la convention et du projet d’exécution et dépasse[raient], à ce stade, le cadre réglementaire du p.a.p. et les compétences de la commune ».
Eu égard aux considérations qui précèdent et plus particulièrement aux enseignements tirés de la jurisprudence de la Cour administrative, les parties requérantes doivent être 4 En ce sens : Cour adm., 19 janvier 2012, n° 28915C du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu ; voir aussi :
Trib. adm., 24 mars 2004, n° 16556 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 413 du rôle et les autres références y citées.
5 Trib. adm., 1er août 2018, n° 37781 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 128 et les autres références y citées.
6 Cour adm., 20 juin 2019, n° 42280C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 809.
considérées comme justifiant en l’espèce d’un intérêt à agir suffisant par le seul fait que leurs objections dirigées contre le projet de PAP NQ litigieux ont été rejetées par le conseil communal.
Il s’ensuit que l’ensemble des arguments des parties défenderesses et tierce-intéressée suivant lesquelles les parties requérantes ne justifieraient pas d’un intérêt né, actuel et direct à agir, en ce qu’elles ne démontreraient plus particulièrement pas en quoi une annulation des décisions entreprises viendrait améliorer leur situation de droit ou de fait, qu’elles contesteraient en réalité le caractère urbanisable du site litigieux qui résulterait toutefois du PAG refondu et non pas du PAP NQ, ou encore qu’elles s’érigeraient en réalité en défenseurs de l’intérêt général, sont à rejeter pour défaut de pertinence, le seul fait d’avoir introduit des objections à l’encontre du projet de PAP NQ litigieux étant suffisant pour justifier l’intérêt à agir dans leur chef.
Le moyen d’irrecevabilité afférent est dès lors à rejeter, étant toutefois relevé que si les considérations avancées, à cet égard, par les parties défenderesses et tierce-intéressée ne constituent certes pas des obstacles à la recevabilité du recours dirigé contre les décisions déférées en termes d’intérêt à agir, elles sont néanmoins, pour certaines, susceptibles d’entrer en ligne de compte dans le cadre du contrôle au niveau de l’examen du fond du dossier.
3. Quant à la recevabilité du recours quant à la forme et quant au délai En l’absence d’autres moyens d’irrecevabilité, le tribunal est amené à conclure que le recours subsidiaire en annulation en ce qu’il est dirigé contre la décision d’adoption du projet de PAP NQ du 8 février 2022 et contre la décision ministérielle d’approbation de celle-ci du 15 juin 2022 est recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.
IV. Quant au fond A l’appui de leur recours et en fait, les parties requérantes expliquent que les parcelles concernées par le PAP NQ litigieux seraient classées en majeure partie en zone d’habitation [HAB-1], ci-après désignée par la « zone [HAB-1] », mais soumises à une « servitude CEF-3 (zone de servitude « urbanisation - habitats espèces protégées) » et ce, notamment en raison de la présence de différentes espèces de chiroptères hautement protégées.
Ainsi, l’ensemble de ces parcelles formerait non seulement un grand espace vert au sein de l’agglomération de Mersch, mais constituerait aussi un habitat, des zones de chasse, des corridors de survols et des zones de reproduction pour les chiroptères. Elles renvoient, à cet égard, aux conclusions contenues dans la Strategische Umweltprüfung (« SUP ») réalisée dans le cadre de la refonte du PAG.
Elles continuent en expliquant que dans le cadre de la viabilisation du site en cause, la société “A”, initiateur du projet de PAP NQ litigieux, aurait été autorisée à effectuer des mesures d’atténuation anticipées aux termes de l’article 27 de la loi modifiée du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ci-après désignée par « la loi du 18 juillet 2018 », et que les mesures en question seraient réalisées sur un site se trouvant à quelques 700 mètres de celui du PAP NQ litigieux sur lequel ne serait, par contre, prévue aucune mesure d’atténuation.
Elles insistent, à cet égard, sur le fait que le site du PAP NQ en cause serait essentiel pour les chiroptères y présents en renvoyant à nouveau à la SUP et plus particulièrement aux réserves émises par le bureau « ”C” » dans le cadre de celle-ci. Elles énumèrent par ailleurs les différentes espèces qui auraient été répertoriées dans la « … » suivant le « rapport “D” ».
En droit, les parties requérantes invoquent une violation, par les décisions déférées, de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004. Dans leur mémoire en réplique, elles concluent encore à l’annulation des décisions déférées « pour défaut de communication des réclamations au ministère de l’Intérieur ».
Il convient à cet égard de relever que le tribunal n’est pas lié par l’ordre des moyens dans lequel ils lui sont soumis mais qu’il détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant.
1. Quant au moyen d’annulation tiré du prétendu défaut de communication de toutes les réclamations au ministère de l’Intérieur Arguments des parties A l’appui de ce moyen, les parties requérantes font valoir qu’à la suite de la communication du dossier administratif par la partie étatique, il serait apparu que les « réclamations » contre le projet de PAP NQ introduites auprès de la commune conformément à l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004 n’auraient pas été transmises au ministère de l’Intérieur et à la cellule d’évaluation de celui-ci. Comme la décision ministérielle litigieuse n’aurait dès lors pas été prise en connaissance de l’ensemble des réclamations, elle serait à annuler pour vice de forme, les parties requérantes précisant que ce vice affecterait nécessairement leurs droits en ce qu’elles auraient subi un préjudice. Il ne pourrait, en effet, pas être exclu que le ministre de l’Intérieur aurait pris une décision différente si l’ensemble des réclamations lui avait été transmises.
Les parties défenderesses et tierce-intéressée concluent au rejet de ce moyen pour ne pas être fondé.
Analyse du tribunal Le tribunal se doit de constater qu’outre le fait que l’affirmation suivant laquelle l’intégralité des objections présentées devant le collège échevinal contre le projet de PAP NQ n’auraient pas été transmises au ministère de l’Intérieur reste à l’état de pure allégation, la partie étatique explique, de son côté, de manière plausible que, pour ce qui est plus particulièrement des objections des parties requérantes sub 2) à 4), celles-ci se trouvaient bien entre les mains des services du ministère de l’Intérieur, mais que c’est à la suite d’un simple oubli lors de la reproduction du dossier administratif par lesdits services en vue du dépôt de celui-ci dans le cadre de la présente procédure contentieuse qu’elles n’ont pas été versées dans un premier stade dans le dossier administratif déposé à l’appui du mémoire en réponse étatique. Ces explications se trouvent d’ailleurs corroborées par le fait que la partie étatique a complété le dossier administratif en déposant ensemble avec son mémoire en duplique les objections manquantes qui étaient dès lors bien à la disposition du ministère de l’Intérieur.
Ensuite et pour être tout à fait complet, il y a lieu de constater qu’il ne se dégage d’aucune disposition légale ni plus particulièrement de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004 que les objections dirigées contre le projet de PAP et portées devant le collège échevinal doivent être transmises à la cellule d’évaluation du ministère de l’Intérieur ou au ministre de l’Intérieur afin de permettre à celui-ci de prendre sa décision d’approbation en vertu des alinéas 12 et 13 de l’article 30, étant relevé que conformément à l’article 30, alinéa 13 de la même loi, la compétence du ministre de l’Intérieur est limitée en matière de PAP à la vérification de « la conformité et [de] la compatibilité du projet de plan d’aménagement particulier avec les dispositions de la [loi du 19 juillet 2004], et notamment les objectifs énoncés à l’article 2, avec ses règlements d’exécution ainsi qu’avec les plans rendus obligatoires en vertu de la loi précitée du 17 avril 2018 et avec les objectifs énoncés à l’article 1er de la prédite loi » et que la loi ne prévoit pas de possibilité d’introduire devant lui une réclamation en cas de rejet des objections portées devant le collège échevinal.
Le moyen afférent est dès lors rejeté.
Pour les mêmes raisons, l’affirmation des parties requérantes suivant laquelle le dossier administratif serait incomplet faute de contenir l’ensemble des 29 objections présentées au collège échevinal est à rejeter pour être dénuée de fondement et il n’y a, en conséquence, pas non plus lieu de faire droit à leur demande à voir ordonner à la partie étatique « de produire au dossier administratif l’ensemble des réclamations et observations écrites transmises par la commune de Mersch dans le cadre de la procédure d’adoption du PAP litigieux ».
2. Quant au moyen tenant à une violation de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004 Arguments des parties En s’emparant des points a) et e) de l’article 2, prévisé, ainsi que de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, les parties requérantes font valoir qu’il se dégagerait de ces dispositions non seulement que les communes devraient, dans l’ensemble de leurs actes, garantir le respect des objectifs écologiques et assurer une protection élevée de l’environnement naturel, de sorte que ces obligations seraient également à respecter par les autorités communales dans le cadre de l’élaboration d’un PAP, mais encore que, par ailleurs, il appartiendrait également au ministre de l’Intérieur de contrôler par la suite le respect de ces obligations.
Or, en l’espèce, ces obligations n’auraient pas été respectées puisque le conseil communal aurait, au contraire, estimé que « les objections concernant le volet environnemental invoquées dans le présent p.a.p. sont traitées dans le cadre des procédures d’autorisation environnementales respectivement au niveau de la convention et du projet d’exécution et dépassent, à ce stade, le cadre réglementaire du p.a.p. et les compétences de la commune ».
Si elles se disent d’accord avec l’affirmation suivant laquelle une partie de ces questions environnementales seraient effectivement traitées dans le cadre des autorisations à donner en vertu de la loi du 18 juillet 2018 par le ministre ayant l’Environnement dans ses attributions, elles sont toutefois d’avis qu’il n’en resterait pas moins que les autorités communales ne pourraient pas adopter un PAP qui ne prendrait aucunement en considération les questions environnementales de premier ordre, dont celle de l’impact de celui-ci sur des habitats et espèces particulièrement protégés. Or, tel aurait été le cas en l’espèce puisque dans le cadre de l’adoption du projet de PAP NQ litigieux, le conseil communal n’aurait pas analysé s’il n’était pas dans l’intérêt des objectifs environnementaux de sauvegarder au moins une partie de l’habitat naturel des chiroptères sur le site du PAP. Il se dégagerait, au contraire, du PAP NQ en cause que « l’ensemble des structures vertes constituant à tout le moins des habitats de chasse et des aires de reproductions pour les chiroptères ser[aie]nt détruites » alors même qu’ils seraient particulièrement protégés aux vœux des articles 17 et 19 de la loi du 18 juillet 2018.
Au vu de ces considérations, le PAP NQ, tel que voté, ne serait pas conforme aux objectifs environnementaux.
Les parties requérantes se réfèrent ensuite à un autre recours contentieux introduit par elles devant le tribunal administratif et visant « la décision ministérielle validant les mesures d’atténuation anticipative ». Elles donnent, dans ce contexte, à considérer que comme dans le cadre de ce litige la société “A” aurait invoqué l’absence d’intérêt à agir dans leur chef au motif que les mesures en question seraient à exécuter sur un site dont elles ne seraient pas les voisins directs, alors, et « [à] suivre ce raisonnement, et pour le cas où le PAP ne devait pas contenir des considérations d’ordre environnemental et être conforme à ce titre avec les objectifs énoncés à l’article 2 de la loi sur l’aménagement communal », elles n’auraient aucun recours juridictionnel leur permettant de faire assurer le respect des objectifs écologiques et le respect d’un niveau élevé de protection de l’environnement naturel aux vœux de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004. Dans ce même ordre d’idée, il faudrait également prendre en considération qu’elles estimeraient que les mesures d’atténuation anticipative telles que visées à l’article 27 de la loi du 18 juillet 2018 devraient être réalisées sur le site du PAP NQ et non pas sur un autre site se trouvant à quelques 700 mètres du PAP en cause. Pour ces raisons, le PAP NQ devrait, à leur avis, nécessairement prendre en compte l’existence de ces mesures et permettre leur réalisation « sur le « site » », ce qui ne serait clairement pas le cas en l’espèce puisque l’ensemble de l’habitat naturel des chiroptères serait tout simplement détruit sans la réalisation d’une telle mesure d’atténuation. En tout état de cause, les parties requérantes estiment que si dans le cadre de leur recours inscrit sous le numéro 47240 du rôle, le tribunal administratif devait estimer que les mesures d’atténuation anticipative étaient à réaliser sur le « site » même du PAP, et non pas sur un site se situant à quelques 700 mètres et ne présentant pas de lien avec le « « site » du PAP », le recours actuellement sous analyse devrait lui aussi être déclaré fondé puisque, dans ce cas, le PAP, tel qu’adopté et approuvé, ne permettrait clairement pas la réalisation de mesures d’atténuation anticipative.
Dans leur mémoire en réplique, les parties requérantes renvoient en substance à leurs développements antérieurs.
Elles insistent pour le surplus sur le fait que si effectivement « le principe d’une constructibilité » des parcelles en cause avait été retenu dans le cadre du PAG, il n’en resterait pas moins que « cette constructibilité » devrait encore « se traduire dans les faits dans la définition, par le biais d’un PAP, des constructions permettant le maintien des fonctions écologiques du site », ce qui serait justement contesté.
Elles soulignent, dans ce contexte, ne pas chercher dans l’absolu l’annulation du caractère constructible des parcelles concernées, tel que résultant du PAG, mais l’annulation du PAP à défaut pour celui-ci de respecter les objectifs environnementaux, dont le maintien du caractère écologique du site, le maintien des arbres uniques dans le centre de Mersch et le maintien de l’ensemble des structures qui seraient, suivant les conclusions des experts en la matière, « tellement importantes pour les chiroptères ».
Elles estiment que le PAP NQ litigieux serait, en tout état de cause, à qualifier d’« antinomique » pour prévoir la mise en place de mesures d’atténuation sur un tout autre site, éloigné du site protégé et impliquant ainsi que le site du PAP litigieux n’aurait plus de valeur écologique pour les chiroptères protégés, contrairement à ce qui aurait été le cas en présence d’un projet ne prévoyant que quelques habitations et le maintien de la structure verte existante.
Ensuite, tout en concédant que chaque acteur dans la procédure d’élaboration d’un PAP a ses propres compétences, les parties requérantes donnent toutefois à considérer que les autorités communales auraient pu et dû, sur base de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, « décider de la mise en place d’une urbanisation différente de la zone soumise à PAP, et garantir ainsi par cette urbanisation un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et des objectifs écologiques », ce qu’elles seraient restées en défaut de faire.
En conclusion, elles maintiennent que le PAP NQ litigieux aurait pour conséquence l’annihilation du site naturel se trouvant sur les parcelles en cause, tout en insistant sur le fait que « cette destruction totale » serait la conséquence directe des décisions prises par les autorités communales de Mersch dans le cadre du PAP NQ en cause en ce que celui-ci autoriserait un nombre de logements tel que « le maintien en permanence de la continuité de la fonctionnalité écologique du site ne [serait] plus garanti ». Faute pour le projet litigieux de permettre en permanence « une telle continuité dans la fonctionnalité écologique » du site du PAP NQ, les décisions déférées seraient à annuler pour ne pas avoir pris en considération les objectifs environnementaux énoncés à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004.
Les parties défenderesses et tierce-intéressée concluent, quant à elles, au rejet du moyen sous analyse pris en ses différentes branches.
Analyse du tribunal Le tribunal relève, à titre liminaire, que les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, respectivement lorsqu’elles adoptent un PAP, doivent être mues par des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général et, dans ce contexte, lesdites autorités doivent veiller tant à la conservation de l’esthétique urbaine qu’au développement rationnel des agglomérations7.
Dans ce contexte, il y a lieu de préciser que saisi d’un recours en annulation, le juge administratif est appelé à vérifier, d’un côté, si, au niveau de la décision administrative querellée, les éléments de droit pertinents ont été appliqués et, d’un autre côté, si la matérialité des faits sur lesquels l’autorité de décision s’est basée est établie. Au niveau de l’application du droit aux éléments de fait, le juge de l’annulation vérifie encore s’il n’en est résulté aucune erreur d’appréciation se résolvant en dépassement de la marge d’appréciation de l’auteur de la décision querellée. Le contrôle de légalité à exercer par le juge de l’annulation n’est pas incompatible avec le pouvoir d’appréciation de l’auteur de la décision qui dispose d’une marge d’appréciation. Ce n’est que si cette marge a été dépassée que la décision prise encourt l’annulation pour erreur d’appréciation. Ce dépassement peut notamment consister dans une disproportion dans l’application de la règle de droit aux éléments de fait. Le contrôle de légalité du juge de l’annulation s’analyse alors en contrôle de proportionnalité8.
7 Trib. adm., 20 octobre 2004, n° 17604 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 217 et les autres références y citées.
8 Cour adm., 9 novembre 2010, n° 26886C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en annulation, n° 40 et les autres références y citées.
S’il est certes vrai que le choix d’entériner ou de ne pas entériner la modification d’un plan d’aménagement relève d’une dimension politique et échappe comme tel au contrôle des juridictions de l’ordre administratif saisies d’un recours en annulation, il n’en demeure pas moins que tout acte administratif doit reposer sur un motif dont le juge administratif vérifie tant l’existence que la légalité. Cette exigence découle du fait que le juge administratif a l’obligation de vérifier si les autorités administratives compétentes n’ont pas violé la loi, commis un excès de pouvoir ou un détournement de pouvoir et cette obligation de motivation existe également pour les actes à caractère réglementaire qui, quoique discrétionnaires, doivent être pris dans l’intérêt général, de sorte qu’il importe que les autorités administratives compétentes fassent connaître le ou les motifs qui les ont guidées dans leur décision, le contrôle exercé par le juge de l’annulation ne portant dès lors pas sur l’opportunité, mais sur la réalité et la légalité des motifs avancés9.
Quant aux objectifs devant guider les autorités communales lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, respectivement lorsqu’elles adoptent un PAP, ainsi que l’autorité ministérielle, dans le cadre de l’exercice de son contrôle tutélaire, il y a lieu de se référer à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, aux termes duquel « Les communes ont pour mission de garantir le respect de l’intérêt général en assurant à la population de la commune des conditions de vie optimales par une mise en valeur harmonieuse et un développement durable de toutes les parties du territoire communal par:
(a) une utilisation rationnelle du sol et de l’espace tant urbain que rural en garantissant la complémentarité entre les objectifs économiques, écologiques et sociaux ;
(b) un développement harmonieux des structures urbaines et rurales, y compris les réseaux de communication et d’approvisionnement compte tenu des spécificités respectives de ces structures, et en exécution des objectifs de l’aménagement général du territoire ;
(c) une utilisation rationnelle de l’énergie, des économies d’énergie et une utilisation des énergies renouvelables ;
(d) le développement, dans le cadre des structures urbaines et rurales, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie de la population et la qualité urbanistique des localités ;
(e) le respect du patrimoine culturel et un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage lors de la poursuite des objectifs définis ci-dessus ;
(f) la garantie de la sécurité, la salubrité et l’hygiène publiques. ».
En l’espèce, il est constant en cause que les parcelles formant l’assiette du PAP NQ litigieux ont été classées dans le cadre de la refonte du PAG en zone [HAB-1] et superposées d’une zone soumise à un PAP NQ laquelle a elle-même été soumise au schéma directeur « … « … » à Mersch ». Il se dégage encore de la partie graphique du PAG que le site en cause fait l’objet d’une mention « CEF m « espèces protégées » » qui est définie à l’article 24 de la partie écrite du PAG, intitulé « Zones ou espaces repris à titre indicatifs », comme représentant « les zones dont une urbanisation résulte, selon toute probabilité, en une infraction aux dispositions de l’article 20 de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles » et dans lesquelles « des mesures « CEF – m » adaptées aux besoins des espèces concernées doivent être réalisées » afin d’éviter de telles infractions.
9 Trib. adm., 23 mars 2005, n° 18463 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Actes réglementaires (Recours contre les), n° 35 et les autres références y citées.
Il se dégage ensuite de la partie écrite du PAP litigieux que celui-ci prévoit la création de 12 maisons unifamiliales, ainsi que d’une résidence à 4 unités d’habitation.
Les parties requérantes soutiennent, en substance, que le PAP NQ litigieux aurait été adopté, respectivement approuvé en violation de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, faute de prise en considération de « questions environnementales de premier ordre » qui se poseraient, tout en faisant valoir que les constructions y prévues ne permettraient pas le « maintien des fonctions écologiques du site ». Si elles citent à l’appui de leur moyen tenant à une violation de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, les points a) et e) de celui-ci, le tribunal se doit de constater que, tel que relevé à bon droit par la société “A”, leur argumentaire table sur le seul point e) dudit article imposant aux communes, dans le cadre de l’adoption d’un PAP, de veiller au respect d’« un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage » et non pas sur le point a).
Il convient, dans ce contexte, tout d’abord de rappeler les missions et compétences respectives des PAG et PAP, ainsi que la relation entre ces deux instruments de planification urbanistique.
La définition et l’objectif d’un PAG sont déterminés aux articles 5 et 6 de la loi du 19 juillet 2004. L’article 5 dispose, ainsi, que « Le plan d’aménagement général est un ensemble de prescriptions graphiques et écrites à caractère réglementaire qui se complètent réciproquement et qui couvrent l’ensemble du territoire communal qu’elles divisent en diverses zones dont elles arrêtent l’utilisation du sol […] ». L’article 6 continue en disposant que : « Le plan d’aménagement général a pour objectif la répartition et l’implantation judicieuse des activités humaines dans les diverses zones qu’il arrête aux fins de garantir le développement durable de la commune sur base des objectifs définis à l’article 2 de la loi. ».
La fonction du PAG se résume donc à diviser le territoire communal en différentes zones et à en arrêter l’affectation.
Quant à l’objectif du PAP, il ressort de l’article 25 de la loi du 19 juillet 2004 que : « Le plan d’aménagement particulier précise et exécute les dispositions réglementaires du plan d’aménagement général concernant une zone ou partie de zone. […] », l’article 29 de la même loi, relatif au contenu des PAP « quartier existant » et « nouveau quartier », précisant encore que « (1) Le plan d’aménagement particulier « quartier existant » fixe les prescriptions urbanistiques servant à garantir l’intégration des constructions et aménagements dans les zones urbanisées.
[…] (2) Le plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » est orienté par le schéma directeur tel que défini à l’article 7 de la présente loi et fixe les règles d’urbanisme et de lotissement de terrains. […] ».
Le PAP se définit donc comme instrument réglementaire d’exécution et de précision du PAG dont la fonction est de fixer les prescriptions urbanistiques applicables aux zones déterminées par le PAG.
Le PAG constitue le cadre général procédant à une division du territoire communal en zones, dont il arrête les affectations, tandis que le PAP précise et exécute ensuite le PAG en déterminant concrètement les règles urbanistiques applicables dans les différentes zones et parties de zones dudit territoire.
Un premier constat s’impose, à savoir que dans la mesure où le classement des parcelles formant l’assiette du PAP litigieux en zone destinée à être urbanisée, en l’occurrence en zone [HAB-1] superposée d’une zone soumise à un PAP NQ, a été opéré au niveau du PAG, tel qu’il a été adopté par le conseil communal et approuvé par le ministre de l’Intérieur, les parties requérantes ne sauraient plus, à travers le recours sous analyse remettre en cause le principe même du caractère constructible du site en cause, tel qu’il est ancré de manière définitive dans le PAG actuellement en vigueur, sous réserve de la mise en place de certaines mesures de protection de l’environnement naturel.
Le reproche non autrement sous-tendu des parties requérantes suivant lequel la commune « aurait pu, et dû, sur la base de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, décider de la mise en place d’une urbanisation différente de la zone soumise à PAP » est ainsi d’ores et déjà à rejeter pour manquer de fondement, puisque, tel que relevé ci-avant, le PAP ne vient que préciser et exécuter le PAG dans le cadre duquel les parcelles formant l’assiette du PAP ont été classées en zone [HAB-1], donc dans une zone destinée principalement, mais pas exclusivement, aux maisons d’habitation unifamiliales isolées, jumelées ou groupées en bande, étant encore relevé que dans la mesure où le degré d’utilisation du sol, exprimé par des coefficients de densité, y inclus la densité de logement, est fixé dans le PAG, la question du nombre de logements pouvant être créés dans la zone en question est directement et exclusivement issue de la densité de logement renseignée dans la partie graphique du PAG.
En ce qui concerne ensuite les reproches suivants lesquels le PAP NQ aurait été adopté, respectivement approuvé en violation des objectifs prévus à l’article 2, point e) de la loi du 19 juillet 2004 en ce que « les questions environnementales de premier ordre, dont la question de l’impact du PAP sur des habitats et espèces particulièrement protégés » ne seraient pas prises en considération par le PAP litigieux, il convient de relever que l’argumentaire des parties requérantes repose en réalité sur la prémisse que l’urbanisation, telle que prévue sur les parcelles formant l’assiette du PAP NQ, se heurterait au respect d’un « niveau élevé de protection de l’environnement naturel », tel qu’exigé par l’article 2, point e) de la loi du 19 juillet 2004, en ce qu’elle impliquerait la destruction des habitats d’espèces, constitués d’un site de chasse, voire de reproduction des chauves-souris. Or, il s’agit-là d’un argumentaire qui relève non pas d’une question de légalité du PAP NQ qui doit s’apprécier plus particulièrement par rapport à sa conformité au plan ou projet d’aménagement général, ainsi que par rapport à sa conformité et compatibilité avec les dispositions de la loi du 19 juillet 2004, et notamment les objectifs énoncés à l’article 2 de celle-ci, mais d’une question d’exécution matérielle de celui-ci, laquelle est, en effet, seule susceptible d’avoir une incidence concrète sur l’environnement. En tant que telle, il s’agit d’une question qui relève de la compétence du ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, ci-après désigné par « le ministre de l’Environnement », dont l’intervention ne s’inscrit toutefois pas dans le cadre du processus d’adoption d’un PAP, tel que découlant de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, mais dans son champ de compétence propre, tel qu’institué par la loi du 18 juillet 2018 et plus particulièrement à l’article 27 de celle-ci aux termes duquel : « Une autorisation du ministre est requise lorsque des projets, plans ou activités sont susceptibles d’avoir une incidence significative sur des espèces protégées particulièrement ou sur leurs sites de reproduction ou leurs aires de repos. Le ministre peut prescrire dans cette autorisation toutes mesures d’atténuation d’incidence visant à minimiser ou même à annuler cette incidence significative. Ces mesures d’atténuation anticipent les menaces et les risques de l’incidence significative sur un site, une aire ou une partie d’un site ou d’une aire, afin de maintenir en permanence la continuité de la fonctionnalité écologique du site, de l’aire ou d’une partie du site ou de l’aire pour l’espèce concernée, en tenant compte de l’état de conservation de cette espèce. […] ». Il y a, à cet égard, lieu de constater que c’est justement en vertu de l’article 27 de la loi du 18 juillet 2018 que ledit ministre a, à travers son autorisation délivrée le 17 août 2021, clairement imposé préalablement et de manière anticipative diverses mesures et conditions contraignantes destinées à encadrer strictement l’urbanisation du site litigieux et à en assurer en permanence la fonctionnalité écologique, en décidant la mise en place de mesures d’atténuation anticipées et de mesures compensatoires sur une autre parcelle dans la commune de Mersch, le tout avant de délivrer, le cas échéant, à un stade ultérieur une autorisation pour procéder à la destruction de biotopes et d’habitats protégés. Ce n’est donc pas le PAP NQ litigieux qui prévoit la mise en place critiquée de mesures d’atténuation sur un autre site mais l’autorisation délivrée par le ministre de l’Environnement qui est une autorisation individuelle et indépendante de la procédure d’adoption d’un PAP.
Pour être tout à fait complet, le tribunal tient encore à relever que les reproches suivant lesquels il n’aurait pas été suffisamment tenu compte, lors de la prise des décisions litigieuses, des contraintes d’ordre environnemental qui s’opposeraient au respect d’un « niveau élevé de protection de l’environnement naturel », tel qu’exigé par l’article 2, point e) de la loi du 19 juillet 2004, sont de toute façon à rejeter pour rester à l’état de pure allégation, voire pour être contredits par les éléments de la cause.
Ainsi, il se dégage du dossier que la société anonyme “E” SA a été mandatée par la société de promotion immobilière “F” pour la réalisation, sur le site du PAP NQ « … », d’une étude chiroptérologique relative à la diversité d’espèces de chauves-souris dans le cadre de laquelle ont été réalisées « 2 campagnes d’inventaire complète des chiroptères sur le site », à savoir « [u]ne première campagne en 2016 avec 7 relevés ponctuels par points d’écoute (sur le site et aux alentours), ainsi qu’un relevé en continu au niveau du site pendant 5 mois. », le tout « dans le but d’établir un screening complet du site », et « [u]ne seconde campagne en 2019 avec un relevé en continu au niveau du site pendant 2 mois en période estivale et le transit automnal, ainsi qu’une recherche active de gîtes au niveau du site et ses abords », le tout « dans le cadre de la procédure du PAP ».
L’analyse de l’impact de l’urbanisation du site en cause, tel que se dégageant du document intitulé « Expertise environnementale sur le PAP ˈ…ˈà Mersch – Analyse chiroptérologique du site », a, dans ce contexte, révélé en ce qui concerne plus particulièrement la question d’un « [i]mpact potentiel sur les gîtes de chauves-souris » que « le site du PAP ˈ…ˈ n’abrite aucun gîte de chauves-souris », suite à quoi le bureau d’expertise est venu à la conclusion qu’il était « donc possible d’urbaniser cette zone de chasse pour les chiroptères sans opérer de destruction intentionnelle d’individus, via l’application de mesures d’accompagnement (période des travaux, phasage, plantations, …) ». Si ledit rapport a confirmé que le site en question constituait un habitat de chasse essentiel pour certaines espèces de chauves-souris, il s’en dégage néanmoins également qu’il a été considéré que « cette zone de chasse peut demeurer partiellement exploitable pour autant que des mesures d’accompagnement soient respectées » et qu’à cette fin, il était « nécessaire de mettre en place une mesure compensatoire comprenant des restitutions de biotopes de valeur écologique au moins équivalente aux biotopes protégés réduits, détruits ou détériorés. ».
C’est sur base de ces considérations que le bureau d’expertise a préconisé des mesures d’accompagnement à mettre en œuvre en cas d’urbanisation du site du PAP NQ litigieux avec la précision que « [c]es propositions d’aménagements écologiques de “E” ont été intégrées par le promoteur pour le projet d’aménagement PAP ˈ…ˈ, comme cela peut être mis en évidence sur la représentation graphique du PAP », reprise dans le document en question. Il n’est, à cet égard, pas contesté que c’est justement pour tenir compte des constats et recommandations formulés par le bureau “E”, que le PAP NQ prévoit notamment la mise en place de zones de végétation de chaque côté du projet immobilier devant permettre le passage des chauves-souris le long des haies vives jusqu’à la mare écologique située au sud du lotissement, le tout dans le but de maintenir et de préserver deux corridors écologiques distincts pouvant être empruntés par les chiroptères.
Le tribunal se doit, à cet égard, de rejoindre la partie étatique dans son constat suivant lequel les parties requérantes restent, en tout état de cause, en défaut d’apporter le moindre élément concret et probant de nature à remettre en cause les constatations effectuées par des professionnels en la matière sur base d’études de terrain approfondies sur le site du PAP NQ et qui les ont amenés à conclure que la présence de zones de chasse pour les chiroptères recensées sur le site en question ne constituait pas un obstacle à son urbanisation, sous réserve que des mesures d’accompagnement adéquates soient mises en œuvre préalablement à la réalisation du PAP.
Le tribunal relève ensuite que c’est justement en tenant compte du constat suivant lequel le projet avait une incidence significative sur un habitat de chasse essentiel de certaines espèces protégées, tel que découlant dudit rapport d’expertise, ainsi que des conclusions se dégageant du rapport élaboré par le même bureau “E”, finalisé le 10 mars 2021, et le plan « … », élaboré par le maître d’ouvrage, à savoir le bureau d’architectes “B”, que le ministre de l’Environnement a délivré à la société “A” le 17 août 2021, donc bien avant la prise des décisions déférées, en application de l’article 27 de la loi du 18 juillet 2018 une autorisation en vue de lui permettre de réaliser sur un autre site des mesures d’atténuation et de compensation visant « les espèces protégées particulièrement, précisément la Pipistrelle commune, la Sérotine commune, la Noctule commune, la Noctule de Leisler », ladite autorisation ayant encore expressément précisé qu’elle n’habilitait pas le maître d’ouvrage « à procéder à la destruction des biotopes et habitats protégés sur le site du PAP « … » pour laquelle une nouvelle demande d’autorisation en vertu de l’article 17 [lui devait] être soumise ». En ce qui concerne, dans ce contexte, les développements des parties requérantes en relation avec le recours contentieux, inscrit sous le numéro 47240 du rôle, qu’elles ont introduit auprès du tribunal administratif contre l’autorisation délivrée par le ministre de l’Environnement le 17 août 2021 et visant à critiquer le fait que suivant ladite autorisation, les mesures d’atténuation anticipative, telles que visées à l’article 27 de la loi du 18 juillet 2018, n’aient pas à être réalisées sur le « site du PAP », mais sur un autre site, celles-ci sont à rejeter pour défaut de pertinence dans le cadre du recours sous analyse qui vise la légalité des décisions déférées portant adoption et approbation du PAP NQ litigieux, étant, par ailleurs, relevé, pour être tout à fait complet, que ledit recours a été déclaré irrecevable pour défaut d’intérêt à agir dans leur chef.
Enfin, il se dégage du rapport justificatif à la base du PAP NQ litigieux établi par bureau d’architectes “B” SARL, daté du 15 décembre 2021, tel que finalisé le 9 février 2022 « suite à l’avis n° … de la Cellule d’Evaluation du Ministère de l’Intérieur », lequel fait partie intégrante du projet de PAP NQ adopté par le conseil communal le 28 février 2022, que la circonstance qu’il s’agit d’un site de chasse essentiel pour trois espèces de chiroptères y a clairement été prise en compte, de même que la nécessité de mettre en place antérieurement à la destruction des biotopes présents initialement sur le site litigieux, des mesures compensatoires comprenant des restitutions de biotopes de valeur écologique au moins équivalente aux biotopes protégés, réduits, détruits ou détériorés. Il y est encore précisé que les mesures d’atténuation, telles que proposées, ont été autorisées par le ministre ayant l’Environnement dans ses attributions et qu’il a été convenu que les mesures en question seraient mises en place parallèlement à la procédure PAP afin de les rendre fonctionnelles d’un point de vue écologique au plus vite et en tout état de cause avant l’introduction d’une « demande d’abattage spécifique au site “A” et au chantier du lotissement ».
Pour ce qui est enfin de l’affirmation vague et non autrement sous-tendue des parties requérantes suivant laquelle le PAP NQ ne permettrait pas le maintien « de nombreux et très vieux arbres » qui seraient « uniques dans le centre de Mersch », il y a lieu de relever qu’outre le fait que la présence même de tels arbres reste à l’état de pure allégation, il s’agit également, tel qu’elles l’admettent d’ailleurs elles-mêmes, d’une question d’exécution matérielle du PAP NQ qui, en tant que telle, relève de la compétence du ministre de l’Environnement, seul habilité à autoriser la destruction de tels arbres sur le site en question. Par ailleurs, l’affirmation des parties requérantes quant à l’existence d’arbres qui seraient prétendument « uniques dans le centre de Mersch » est en elle-même contredite par les explications de la partie étatique, appuyées par une orthophoto du site geoportail, dont il se dégage que de nombreuses zones boisées sont d’ores et déjà situées à proximité du site en cause lesquelles ont, par ailleurs, été classées au niveau du PAG en différentes zones non destinées à être urbanisées à l’avenir et dont la fonction écologique est dès lors vouée à être maintenue.
Au vu de toutes les considérations qui précèdent et plus particulièrement du fait que parallèlement au processus d’adoption du PAP litigieux, le ministre ayant l’Environnement dans ses attributions a expressément autorisé, avant la prise des décisions d’adoption et d’approbation du PAP NQ, la mise en place de mesures visant à atténuer les impacts de l’exécution du PAP NQ sur les espèces y répertoriées, le tribunal se doit de retenir que contrairement à ce qu’affirment péremptoirement les parties requérantes, il n’apparaît pas dans quelle mesure les décisions déférées se heurteraient au respect d’un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage tel qu’imposé à l’article 2, point e) de la loi du 19 juillet 2004.
En ce qui concerne encore la demande des parties requérantes tendant à voir condamner l’Etat, ainsi que l’administration communale de Mersch et la société “A” à leur payer solidairement une indemnité de procédure d’un montant de 2.500.- euros sur le fondement de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, celle-ci est à rejeter au vu de l’issue du litige.
Le même sort est à réserver à la demande de la société “A” à voir condamner, sur le fondement de la même base légale, solidairement, sinon in solidum pour telle quote-part qu’il appartiendra au tribunal de fixer, les parties requérantes à lui verser chacune une indemnité de procédure d’un montant de 1.500.- euros, alors qu’il n’appert pas des éléments de la cause en quoi il serait inéquitable de laisser à sa charge les sommes exposées non comprises dans les dépens.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;
se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;
reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;
au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;
rejette la demande des parties requérantes à voir ordonner à la partie étatique « de produire au dossier administratif l’ensemble des réclamations et observations écrites transmises par la commune de Mersch dans le cadre de la procédure d’adoption du PAP litigieux » ;
rejette les demandes tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure telles que formulées par les parties requérantes et la société “A” ;
condamne les parties requérantes aux frais et dépens.
Ainsi jugé par :
Alexandra Castegnaro, vice-président, Annemarie Theis, premier juge, Caroline Weyland, premier juge, et lu à l’audience publique du 16 septembre 2024 par le vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.
s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 16 septembre 2024 Le greffier du tribunal administratif 20