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18/09/2024 | LUXEMBOURG | N°47915,48096

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 18 septembre 2024, 47915,48096


Tribunal administratif Nos 47915 et 48096 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47915+48096 5e chambre Inscrits les 9 septembre et 27 octobre 2022 Audience publique du 18 septembre 2024 Recours formé par la société à responsabilité limitée X, … contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt

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JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 47915 du rôle et déposée au greffe du tribunal administrati

f en date du 9 septembre 2022 par Maître Jean-Luc DASCOTTE, avocat à la Cour, inscrit au tableau...

Tribunal administratif Nos 47915 et 48096 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2024:47915+48096 5e chambre Inscrits les 9 septembre et 27 octobre 2022 Audience publique du 18 septembre 2024 Recours formé par la société à responsabilité limitée X, … contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt

__________________________________________________________________________

JUGEMENT

I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 47915 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 9 septembre 2022 par Maître Jean-Luc DASCOTTE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée X, établie et ayant son siège social à L-…, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil de gérance actuellement en fonctions, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 10 juin 2022, référencée sous le numéro C 30878, rendue sur réclamation, et à « modifier les Bulletins en tenant compte des pertes reportables dépenses déductibles, du contrat de prêt du 10 mai 2011 et de la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012 » ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 14 décembre 2022 ;

II.

Vu la requête inscrite sous le numéro 48096 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 27 octobre 2022 par Maître Jean-Luc DASCOTTE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée X, établie et ayant son siège social à L-…, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil de gérance actuellement en fonctions, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 28 juillet 2022, référencée sous le numéro C 31168, rendue sur recours hiérarchique formel, et à « enjoindre le Bureau d’Imposition afin de conduire le contrôle fiscal qui aboutira à modifier les Bulletins en conformité avec les conclusions de l’arrêt du 16 décembre 2022 de la Cour Administrative d’Appel » ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 26 janvier 2023 ;

Vu le mémoire en réplique de Maître Jean-Luc DASCOTTE déposé au greffe du tribunal administratif en date du 24 février 2023 au nom de sa mandante, préqualifiée ;

1I et II.

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions déférées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Eric PRALONG en sa plaidoirie à l’audience publique du 22 mai 2024, Maître Jean-Luc DASCOTTE s’étant excusé.

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Le 3 novembre 2015, la société à responsabilité limitée X - de sa désignation complète X, ci-après désignée par la « société X », déposa sa déclaration fiscale relative à l’année 2014.

En date du 21 octobre 2016, la société X déposa encore sa déclaration fiscale de l’année 2015 et le 26 février 2018, elle déposa celle pour l’année 2016.

Par trois courriers datés au 5 mars 2019, le bureau d’imposition, Sociétés … de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « bureau d’imposition » informa la société X de ce qu’en application du § 205, alinéa (3) de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, telle que modifiée, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », il envisageait de s’écarter sur différents points des déclarations fiscales des années 2014 à 2016.

Par courriers recommandés du 2 avril 2019, la société X prit position quant aux rectifications ainsi envisagées.

En date du 10 avril 2019, le bureau d’imposition émit :

- les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal pour les années 2014, 2015 et 2016, - le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux mobiliers de l’année d’imposition 2014 avec la mention suivante : « DISTRIBUTION CACHE (OCCULTE) DE BENEFICE ET DE RESERVES A L’ASSOCIE UNIQUE SUIVANT NOTRE LETTRE DU 05/03/2016, EN CONFORMITE AVEC LES DISPOSITIONS DU §205(3) L.G.I. », - le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux mobiliers de l’année d’imposition 2015, - les bulletins d’établissement séparé de la valeur unitaire de la fortune d’exploitation et de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2015, 2016 et 2017, - les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2017 sur le fondement des §§ 100a et 92, alinéa (3) AO avec la mention « […] Mauvaise Imputation de l’IRC min. considéré comme une avance suite à l’imposition non-chronologique », et - les bulletins rectificatifs d’établissement séparé de la valeur unitaire de la fortune d’exploitation et de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2018, tous les deux sur le fondement des §§ 100a et 92, alinéa (3) AO avec la mention « […] Imputation IRC min. fautive avec répercussion sur le calcul de l’IF minimum ».

Par courrier du 7 mai 2019, réceptionné le 10 mai 2019, la société X introduisit une réclamation contre les prédits bulletins d’impôt, à l’exclusion des bulletins de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux mobiliers des années d’imposition 2014 et 2015, auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « directeur », pour contester le « Rejet des frais de voyages et de représentation (2014-2015-2016) », la 2« Requalification des comptes courants et avances en distributions occultes de bénéfices », ainsi que la part d’utilisation privée de la « Voiture … » et du « Véhicule … ».

Par décision du 12 août 2019, référencée sous le numéro C 26376, le directeur, d’une part, déclara irrecevable la réclamation lui ainsi soumise pour autant qu’elle fut dirigée contre le bulletin de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2015, et, d’autre part, rejeta comme non fondée ladite réclamation pour le surplus.

En date du 2 janvier 2020, le bureau d’imposition émit :

- les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année d’imposition 2018 sur le fondement du § 100a AO, et - le bulletin de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2019 sur le fondement du § 100a AO.

Par jugement du 19 mai 2021, inscrit sous les numéros 43728 et 43811 du rôle, le tribunal déclara partiellement fondé le recours contentieux, inscrit sous le numéro 43728 du rôle, introduit par la société X contre la décision directoriale précitée en date du 12 août 2019 et jugea que « c’est à tort que le bureau d’imposition a conclu que le véhicule de marque … a été repris par Monsieur A au terme du contrat de leasing et qu’il l’a prélevé à la valeur d’exploitation de la société à responsabilité limitée X, tout en concluant à une distribution cachée de bénéfices ». Ledit recours fut déclaré non fondé pour le surplus et le dossier fut renvoyé devant le directeur aux fins de transmission au bureau d’imposition compétent pour exécution.

Par arrêt du 16 décembre 2021, inscrit sous le numéro 46136C du rôle, la Cour administrative réforma partiellement ledit jugement, appelé par la partie étatique, en accueillant l’appel incident introduit par la société X dans la seule mesure où « […] la déduction comme dépenses d’exploitation des commissions fiscales forfaitaires de 65% du montant total des commissions totales perçues selon les modalités contenues dans la décision [fiscale anticipée] du 5 novembre 2012 doit être reconnue pour les années d’imposition en cause ». Pour le surplus, la Cour rejeta l’appel incident, confirma le jugement appelé et renvoya le dossier devant le directeur dans la mesure de cette réformation partielle et de celle prononcée par le jugement du 19 mai 2021.

En date du 19 janvier 2022, le bureau d’imposition émit les bulletins d’impôt suivant en « Rectification svt arrêt de la cour administrative » :

- les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2014, et - le bulletin rectificatif de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux mobiliers de l’année 2015, notamment avec la mention suivante : « Annulation du bulletin du 10/04/2019 … ».

Par courrier du 8 avril 2022, réceptionné le 11 avril 2022, le litismandataire de la société X introduisit une réclamation contre les bulletins suivants : « Bulletin de l’impôt sur le revenu des collectivités 2014 ; Bulletin de l’impôt commercial communal 2014 ; Bulletin de retenue à la source sur les revenus mobiliers 2014 ; Bulletin de retenue à la source sur les revenus mobiliers 2015. », « tous datés du 19 janvier 2022 ».

3Par courrier du 12 avril 2022, le litismandataire de la société X sollicita du bureau d’imposition qu’il procède à un « contrôle ultérieur » sur le fondement du § 100a AO par rapport à « son imposition à l’impôt sur le Revenu des collectivités de l’exercice 2017 opérée par le bulletin du 10 avril 2019 […], à l’Impôt sur le Revenu des collectivités et l’Impôt commercial Communal de l’exercice 2018 opérée par bulletins des 2 janvier 2020 […], à l’Impôt sur la Fortune 2018 opérée par le bulletin d’impôt du 10 avril 2019 […], et par le bulletin d’impôt sur la fortune 2019 du 2 janvier 2020 […].

Ces impositions ont été fixées provisoirement, sur pied du [§100a AO]. Ces bulletins n’ont pas fait l’objet d’une contestation formelle sur pied du paragraphe 218 (tbc) Abgabenordnung, pareil recours n’étant fondé qu’en cas de discordance manifeste entre le bulletin provisoire et la déclaration fiscale [CA 16 décembre 2021, rôle 16136C]. Tel n’est pas le cas en l’espèce.

Le [§100a AO] prévoit que l’imposition provisoire sur base de la seule déclaration fiscale du contribuable n’est jamais établie que « sous réserve d’un contrôle ultérieur ».

Notre mandante nous charge de solliciter la conduite d’un tel contrôle ultérieur, sur base de l’arrêt de la Cour d’Appel rendu le 16 décembre 2021 en cause de celle-ci […]. Cet arrêt a en effet (i) maintenu la requalification du prêt octroyé par la Société en distribution de revenus mobiliers, et (ii) confirmé l’applicabilité de la décision fiscale anticipée émise par votre Bureau le 5 novembre 2012.

[…] Nous vous prions par conséquent de bien vouloir procéder à un contrôle fondé sur le § 100 al.5 Abgabenordnung tenant compte des conclusions de l’arrêt du 16 décembre 2021.

[…] ».

Par courrier du 13 avril 2022, le litismandataire sollicita un entretien auprès du préposé du bureau d’imposition.

Par courrier du 24 mai 2022, le bureau d’imposition rejeta la demande de la société X dans les termes suivants :

« […] En réponse à votre lettre susmentionnée, je vous informe, par la présente, que je ne peux pas donner suite à votre demande de rendez-vous.

En effet, je vous rappelle qu’à partir du moment où le contribuable interjette réclamation, le bureau d’imposition est, pour des raisons de procédure impérieuse, complétement dessaisi du cas d’imposition.

En ce qui concerne votre demande d’un contrôle ultérieur, veuillez noter que le bureau d’imposition décidera de son propre gré si un contrôle ultérieur (§100a (2) LGI) des déclaration fiscales et l’émission des bulletins d’impôt au sens du §210 LGI seront effectuées.

[…] ».

Par courrier du 3 juin 2022, réceptionné le 10 juin 2022, indiquant avoir pour objet « Réclamation », le litismandataire de la société X introduisit un « recours hiérarchique fondé sur le paragraphe 46 Abgabenordnung » contre la décision précitée du bureau d’imposition datée du 24 mai 2022, dans les termes suivants :

4« […] Nous sommes consultés par la [société X] et avons reçu instruction d’introduire un recours hiérarchique fondé sur le [§ 46 AO] à l’encontre de la position prise par le Bureau d’Imposition Sociétés … en date du 24 mai 2022 suite à notre courrier du 13 avril 2022.

Ce courrier sollicitait une entrevue avec le préposé du Bureau suite aux bulletins d’imposition rectificatifs émis le 19 janvier 2022 en suite de l’arrêt de la Cour Administrative d’Appel le 16 décembre 2021, et faisait suite à plusieurs appels infructueux.

Ces bulletins rectificatifs concernent les exercices 2014, 2015 et 2016 et, à défaut de pouvoir en discuter utilement avec les services d’imposition en dépit de nombreux appels téléphoniques, notre mandante n’a eu d’autre choix que d’introduire une réclamation formelle le 8 avril 2022, actuellement au rôle du contentieux sous le numéro C30878.

Nous partageons dès lors la considération du préposé du Bureau Sociétés … selon laquelle « le bureau d’imposition est, pour des raisons de procédure impérieuse, complètement dessaisi du cas d’imposition » sous la seule réserve que ce dessaisissement ne saurait porter que sur les exercices faisant l’objet du contentieux, à l’exclusion des exercices suivants.

Par ailleurs, les exercices 2017 et 2018 ont fait l’objet d’imposition temporaires sur pied du [§ 100a AO], par bulletins du 10 avril 2019 et du 2 janvier 2020 respectivement. Or depuis lors, l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021 a tranché plusieurs questions de principe, dont celle de l’opposabilité de la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012. Cette confirmation a un impact substantiel sur la situation fiscale de notre mandante, notamment en ce qui concerne ces exercices 2017 et 2018.

L’objet de nos démarches était d’inviter le Bureau d’Imposition Sociétés … à procéder à un réexamen de la situation fiscale de notre mandante compte-tenu de cette décision, en application de la faculté qui lui en est donnée par le [§ 100a AO]. […] […] En l’espèce la décision du Bureau d’imposition Sociétés … en date du 24 mai 2022, refusant d’examiner objectivement les éléments matériels portés à sa connaissance par les différents courriels et par la déclaration fiscale rectificative déposée par la mandante [de la société X] a violé les principes généraux de droit fiscal de (i) l’égalité de l’impôt, (ii) du « Anspruch auf Gehör » et (iii) d’instruction à charge et à décharge, tout comme le [§ 29 AO].

En conséquence, nous vous prions de bien vouloir exercer la compétence qui vous est reconnue par le § 46 AO telle que précisée par la jurisprudence précitée. […]. ».

Par décision du 10 juin 2022, référencée sous le numéro C 30878, le directeur (i) déclara irrecevable la réclamation introduite le 11 avril 2022 pour autant qu’elle était dirigée contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux mobiliers de l’année 2014 pour cause de tardiveté, et (ii) déclara partiellement fondée la réclamation pour le surplus en annulant le bulletin rectificatif de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015, et en ramenant l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2014, y compris la contribution au fonds pour l’emploi, à … euros et l’impôt commercial communal de l’année 2014 à … euros.

Ladite décision est libellée comme suit :

5 « […] Vu la requête introduite le 8 avril 2022 par Me Jean-Luc Dascotte, de la société à responsabilité limitée Y, au nom de la société à responsabilité limitée X, avec siège social à L-…, pour réclamer contre les bulletins d’impôt suivants :

- bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2014, émis le 10 avril 2019, - bulletin rectificatif de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2014, - bulletin rectificatif de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2014, - bulletin rectificatif de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015, tous émis le 19 janvier 2022, Vu le dossier fiscal ;

Vu la décision directoriale du 12 août 2019, répertoriée sous le n° C 26376 du rôle ;

Vu le jugement du Tribunal administratif du 19 mai 2021, répertorié sous le n° 43728 et 43811 du rôle et libellé comme suit en ce qui concerne son dispositif :

« reçoit le recours principal en réformation introduit sous le numéro 43728 du rôle en la forme ; au fond, le déclare partiellement justifié ;

partant, par réformation de la décision directoriale du 12 août 2019, référencée sous le n° C 26376, dit que c’est à tort que le bureau d’imposition a conclu que le véhicule de marque … a été repris par Monsieur A au terme du contrat de leasing et qu’il l’a prélevé à la valeur d’exploitation de la société à responsabilité limitée X, tout en concluant à une distribution cachée de bénéfices ;

renvoie le dossier au directeur de l’administration des Contributions directes aux fins de transmission au bureau d’imposition compétent pour exécution ; » Vu l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021, répertorié sous le n° 46136C du rôle et libellé comme suit en ce qui concerne son dispositif :

« reçoit l’appel incident de la société X en la forme, au fond, le déclare partiellement justifié, partant, par réformation partielle du jugement entrepris, réforme partiellement la décision déférée du directeur de l’administration des Contributions directes du 12 août 2019 (n° C 26376 du rôle) en ce sens que la déduction comme dépenses d’exploitation des commissions fiscales forfaitaires de 65% du montant total des commissions totales perçues selon les modalités contenues dans la décision du 5 novembre 2012 doit être reconnue pour les années d’imposition en cause, rejette l’appel incident pour le surplus et confirme le jugement dans la même mesure en ce qui concerne le recours de la société X inscrit sous le n° 43728 du rôle, 6renvoie l’affaire devant le directeur de l’administration des Contributions directes dans la mesure de cette réformation partielle et de celle prononcée par le jugement entrepris » ;

Vu les §§ 228 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

En ce qui concerne la réclamation contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2014 Considérant que la réclamante avance que le bulletin susvisé aurait fait l’objet d’une imposition rectificative en date du 19 janvier 2022 ;

Considérant qu’au moment de la rédaction de la requête introductive, aucun bulletin rectificatif de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2014 n’avait été notifié à la réclamante (§ 91 AO) et l’imposition n’avait même pas été arrêtée au sens du § 246, alinéa 2 AO ; qu’il n’existe dès lors pas de bulletin rectificatif de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2014 qui serait susceptible de faire l’objet d’une réclamation au sens du § 228 AO ;

Considérant que par application du principe de l’effet utile selon lequel la jurisprudence tend, sur le fondement du § 249, alinéas 1er et 2 AO, à interpréter les requêtes des contribuables selon l’intention qu’elles manifestent plutôt que de s’arrêter au sens littéral des termes employés, la requête est à considérer comme étant dirigée contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2014, émis le 10 avril 2019 ;

Considérant qu’aux termes des §§ 228 et 246 AO, dont la règle a été reprise dans l’instruction sur les voies de recours figurant au bulletin entrepris, le délai de réclamation est de trois mois et court à partir de la notification ;

Considérant que la décision litigieuse a été émise le 10 avril 2019 et notifiée le 15 avril 2019, de sorte que le délai a expiré le 15 juillet 2019 ; que la réclamation, introduite en date du 8 avril 2022 est donc tardive ;

Considérant qu’aux termes du § 83 AO ce délai est un délai de forclusion ;

Considérant qu’en exécution du § 252 AO, la réclamation est donc à qualifier de tardive ;

Considérant qu’il découle de ce qui précède que la réclamation contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2014 est irrecevable pour cause de tardiveté ;

En ce qui concerne la réclamation contre le bulletin rectificatif de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015 Considérant que le bulletin originaire de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015, émis le 10 avril 2019, n’a jamais été attaqué en vertu du § 228 AO ; qu’en analysant les jugement et arrêt précités, force est de constater que les juridictions administratives ne se sont pas non plus, et à l’instar du directeur, prononcées à l’encontre du bulletin originaire de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015 ;

7Considérant que suite à la mise en œuvre de l’arrêt de la Cour administrative, le bureau d’imposition a émis un bulletin rectificatif de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015 ensemble avec les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2014, alors qu’il n’a pas été habilité à émettre un tel bulletin ;

Considérant que par voie de conséquence, la rectification a été entreprise à défaut de base légale habilitante de sorte qu’il y a lieu de procéder par l’annulation pure et simple du bulletin rectificatif de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015, le cadre légal pour son émission ayant été dépassé ;

En ce qui concerne les réclamations contre les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2014 Considérant que si l’introduction de plusieurs instances par une seule et même requête n’est incompatible, en l’espèce, ni avec le secret fiscal, ni avec les règles de compétence et de procédure, elle ne dispense pas d’examiner chaque acte attaqué en lui-même et selon ses propres mérites et ne saurait imposer une jonction qu’il est loisible au directeur des contributions de prononcer lorsque les instances lui paraissent suffisamment connexes ; qu’il n’y a pas lieu de la refuser en la forme ;

Considérant que la réclamante fait grief au bureau d’imposition de ne pas avoir correctement déterminé la déduction forfaitaire de 65 pour cent des commissions qu’elle a perçues et de ne pas avoir déduit les revenus d’intérêts et les pertes reportables de son résultat imposable ;

Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§ 238 AO), dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 228 AO) de la loi, qu’elles sont partant recevables ;

Considérant qu’en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d’office un réexamen intégral de la cause, la loi d’impôt étant d’ordre public ; qu’à cet égard le contrôle de la légalité externe de l’acte doit précéder celui du bien-fondé ; qu’en l’espèce la forme suivie par le bureau d’imposition ne prête pas à critique ;

Considérant qu’en exécution de l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021, le bureau d’imposition a émis, entre autres, des bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2014 en date du 19 janvier 2022 ;

Considérant, à titre introductif, que conformément à l’arrêt susmentionné, la réclamante a obtenu gain de cause, d’une part, à l’endroit de la déduction forfaitaire comme dépenses d’exploitation de 65 pour cent du montant total des commissions perçues, et d’autre part, en ce qui concerne la non requalification en distribution cachée de bénéfices d’un prélèvement d’une voiture à la valeur d’exploitation à hauteur de … euros ; que pour ce qui est des autres distributions cachées de bénéfices, en l’occurrence des frais de voiture, de réception, de représentation, de voyage, ainsi que des prélèvements d’argent de la part de l’associé et gérant unique, i.e. le sieur A, la Cour administrative a validé la manière d’agir du bureau d’imposition, confirmé par le directeur des contributions et le Tribunal administratif ;

8Quant aux « revenus d’intérêts comptabilisés au titre de l’avance en compte-courant » Considérant qu’au point 2 de la présente requête, la réclamante invoque que « Conformément à l’Arrêt, les revenus d’intérêts comptabilisés au titre de l’avance en compte-

courant requalifié en distribution de résultat devraient être retranchés du résultat taxable » ;

Considérant que la présente instance ne conçoit pas en quoi les bulletins rectificatifs devraient tenir compte de « revenus d’intérêts » divergeants étant donné que le Tribunal administratif, confirmé par la Cour administrative, a conclu que le bureau d’imposition a correctement déterminé les distributions cachées de bénéfices en cause (à l’exception de celle afférente à l’année 2015 et s’élevant à … euros) ;

Considérant que sur fond des éléments ci-avant relatés, il y a lieu de conforter le bureau d’imposition pleinement dans sa manière d’agir notamment en ce qui concerne la non modification du montant des distributions cachées de bénéfices de l’année 2014 ;

Quant à « la déduction forfaitaire de 65% des commissions perçues » Considérant que dans son arrêt du 16 décembre 2021, la Cour administrative a consigné que « C’est partant à tort que le bureau d’imposition a refusé d’accorder la déduction comme dépenses d’exploitation des commissions fiscales forfaitaires de 65% du montant total des commissions totales perçues selon les modalités contenues dans la décision du 5 novembre 2012 et que le directeur a confirmé cette position du bureau d’imposition. » ;

Considérant que la réclamante fait valoir que la déduction forfaitaire de 65 pour cent devrait être calculée sur base du montant de … euros et non sur celui de … euros comme le bureau d’imposition l’a fait ; qu’il convient de relever que le bureau d’imposition s’est basé sur le « Chiffre d’affaires - Commissions Perçues » de … euros, tel que déclaré par la réclamante, afin de déterminer la déduction forfaitaire en cause; que dans son placet, la réclamante reconnaît que le « chiffre d’affaires brut (… €) [lequel] comprenait aussi un montant correspondant à une refacturation de frais de voiture pour … € » ; que dès à présent elle invoque que les commissions perçues par elle au titre de l’année 2014 se sont élevées à … euros ;

Considérant qu’il suit de ce qui précède que la déduction forfaitaire à mettre en compte en tant que dépenses d’exploitation se chiffre à (65% x (… - …) i.e.) … euros ;

Considérant ensuite, que la réclamante sollicite la déduction des pertes reportables des années 2012 et 2013, en l’occurrence … euros et … euros ;

Considérant que, tout comme le bureau d’imposition, le directeur doit instruire (§ 204 AO) sur les pertes et bénéfices des exercices antérieurs ;

Considérant qu’il ressort de l’examen du dossier fiscal portant sur l’année 2014 que le bureau a refusé le report de pertes déclaré en relation avec les années d’imposition 2012 et 2013 étant donné qu’elles ont été générées principalement par les déductions forfaitaires de 65 pour cent ;

Considérant, à titre liminaire, que le montant d’un report de pertes, susceptible d’influer sur un certain bénéfice réalisé au titre d’une année d’imposition ultérieure, dépend notamment de l’ensemble des pertes accumulées et non compensées avec le(s) bénéfice(s) 9réalisé(s) au cours des exercices précédents ; que le report de pertes est régi par les dispositions de l’article 114 de la loi concernant l’impôt sur le revenu (L.I.R.) et range par conséquent parmi les dépenses spéciales ; qu’en matière d’impôt commercial communal, la déduction de telles pertes du bénéfice de l’exercice est permise dans les conditions du § 9bis Gewerbesteuergesetz (GewStG) ; que dans le cas d’un report de pertes divergeant de celui sollicité par le contribuable à travers sa déclaration fiscale, il échoit notamment de reconstituer l’origine du report de pertes à octroyer au titre de l’année d’imposition litigieuse ;

Considérant qu’il s’impose dès lors de procéder en l’espèce à une reconstitution des résultats fiscaux des années antérieures afin d’être en mesure de déterminer le report de pertes susceptible d’influer sur le bénéfice réalisé en 2014 ; qu’en ce qui concerne justement les années 2012 et 2013, force est en principe de se référer aux impositions effectuées, d’ailleurs sous réserve de les contrôler quant à leur exactitude et à leur bien-fondé au niveau de l’instance contentieuse ;

Considérant que conformément à l’arrêt susmentionné, il y a lieu d’admettre les déductions forfaitaires de 65 pour cent des commissions perçues par la réclamante, en l’occurrence (65% x … i.e.) … euros au titre de l’année 2012 et (65% x … i.e.) … euros au titre de l’année 2013 ;

Considérant que l’instruction menée par la présente instance a révélé que la réclamante a encore fait valoir des frais de matériel roulant, de réception, de représentation et de voyage, ainsi que des cadeaux à la clientèle au titre des années 2012 et 2013 ; qu’in concreto, les frais comptabilisés se présentent comme suit ;

Année 2012 Année 2013 Entretien et réparation du matériel roulant … euros … euros Assurances sur véhicules … euros … euros Amortissement … … euros … euros Amortissement … … euros … euros Cadeaux à la clientèle … euros Voyages et déplacements pour compte de clients … euros … euros Réceptions et frais de représentation … euros … euros Considérant qu’aux termes de l’article 45, alinéa 1er L.I.R., les dépenses provoquées exclusivement par l’entreprise constituent des dépenses d’exploitation déductibles ;

Considérant qu’aux termes de l’article 164, alinéa 3 L.I.R., il y a distribution cachée de bénéfices si un associé, sociétaire ou intéressé, reçoit directement ou indirectement des avantages d’une société ou d’une association dont, normalement, il n’aurait pas bénéficié s’il n’avait pas eu cette qualité ;

10Considérant, en ce qui concerne les frais du matériel roulant, que la réclamante a reconnu à travers un courrier daté au 10 mai 2017 qu’elle n’a pas tenu de carnet de bords ;

Considérant que le Tribunal administratif, confirmé par la Cour administrative, a notamment retenu ce qui suit : « la demanderesse ne prend en aucune façon position quant aux conclusions du directeur en ce qui concerne la non-applicabilité du règlement grand-ducal du 23 décembre 2016 portant exécution de l’article 104, alinéa 3 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, voire en ce qui concerne le fait qu’elle n’a fourni aucune preuve de la totalité des déplacements à des fins de détermination de la part de l’utilisation professionnelle de ce même véhicule au moyen notamment d’un carnet de bord, de sorte que le tribunal ne saurait utilement remettre en cause la conclusion du directeur que le bureau d’imposition a légitimement pu fixer la part d’utilisation privée de ce même véhicule à 50% » ; que partant 50 pour cent desdits frais en relation avec les années 2012 et 2013 sont également à considérer comme distributions cachées de bénéfices ; qu’il s’ensuit que les frais de matériel roulant à requalifier en tant que distributions cachées de bénéfices se chiffrent à (50% x (… + … + … + …) i.e.) … euros (année 2012) respectivement à (50% x (… + … + … + …) i.e. ) … euros (année 2013) ;

Considérant qu’à l’endroit des frais de réception, de représentation et de voyage, la Cour administrative a retenu ce qui suit : « Si la Cour admet que l’argumentation de la société X suivant laquelle, en substance, la participation de Monsieur A à des voyages et événements de plusieurs journées et comportant certes des aspects de loisirs aurait été nécessaire afin d’avoir l’occasion de discussions et de négociations avec les dirigeants et responsables commerciaux qu’il entendait rencontrer, de sorte que lesdites dépenses présentent un caractère « hybride », paraît a priori plausible, il n’en reste pas moins que c’est précisément cette imbrication entre les aspects d’ordre commercial et ceux plutôt de loisirs qui entraîne que les dépenses y relatives ne peuvent pas être admises comme dépenses d’exploitation. L’article 45 LIR requiert en effet qu’une dépense présente dans son intégralité un lien exclusif avec l’exploitation de l’entreprise ou, si tel n’est pas le cas, que la dépense puisse être ventilée sur base d’éléments objectifs et que lien causal avec l’activité de l’entreprise d’une partie séparable de la dépense puisse être établi de manière adéquate. Or, au vu des éléments factuels soumis par la société X, une telle ventilation des frais des différents voyages effectués par Monsieur A pour son compte n’est pas possible, de sorte que les frais de voyage et de représentation litigieux ne sauraient être qualifiés de dépenses d’exploitation.

Au vu de cette conclusion et du fait que c’est Monsieur A, associé et gérant unique de la société X, qui doit dès lors être considéré comme ayant bénéficié de l’avantage d’une prise en charge de dépenses de voyages d’ordre mixte ou privé sans contrepartie établie en faveur de la société X, et ce en raison de son statut d’associé unique, c’est encore à bon droit que le bureau d’imposition a qualifié les frais de voyage et de représentation en cause de distributions cachées en faveur de Monsieur A » ; qu’il doit être admis, qu’à l’instar des années 2014, 2015 et 2016 la réclamante a également comptabilisé des dépenses présentant un caractère hybride c’est-à-dire sans « lien exclusif avec l’exploitation de l’entreprise » ; qu’il échoit de prendre acte d’un courrier daté au 29 janvier 2019 dans lequel l’associé et gérant unique de la réclamante expose que « Cette activité [professionnelle] repose principalement sur un réseau de relations (carnet d’adresse) développé au fil de ma carrière professionnelle riche et variée.

Ce réseau est continuellement entretenu par ma société en créant des évènements ludiques propices pour nouer des liens amicaux et privilégiés avec mes apporteurs d’affaires. A titre d’exemple (sic), font partie de ces évènements les voyages, déjeuners, activités sportives, rallye voiture et ou moto etc… Les compagnes sont de temps en temps également présentes à ces 11évènements. C’est pourquoi ma compagne B était avec moi sur certains déplacements. » ;

qu’en l’espèce, il est patent que les frais occasionnés par l’associé et gérant unique, de même que les cadeaux offerts à la clientèle, constituent des frais d’ordre mixte ou privé sans contrepartie établie en faveur de la réclamante ; qu’en vertu de l’interdiction de ventilation des dépenses à caractère mixte (Aufteilungsverbot) l’intégralité des cadeaux à la clientèle, des frais de réception, de représentation et de voyage sont à requalifier en tant que distributions cachées de bénéfices ;

Considérant qu’il en résulte que les distributions cachées de bénéfices pour les années 2012 et 2013 sont fixées par la présente instance comme suit :

Année 2012 Année 2013 Frais de matériel roulant … euros … euros Cadeaux à la clientèle … euros Voyages et déplacements pour compte de clients … euros … euros Réceptions et frais de représentation … euros … euros … euros … euros que les distributions cachées de bénéfices à rajouter aux résultats imposables des années 2012 et 2013 se chiffrent dès lors à respectivement … euros et … euros ;

Considérant, en ce qui concerne l’année 2012, que la réclamante a déclaré un revenu imposable de (… - … (déduction forfaitaire) + … (impôt sur la fortune) i.e.) -… euros ;

qu’après rajout des distributions cachées de bénéfices de … euros, la perte reportable sollicitée par la réclamante devient ainsi caduque à défaut d’un résultat négatif ;

Considérant, en ce qui concerne l’année 2013, que la réclamante a déclaré un revenu imposable de (-… - … (déduction forfaitaire) + … (intérêts de retard) + … (impôt sur la fortune) i.e.) -… euros ; qu’après rajout des distributions cachées de bénéfices, la perte reportable invoquée par la réclamante s’élève à (-… + … i.e.) -… euros ;

Considérant que pour le surplus, les impositions sont conformes à la loi et aux faits de la cause et ne sont d’ailleurs pas autrement contestées ;

Considérant que les redressements de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2014, ainsi que de la base d’assiette de l’impôt commercial de l’année 2014 font l’objet de l’annexe qui constitue une partie intégrante de la présente décision ;

PAR CES MOTIFS dit la réclamation contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2014 irrecevable pour cause de tardiveté, reçoit les autres réclamations en la forme, 12 annule le bulletin rectificatif de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015, dit les réclamations contre les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2014 partiellement fondées, réformant, ramène l’impôt sur le revenu des collectivités dû, y compris la contribution au fonds pour l’emploi, pour l’année 2014 à … euros, établit la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2014 à … euros, ramène l’impôt commercial communal pour l’année 2014 à … euros, renvoie au bureau d’imposition pour exécution. […] ».

Par courrier du 29 juin 2022, le directeur s’adressa au litismandataire de la société X pour obtenir des éclaircissements quant à l’objet de sa demande incluse dans son courrier du 10 juin 2022, précité, dans les termes suivants :

« […] Votre requête du 3 juin 2022 semblant viser tant les impositions des années 2014, 2015 et 2016 que les impositions des années 2017 et 2018, et sachant que le litige concernant les années 2014, 2015 et 2016 a été toisé par décision directoriale du 10 juin 2022 (n° du rôle C 30878), je me permets d’admettre que la présente requête du 3 juin 222 ne visera dorénavant plus que les années 2017 et 2018.

Dans ce contexte et compte tenu d’une certaine ambiguïté constatée entre l’objet et le contenu de votre requête (citation : « réclamation » versus « recours hiérarchique fondé sur le paragraphe 46 Abgabenordnung » (sic)), je vous prie d’en préciser, pour le 15 juillet 2022 au plus tard, la nature exacte en indiquant si vous entendez introduire ou bien une réclamation au sens du § 228 de la loi générale des impôts (AO) ou bien un recours hiérarchique au sens du § 46 (2) AO. […] ».

Par courrier du 1er juillet 2022, réceptionné le 6 juillet 2022, le litismandataire de la société X confirma que sa demande du 10 juin 2022 « n’entendait pas viser la réclamation introduite – et, en effet, entretemps toisée – à l’encontre des bulletins rectificatifs correspondant aux exercices 2014, 2015 et 2016. Ces exercices ne sont mentionnés qu’à titre d’éléments de contexte dans la mesure où nous avions – en vain – sollicité un entretien avec le préposé du Bureau d’Imposition Sociétés … afin d’envisager l’ensemble de la situation de notre cliente. Pour cette raison, notre courrier du 3 juin ne fait pas référence au § 228 AO.

En revanche, notre mandant entend fonder sa démarche sur le § 46 AO, en ce qui concerne les seuls exercices 2017 et 2018. […]. ».

Par décision du 28 juillet 2022, référencée sous le numéro C 31168, le directeur rejeta ledit recours hiérarchique en s’adressant au litismandataire de la société X dans les termes suivants :

13« […] Par la présente, je me permets de vous informer que je ne donnerai pas de suite favorable à votre recours hiérarchique au sens du § 46, alinéa 2 AO, introduit en date du 10 juin 2022 et visant à contester le refus vous communiqué par écrit en date du 24 mai 2022 par le bureau d’imposition Sociétés … de procéder à un contrôle ultérieur au sens du § 100a, alinéa (2) AO des impositions des « seuls exercices 2017 et 2018 », pour reprendre la formulation choisie par vos soins dans votre missive de confirmation du 1er juillet 2022. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 9 septembre 2022, inscrite sous le numéro 47915 du rôle, la société X a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision directoriale précitée du 10 juin 2022 prise sur réclamation, tout en sollicitant le tribunal, d’après le dispositif, « d’enjoindre le Bureau de modifier les Bulletins en tenant compte des pertes reportables dépenses déductibles, du contrat de prêt du 19 mai 2011 et de la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012 », à savoir, suivant le corps de la requête, le « Bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2014, émis le 10 avril 2019 », le « Bulletin rectificatif de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2014, émis le 19 janvier 2022 », le « Bulletin rectificatif de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2014, émis le 19 janvier 2022 » et le « Bulletin rectificatif de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015, émis le 19 janvier 2022 ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 27 octobre 2022, inscrite sous le numéro 48096 du rôle, la société X a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision directoriale précitée du 28 juillet 2022 prise sur recours hiérarchique formel, tout en sollicitant le tribunal, d’après le dispositif, « d’enjoindre le Bureau d’imposition afin de conduire le contrôle fiscal qui aboutira à modifier les Bulletins en conformité avec les conclusions de l’arrêt du 16 décembre 2022 de la Cour Administrative d’Appel », à savoir, suivant le corps de la requête, les bulletins de « l’Impôt sur le Revenu des Collectivités de l’exercice 2017 […] du 10 avril 2019 », « l’Impôt commercial Communal de l’exercice 2018 […] du 2 janvier 2020 », « l’Impôt sur la Fortune 2018 […] du 10 avril 2019 » et « l’impôt sur la Fortune 2019 […] du 2 janvier 2020 ».

I) Quant à la jonction des recours inscrits sous les numéros 47915 et 48096 du rôle Une jonction entre différentes affaires est susceptible d’être prononcée, dans le souci d’une bonne administration de la justice, dans l’hypothèse où ces affaires concernent les mêmes parties et où elles ont trait au même objet1.

En l’espèce, les deux recours inscrits sous les numéros 47915 et 48096 du rôle ont été déposés par la société X. Ils tendent certes à la réformation, respectivement à l’annulation de deux décisions directoriales distinctes, l’une ayant été rendue sur réclamation le 10 juin 2022, l’autre sur recours hiérarchique formel le 28 juillet 2022, il n’en reste pas moins que l’objet des deux demandes sous-jacentes tend in fine à remettre en cause, en substance, l’imposition effectuée par l’administration à la suite de l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021, inscrit sous le numéro 46136C du rôle.

Les deux recours contentieux sous examen présentent, dès lors, un lien suffisamment étroit pour qu’il soit statué à leur égard par un seul et même jugement.

1 Trib. adm., 12 juin 2003, n° 15385 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 1007 et les autres références y citées.

14Il y a, dès lors, lieu d’ordonner la jonction des recours sous examen inscrits sous les numéros 47915 et 48096 du rôle.

II) Quant au recours inscrit sous le numéro 47915 du rôle A) Quant à la compétence du tribunal et à la recevabilité du recours Conformément aux dispositions combinées du § 228 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, telle que modifiée, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », et de l’article 8, paragraphe (3), point 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par la « loi du 7 novembre 1996 », le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond sur le recours dirigé par un contribuable contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’une réclamation de sa part contre un bulletin d’imposition.

Toutefois, si le tribunal, investi du pouvoir de statuer en tant que juge du fond, peut remplacer une décision administrative viciée, dans les limites de l’objet du recours, par une décision nouvelle, conforme à la loi, il ne lui est, en l’absence d’une disposition légale spécifique, pas possible de formuler des injonctions à l’encontre de l’administration2.

Dès lors, le tribunal est incompétent pour statuer sur la demande de la société X d’enjoindre au bureau d’imposition « de modifier les Bulletins en tenant compte des pertes reportables dépenses déductibles, du contrat de prêt du 10 mai 2011 et de la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012 ».

Pour le surplus, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal à l’encontre de la décision directoriale précitée du 10 juin 2022, recours qui est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

Il n’y a, partant, pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

B) Quant au fond Arguments et moyens des parties A l’appui de sa requête introductive d’instance, la société demanderesse se prévaut de l’article 114, alinéa (1) de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après désignée par la « LIR », pour soutenir qu’une société serait en droit de bénéficier d’un report de perte une fois que les conditions y visées seraient remplies et que le « résultat fiscal négatif » d’une société serait déterminé à la suite d’une série de déductions de dépenses qui seraient occasionnées par l’activité de cette société ou de ses dirigeants conformément à l’article 45 LIR.

La société demanderesse dresse, ensuite, un exposé des faits en commençant par indiquer que le recalcul qui aurait été effectué par les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2 Trib. adm., 11 mars 2015, n° 33444 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en réformation, n° 36 et les autres références y citées.

152014, le bulletin de la retenue d’impôt sur le revenus de capitaux mobiliers de l’année 2014, et le bulletin rectificatif de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux de l’année 2015 ne tiendraient, à tort, pas compte de ses pertes fiscales reportables qu’elle aurait réalisées au cours des exercices 2012 et 2013 d’un montant de … euros et … euros respectivement.

Elle reproche au directeur d’avoir conclu que 50% des frais en relation avec le matériel roulant des années 2012 et 2013 seraient à considérer comme des distributions cachées de bénéfices, en l’occurrence … euros pour l’année 2012 (50% x (… + … + … + …)) et un montant de … euros pour l’année 2013 (50% x (… + … + … + …)). Elle lui reproche également d’avoir considéré que les frais occasionnés par son associé et gérant unique en lien avec des « Voyages et déplacements pour compte de clients » et « Réceptions et frais de représentation », de même que les cadeaux offerts à la clientèle, constitueraient des frais d’ordre mixte ou privé sans contrepartie établie en sa faveur et de s’être référé au principe de l’interdiction de ventilation des dépenses à caractère mixte (Aufteilungsverbot) pour retenir des distributions cachées de bénéfices d’un montant total de … euros et … euros pour les années 2012 et 2013 respectivement, en ce compris les montants relatifs aux frais en relation avec le matériel roulant.

La société demanderesse estime qu’en requalifiant ces dépenses comme étant des dépenses mixtes et en retenant des distributions cachées de bénéfices, le directeur aurait rejeté intégralement ses pertes de l’année 2012, dans la mesure où le revenu imposable négatif de … euros qu’elle aurait déclaré, autrement dit sa perte reportable, serait devenu « caduque » à la suite de l’ajout des distributions cachées de bénéfices d’un montant de … euros « à défaut d’un résultat négatif ». Concernant l’année 2013, le directeur n’aurait reconnu que partiellement ses pertes reportables au motif que son revenu imposable négatif déclaré de … euros ne s’élèverait plus qu’à une perte de … euros après l’ajout des distributions cachées de bénéfices de … euros.

Par rapport aux frais de voyage et de représentation en particulier, la société demanderesse explique que cette catégorie de frais comprendrait toutes les dépenses représentant les frais de voyage et déplacement, les frais de réception et de représentation et les cadeaux pour les clients. Elle donne à considérer qu’il y aurait lieu de retenir compte du contexte général de ses activités, en l’occurrence la « prestation de services d’intermédiation entre parties à divers contrats commerciaux internationaux (immobilier, infrastructure, technologie, opérations commerciales) et la perception de commissions à ce titre en cas de succès », pour apprécier l’opportunité et la légitimité des dépenses dont la déductibilité aurait été rejetée par l’administration au cours des exercices concernés.

Ce type de contrat, ainsi que l’intermédiation donnant lieu à leur conclusion, se fonderaient essentiellement sur l’« intuitu personae, en ce sens que la création, l’entretien, le développement et l’exploitation du réseau relationnel de l’actionnaire et gérant unique lui auraient permis au fil du temps de générer des commissions substantielles. Ses contacts, prospects et interlocuteurs se trouveraient dans les endroits les plus divers et seraient généralement peu disponibles pour être eux-mêmes souvent en déplacement dans le cadre de leurs propres activités, raison pour laquelle son actionnaire et gérant unique serait amené à les rencontrer à l’occasion d’évènements ou d’activités sportives, récréatives ou autres, lesquelles permettraient de nouer des contacts plus personnels, essentiels à la création, l’entretien et l’exploitation d’un réseau de contacts commerciaux. La société demanderesse ajoute à cet égard que cette activité porterait sur des « Public Relations » et le « Business Development » qui permettrait de créer, par des contacts plus ou moins informels, un climat propice à la conclusion de contrats commerciaux. L’organisation de tels évènements serait une pratique 16courante dans ce secteur d’activité et aurait vocation à nouer et à renforcer des liens d’affaires basés sur la confiance et l’esprit collaboratif. Ils faciliteraient les échanges avec plusieurs clients potentiels ou existants et participeraient à sa propre attractivité et sa propre image afin de renforcer et valoriser son statut d’intermédiaire des affaires de grande taille.

La société demanderesse en déduit que le lien causal entre son activité principale et ses dépenses de voyage et de représentation serait établi de manière non seulement nécessaire mais essentielle pour faire augmenter le nombre de ses clients, de ses projets et son chiffre d’affaires.

Elle insiste sur la considération que le caractère personnel de ces relations aurait rendu très utile la participation de la compagne de son actionnaire et gérant unique à certaines de ces activités, « tant les propres relations personnelles de Mme B [auraient] également pu contribuer [à son] développement commercial ». A titre d’exemple, Monsieur A et Madame B auraient voyagé en Thaïlande en 2014 afin d’y rencontrer Monsieur C, ce qui aurait permis la conclusion du « contrat … » qui aurait généré un total de commissions de … euro sur ce même exercice. Divers montants seraient encore consacrés à l’entretien d’une relation professionnelle avec Monsieur D qui serait un homme d’affaire belge de premier plan réunissant régulièrement d’autres hommes d’affaires autour de lui dans sa propriété sise en … En affirmant encore qu’il ne serait pas toujours possible d’établir la corrélation directe entre la visite d’un prospect et la perception d’une commission reflétée dans son chiffre d’affaires, la société demanderesse ajoute que la négociation de ce type de contrats prendrait beaucoup de temps et que son issue serait aléatoire, alors que seule une portion des démarches prospectives serait couronnée de succès.

Ceci expliquerait le caractère nécessairement indicatif du plan financier transmis pour information à l’administration des Contributions directes, ci-après désignée par l’« administration », à l’appui de sa « demande de confirmation écrite » du 16 octobre 2012.

Elle explique, à cet égard, que lors de la préparation du plan financier de 2012, elle aurait envisagé la négociation du financement recherché, notamment par la société anonyme Z, afin de procéder à l’acquisition de maisons de repos en Belgique, et la société anonyme Q, en vue du développement de ses produits en matière de traduction électronique et d’intelligence artificielle. Etant donné que ses deux clients auraient entre temps pu trouver par eux-mêmes une source de crédit plus avantageuse, ces projets n’auraient toutefois pas abouti, ce qui aurait généré un manque à gagner de … euros par rapport au plan financier sur 2014, 2015 et 2016 et qui aurait été partiellement compensé par les commissions perçues dans le cadre des « contrats … » en 2014 et « … ».

Après avoir cité des extrais de jurisprudence des juridictions administratives quant aux conditions de déductibilité qui se dégagent de l’article 45, alinéa (1) LIR, la société demanderesse fait valoir qu’elles seraient toutes remplies en l’espèce et qu’elle aurait justifié, sur base de factures, de contrats et des précisions quant à son activité et son intérêt social, le caractère déductible des dépenses ayant été rejeté par l’administration. Elle ajoute que le nombre de ces évènements ne pourrait pas non plus être considéré comme excessif par rapport au stade de développement de ses activités qui, en 2012 et 2013, était tout au début de son existence, et par rapport au lien causal suffisamment étroit et exclusif affiché avec son activité.

La société demanderesse en conclut que ces dépenses de voyage et de représentation seraient à qualifier de dépenses d’exploitation au sens de l’article 45 LIR qui seraient déductibles dans son chef.

17 Quant aux frais de matériel roulant en particulier, la société demanderesse ajoute que le pourcentage de 50% qu’aurait retenu l’administration n’aurait aucune base « légale ou judiciaire en une décision antérieure », tandis que les circulaires auxquelles se serait référé le directeur en ce qui concerne les dépenses mixtes qui nécessiteraient la tenue d’un carnet de bord afin de procéder à une ventilation des coûts liés au moyen de transport ne seraient pas applicables au motif qu’elles auraient été publiées après la période d’imposition concernée en l’espèce, de sorte que les forfaits de déduction lui auraient été indûment imposés.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours inscrit sous le numéro 47915 du rôle pour n’être fondé dans aucun de ses moyens, en sollicitant la confirmation de la décision directoriale et en se référant notamment au jugement du tribunal administratif du 19 mai 2021, inscrit sous les numéros 43728 et 43811 du rôle, ainsi qu’à l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021, inscrit sous le numéro 46136C, ayant également concerné la société demanderesse, mais au titre des années d’imposition 2014, 2015 et 2016.

Analyse du tribunal Le tribunal est, d’abord, amené à rappeler que dans cadre du recours inscrit sous le numéro 47915 sous examen, il est appelé à statuer en tant que juge de la réformation, étant donné que le recours en question tend à la réformation de la décision directoriale du 10 juin 2022 prise sur réclamation.

Néanmoins, s’il est certes investi du pouvoir de statuer en tant que juge du fond dans le cadre du recours sous examen, le tribunal n’en demeure pas moins saisi d’un recours contentieux contre un acte déterminé. Ainsi, l’examen auquel il doit se livrer s’effectue en principe dans le cadre des moyens invoqués par le contribuable pour contrer les points spécifiques de l’acte déféré faisant grief – en l’occurrence la décision directoriale du 10 juin 2022 –, sans que son contrôle ne consiste à procéder à un réexamen général et global de sa situation fiscale. La mission du juge administratif, lorsqu’il est investi du pouvoir de réformer, consiste en effet à substituer à une décision administrative jugée illégale sa propre décision, de sorte qu’il incombe au contribuable de fournir à l’appui de sa requête des éléments suffisamment précis pour permettre le cas échéant l’exercice utile de ce pouvoir de réformation3.

Dès lors, l’analyse du tribunal se limitera exclusivement aux contestations avancées par la société demanderesse dans le cadre du recours sous examen, à l’exclusion des développements contenus dans son recours hiérarchique formel faisant l’objet du recours, inscrit sous le numéro 48096 du rôle, auquel elle a renvoyé.

De la même manière, le tribunal constate que dans le cadre de son recours sous examen, la société demanderesse sollicite la réformation de la décision directoriale du 10 juin 2022 sans pour autant formuler une quelconque contestation quant au caractère tardif de sa réclamation retenu par le directeur pour autant qu’elle était dirigée contre le bulletin de la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux mobiliers de l’année 2014, émis à son encontre en date du 10 avril 2019, erronément datée par la société demanderesse au 19 janvier 2022, de sorte que ledit volet 3 Trib. adm., 31 mai 2006, n° 20705 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 1304 (1er volet) et les autres références y citées.

18de la décision directoriale du 10 juin 2022 n’est pas contesté et que le tribunal n’en est pas saisi. Le tribunal limitera, dès lors, son analyse aux seules contestations de la société demanderesse tendant à la réformation de la décision directoriale du 10 juin 2022 ayant rejeté comme non fondée sa réclamation dirigée contre les bulletins rectificatifs de l’impôt sur le revenu des collectivités, et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année 2014, émis en date du 19 janvier 2022.

A cet égard, le tribunal est amené à relever qu’il est constant en cause que ces deux bulletins ont été émis par le bureau d’imposition à la suite de l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021, inscrit sous le numéro 46136C du rôle, dont la solution y dégagée, ensemble le jugement appelé du tribunal administratif du 19 mai 2021, a abouti, en substance :

- au rejet de la déduction des frais de voyages et de représentation de la société demanderesse en application de l’article 45, alinéa (1) LIR au titre de l’année d’imposition 2014 compte tenu de l’imbrication de la part privée et de la part professionnelle de ces dépenses ayant empêché toute ventilation, - à la reconnaissance de la qualification de distributions cachées de bénéfices de ces frais de voyages et de représentation en application de l’article 164, alinéa (3) LIR, au titre de l’année d’imposition 2014, et - à la reconnaissance de l’applicabilité de la décision fiscale anticipée datée du 5 novembre 2012 aux termes de laquelle la rémunération versée par la société demanderesse à son gérant et associé unique, sous la forme d’une « commission fiscale forfaitaire de 65% du montant total des commissions perçues au titre d’une année donnée dans le compte de pertes et profits de la société » était fiscalement déductible.

Dans le cadre du recours sous examen, les contestations de la société demanderesse portent :

- sur le refus du directeur de reconnaître le caractère pleinement déductible des frais de matériel roulant, de réception, de représentation et de voyages, ainsi que des cadeaux à la clientèle au titre des années d’imposition 2012 et 2013 en application de l’article 45, alinéa (1) LIR, - sur la requalification de ces frais en tant que distributions cachées de bénéfices au sens de l’article 164, alinéa (3) LIR, et - sur les conséquences de cette décision sur les pertes reportables de la société demanderesse qu’elle aurait accusées au cours des années d’imposition 2012 et 2013 et déclarées comme telles dans ses déclarations fiscales afférentes.

Le tribunal se trouve, dès lors, saisi des trois points susvisés, à l’exclusion du volet de la décision directoriale déférée portant sur les « revenus d’intérêts comptabilités au titre de l’avance en compte-courant », à défaut pour la société demanderesse d’avoir formulé une quelconque contestation à ce sujet.

En présence de plusieurs moyens invoqués, le tribunal n’est pas lié par l’ordre dans lequel ils lui ont été soumis et détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant4.

4 Trib. adm., 21 novembre 2001, n° 12921 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 528 et les autres références y citées.

191) Quant à la question de la déductibilité des frais et de la qualification de distributions cachées de bénéfices Le tribunal relève, d’un côté, que l’article 45, alinéa (1) LIR, invoqué par le directeur, dispose comme suit : « Sont considérées comme dépenses d’exploitation déductibles les dépenses provoquées exclusivement par l’entreprise. ».

Cette disposition admet la qualification de dépense d’exploitation s’il existe un lien de causalité suffisamment étroit entre la dépense et le revenu passé, actuel ou à naître du contribuable et si ce lien présente un caractère d’exclusivité suffisant pour exclure que la dépense a été en réalité engagée pour les besoins personnels d’autres personnes5.

Le contribuable est néanmoins seul juge de l’opportunité d’une dépense d’exploitation et la notion du lien de causalité n’implique aucun contrôle de la question de savoir si la dépense était nécessaire pour l’activité ou si elle était effectivement susceptible de profiter à l’exploitation. Il faut et il suffit que la dépense ait trouvé sa cause exclusive dans l’activité commerciale. En effet, étant donné que le droit fiscal soumet à l’impôt l’activité à but de lucre du contribuable qu’il a effectivement réalisée, mais n’affecte pas sa liberté individuelle de définir lui-même l’envergure de son initiative entrepreneuriale, il incombe au seul contribuable de déterminer l’étendue de son activité commerciale, les moyens y engagés et le niveau de profit qu’il entend en tirer6.

Il s’ensuit que les dépenses d’exploitation ne connaissent pas de limitation quant à leur montant7, dès lors que leur lien exclusif avec l’activité en question est donné.

Toutefois, la circonstance que le contribuable reste juge de l’opportunité et du montant des dépenses à engager par lui ne l’exonère pas de l’obligation de rapporter la preuve du lien causal exclusif8 susvisé.

En effet, la preuve du lien de causalité suffisamment étroit et exclusif incombe en principe au contribuable à la fois au niveau de la procédure d’imposition conformément aux principes posés par les §§ 171, alinéa (1), 204, alinéa (1) et 205, alinéas (1) et (2) AO, et au niveau de la procédure contentieuse eu égard à l’article 59 de loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par la « loi du 21 juin 1999 », suivant lequel « La preuve des faits déclenchant l’obligation fiscale appartient à l’administration, la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la cote d’impôt appartient au contribuable. […]. La preuve peut être rapportée par tous les moyens, hormis le serment. »9.

Il appartient dès lors au contribuable de rapporter la preuve non seulement de l’existence matérielle de ces dépenses, c’est-à-dire que les dépenses alléguées ont causé une 5 Cour adm., 4 mai 2021, n° 44776C du rôle ; Cour adm., 27 juillet 2016, n° 36855C du rôle, disponibles sur le site www.justice.public.lu.

6 Cour adm., 1er décembre 2016, n° 37844C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 221 et les autres références y citées.

7 Trib. adm., 24 février 2000, n° 11061 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 220 et les autres références y citées.

8 Voir en ce sens : Trib. adm., 28 juin 2000, n° 11553 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 221 et les autres références y citées.

9 Cour adm., 10 novembre 2015, n° 35818C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 224 et l’autre référence y citée.

20diminution effective de son patrimoine, mais encore la preuve de la relation économique de la dépense alléguée avec la catégorie de revenu choisie10.

Dans ces conditions, il incombe à la société demanderesse de rapporter la preuve que les conditions de l’article 45, alinéa (1) LIR sont remplies pour porter en déduction les frais litigieux, analyse qui sera faite ci-après.

D’un autre côté, le tribunal relève que se pose la question de l’existence de distributions cachées de bénéfices au sens de l’article 164, alinéa (1) LIR, retenue par le directeur, dans la mesure où c’est justement le défaut de lien de causalité exclusif entre les dépenses engagées et l’activité de la société demanderesse qui serait susceptible, le cas échéant, de permettre de conclure que les dépenses litigieuses ont, en réalité, été engagées pour les besoins personnels d’autres personnes, tel que relevé ci-avant, dont notamment les associés de la société demanderesse, respectivement des personnes intéressées au sens de l’article 164, alinéa (3) LIR.

C’est sur cette toile de fond et sur base de ces considérations que le tribunal examinera, les contestations de la société demanderesse quant aux différentes dépenses que celle-ci entend déduire.

En l’espèce, le tribunal relève, d’abord, que la circonstance que le caractère déductible des frais litigieux ait été rejeté, en partie, par les juridictions administratives au titre de l’année d’imposition 2014 ayant ainsi confirmé le volet afférent de la décision directoriale du 12 août 2019, ne remet pas en cause la possibilité pour la société demanderesse de rapporter en l’espèce la preuve que l’intégralité des frais en question devraient être admis en déduction au titre des années d’imposition 2012 et 2013, chaque année d’imposition étant à considérer individuellement conformément au principe de l’annualité de l’impôt ancré notamment à l’article 1er, alinéa (2) LIR.

Quant aux frais de matériel roulant, force est au tribunal de constater que la société demanderesse se limite à reprocher au directeur d’avoir retenu un pourcentage de 50% de déduction qui ne reposerait sur aucune base « légale ou judiciaire » et à rejeter l’applicabilité des circulaires auxquelles il s’est référé, sans préciser d’une quelconque façon de quel matériel, respectivement de quels véhicules il s’agirait. Le tribunal constate, ensuite, que contrairement à ce que soutient la société demanderesse, le directeur ne s’est référé à aucune circulaire pour justifier sa décision, de sorte que cette branche du moyen est à rejeter. Quant au taux de déduction retenu par le directeur, s’il est certes vrai qu’il a été évalué par voie de taxation d’office, il n’en reste pas moins que la société demanderesse doit être considérée comme étant restée en défaut de rapporter la preuve de la cause professionnelle (« die berufliche Veranlassung ») relativement à l’utilisation des véhicules dont elle réclame la déduction des frais afférents, ainsi que le pourcentage de l’utilisation professionnelle effective de ces véhicules.

La société demanderesse est, en effet, restée en défaut de soumettre le moindre élément probant quant aux déplacements effectués, empêchant ainsi la détermination de la part de l’utilisation professionnelle du matériel roulant. Elle est ainsi plus particulièrement restée en défaut de verser en cause un carnet de bord, tel qu’épinglé par le directeur et non contesté par 10 Cour adm., 11 mars 2021, n° 44078C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 225 (2e volet) et les autres références y citées.

21la société demanderesse dans le cadre du recours sous examen. Plus particulièrement, aucun document probant contenant (i) une mention de la durée des différents trajets, ainsi que du kilométrage de chaque véhicule au début et à la fin du trajet (ii) un descriptif des activités relatives à ces déplacements, en somme l’utilité individuelle des trajets mentionnés et leur rapport avec la nature de l’activité de la société demanderesse, et (iii) une indication que le lieu de départ des trajets en question aurait été le siège de la société demanderesse, n’a été soumis à l’appréciation du tribunal.

La fixation d’un pourcentage de 50% s’analyse, dès lors, en réalité comme une mesure largement favorable à la société demanderesse, de sorte qu’aucune critique ne saurait être faite au directeur, confirmant le bureau d’imposition, d’avoir déterminé la quote-part d’utilisation professionnelle et privée par voie de taxation suivant le § 217 AO.

Les contestations afférentes encourent, dès lors, elles aussi le rejet.

Par rapport aux frais de réception et de représentation, le tribunal est amené à constater, à l’instar de ce qu’il a retenu, pour l’année d’imposition 2014, dans son jugement du 19 mai 2021, inscrit sous les numéros 43728 et 43811 du rôle, confirmé sur ce point par la Cour administrative dans son arrêt du 16 décembre 2021, inscrit sous le numéro 46136C du rôle, que la société demanderesse n’a pas rapporté la preuve que les conditions de l’article 45, alinéa (1) LIR étaient remplies en vue de justifier la déduction de l’intégralité des dépenses litigieuses au titre des années d’imposition 2012 et 2013.

S’il ne ressort pas de la décision déférée que le directeur ait remis en cause l’existence matérielle des dépenses litigieuses pour ce qui concerne les années d’imposition 2012 et 2013, contrairement à l’année d’imposition 2014, force est de constater que la société demanderesse est restée en défaut de répondre aux reproches du directeur portant, d’une part, sur le caractère hybride des frais de réception, de représentation et de voyage qui avait d’ailleurs déjà été épinglé par le tribunal et par la Cour administrative dans les deux décisions de justice précitées, et, d’autre part, sur l’absence de lien de causalité exclusif entre ces dépenses et son activité.

La société demanderesse n’a pas versé la moindre pièce à l’appui de son recours, dont les annexes se limitent à établir les faits et rétroactes repris par le tribunal ci-avant, de sorte à mettre le tribunal dans l’impossibilité d’épuiser son pouvoir de réformation en analysant concrètement la nature des dépenses litigieuses et l’existence d’un quelconque lien de causalité exclusif avec l’activité de la société demanderesse. Au-delà de ce constat, le tribunal relève que la société demanderesse n’a fourni aucune explication de nature à établir, malgré le reproche d’une imbrication des dépenses sous analyse entre les aspects d’ordre commercial et ceux plutôt de loisirs qui entraîne que les dépenses y relatives ne peuvent pas être admises comme dépenses d’exploitation, que lesdites dépenses pourraient tout de même être ventilées sur base d’éléments objectifs et a fortiori objectivement vérifiables, et que le lien causal avec l’activité de l’entreprise d’une partie séparable de la dépense puisse être établi de manière adéquate. Il ressort d’ailleurs des propres explications de la société demanderesse qu’il ne lui a pas été systématiquement possible d’établir une corrélation directe entre des visites de prospects et la perception de commission.

Aucun reproche ne saurait, dès lors, être fait au directeur d’avoir constaté « au vu des éléments factuels » lui soumis qu’une telle ventilation n’était pas possible en l’espèce et d’avoir exclu, en conséquence, la qualification de dépenses d’exploitation au sens de l’article 45, alinéa (1) LIR et la déduction afférente.

22 Force est ensuite de constater que la société demanderesse n’a présenté aucune argumentation visant à remettre en cause la qualification de distributions cachées de bénéfices au sens de l’article 164, alinéa (3) LIR retenue par le directeur en conséquence du caractère non déductible des dépenses litigieuses, qu’il s’agisse du pourcentage d’utilisation privée du matériel roulant de 50% ou de l’ensemble des frais de réception, de représentation et des cadeaux à la clientèle. Dans ces conditions, le tribunal est amené retenir que Monsieur A, associé et gérant unique de la société demanderesse, doit dès lors être considéré comme ayant bénéficié de l’avantage d’une prise en charge de dépenses de frais de réception et représentation sans contrepartie établie en faveur de la société demanderesse, et ce en raison de son statut d’associé unique, tel que déjà retenu par le tribunal et la Cour administrative au titre de l’année d’imposition 2014. La même conclusion s’impose au sujet du pourcentage d’utilisation privée du matériel roulant. C’est, dès lors, à bon droit que le directeur a qualifié ces frais en distributions cachées en faveur de Monsieur A, les contestations afférentes étant à rejeter.

2) Quant à la question des pertes reportables Le tribunal constate que le directeur n’a, contrairement à ce que soutient la société demanderesse, pas omis de prendre en compte les pertes reportables des années 2012 et 2013, puisqu’il ressort expressément de la décision déférée que le directeur s’est référé à l’article 114 LIR et au § 9bis de la loi modifiée de l’impôt commercial communal, appelé « Gewerbesteuergesetz », en abrégé « GewStG », pour décider qu’il lui incombait en application du § 204 AO, de procéder à une reconstitution des résultats fiscaux des années antérieures – en l’occurrence des années 2012 et 2013 – afin d’être en mesure de déterminer le report de pertes susceptibles d’influer sur le bénéfice réalisé en 2014, avec pour objectif ultime de se conformer à l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021 qui portait justement sur les années d’imposition 2012, 2013 et 2014.

Il ressort plus particulièrement de la décision directoriale que la reconnaissance par la Cour administrative de l’applicabilité de la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012 autorisant la déductibilité de 65% du montant des commissions versée à Monsieur A – le gérant et associé unique de la société demanderesse –, a entraîné la prise en compte par le directeur de ces montants dans la détermination du résultat de la société demanderesse non seulement pour l’année d’imposition 2014, mais également pour les années d’imposition antérieures, en ce compris les années d’imposition 2012 et 2013. La société demanderesse ne conteste d’ailleurs pas les montants des commissions retenus par le directeur conformément à la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012, tout en tenant compte de ces propres explications, soit en l’occurrence … euros pour l’année 2012, … euros pour l’année 2013 et … euros pour l’année 2014.

L’argumentation de la société demanderesse révèle, quant à elle, une compréhension erronée de la décision directoriale déférée.

Le directeur a, en substance, pris comme point de départ les montants – non litigieux en l’espèce – des pertes reportables déclarées par la société demanderesse, en l’occurrence … euros pour l’année 2012 et … euros pour l’année 2013 en vue de les admettre en déduction conformément à l’article 114, alinéa (1) LIR. Or, étant donné qu’il ressort de la décision sous analyse que la société demanderesse a sollicité, par ailleurs, la déduction de certains frais au titre de ces mêmes années d’imposition – à savoir les frais de réception, de représentation et de matériel roulant analysés ci-avant –, c’est à bon droit que le directeur a analysé si la société 23demanderesse avait rapporté la preuve que les conditions de déductibilité qui se dégagent de l’article 45, alinéa (1) LIR étaient remplies conformément à l’article 59 de la loi du 21 juin 1999, précité. Il ne saurait, dès lors, être question d’une quelconque « caducité » des pertes reportables de la société demanderesse ou d’une réduction erronée de ces pertes reportables déclarées au titre de années d’imposition 2012 et 2014, celles-ci ayant été entièrement acceptées dans le principe et leur montant par le directeur.

Le directeur ayant conclu au rejet d’une partie de la déduction des frais sollicitée à hauteur de … euros pour l’année 2012 et de … euros pour l’année 2013, le montant des pertes reportables de la société demanderesse relatives aux mêmes années d’imposition a ainsi corrélativement été diminué. Or, le seul fait que leur montant ait in fine été réduit est exclusivement imputable, d’une part, à la volonté de la société demanderesse de voir admettre des frais déclarés par elle en déduction de son résultat, et, d’autre part, au caractère non déductible d’une partie de ces frais qui trouve son origine dans le défaut de preuve, par la société demanderesse, que les conditions afférentes seraient remplies.

Etant donné que le tribunal a retenu ci-avant que c’était à juste titre que le directeur avait rejeté la déduction de l’intégralité des frais de réception de la société demanderesse et limité la déduction des frais de matériel roulant à hauteur de 50% et de retenir la qualification de distributions cachées afférente, c’est également à bon droit que le directeur en a tiré la conséquence que les pertes reportables litigieuses étaient in fine à réduire de ces mêmes montants.

Dans ces conditions, le tribunal est amené à rejeter les contestations afférentes de la société demanderesse pour être non fondées.

A défaut d’autres moyens, le tribunal retient que le recours inscrit sous le numéro 47915 du rôle n’est fondé dans aucun de ses moyens, de sorte à devoir encourir le rejet.

C) Quant à l’indemnité de procédure Au vu de l’issue du recours inscrit sous le numéro 47915 du rôle, la demande en allocation d’une indemnité de procédure de 5.000 euros fondée sur l’article 33 de la loi du 21 juin 1999, est à rejeter.

III) Quant au recours inscrit sous le numéro 48096 du rôle A) Quant à la compétence du tribunal et à la recevabilité du recours Conformément aux dispositions combinées du § 237 AO et du point 2. du paragraphe (3) de l’article 8 de la loi du 7 novembre 1996, le tribunal administratif est appelé à statuer comme juge de l’annulation sur les recours introduits contre une décision du directeur ayant statué sur les mérites d’un recours hiérarchique formel dirigé contre une décision autre que celles visées aux §§ 166 alinéa (3), 211, 212, 212a alinéa (1), 214, 215, 215a et 235, 396 alinéa (1) et 402 AO.

24Toutefois, lorsqu’il est saisi d’un recours en réformation dans une matière dans laquelle la loi ne prévoit pas un tel recours, le tribunal doit se déclarer incompétent pour connaître du recours11.

Dans ces conditions et dans la mesure où le directeur a, en l’espèce, statué par rapport à un recours hiérarchique formel suite à une demande dont il n’est pas contesté qu’il ne s’agit pas d’une décision visée au § 228 AO, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation introduit par la société X contre la décision directoriale du 28 juillet 2022, précitée.

Le tribunal relève, ensuite, qu’en tant que juge de l’annulation, il ne lui est pas non plus possible, en l’absence d’une disposition légale spécifique, de formuler des injonctions à l’encontre de l’administration et qu’en tout état de cause, il n’est, dans ce cadre, pas appelé à prendre une décision nouvelle remplaçant celle prise par l’administration, l’office du juge de l’annulation se limitant à se placer dans la même situation de fait et de droit que le directeur au moment où il a pris sa décision afin de vérifier, dans la limite des moyens de la société demanderesse, la légalité de sa décision.

Dès lors, le tribunal est également incompétent pour statuer sur la demande de la société X « d’enjoindre le Bureau d’Imposition afin de conduire le contrôle fiscal qui aboutira à modifier les Bulletins en conformité avec les conclusions de l’arrêt du 16 décembre 2022 de la Cour Administrative d’Appel ».

Pour le surplus, le tribunal est, en revanche, compétent pour connaître du recours subsidiaire en annulation introduit à l’encontre de la décision directoriale susmentionnée du 28 juillet 2022, recours qui est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

B) Quant au fond Arguments et moyens des parties A l’appui de son recours, la société demanderesse se prévaut, comme motif principal d’annulation de la décision 28 juillet 2022, d’un défaut de motivation du directeur pour toiser son recours hiérarchique formel. Elle invoque, à cet égard, une violation de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après désigné par le « règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », ainsi que du § 258 AO qui constituerait une « Sollvorschrift », tout en citant des extraits de jurisprudences des juridictions administratives à cet égard. Elle ajoute que la motivation devrait permettre au contribuable de retracer et de comprendre les raisons ayant conduit le directeur à rejeter « sa réclamation » et ce afin de respecter le principe général des droits de la défense, encore que les juridictions administratives auraient permis au directeur de ne pas devoir répondre en détail à tous les moyens soulevés dans la « réclamation ».

La société demanderesse invoque, ensuite, son « droit à un contrôle ultérieur » en application du § 100a AO qui prévoirait qu’une imposition provisoire sur base de la seule déclaration fiscale du contribuable ne serait jamais établie que sous réserve d’un contrôle 11 Trib. adm., 28 mai 1997, n° 9667 du rôle, confirmé par Cour adm., 16 octobre 1997, n ° 10082C du rôle, Pas.

adm. 2023, V° Recours en réformation, n° 9 et les autres références y citées.

25ultérieur. Elle explique solliciter un contrôle ultérieur au sens de cette disposition en se référant à l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021, inscrit sous le numéro 46136C du rôle l’ayant également concernée. Tout en affirmant que la loi et les travaux parlementaires relatif à la loi du 19 décembre 2008 ayant pour objet la coopération interadministrative et judiciaire et le renforcement des moyens de l’Administration des contributions directes, de l’Administration de l’enregistrement et des domaines et de l’Administration des douanes et accises, ci-après désignée par la « loi du 19 décembre 2008 », ayant introduit le § 100a AO, seraient muets quant au déclenchement d’un tel contrôle, la société demanderesse affirme que ce déclenchement ne pourrait pas résulter du « seul pouvoir arbitraire » de l’administration.

Le principe général de droit fiscal du « Anspruch auf Gehör » reconnaîtrait le droit du contribuable à un contrôle équitable, objectif et effectif de sa situation fiscale endéans un délai défini par la loi. Ce droit découlerait directement du principe constitutionnel de légalité de l’impôt aux termes duquel l’établissement de l’impôt ne pourrait pas dépendre d’un quelconque « arbitraire administratif » et la conformité de l’impôt à la loi devrait pouvoir faire l’objet d’un contrôle effectif. Tout en admettant que le bureau d’imposition aurait le droit de décider d’initier un contrôle, ainsi que prévu par la loi, une demande en ce sens formulée par le contribuable lui-même s’inscrirait, quant à elle, dans un contexte différent et devrait être traitée conformément aux principes généraux de droit fiscal, au premier rang desquels le principe de légalité de l’impôt et celui du « Anspruch auf Gehör », la société demanderesse se référant à un arrêt de la Cour administrative du « 29 juillet 2009 ».

Par rapport à la question de la légalité de l’impôt, la société demanderesse se réfère à nouveau aux travaux parlementaires ayant abouti l’adoption du § 100a AO dans lesquels l’importance cruciale d’un contrôle des cas d’imposition aurait été rappelée. Elle ajoute que cette disposition ne dérogerait pas au § 29 AO et que ce serait « ce contrôle indispensable » qu’elle solliciterait dans le prolongement du dépôt de ses déclarations fiscales rectificatives.

Les impositions temporaires qui résulteraient « des Bulletins » – définis dans sa requête comme étant les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2017 et de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2018, tous les deux émis le 10 avril 2019, et les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et l’impôt commercial communal de l’année 2018, ainsi que de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2019, tous les trois émis le 2 janvier 2020 – seraient manifestement incompatibles avec les conclusions de l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021, inscrit sous le numéro 46136C du rôle. Il incomberait, en conséquence, au bureau d’imposition de les rectifier en vertu du principe de légalité de l’impôt et de l’égalité des contribuables au motif que cette contrariété aurait été portée à son attention par le contribuable lui-même, et que le délai pour procéder à une rectification après contrôle ne serait pas écoulé. A cet égard, la société demanderesse précise que le §100a AO conférerait certes un pouvoir discrétionnaire à l’administration pour initier un contrôle ultérieur endéans le délai de prescription général de cinq ans, mais affirme que l’administration serait également tenue, lorsqu’elle y serait sollicitée, d’exercer ce pouvoir dans le cadre général posé par les §§ 29 et 204 AO qui prévaudraient, de par leur généralité, sur la règle spécifique du § 100a AO.

La société demanderesse décrit, ensuite, les impositions qu’il y aurait lieu de rectifier.

Par rapport à la « Requalification du compte courant d’actionnaire », elle indique que des montants d’intérêts de … et … euros auraient été comptabilisés sur les montants prêtés et affirme que compte tenu de la solution retenue par la Cour administrative dans son arrêt du 16 décembre 2021, inscrit sous le numéro 46136C du rôle, la requalification de ce prêt en distribution de revenus de capitaux frappés par la retenue à la source ne serait pas compatible 26avec le maintien d’une imposition des intérêts sur ce prêt. Il y aurait donc lieu de procéder à une imposition rectificative après contrôle effectif.

Elle ajoute encore dans ce contexte que la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012, dont la Cour administrative a reconnu l’applicabilité dans ledit arrêt, n’aurait été assortie d’aucune limite temporelle. Cette décision fiscale anticipée serait certes devenue « caduque » en application de la loi du 20 décembre 2019 concernant le budget des recettes et des dépenses de l’État pour l’exercice 2020, qui serait entrée en vigueur le 1er janvier 2020, mais serait toutefois toujours applicable aux années 2017 et 2018.

En dernier lieu, la société demanderesse indique réitérer intégralement les moyens et arguments qu’elle aurait présenté dans son recours hiérarchique du 10 juin 2022 à l’encontre de la décision du bureau d’imposition.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement affirme que les prétentions de la société demanderesse viseraient à contourner la forclusion attachée au délai de recours « contre les bulletins IRC 2017 du 10 avril 2019, de l’IRC et de l’ICC 2018 du 2 janvier 20[20], de l’IF 2018 du 14 avril 2019 et de l’impôt sur la fortune 2019 du 2 janvier 2020. » par le biais d’une demande de contrôle ultérieur de ces bulletins rectificatifs émis sur le fondement du § 100a AO et ce afin de prendre en compte la solution dégagée par la Cour administrative dans son arrêt du 16 décembre 2021.

Le représentant étatique se réfère à un arrêt de la Cour administrative du 9 août 2017, inscrit sous le numéro 38981C du rôle, pour soutenir que le bureau d’imposition disposerait d’un pouvoir discrétionnaire pour effectuer une instruction au fond du dossier à la suite d’une imposition suivant déclaration. Il indique que la société demanderesse serait restée en défaut d’introduire une réclamation contre les bulletins litigieux et qu’elle ne serait pas fondée à se prévaloir de son propre comportement fautif pour contourner les délais des voies de recours et ainsi solliciter une modification de l’imposition, le délégué du gouvernement ajoutant ne pas saisir l’intérêt du contribuable de contester une imposition établie en tenant compte de la seule déclaration d’impôt.

Il conteste, par ailleurs, que les principes dégagés par la Cour administrative dans son arrêt du 16 décembre 2021 seraient transposables aux exercices subséquents et affirme que la décision directoriale déférée satisferait pleinement aux exigences du § 258 AO au motif que les bases légales des §§ 100a, alinéa (2) et « 496, alinéa (2) » AO auraient été mentionnées.

Le délégué du gouvernement rejette, en substance, les autres moyens et arguments de la société demanderesse, en ce compris ceux fondés sur le § 46, alinéa (2) AO.

Dans sa réplique, la société demanderesse conteste vouloir contourner un délai de forclusion et affirme que l’objet premier de son recours porterait sur son droit à un contrôle effectif de sa situation fiscale, même après l’émission des bulletins d’imposition provisoires émis sur le fondement du § 100a AO, dans le contexte de la survenance d’un fait nouveau, en l’occurrence l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021. Elle estime que le directeur aurait dû prendre en compte ses arguments et inviter le bureau d’imposition à procéder audit contrôle effectif et conteste que l’objet de sa demande initiale n’aurait pas consisté en l’obtention d’une modification de l’imposition.

27Elle maintient que la décision directoriale déférée serait dépourvue de motifs de fait ou de droit gisant à sa base et conteste que ladite décision mentionne le §§ 46, alinéa (2) AO – que le délégué du gouvernement aurait erronément référencé comme le § 496 –, ainsi que le § 100a AO. La décision ne mentionnerait aucun texte légal pour justifier son refus.

Quant à l’argumentation du délégué du gouvernement relative au § 46 AO, la société demanderesse affirme (i) que l’objet de sa « réclamation » auprès du directeur ne porterait pas sur l’imposition elle-même, pour laquelle seul le bureau d’imposition serait compétent, (ii) qu’elle aurait saisi le bureau d’imposition d’une demande de procéder à un contrôle fiscal, (iii) que suite au refus du bureau d’imposition, elle aurait demandé au directeur de « rapporter d’office » ou d’enjoindre à ce dernier de « faire quelque chose » au sens de cette disposition, en l’occurrence de procéder à un contrôle de sa situation fiscale en vertu de ses pouvoirs du contrôle hiérarchique, (iv) qu’aucune demande formulée envers le directeur n’aurait eu pour objet qu’il effectue lui-même l’imposition ou procède à la modification ou rectification des impositions pour les exercices 2017 et 2018, et (v) que le directeur n’aurait pas non plus été invité à se substituer au bureau d’imposition dans le cadre d’un contrôle fiscal.

La société demanderesse maintient, pour le surplus, son argumentation fournie dans le cadre de sa requête introductive d’instance.

Analyse du tribunal Le tribunal est, d’abord, amené à rappeler que dans le cadre du recours sous examen – et contrairement au recours inscrit sous le numéro 47915 du rôle –, il est appelé à statuer en tant que juge de l’annulation, étant donné que le recours en question tend à l’annulation de la décision directoriale du 28 juillet 2022 prise sur recours hiérarchique formel, tel que retenu ci-

avant.

Dans ce cadre, le tribunal apprécie la légalité de la décision en considération de la situation de droit et de fait au jour où elle a été prise, en ce sens qu’il doit se placer au même moment sans pouvoir tenir compte des circonstances de droit ou de fait postérieures à l’acte attaqué, puisque dans le contentieux de l’annulation, il ne peut pas substituer son appréciation à celle de l’autorité administrative. La légalité d’un acte administratif se trouve donc en principe cristallisée au moment où cet acte est pris et le juge se place exactement dans les mêmes conditions où se trouvait l’administration : c’est la logique du procès fait à un acte12.

Ensuite, au regard des échanges intervenus entre la société demanderesse et le directeur au cours de la phase précontentieuse au sujet de l’objet et de la portée de sa demande datée du 10 juin 2022, le tribunal est amené à préciser qu’il est désormais constant en cause que ladite demande concerne « les seuls exercices 2017 et 2018 ». Etant donné que le directeur a lui-

même rendu sa décision par rapport aux « seuls exercices 2017 et 2018 », le tribunal limitera lui aussi son analyse à ces deux « exercices ».

Encore que la terminologie employée par le litismandataire de la société demanderesse, en ce qu’il vise les « exercices 2017 et 2018 » prête à confusion, il y a lieu d’admettre, au regard des dates des bulletins d’imposition invoquées par la société demanderesse, de la 12 Trib. adm., 16 juin 2016, n° 36542 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en annulation, n° 19 (2e volet) et les autres références y citées.

28définition des « Bulletins » incluse dans son recours contentieux et de la référence faite à des bulletins émis sur le fondement du § 100a AO, qu’il s’agit :

- pour ce qui concerne l’ « exercice 2017 », du bulletin rectificatif de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2017, et du bulletin rectificatif de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2018, tous émis le 10 avril 2019, et - pour ce qui concerne l’ « exercice 2018 », des bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année d’imposition 2018, et du bulletin l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2019, tous émis le 2 janvier 2020.

Concernant plus particulièrement l’objet de son recours hiérarchique formel, le tribunal constate encore qu’à travers le recours sous examen, la société demanderesse souhaite que le bureau d’imposition procède au « contrôle ultérieur » visé au § 100a AO des bulletins prémentionnés afin de les voir remplacer par une imposition définitive qui tiendrait compte de l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021.

La société demanderesse sollicite l’annulation de la décision prise sur recours hiérarchique en contestant la légalité externe, dont les moyens sont à analyser en premier lieu, et la légalité interne de cette décision.

1) Quant à la légalité externe de la décision Par rapport au défaut de motivation dont se prévaut la société demanderesse fondé sur une violation alléguée du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, et plus particulièrement, de l’entendement du tribunal, de son article 6 portant sur l’obligation de motivation, force est de constater que c’est à juste titre que le délégué du gouvernement conclut au rejet de ce moyen en se référant à l’article 5 de la loi du 1er décembre 1978 réglant la procédure administrative non contentieuse qui exclut expressément son applicabilité, de même que celle de son règlement d’exécution, en l’occurrence le règlement grand-ducal du 8 juin 1979, « à la matière des contributions directes »13. La société demanderesse n’est, dès lors, pas fondée à reprocher au directeur un défaut de motivation sur ce fondement.

Aux termes du § 258, alinéa (1) AO sur lequel la société demanderesse s’est encore fondée pour conclure au défaut de motivation de la décision directoriale sous analyse, « (1) Bei Zurückweisung des Rechtsmittels soll die Entscheidung das tatsächliche und rechtliche Vorbringen und die Beweisergebnisse würdigen. […] ».

A cet égard, le tribunal relève que ni le § 228 AO, ni les §§ 299 et suivants AO, auxquels renvoie le § 228 AO, ni les dispositions générales relatives au régime des décisions (« Verfügungen ») contenues aux §§ 91 à 96 AO, ne prévoient une obligation générale, sous peine d’annulation, de motivation expresse d’une décision du directeur14.

Une décision directoriale statuant sur une réclamation n’est pas soumise à une exigence formelle de motivation complète dont le non-respect serait sanctionné par l’annulation de la décision. L’obligation de motivation ne se conçoit à l’égard d’une décision directoriale qu’à travers le principe général du droit du respect des droits de la défense, en ce sens qu’il faut et il suffit que les motifs à la base de la décision aient existé à la date où elle a été prise et que le 13 « La présente loi et ses règlements d´exécution ne s´appliquent pas à la matière des contributions directes ».

14Trib. adm., 15 novembre 2007, n° 22500 du rôle, confirmé par Cour adm., 20 mars 2008, n° 23789C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 1180 (1er volet) et les autres références y citées.

29contribuable doit être en mesure de connaître la motivation d’une décision au plus tard au cours de la procédure contentieuse devant les juridictions administratives afin de pouvoir utilement préparer sa défense15.

Ces principes dégagés par rapport aux réclamations sont applicables mutatis mutandis au recours hiérarchique formel litigieux. En effet, la notion de « Rechtsmittel » visé au § 258, alinéa (1) AO regroupe tant la notion de réclamation (« Anfechtung ») au sens du § 228 AO, que celle de contestation (« Beschwerde ») au sens du § 237 AO, dans la mesure où ces deux dispositions sont insérées sous le « Dritter Abschnitt : Rechtsmittel » de l’AO et plus particulièrement sous le même « Erster Unterabschnitt : Zulässigkeit der Rechtsmittel », le § 258 AO figurant, quant à lui, dans le « Zweiter Unterabschnitt: Allgemeine Vorschriften über das Verfahren » du même « Dritter Abschnitt » précité.

En tout état de cause, le reproche soulevé par la société demanderesse manque en fait, alors que la décision directoriale comporte une indication des motifs de fait et de droit gisant à la base de la décision. En effet, le directeur s’est référé, contrairement à ce que soutient la société demanderesse, aux §§46, alinéa (2) et 100a AO pour rejeter sa demande tendant à enjoindre au bureau d’imposition de procéder à un « contrôle ultérieur » au sens de cette dernière disposition. Le délégué du gouvernement a d’ailleurs complété en cours de phase contentieuse16, les motifs de refus en se référant plus particulièrement au § 46, alinéa (2) AO lequel conférerait certes le pouvoir de rapporter d’office une décision, ainsi que le pouvoir d’enjoindre aux autorités subordonnées de faire quelque chose, mais que cette même disposition ne permettrait pas au directeur de prendre une décision à la place du bureau d’imposition dans des cas d’impositions individuels. Le directeur aurait uniquement le pouvoir d’enjoindre au bureau d’imposition de prendre une décision conforme à sa directive. Le représentant étatique a encore ajouté contester que les principes dégagés par la Cour dans son arrêt du 16 décembre 2021 seraient ipso facto transposables aux exercices subséquents.

Dans ces conditions, le tribunal retient que le directeur, ensemble les explications complémentaires du délégué du gouvernement, a à suffisance exposé les éléments de fait et de droit motivant, d’un point de vue formel, sa décision prise sur recours hiérarchique formel, indépendamment du bien-fondé de cette motivation à ce stade de l’analyse.

Il s’ensuit que le moyen fondé sur le § 258 AO encourt le rejet.

2) Quant à la légalité interne de la décision A titre liminaire, le tribunal est amené à rappeler que dans la mesure où la voie de la réclamation visée au § 228 AO est la seule ouverte pour remettre en cause le bien-fondé d’une imposition fixée par un bulletin d’impôt, le tribunal ne se trouve pas saisi de la question du bien-fondé d’une quelconque cote d’impôt fixée dans le chef de la société demanderesse, mais uniquement de la question de la légalité de la décision du directeur portant confirmation du refus du bureau d’imposition de procéder au « contrôle ultérieur » des « exercices 2017 et 2018 » visé au § 100a AO.

15 Cour adm., 5 juillet 2016, n° 36888C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 1180 (3e volet) et les autres références y citées.

16 Trib. adm., 15 avril 1997, n° 9510 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 924 (1er volet) et les autres références y citées.

30Le tribunal est appelé à apprécier la légalité de cette décision dans la seule limite des moyens invoqués par la société demanderesse qui argumente, en substance, que le directeur aurait dû annuler la décision du bureau d’imposition portant refus de procéder au « contrôle ultérieur » conformément :

- aux §§ 29 et 46, alinéa (2) AO en rapportant d’office la décision de refus du bureau d’imposition, respectivement en lui enjoignant de procéder audit « contrôle ultérieur », et - au § 100a AO, au « Anspruch auf Gehör », ainsi qu’au principe d’égalité et de légalité de l’impôt, au motif que la société demanderesse aurait un « droit à un contrôle ultérieur ».

En revanche, le tribunal n’a pas à statuer sur les moyens et arguments qui seraient inclus dans sa demande de recours hiérarchique formel du 10 juin 2022 auxquels a renvoyé la société demanderesse dans le cadre du recours sous examen, le tribunal n’ayant pas à répondre à des moyens simplement suggérés, de sorte qu’il qui encourent le rejet.

Quant au moyen tiré d’une violation du § 100a AO, le tribunal relève qu’aux termes de cette disposition : « (1) Le bureau d’imposition peut, sous réserve d’un contrôle ultérieur, fixer l’impôt en tenant compte de la seule déclaration d’impôt, et ceci sans qu’il y ait lieu d’indiquer les motifs.

(2) L’émission d’un bulletin d’impôt au sens du § 210 comporte la levée de la réserve du contrôle ultérieur.

(3) Avec l’expiration du délai de prescription de cinq ans, la réserve du contrôle ultérieur devient caduque et la fixation de l’impôt devient définitive.

(4) Les dispositions du présent paragraphe s’appliquent par analogie à d’autres bulletins émis en matière d’impôts directs, notamment ceux visés aux §§ 212a al. 1er, 214, 215, 215a, 386 et 390. ».

Cette disposition a été introduite par la loi du 19 décembre 2008 à laquelle se sont référées les parties à l’instance. Elle consacre la faculté pour le bureau d’imposition compétent d’émettre un bulletin d’impôt sur la seule base de la déclaration d’impôt lui soumise par le contribuable, sans motifs, tout en se réservant le droit de procéder à un « contrôle ultérieur » du cas d’imposition concerné endéans le délai de 5 ans.

C’est, dès lors, à tort que la société demanderesse affirme qu’une imposition provisoire serait nécessairement établie sous réserve d’un « contrôle ultérieur », alors qu’il ressort du § 100a AO que l’imposition suivant déclaration, revêtant un caractère provisoire par nature, peut se voir conférer un caractère définitif par le seul écoulement du temps, en l’occurrence du délai de 5 ans, sans qu’un « contrôle ultérieur » n’ait jamais eu lieu.

Le tribunal relève, ensuite, que lorsque le bureau d’imposition émet un bulletin sur déclaration, il n’a ni instruit le cas d’imposition intégral sur pied du § 204, alinéa (1) AO, ni exercé un contrôle afférent qui pourrait conduire à une imposition divergeant de la déclaration fiscale17. Les travaux parlementaires relatifs à la loi du 19 décembre 2008 révèlent que dans l’intention du législateur, lorsque le bureau d’imposition entend fixer l’impôt sur base de la 17 Cour adm., 13 février 2020, n° 43115C du rôle, disponible sur le site www.justice.public.lu.

31seule déclaration du contribuable, « il se réserve le droit de procéder ultérieurement à l’instruction et au contrôle du dossier, mais sans pour autant y être obligé. La décision de procéder par voie d’imposition suivant déclaration est discrétionnaire, elle ne doit pas être motivée »18. Ce n’est que la mise en œuvre du « contrôle ultérieur » qui déclenche « la procédure d’investigation fiscale („Ermittlungsverfahren“) » afin de procéder à la « fixation définitive de l’impôt »19.

Le législateur a partant conféré un caractère discrétionnaire à la décision du bureau d’imposition compétent de recourir à la procédure du § 100a AO plutôt que d’émettre un bulletin formel suite à une instruction du cas d’imposition et le même caractère doit être retenu en ce qui concerne son option de faire ultérieurement usage de son pouvoir d’instruire le cas d’imposition et d’émettre un bulletin définitif20.

En l’espèce, la société demanderesse fait valoir, en substance, que le bureau d’imposition aurait dû procéder au « contrôle ultérieur » visé au § 100a AO afin de tenir compte de l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021 qui aurait, non pas seulement reconnu l’applicabilité de la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012 aux années d’imposition concernées dans cette affaire, mais également aux années d’imposition subséquentes et plus particulièrement jusqu’à l’année d’imposition 2018 incluse.

La décision du bureau d’imposition, et plus particulièrement la terminologie y employée, révèle que ce dernier n’a pas refusé, dans son principe, d’effectuer le « contrôle ultérieur » demandé, mais a, en substance, indiqué qu’il déterminerait, de son propre chef, l’opportunité de procéder audit contrôle. Le bureau d’imposition doit, dès lors, être considéré comme ayant refusé d’y procéder à la date où il a pris sa décision, en l’occurrence le 24 mai 2022, et non pas de ne pas y procéder du tout.

Cette configuration du litige opposant les deux parties est à rapprocher du § 2 de la loi d’adaptation fiscale du 16 octobre 1934, telle que modifiée, appelée « Steueranpassungsgesetz », en abrégé « StAnpG », bien que non invoqué de part et d’autre, étant donné que toute décision discrétionnaire est soumise aux règles de fond générales y contenues en ce sens qu’elle doit répondre aux conditions d’équité et d’opportunité.

Cette exigence s’applique non pas seulement lorsque l’administration prend une décision positive, mais également, lorsque comme en l’espèce, l’administration décide de ne pas exercer un pouvoir21, à savoir son pouvoir d’instruction et de contrôle.

En effet, aux termes du § 2 StAnpG, « (1) Entscheidungen, die die Behörden nach ihrem Ermessen zu treffen haben (Ermessensentscheidungen) müssen sich in den Grenzen halten, die das Gesetz dem Ermessen zieht.

(2) Innerhalb dieser Grenzen sind Ermessensentscheidungen nach Billigkeit und Zweckmäßigkeit zu treffen ».

Tandis que l’alinéa (1) du § 2 StAnpG prévoit que l’administration doit, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, respecter les limites légales qui lui sont imposées par le 18 Doc. parl. 5757, Commentaire des articles, Ad article 18, page 15 ; Cour adm., 13 février 2020, n° 43115C du rôle, disponible sur le site www.justice.public.lu.

19 Doc. parl. 5757, Commentaire des articles, Ad article 18, page 15.

20 Cour adm., 13 février 2020, n° 43115C du rôle, disponible sur le site www.justice.public.lu.

21 Cour adm., 13 février 2020, n° 43115C du rôle, disponible sur le site www.justice.public.lu.

32législateur, c’est l’alinéa (2) de la même disposition qui établit le principe général selon lequel chaque fois que l’administration se voit reconnaître un pouvoir discrétionnaire en vue de l’adoption d’une certaine décision, elle est tenue d’exercer son pouvoir de telle manière que sa décision soit conforme aux critères de la « Billigkeit und Zweckmäßigkeit » qui sont communément traduits par les termes de l’équité et de l’opportunité22.

La « Zweckmäßigkeit » ou l’opportunité comporte, en premier lieu, une limite « extérieure » à l’action de l’administration en ce que la mesure envisagée doit être conforme au but de la loi et à l’intention du législateur, dont surtout l’application des lois fiscales en conformité avec le principe d’égalité, et, en deuxième lieu, à l’intérieur de cette limite l’exigence que ladite mesure permette le mieux d’atteindre utilement le but recherché23.

Toutefois, il est admis que si le respect de cette première limite doit être examiné par le juge administratif, le contrôle juridictionnel relatif au choix du moyen le plus approprié pour y parvenir se limite, quant à lui, à vérifier si l’autorité s’est laissée guider par des considérations objectives dans son action et a pris une décision opportune à cet égard, sans toutefois qu’une opinion éventuellement différente du juge sur la solution opportune à cet égard puisse conduire à l’annulation de l’acte contesté24.

En l’espèce, le tribunal est amené à retenir que la décision du bureau d’imposition de refuser de procéder au « contrôle ultérieur » le 24 mai 2022 s’inscrit en conformité avec l’objectif poursuivi par le § 100a AO en ce qu’elle se fonde implicitement mais nécessairement sur la liberté d’action lui conférée par le législateur.

D’abord, d’un point de vue temporel, le bureau d’imposition a valablement pu considérer opportun de ne pas procéder, à la date du 24 mai 2022, au « contrôle ultérieur » des bulletins d’imposition émis le 10 avril 2019 et 2 janvier 2020 au seul motif de l’existence de l’arrêt de la Cour administrative rendu un peu plus de quatre mois plus tôt, soit le 16 décembre 2021, compte tenu de la latitude qui lui restait, à cette date, pour décider d’y procéder, le délai de 5 ans visé au § 100a AO expirant le 10 avril 2024 pour les bulletins relatifs à l’« exercice 2017 », respectivement le 2 janvier 2025 pour les bulletins relatifs à l’« exercice 2018 ». Le bureau d’imposition peut, en effet, légitimement déterminer, endéans la limite légale de 5 ans, le moment opportun afin de procéder à un « contrôle ultérieur » suivant des considérations qui lui sont propres, tenant notamment à son organisation interne, dans laquelle le contribuable n’a pas à interférer, ni d’ailleurs le juge de l’impôt.

Ensuite, il n’est pas non plus inopportun pour le bureau d’imposition d’avoir refusé le « contrôle ultérieur » en date du 24 mai 2022 en rejetant le motif avancé par la société demanderesse suivant lequel la solution dégagée par la Cour administrative dans son arrêt du 16 décembre 2021 serait contraire à son imposition provisoire établie antérieurement et portant sur des années d’imposition différentes audit arrêt, en l’occurrence ultérieures. Il ne ressort, en effet, pas des éléments soumis à l’appréciation du tribunal que l’applicabilité de la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012 aurait été reconnue par la Cour administrative pour les 22 Cour adm., 13 février 2021, n° 45185C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 1024 et les autres références y citées.

23 Ibidem.

24 Hübschmann-Hepp-Spitaler, Kommentar zur Reichsabgabenordnung, Verlag Dr. Otto Schmidt KG Köln, § 2 StAnpG, Anm. 66: Während aber die Ausrichtung auf den Zweck des Gesetzes eine auf ihre Einhaltung verwaltungsgerichtlich zu prüfende Rechtsschranke beinhaltet, ist die gerichtliche Prüfung hinsichtlich der Auswahl des zweckmäßigsten Mittels darauf beschränkt, zu prüfen, ob sich die Behörde bei ihrer Tätigkeit von sachlichen Erwägungen leiten ließ und eine insoweit zweckmäßige Entscheidung getroffen hat, ohne dass aber eine möglicherweise andere Auffassung des Gerichts über die insoweit zweckmäßige Lösung zur Aufhebung des angefochtenen Aktes führen könnte.

33années postérieures à celles visées dans l’arrêt du 16 décembre 2021, alors que dans cette affaire, la société demanderesse s’est limitée à contester les « années d’imposition 2014 à 2016 », tel que retenu ci-avant, et que la Cour administrative a reconnu l’applicabilité de ladite décision fiscale anticipée « pour les années d’imposition en question ». Admettre la thèse de la société demanderesse reviendrait, dès lors, à étendre l’autorité de la chose jugée à un cas d’imposition n’ayant pas fait l’objet du litige. Elle contreviendrait encore au principe de l’annualité de l’impôt, consacré notamment à l’article 1er LIR, qui requiert que la situation du contribuable soit considérée pour chaque année d’imposition suivant des données et caractéristiques propres, établies du moment. Cette conclusion s’impose d’autant plus que l’administration peut revenir sur l’acceptation de l’accord en ce sens que les renseignements fournis par elle ne la lient plus, si la situation de fait qui s’est réalisée diverge de celle à la base des renseignements fournis25. Or, aucun élément soumis à l’appréciation du tribunal ne permet de retenir que la situation gisant à la base de la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012 n’aurait pas changé pour les années d’imposition 2017 et 2018. Il s’ensuit que la décision fiscale anticipée en question n’est pas ipso facto applicable aux années d’imposition 2017 et 2018, tel que relevé à juste titre par le délégué du gouvernement.

En tout état de cause, même à admettre que l’applicabilité de la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012 aurait été reconnue « sans limite de temps » par la Cour administrative, tel que l’affirme la société demanderesse, force est de constater qu’exiger du bureau d’imposition qu’il renonce à son choix d’une imposition suivant déclaration pour que la société demanderesse voit sa cote d’impôt, jusqu’alors fixée provisoirement, modifiée dans un sens qu’elle estime lui être favorable, malgré l’autorité de la chose décidée dont est revêtue son imposition provisoire, irait à l’encontre de l’objectif poursuivi par le § 100a AO, en ce sens que le choix discrétionnaire du bureau d’imposition lui octroyé par le législateur de pouvoir imposer le contribuable suivant les données fournies par lui dans sa déclaration, tout en se réservant un droit de contrôle endéans le délai de 5 ans, serait vidé de sa substance au seul motif que la société demanderesse n’a pas exercée les voies de recours légalement prévues à cet effet par le législateur, que ce soit en cours de phase précontentieuse ou au cours de la phase contentieuse.

L’argumentation de la société demanderesse révèle, en effet, une volonté de voir sa cote d’impôt fixée, d’une part, dans le bulletin rectificatif de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2017 et le bulletin rectificatif de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2018, tous émis le 10 avril 2019, et, d’autre part, dans les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année d’imposition 2018, et le bulletin l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2019, tous émis le 2 janvier 2020, modifiée.

C’est dans cette optique que doit être comprise l’argumentation du délégué du gouvernement suivant laquelle la société demanderesse tenterait de « contourner la forclusion du délai de recours à l’encontre des bulletins définitifs » et que le tribunal ne pourrait que « constater la forclusion du délai de recours contre les contre les bulletins IRC 2017 du 10 avril 2019, de l’IRC et de l’ICC 2018 du 2 janvier 20[20], de l’IF 2018 du 14 avril 2019 et de l’impôt sur la fortune 2019 du 2 janvier 2020. ».

De l’entendement du tribunal, la position du représentant étatique justifiant le refus de procéder au « contrôle ultérieur » réside dans le fait que les bulletins d’imposition dont la société demanderesse réclame le « contrôle ultérieur » seraient coulés en force de chose 25 Cour adm., 12 juillet 2016, n° 37448C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 923 (2e volet).

34décidée à défaut d’avoir fait l’objet d’une réclamation et que faire droit au « contrôle ultérieur » reviendrait à contourner l’autorité de la chose décidée en procédant à un réexamen du bien-fondé de l’imposition relative aux années d’imposition 2017 et 2018.

Par rapport à l’« exercice 2017 » et plus particulièrement au bulletin rectificatif de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2017 et au bulletin rectificatif de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2018, émis le 10 avril 2019, le tribunal relève que la société demanderesse a effectivement déjà introduit une réclamation à leur encontre en date du 10 mai 2019.

Dans sa décision du 12 août 2019 ayant abouti à l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021, le directeur a ainsi certes rejeté comme non fondée la réclamation en question par rapport à ces bulletins en décidant, compte tenu des dispositions du § 100a AO, que son analyse ne pouvait se limiter qu’à une vérification d’ « erreurs manifestes », à l’exclusion d’une « analyse détaillée et approfondie », afin de ne pas priver le bureau d’imposition de son droit au contrôle ultérieur26. Indépendamment du bien-fondé de ce volet de la décision compte tenu du fait que le droit de recours du contribuable contre un bulletin émis sur le fondement du § 100a AO est pourtant ouvert sans limites et avec la même portée qu’un bulletin définitif27, le tribunal constate qu’il ne ressort cependant ni du jugement du tribunal administratif du 19 mai 2021, ni de l’arrêt de la Cour administrative au 16 décembre 2021 que dans le cadre de ses recours contentieux afférents, la société demanderesse aurait contesté ce volet de la décision directoriale portant sur les deux bulletins d’impôt, précités, émis le 10 avril 2019. Il en ressort, au contraire, que la société demanderesse s’est limitée à contester les redressements effectués par le bureau d’imposition, tels qu’envisagés dans son courrier émis en application du § 205, alinéa (3) AO « pour les années d’imposition 2014 à 2016 » et que la question de l’imposition, quant au fond, relative à l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année d’imposition 2017, ainsi qu’à l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2018, n’a pas été déférée aux juridictions administratives, la société demanderesse n’ayant formulé aucune contestation visant à remettre en cause le volet de la décision directoriale afférent.

Dans ces conditions, la société demanderesse doit être considérée comme ayant déjà introduit une réclamation contre les deux bulletins sous analyse émis le 10 avril 2019 dont le volet de la décision directoriale afférent n’a, en revanche, pas fait l’objet d’une contestation dans le cadre d’un recours contentieux justement afin d’exiger l’application de la décision 26 « […] que le réexamen directorial se confinera dès lors, en ce qui concerne le fond, à analyser la conformité du bulletin aux indications de la déclaration ; qu’instruire au contentieux la conformité à la loi et aux faits de la cause au-delà de ces limitations reviendrait à priver le bureau d’imposition de son droit au contrôle ultérieur et le contribuable de voir le bulletin émis en vertu du § 100a AO acquérir, le cas échéant, la qualité d’imposition définitive après expiration du délai de prescription de cinq ans, tel que prévu au § 100a, alinéa 3 AO ; […] […] dans le cadre d’une réclamation contre un bulletin d’impôt émis sur pied du § 100a AO, il importe tout d’abord de vérifier la nature des griefs exprimés par la partie requérante ; que si ceux-ci concernent des erreurs manifestes qui se laissent constater au premier coup d’œil (p.ex. : inversion de chiffres, erreur matérielle manifeste,…), le directeur peut valablement procéder, le cas échéant, à leur redressement, alors que s’ils constituent des erreurs qui ne se dégagent que d’une analyse détaillée, approfondie, et à la lumière des textes de loi y intervenant, il y a lieu d’annuler le bulletin en cause, une imposition suivant le § 100a AO s’avérant inadéquate pour avoir violé implicitement les dispositions du § 205 AO, notamment celles se dégageant du 3e alinéa ;

Considérant qu’en ce qui concerne le cas d’espèce, l’analyse au contentieux a révélé que les impositions établies conformément aux dispositions du § 100a AO ne diffèrent en aucun point des données fournies par la réclamante au niveau de ses déclarations fiscales […] ».

27 Cour adm., 9 août 2017, n° 38981C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 1150.

35fiscale anticipée du 5 novembre 2012, comme elle l’a pourtant fait pour les années d’imposition 2014 à 2016. La décision directoriale en question doit dès lors, sous ce volet, être considérée comme revêtant l’autorité de la chose décidée.

Ensuite, au sujet de l’« exercice 2018 », le tribunal constate qu’il ne ressort d’aucun élément soumis à son appréciation que la société demanderesse aurait introduit une réclamation contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année d’imposition 2018, et le bulletin l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2019, tous émis le 2 janvier 2020, soit à une date où l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021 avait pourtant déjà été rendu. En conséquence, ces bulletins doivent être considérés comme revêtant l’autorité de la chose décidée, de sorte que la société demanderesse se trouve forclos à agir à leur encontre en application des §§ 83, alinéa (2)28 et 245, alinéa (1)29 AO. Aucun élément soumis à l’appréciation du tribunal ne révèle pourquoi la société demanderesse n’a pas estimé utile, voire opportun d’introduire une réclamation par rapport à ces bulletins pour contester le refus d’application de la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012, comme elle l’a pourtant fait pour les années d’imposition 2014 à 2016.

Dans ces conditions, tant le choix de ne pas contester le volet de la décision directoriale du 12 août 2019 quant au bulletin rectificatif de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2017 et au bulletin rectificatif de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2018, d’une part, que celui de ne pas introduire de réclamation contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année d’imposition 2018, et le bulletin de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2019, d’autre part, ne sauraient partant constituer un motif valable de nature à qualifier le refus du bureau d’imposition de ne pas procéder au « contrôle ultérieur » de ces mêmes bulletins comme étant inopportun, voire inéquitable, la société demanderesse ayant elle-même estimé inopportun d’exercer les voies de recours légalement prévues à cet effet pour des raisons qui lui appartiennent.

C’est, par ailleurs, à tort que la société demanderesse fait valoir que l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021 constituerait un « fait nouveau » qui n’aurait, de l’entendement du tribunal, pas été à la connaissance du bureau d’imposition au moment de l’émission des bulletins d’impôt émis le 2 janvier 2020. A cet égard, le tribunal précise encore, pour autant que la société demanderesse ait entendu se référer au § 222, alinéa (1) AO, qu’une rectification faite en application de cette disposition n’est, en tout état de cause, pas de nature à ouvrir au contribuable un droit de révision de sa situation fiscale déjà couverte par l’autorité de la chose décidée30, indépendamment de la question de l’applicabilité de cette disposition aux bulletins émis sur le fondement du § 100a AO.

Pour être tout à fait complet, le tribunal tient à relever qu’il se dégage certes des explications de part et d’autre qu’aucun « contrôle ultérieur » n’a été effectué à ce jour par rapport aux bulletins d’imposition du 10 avril 2019 relatif à l’« exercice 2017 », de sorte qu’ils doivent être considérés comme emportant fixation de l’impôt de manière définitive compte tenu de l’expiration du délai de 5 ans au jour où le tribunal statue. Or, encore qu’il soit permis au juge de l’annulation, dans une démarche de mise en perspective des faits constants en cause 28 § 83, alinéa (2) AO: « Fristen zur Einlegung eines Rechtsmittels sind Ausschlussfristen. Unter Rechtsmitteln im Sinn der §83, 84 und 87 ist auch der Antrag auf Nachsicht im Fall des §86 zu verstehen. ».

29 § 245, alinéa (1) AO : « Le délai de recours est de trois mois pour les réclamations (§228 AO) et de trois mois au contentieux des actes détachables (§237 AO). ».

30 Cour adm., 11 janvier 2007, n° 21679C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 1073 et les autres références y citées.

36dans une optique de mise en cohérence à moyen voire long terme, d’avoir égard à des faits ultérieurs à la date de la décision administrative critiquée devant lui, il n’en reste pas moins que ces faits ne peuvent pas influer directement quant au bien-fondé de cette décision, dans la mesure où ils n’ont pas pu être, par la force des choses, à la connaissance des parties à l’époque où ces décisions ont été prises31. Dès lors, la circonstance que le bureau d’imposition ait in fine décidé, conformément à son pouvoir discrétionnaire, de ne pas procéder au « contrôle ultérieur » de l’« exercice 2017 » au sens du § 100a AO, ne saurait constituer un motif de nature à démontrer le caractère inopportun de sa décision de refus prise le 24 mai 2022.

Le tribunal retient, ensuite, que c’est à tort que la société demanderesse se prévaut d’un « droit » dont elle disposerait en tant que contribuable à exiger un « contrôle ultérieur » compte tenu du principe de légalité de l’impôt et du § 204 AO qui prévaudrait, de par sa généralité, à la disposition spécifique que serait le § 100a AO.

D’abord, le tribunal relève, d’un point de vue formel, que la nomenclature de l’AO révèle que c’est justement la solution inverse qui a été retenue par le législateur. Le § 100a a été inséré sous le « Erster Abschnitt: Allgemeine Vorschriften » du « Zweiter Teil :

Besteuerung » de la loi, et plus particulièrement sous le « 1. Entstehung. Fälligkeit » figurant sous le point « I. der Steueranspruch », lui-même incorporé sous le « Zweiter Unterabschnitt:

Sachliche Vorschriften ». Il s’ensuit que la procédure visée au § 100a AO fait partie des règles de fond revêtant un caractère général. De son côté, le § 204 AO ne figure pas parmi ces dispositions générales, puisqu’il relève certes du « Zweiter Teil : Besteuerung » de l’AO comme le § 100a, mais qu’il est inséré sous le « Zweiter Unterabschnitt : Ermittlungs-und Festsetzungsverfahren » relevant du « Zweiter Abschnitt: Ermittlung und Festsetzung der Steuer ». Le 204 AO concerne ainsi la procédure de détermination et de fixation de l’impôt.

Ensuite, les dispositions des §§ 100a et 204 AO ne sont pas à analyser de façon hiérarchique, étant donné que l’application de l’un exclut nécessairement l’application de l’autre et que le bureau d’imposition est seul compétent pour déterminer quelle procédure et quelle disposition sera appliquée au cas d’imposition donné. Il se dégage, en effet, des travaux parlementaires prémentionnés que lorsque le bureau d’imposition a recours au § 100a, la procédure du « Ermittlungsverfahren » n’est justement pas déclenchée, de sorte qu’il n’est pas fait application du § 204 AO. A l’inverse, le bureau d’imposition déclenchant dès le début la procédure d’instruction et de contrôle conformément à cette dernière disposition ne peut plus recourir au § 100a AO, l’imposition revêtant alors un caractère définitif, sous réserve de l’exercice des voies de recours ordinaires.

Cette solution adoptée par le législateur ne contrevient d’ailleurs pas au principe de légalité de l’impôt, alors que les voies de recours dont dispose le contribuable pour voir vérifier la légalité et le bien-fondé de sa cote d’impôt sont identiques, que les bulletins aient été émis sur le fondement du § 100a AO ou qu’il s’agisse de bulletins formels portant fixation d’une cote d’impôt au sens du § 211 AO32, tel que retenu ci-avant.

Il résulte de ces considérations que la société demanderesse n’est pas fondée à reprocher au directeur d’avoir méconnu le principe de légalité de l’impôt et les dispositions du § 204 AO en décidant de confirmer le bureau d’imposition dans son refus de procéder au « contrôle ultérieur » visé au § 100a AO.

31 Cour adm., 4 juin 2013, n° 32144C, Pas. adm. 2023, V° Recours en annulation, n° 26 et l’autre référence y citée.

32 Cour adm., 9 août 2017, n° 38981C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 1150.

37 La référence faite au « Anspruch auf Gehör » est, quant à elle, dénuée de pertinence en l’espèce, alors que la question de l’exercice par le bureau d’imposition d’un « contrôle ultérieur » visé au § 100a AO est étrangère à celle de la possibilité pour le contribuable d’être entendu, que ce soit à travers le dépôt d’une réclamation, d’une contestation ou d’une prise de position dans le cadre du § 205, alinéa (3) AO pour autant que son imposition repose exclusivement sur la déclaration fiscale, de sorte à écarter toute divergence et a fortiori toute divergence significative (« wesentliche Abweichung »).

Quant à la violation alléguée du principe d’égalité, les contestations afférentes encourent le rejet pour être simplement suggérées, le tribunal n’ayant pas à suppléer à la carence de la société demanderesse sous peine de violation des droits de la défense.

A défaut d’autres éléments mis en avant par la société demanderesse, le tribunal retient qu’aucun reproche ne saurait être fait au bureau d’imposition de ne pas avoir accédé, en date du 24 mai 2022, à sa demande de « contrôle ultérieur » visé au § 100a AO, sa décision de refus devant, au contraire, être considérée comme étant conforme aux principes visés au § 2 StAnpG.

C’est, dès lors, à bon droit que directeur a pu confirmer le bureau d’imposition dans son refus de procéder, à cette date, au « contrôle ultérieur » sollicité par la société demanderesse.

Quant au moyen tiré d’une violation des §§ 29 et 46, alinéa (2) AO, le tribunal relève qu’aux termes du § 46 AO : « (1) Der Steuerdirektor hat die Leitung der Steuerverwaltung. Er überwacht die Gleichmäßigkeit der Gesetzesanwendung und beaufsichtigt die Geschäftsführung der Steuerkontrollstellen.

(2) Der Steuerdirektor und der Finanzminister können im Aufsichtsweg Verfügungen nachgeordneter Behörden von Amts wegen oder auf Gegenvorstellung hin außer Kraft setzen und diese Behörden anweisen; Verfügungen können jedoch nur dann außer Kraft gesetzt werden, wenn sie von den nachgeordneten Behörden zurückgenommen werden können. ».

De son côté, le § 29 AO dispose comme suit : « (1) Die Steuerkontrollstellen stehen unter Leitung von Vorstehern, (Steuerinspektoren oder Steuerkontrolleuren), denen die erforderlichen Beamten beigegeben werden. Mit Vertretung der Vorsteher im allgemeinen oder mit Wahrnehmung einzelner Dienstgeschäfte der Vorsteher können andere Beamte betraut werden.

(2) Die Vorsteher haben darauf zu halten, dass die Steuern in ihrem Bezirk nach dem Gesetz verwaltet und alle Steuerpflichtigen gleichmäßig behandelt werden. Sie haben alles, was für die Festsetzung der Steuern in ihrem Bezirk wichtig ist, sorgfältig zu erkunden und die Nachrichten darüber zu sammeln und fortlaufend zu ergänzen. ».

Le § 46, alinéa (1) AO confère au directeur la mission de diriger l’administration des Contributions directes et de superviser les bureaux d’imposition pour s’assurer du respect, par ces derniers, du principe d’égalité et de la bonne gestion des cas d’imposition. Cette disposition du § 46, alinéa (1), 2e phrase AO doit être rapprochée de celle du § 29 AO et plus particulièrement son alinéa (2) dans le sens que le préposé du bureau d’imposition est investi d’une compétence propre pour le traitement des cas d’imposition individuels, mais qu’il doit l’exercer en conformité aux principes de légalité et d’égalité et que l’exercice de la compétence et plus particulièrement le respect de ces principes est soumis à la surveillance du directeur.

38 Le § 46, alinéa (2) AO prévoit, quant à lui, deux instruments d’exercice de cette surveillance par le directeur, en l’occurrence d’abord le pouvoir de rapporter d’office une décision (« Verfügungen untergeordneter Behörden von Amts wegen oder auf Gegenvorstellung hin außer Kraft setzen »), ainsi que le pouvoir d’enjoindre aux autorités subordonnées de faire quelque chose (« diese Behörden anweisen »). Le directeur peut user de ces deux instruments, tant pour donner des directives générales que dans le cadre d’un ou de plusieurs cas d’imposition individuels. Ces deux instruments d’exercice de cette surveillance par le directeur constituent deux compétences distinctes et indépendantes l’une de l’autre à défaut d’un ordre de subsidiarité prévu entre elles, la compétence d’injonction à travers des directives générales étant nécessairement indépendante de la faculté de rapporter une décision dans un cas d’imposition individuel.

Cependant, ces deux compétences du directeur sont limitées en ce sens que les deux instruments y prévus autorisent celui-ci à enjoindre au bureau d’imposition de prendre une décision conforme à sa directive, mais ne lui permettent pas de se substituer au bureau d’imposition pour prendre à sa place des décisions dans le cadre de cas d’imposition individuels33.

Il s’ensuit que c’est à bon droit que le directeur a, en l’espèce, refusé de faire droit à la demande de la société demanderesse fondée sur ces dispositions.

En effet, contrairement à ce que soutient la société demanderesse, le fait pour le directeur de rapporter la décision de refus du bureau d’imposition aurait, le cas échéant, uniquement abouti à son annulation et non pas à la prise d’une nouvelle décision du bureau d’imposition et a fortiori positive visant à procéder au « contrôle ultérieur » sollicité par la société demanderesse. Tel que retenu ci-avant sur le fondement du § 100a AO, le bureau d’imposition a, en effet, une compétence discrétionnaire, d’ailleurs exclusive, pour décider d’effectuer un « contrôle ultérieur » ou de le refuser. De la même manière, une injonction directoriale adressée au bureau d’imposition d’effectuer le « contrôle ultérieur » ne remet pas en cause la règle de principe que seul le bureau d’imposition peut in fine prendre une décision positive à cet égard.

En tout état de cause, si le contribuable est en droit de voir contrôler par le directeur, par voie de recours hiérarchique formel (« Beschwerde ») au sens du § 237 AO, une décision discrétionnaire prise par un bureau d’imposition, compte tenu des compétences lui conférées par le § 46 AO, il n’en reste pas moins que le directeur ne peut pas y être contraint par un contribuable ayant décidé de renoncer formellement à introduire un recours (« Rechtsmittel »), alors que le contribuable désireux d’obtenir une décision (« Rechtsentscheidung ») doit exercer les voies de recours ordinaires prévues à cet effet34.

Or, tel que retenu ci-avant, c’est en connaissance de cause que la société demanderesse a décidé, d’une part, de ne pas contester le volet de la décision directoriale du 12 août 2019 quant au bulletin rectificatif de l’impôt sur le revenu des collectivités de l’année 2017 et au bulletin rectificatif de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2018, et, d’autre part, de ne pas introduire de réclamation contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des collectivités et de la base d’assiette de l’impôt commercial communal de l’année d’imposition 2018, et le bulletin 33 Cour adm. 29 juillet 2009, n° 25165C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 898 et les autres références y citées.

34 Hübschmann-Hepp-Spitaler, Kommentar zur Reichsabgabenordnung, Verlag Dr. Otto Schmidt KG Köln, § 2 StAnpG, Anm. 85.

39de l’impôt sur la fortune au 1er janvier 2019. Il s’ensuit que la société demanderesse n’est pas fondée à exiger actuellement du directeur qu’il intervienne pour forcer le bureau d’imposition à prendre une décision – en l’occurrence à travers l’émission de bulletins d’impôt définitifs – dans le sens voulu par elle, qui serait, le cas échéant, susceptible de faire l’objet d’une réclamation pour en contester les cotes d’impôts définitives et voir in fine prendre en compte la solution de l’arrêt de la Cour administrative du 16 décembre 2021.

Le moyen de la société demanderesse encourt, dès lors, le rejet.

Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours est à déclarer non fondé et qu’il est à rejeter.

C) Quant à l’indemnité de procédure Au vu de l’issue du recours inscrit sous le numéro 48096 du rôle, la demande en allocation d’une indemnité de procédure de 5.000 euros fondée sur l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 est à rejeter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, cinquième chambre, statuant contradictoirement ;

joint les rôles inscrits sous les numéros 48096 et 47915 pour y être statué par un seul et même jugement ;

en ce qui concerne le recours inscrit sous le numéro 47915 du rôle se déclare incompétent pour statuer sur la demande de la société demanderesse d’enjoindre au bureau d’imposition « de modifier les Bulletins en tenant compte des pertes reportables dépenses déductibles, du contrat de prêt du 10 mai 2011 et de la décision fiscale anticipée du 5 novembre 2012 » ;

pour le surplus, reçoit le recours principal en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours en annulation introduit à titre subsidiaire ;

rejette la demande en paiement d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 euros formulée par la société demanderesse ;

condamne la société demanderesse aux frais et dépens de cette instance ;

en ce qui concerne le recours inscrit sous le numéro 48096 du rôle se déclare incompétent pour statuer sur la demande de la société demanderesse d’enjoindre au bureau d’imposition « de conduire le contrôle fiscal qui aboutira à modifier les Bulletins en conformité avec les conclusions de l’arrêt du 16 décembre 2022 de la Cour Administrative d’Appel » ;

40 se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre la décision directoriale du 28 juillet 2022 rendue sur recours hiérarchique formel ;

reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 euros formulée par la société demanderesse ;

condamne la société demanderesse aux frais et dépens de cette instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 18 septembre 2024 par :

Françoise EBERHARD, premier vice-président, Benoît HUPPERICH, premier juge, Nicolas GRIEHSER SCHWERZSTEIN, juge, en présence du greffier Lejila ADROVIC.

s.Lejila ADROVIC s.Françoise EBERHARD Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 18 septembre 2024 Le greffier du tribunal administratif 41


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : 47915,48096
Date de la décision : 18/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2024-09-18;47915.48096 ?

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