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09/01/2025 | LUXEMBOURG | N°47937

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 janvier 2025, 47937


Tribunal administratif N° 47937 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:47937 2e chambre Inscrit le 15 septembre 2022 Audience publique du 9 janvier 2025 Recours formé par la société à responsabilité limitée (AA) SARL, …, contre une décision du conseil communal de Schengen et une décision du ministre de l’Intérieur en présence de la société à responsabilité limitée (BB) SARL en matière de plan d’aménagement particulier

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47937 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 15 sep

tembre 2022 par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES SA, inscrite sur la liste V du table...

Tribunal administratif N° 47937 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:47937 2e chambre Inscrit le 15 septembre 2022 Audience publique du 9 janvier 2025 Recours formé par la société à responsabilité limitée (AA) SARL, …, contre une décision du conseil communal de Schengen et une décision du ministre de l’Intérieur en présence de la société à responsabilité limitée (BB) SARL en matière de plan d’aménagement particulier

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47937 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 15 septembre 2022 par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES SA, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2146 Luxembourg, 63-65, rue de Merl, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B240929, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée (AA) SARL, établie et ayant son siège social à L-…, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son gérant actuellement en fonctions, tendant à l’annulation 1) de la « […] délibération du conseil communal de Schengen datée du 19 mai 2022, portant approbation du projet d’aménagement particulier concernant des fonds sis à Emerange, commune de Schengen, au lieu-dit « … » […] » et 2) de la « […] décision d’approbation de la Ministre de l’intérieur du 11 juillet 2022 approuvant la délibération du conseil communal du 19 mai 2022 portant approbation du projet d’aménagement particulier concernant des fonds sis à Emerange, commune de Schengen, au lieu-dit « … » […] » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Kelly FERREIRA SIMOES, en remplacement de l’huissier de justice Frank SCHAAL, demeurant à Luxembourg, des 20 et 21 septembre 2022, portant signification de ce recours à l’administration communale de Schengen, ayant sa maison communale à L-5540 Remerschen, 75, Waistrooss, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions, ainsi qu’à la société à responsabilité limitée (BB) SARL, établie et ayant son siège social à L-…, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son gérant actuellement en fonction ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 23 septembre 2022 par Maître Steve HELMINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Schengen, préqualifiée ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 3 octobre 2022 par la société à responsabilité limitée ELVINGER DESSOY MARX SARL, inscrite 1sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1461 Luxembourg, 31, rue d’Eich, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B251584, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Serge MARX, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée (BB) SARL, préqualifiée ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 3 octobre 2022 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH SA, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F. Kennedy, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B186371, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Christian POINT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 15 décembre 2022 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH SA, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 16 décembre 2022 par la société à responsabilité limitée ELVINGER DESSOY MARX SARL, au nom de la société à responsabilité limitée (BB) SARL, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 20 décembre 2022 par Maître Steve HELMINGER, au nom de l’administration communale de Schengen, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 20 janvier 2023 par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES SA, au nom de la société à responsabilité limitée (AA) SARL, préqualifiée ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 20 février 2023 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH SA, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 20 février 2023 par la société à responsabilité limitée ELVINGER DESSOY MARX SARL, au nom de la société à responsabilité limitée (BB) SARL, préqualifiée ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 20 février 2023 par Maître Steve HELMINGER, au nom de l’administration communale de Schengen, préqualifiée ;

Vu les pièces versées en cause ainsi que les actes attaqués ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Sébastien COUVREUR, en remplacement de Maître Georges KRIEGER, Maître Steve HELMINGER, Maître Martial BARBIAN, en remplacement de Maître Christian POINT, et Maître Serge MARX en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 14 octobre 2024.

_____________________________________________________________________________

2Lors de sa séance du 5 janvier 2022, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Schengen, ci-après désigné par « le collège échevinal », avisa favorablement le projet de plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » (« PAP NQ »), dénommé « … », introduit par le bureau d’architectes (CC) SARL, au nom et pour le compte de la société à responsabilité limitée (BB) SARL, ci-après désignée par « la société (BB) », concernant les parcelles inscrites au cadastre de la commune de Schengen, section … d’Emerange, sous les numéros (P1) et (P2), ci-

après désignées par « les parcelles (P1) et (P2) », en vue de l’aménagement sur celles-ci de huit unités d’habitation « en maison unifamiliale du type maison isolée ».

Le 26 janvier 2022, la cellule d’évaluation auprès du ministère de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministère », émit son avis au sujet du projet de PAP NQ.

Suite au dépôt et à la publication du projet de PAP NQ à la maison communale à compter du 12 janvier 2022 jusqu’au 10 février 2022 inclus, la société à responsabilité limitée (AA) SARL, ci-après désignée par « la société (AA) », s’adressa, par courrier de son litismandataire du 8 février 2022, au collège échevinal pour faire valoir ses observations et objections à l’encontre du projet de PAP NQ.

Suite à l’avis de la cellule d’évaluation auprès du ministère du 26 janvier 2022, prémentionné, et suite aux observations et objections introduites par courrier, prémentionné, du 8 février 2022 à l’encontre du projet de PAP NQ par la société (AA), ledit projet de PAP NQ fut modifié.

Lors de sa séance publique du 19 mai 2022, le conseil communal de Schengen, ci-après désigné par « le conseil communal », adopta le projet de PAP NQ « … », tel que modifié, en tenant compte de l’avis, prémentionné, de la cellule d’évaluation auprès du ministère délivré le 26 janvier 2022 et de certaines objections formulées par la société (AA) dans son courrier, prémentionné, du 8 février 2022.

Par décision du 11 juillet 2022, le ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », approuva la délibération, prémentionnée, du conseil communal du 19 mai 2022 portant adoption du projet de PAP NQ « … ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 15 septembre 2022, la société (AA) a fait introduire un recours tendant à l’annulation 1) de la « […] délibération du conseil communal de Schengen datée du 19 mai 2022, portant approbation du projet d’aménagement particulier concernant des fonds sis à Emerange, commune de Schengen, au lieu-dit « … » […] » et 2) de la « […] décision d’approbation de la Ministre de l’intérieur du 11 juillet 2022 approuvant la délibération du conseil communal du 19 mai 2022 portant approbation du projet d’aménagement particulier concernant des fonds sis à Emerange, commune de Schengen, au lieu-

dit « … » […] ».

I. Quant à la compétence du tribunal Le tribunal relève que les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à y ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé1.

1 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Actes réglementaires, n° 59 et les autres références y citées.

3 Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire.

Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en annulation.

II. Quant à la recevabilité du recours 1) Quant à l’intérêt à agir de la société (AA) Arguments de parties Dans sa requête introductive d’instance, la société demanderesse affirme avoir un intérêt à agir contre les décisions déférées en raison du fait que celles-ci empêcheraient, voire complexifieraient grandement l’urbanisation ultérieure de sa parcelle inscrite au cadastre de la commune de Schengen, section … d’Emerange, sous le numéro (P3). Elle s’empare, à cet égard, de différentes jurisprudences du tribunal administratif pour faire valoir qu’un administré ayant introduit une réclamation à l’encontre d’un projet d’aménagement particulier auprès du collège échevinal disposerait d’un intérêt à voir vérifier la légalité de la décision portant adoption dudit projet malgré ses objections et, dès lors, également la légalité de la décision ministérielle portant approbation de ladite décision.

Dans leurs mémoires en réponse respectifs, la partie communale, ainsi que la société (BB) concluent à l’irrecevabilité du recours sous analyse pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de la société (AA). La partie étatique se rapporte, quant à elle, à prudence de justice concernant l’existence d’un intérêt à agir dans le chef de la société (AA).

La partie communale, tout comme la société (BB) font, en substance, valoir qu’étant donné que le PAP NQ en cause ne compromettrait pas l’urbanisation de la parcelle de la société (AA), ledit Plan d’aménagement particulier (« PAP ») ne serait pas de nature à lui causer grief, de sorte qu’elle n’aurait aucun intérêt à agir contre les décisions déférées.

La partie communale conteste encore la justification avancée par la société (AA) selon laquelle elle disposerait d’un intérêt à agir contre les décisions déférées par le seul fait d’avoir introduit une réclamation contre le PAP NQ lui conférant, dès lors, le droit de faire vérifier le bien-fondé du rejet de sa réclamation par le juge administratif, en donnant à considérer que ni la commune, ni le ministre ne seraient compétents pour statuer sur l’existence ou non d’un intérêt à agir dans le chef d’un réclamant en raison du fait que ces deux instances seraient appelées à traiter toutes les réclamations qui leur seraient adressées par des réclamants endéans le délai légal sans procéder au préalable à la vérification de l’existence d’un intérêt à agir dans le chef de chacun desdits réclamants. Il s’ensuivrait que l’existence d’un intérêt à agir dans le chef d’un réclamant serait, à condition que ce dernier ait introduit un recours en annulation, vérifiée pour la première fois par le juge administratif.

La partie communale met, à cet égard, en évidence que méconnaître au juge administratif le droit de vérifier l’existence d’un intérêt à agir dans le chef d’un réclamant reviendrait à permettre à tout réclamant l’introduction d’un recours contentieux, sans que celui-ci ne soit dans l’obligation de justifier d’un tel intérêt à agir.

4La partie communale, tout en citant l’article 7 de la loi du 7 novembre 1996, conclut que la seule introduction d’une réclamation lors de l’enquête publique ne saurait suffire pour justifier d’un intérêt à agir, alors qu’il faudrait également apporter la preuve d’une lésion ou d’un intérêt personnel, direct, actuel et certain à agir, ce que la société (AA) resterait en défaut de faire.

Dans son mémoire en réplique, la société (AA) conteste les affirmations de la société (BB) selon lesquelles elle aurait obstinément refusé de participer à l’élaboration du PAP NQ sous examen, alors qu’il résulterait des pièces versées par la prédite société qu’elle aurait, au contraire, désiré participer au développement d’un « PAP global » et se serait uniquement opposée au développement d’un « PAP unilatéral » représentant les intérêts de la société (BB).

Elle avance, dans ce contexte, que la société (BB) aurait, quant au développement d’un PAP NQ, disposé de trois possibilités qu’elle n’aurait pas entendu contester. La société (BB) aurait, en effet, pu (i) demander au collège échevinal de prendre l’initiative d’élaborer un projet de PAP NQ qui aurait garanti l’égalité des citoyens devant les charges publiques et qui lui aurait permis de participer à l’élaboration dudit projet, sinon (ii) proposer l’élaboration commune d’un projet de PAP NQ, afin de lui permettre d’avoir son mot à dire concernant la planification urbanistique du site en question, sinon (iii) initier elle-même un projet de PAP NQ qui aurait tenu compte de l’urbanisation ultérieure de la parcelle (P3) et respecté ses droits et intérêts.

La société demanderesse estime que le simple fait pour la société (BB) d’avoir préféré développer un projet de PAP NQ à sa propre guise, ayant nui à ses droits et intérêts, serait de nature à justifier l’introduction du recours en annulation sous analyse, recours qui aurait, par ailleurs, été « totalement prévisible » en raison du fait qu’elle aurait rencontré à plusieurs reprises les représentants de la société (BB) dans l’optique de trouver un « terrain d’entente ». Elle explique avoir même formulé une « proposition de partage, en vue d’un développement commun », qui aurait cependant été rejetée par la société (BB) alors que celle-ci aurait « cherché […] à maximiser [son] profit ».

La société (AA), en s’appuyant sur un arrêt de la Cour administrative du 21 mars 2019 inscrit sous les numéros 41948C et 41949C du rôle, ainsi que sur un jugement du tribunal administratif du 21 février 2000 inscrit sous le numéro 11206 du rôle, fait valoir que sa parcelle ne serait pas intégralement urbanisable en raison du fait que l’accès vers ladite parcelle ne serait garanti que par une des deux voies carrossables existantes. Toutefois la configuration du PAP NQ tel qu’adopté et approuvé ne permettrait que la construction de seulement deux maisons sur la parcelle (P3) et non pas la construction de quatre maisons sur celle-ci, telle qu’envisagée dans le rapport justificatif du bureau d’architectes (CC) SARL du 22 mars 2022, en raison du fait que l’un des accès vers ladite parcelle, prévu depuis la rue … et situé entre le lot numéro … et le lot numéro … du PAP NQ, ne serait, en conséquence de la modification « illégale » de la délimitation initiale de l’assiette dudit PAP NQ, pas garanti.

La société demanderesse donne encore à considérer que l’exclusion de la parcelle litigeuse de l’assiette du PAP NQ sous analyse ne permettrait pas de réaliser « ultérieurement » sur celle-

ci des maisons de qualité urbanistique et architecturale suffisante, ladite parcelle ayant, à certains endroits, une profondeur maximale de 12 mètres, ce qui ne permettrait que de réaliser « des maisons de 6 mètres (brut) de largeur, avec 3 mètres de reculs latéraux imposés ».

Elle estime qu’en tout état de cause, elle aurait la qualité de réclamante déboutée, qualité à elle seule suffisante pour démontrer l’existence d’un intérêt à agir dans son chef.

Dans leurs mémoires en duplique respectifs, la partie communale et la société (BB) 5maintiennent leur moyen d’irrecevabilité en renvoyant, en substance, à leurs développements antérieurs, la partie communale ajoutant que la modification opérée dans le projet de PAP NQ, ayant consisté à exclure une partie de la parcelle (P2) de l’assiette dudit PAP NQ aurait justement découlé de la volonté de garantir la possibilité d’un développement urbanistique de qualité sur cette partie de la parcelle et non pas de la volonté de nuire à la société demanderesse.

Analyse du tribunal Le tribunal rappelle que concernant la question de l’intérêt à agir en matière de plan d’aménagement général (« PAG »), il ressort d’une jurisprudence constante des juridictions administratives2 que le recours introduit devant le juge administratif contre un projet d’aménagement général communal n’est recevable qu’à condition de l’épuisement de la procédure non contentieuse de réclamation, entraînant qu’en particulier l’omission d’emprunter la voie de la réclamation à adresser au gouvernement à l’encontre de la délibération portant adoption d’un projet entraîne l’irrecevabilité omisso medio du recours devant le juge administratif. Il ressort de cette même jurisprudence qu’en contrepartie, peu importe que cette réclamation ait été déclarée irrecevable ou non fondée par le ministre, le réclamant en question dispose d’un intérêt à voir vérifier la légalité de la décision ministérielle prise à son encontre et, plus loin, de la délibération communale ainsi approuvée, de sorte que son recours en annulation est recevable sous l’aspect de l’intérêt à agir au-delà de toutes autres considérations fussent-elles du domaine politique.

Dès lors, le fait même pour le ministre d’avoir statué sur une réclamation en la déclarant recevable mais en l’écartant au fond, suffit pour fonder l’intérêt à agir dudit réclamant. Celui-ci doit pouvoir faire contrôler la légalité de la décision ministérielle prise à son égard, à l’aboutissement de la procédure non contentieuse d’adoption sinon de modification du PAG dont s’agit sous peine de ne pas disposer d’un recours effectif en la matière. Dès lors, la simple qualité de réclamant débouté suffit en la matière pour le demandeur, pour fonder son intérêt à agir au contentieux3.

Cette même jurisprudence constante en matière de PAG a été retenue en matière de PAP4.

En effet, dans un arrêt du 20 juin 20195, inscrit sous le numéro 42280C du rôle, la Cour administrative a retenu qu’« En matière de PAP, la procédure d’aplanissement des difficultés a été simplifiée par la loi du 28 juillet 2011, essentiellement pour des raisons de rapidité et de simplification administrative, de sorte à ne plus comporter qu’une objection devant le conseil communal sans passage par une réclamation devant le ministre de l’Intérieur. Même en présence de cette procédure d’aplanissement des difficultés simplifiée, il y a lieu de maintenir le lien systémique entre celle-ci et l’appréciation de l’intérêt à agir au niveau contentieux. Ainsi, il faut et il suffit que l’administré ait parcouru toute la procédure d’aplanissement des difficultés devant le conseil communal pour qu’au niveau contentieux un intérêt à agir suffisant lui soit reconnu de ce seul fait, ses doléances n’ayant, par hypothèse, pas été entièrement accueillies au niveau précontentieux. ».

2 Cour adm., 17 avril 2008, n° 23846C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 416 (1er volet) et les autres références y citées, ainsi que trib. adm., 24 mars 2004, n° 16556 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 127 (1er volet) et les autres références y citées.

3 En ce sens : Cour adm., 19 janvier 2012, n° 28915C du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu ; voir aussi : trib.

adm., 24 mars 2004, n° 16556 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 413 du rôle et les autres références y citées.

4 Trib. adm., 1er août 2018, n° 37781 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 128 et les autres références y citées.

5 Cour adm., 20 juin 2019, n° 42280C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 809.

6En l’espèce, il est constant qu’à travers un courrier du 8 février 2022 la société (AA) a adressé au collège échevinal ses observations et objections « […] contre le projet d’aménagement particulier « … » présenté par le (CC) S.à.r.l pour le compte de (BB) S.à.r.l. […] » en faisant valoir que (i) compte tenu des délimitations de la zone soumise à PAP NQ ainsi que du schéma directeur, tout ou partie de sa parcelle aurait dû être intégrée à ladite zone soumise à PAP NQ et (ii) subsidiairement, le PAP NQ aurait dû garantir un développement ultérieur de ladite parcelle, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce. Il est encore constant que lors de sa séance publique du 19 mai 2022, le conseil communal a adopté le projet de PAP NQ litigieux, tout en déclarant recevables en la forme et partiellement fondées les objections de la société (AA).

Eu égard aux considérations qui précèdent et plus particulièrement aux enseignements tirés de la jurisprudence de la Cour administrative, la société (AA) doit être considérée comme justifiant en l’espèce d’un intérêt à agir suffisant par le seul fait que ses objections dirigées contre le projet de PAP NQ litigieux ont été partiellement rejetées par le conseil communal.

Il s’ensuit que l’ensemble des arguments de la partie communale et de la société (BB) suivant lesquelles la société (AA) ne justifierait pas d’un intérêt né, actuel et direct à agir, en ce qu’elle ne démontrerait ni que le projet de PAP NQ lui porterait grief, ni que ledit projet compromettrait l’urbanisation de la parcelle (P3), sont à rejeter pour défaut de pertinence, le seul fait d’avoir introduit des objections à l’encontre du projet de PAP NQ litigieux étant suffisant pour justifier un intérêt à agir dans son chef.

Le moyen d’irrecevabilité afférent est dès lors à rejeter, étant toutefois relevé que si les considérations avancées, à cet égard, par la commune et par la société (BB) ne constituent certes pas des obstacles à la recevabilité du recours dirigé contre les décisions déférées en termes d’intérêt à agir, elles sont néanmoins, pour certaines, susceptibles d’entrer en ligne de compte dans le cadre du contrôle au niveau de l’examen du fond du dossier.

2) Quant à la recevabilité du recours quant à la forme et quant au délai Dans leurs mémoires en réponse respectifs, les parties communale et étatique ainsi que la la société (BB) se rapportent toutes les trois à prudence de justice pour ce qui est de la recevabilité du recours quant à la forme et quant au délai. S’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer à la carence des parties et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions6. Dès lors et dans la mesure où les parties défenderesses et tierce intéressée sont restées en défaut d’expliquer pour quelles raisons le recours sous analyse serait irrecevable, leurs contestations afférentes encourent le rejet.

En l’absence d’autres moyens d’irrecevabilité, le tribunal est amené à conclure que le recours en annulation en ce qu’il est dirigé contre la décision d’adoption du projet de PAP NQ du 19 mai 2022 et contre la décision ministérielle d’approbation de celle-ci du 11 juillet 2022 est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

III. Quant à la loi applicable La procédure d’adoption d’un PAP est prévue par la loi modifiée du 19 juillet 2004, 6 Trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 905 et les autres références y citées.

7concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par « la loi du 19 juillet 2004 ». Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire, (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, (vii) par la loi du 30 juillet 2021 relative au Pacte logement 2.0, entrée en vigueur en date du 1er janvier 2021 par application de l’article 16 de la loi en question et (viii) par la loi du 7 août 2023 relative au logement abordable.

Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des actes déférés et, d’autre part, que dans le cadre d’un tel recours, le juge administratif est amené à en apprécier la légalité en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où ils ont été pris7, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par la loi précitée du 7 août 2023, entrée en vigueur postérieurement à la délibération du 19 mai 2022 ne sont pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement précisé à cet égard que les actes de tutelle administrative, tels que la décision ministérielle litigieuse, rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.

Il s’ensuit que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015, 3 mars 2017, 17 avril 2018, 18 juillet 2018 et 30 juillet 2021.

IV. Quant au fond Moyens et arguments des parties A l’appui de son recours et en fait, la société (AA), tout en reprenant une partie des rétroactes tels qu’exposés ci-avant, explique être propriétaire de la parcelle (P3) ayant une contenance de 0ha 23a et 27ca. Dans la partie graphique du PAG, ladite parcelle aurait été classée en zone d’habitation 1 [« HAB-1 »], ci-après désignée par la « la zone HAB-1 », superposée d’une zone soumise à PAP NQ et elle aurait, ensemble avec des parcelles voisines, été soumise au schéma directeur intitulé « … « Rue … » », qui couvrirait la totalité des parcelles classées, selon le PAG en vigueur, en zone HAB-1, superposées d’une zone soumise à PAP NQ. Le PAP NQ litigieux ne porterait, quant à lui, que sur une partie du site couvert par ledit schéma directeur, la parcelle (P3) n’ayant pas été incluse dans l’assiette dudit PAP NQ.

La société demanderesse donne, à cet égard, à considérer qu’elle aurait, dans ses observations et objections adressées au collège échevinal le 8 février 2022, expressément sollicité que sa parcelle soit « intégrée à la planification urbanistique », afin d’assurer que le PAP NQ litigieux ne puisse pas « hypothéquer » l’urbanisation de celle-ci.

Elle continue en expliquant que suite à l’avis émis par la cellule d’évaluation le 26 janvier 7 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en annulation, n° 22 et les autres références y citées.

82022 et à ses observations et objections adressées le 8 février 2022 au collège échevinal, le projet de PAP NQ aurait été modifié, de sorte que le PAP NQ sous analyse prévoirait désormais la création de deux nouveaux accès carrossables à sa parcelle depuis la rue …, le premier accès étant situé entre le lot numéro … et le lot numéro … et le second accès étant situé entre le lot numéro … et le lot numéro … dudit PAP NQ. Elle donne cependant à considérer que des modifications auraient également été apportées aux délimitations de l’assiette du PAP NQ prévues dans le projet de PAP NQ initial, de sorte qu’une petite partie de la parcelle appartenant à la société (BB) ne serait plus incluse dans l’assiette du PAP NQ sous analyse, ce qui aurait pour conséquence de séparer de facto l’accès carrossable que le PAP NQ entendrait créer, entre le lot numéro … et le lot numéro …, vers la parcelle (P3). Il s’ensuivrait (i) que ledit accès carrossable n’en serait, en réalité, pas un, alors que la parcelle (P3) ne pourrait pas être viabilisée par cette voie et (ii) que la desserte future vers deux des quatre maisons projetées sur la parcelle (P3) ne serait plus assurée, la société demanderesse faisant, à cet égard, plus particulièrement valoir que la modification apportée aux délimitations de l’assiette du projet de PAP NQ permettrait à la société (BB) de « garder un pied dans la porte » et lui offrirait une « possibilité de blocage ultérieur » concernant la viabilisation de la parcelle (P3). Elle est encore d’avis que la modification relative aux délimitations de l’assiette du projet de PAP NQ aurait été réalisée illégalement, afin de permettre à la société (BB) d’empêcher, respectivement « de monnayer » l’accessibilité à la parcelle (P3) depuis la voie carrossable à créer entre le lot numéro … et le lot numéro … du PAP NQ et, in fine, depuis la rue ….

En droit, et concernant plus particulièrement la non-inclusion de sa parcelle dans l’assiette du PAP NQ litigieux, la société demanderesse donne à considérer que suivant une bonne logique urbanistique et afin d’assurer le respect des objectifs relatifs à l’aménagement communal, il aurait été opportun de réaliser un PAP NQ sur l’ensemble des parcelles classées, suivant la partie graphique du PAG, dans la zone soumise à l’élaboration du PAP NQ intitulé « … Rue … ». Ce serait d’ailleurs ce qui aurait été préconisé par la cellule d’évaluation, alors que celle-ci aurait, dans son avis du 26 janvier 2022, recommandé d’intégrer la parcelle (P3) dans l’assiette du PAP NQ sous analyse et de densifier les constructions donnant sur la rue …, ceci afin d’éviter la nécessité de l’implantation de deux voiries d’accès vers la parcelle (P3) en vue de la construction de « seulement quatre maisons » sur celle-ci.

La société (AA) fait, dans ce contexte, valoir qu’elle ignorerait pour quelle raison la société (BB) aurait décidé de « faire cavalier seul » mais qu’elle aurait sûrement agi de la sorte par « opportunisme financier », en ajoutant que si « cette attitude égoïste » dans le chef de cette dernière ne pouvait prêter le flanc qu’à la critique morale sans constituer per se une illégalité, ce « cavalier seul » devrait toutefois se conformer à la loi, ce qui n’aurait pas été le cas en l’espèce.

La société demanderesse, après avoir cité l’article 29, paragraphe (2), alinéa 6 de la loi du 19 juillet 2004, explique que ledit article viserait à éviter que l’exécution partielle d’un schéma directeur par un propriétaire désireux d’envisager une urbanisation de son terrain ne se fasse sans garantie d’un développement ultérieur et harmonieux des terrains restants à urbaniser dans la zone soumise à PAP NQ. Elle avance ensuite que le projet de PAP NQ initialement mis sur orbite n’aurait pas été conforme à l’exigence prévue par l’article 29, paragraphe (2), alinéa 6 de la loi du 19 juillet 2004, prémentionné, puisque, comme l’aurait par ailleurs épinglé la cellule d’évaluation dans son avis, prémentionné, les lots initialement désignés sous le numéro … et le numéro …, destinés à constituer des « espaces verts privés », « hypothéqu[er]aient » un développement ultérieur de la parcelle (P3). La société demanderesse fait, dans ce contexte, valoir que la modification apportée par la commune, respectivement par la société (BB) au projet de PAP NQ initial pour répondre « à cette situation », serait contraire à la loi, alors que le rapport 9justificatif « n[e serait] pas précisé en ce sens que l’utilisation rationnelle et cohérente de l’ensemble des fonds soit garantie », de sorte qu’il y aurait lieu d’annuler les décisions déférées.

La société (AA) soutient ensuite que les décisions déférées méconnaîtraient l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, disposition qui encadrerait la compétence dévolue au conseil communal concernant les modifications pouvant être apportées à un projet de PAP NQ lors de sa procédure d’adoption. Elle estime que lesdites modifications ne pourraient porter en tout ou en partie que sur les observations présentées au collège échevinal lors de la phase précontentieuse, respectivement sur l’avis émis par la cellule d’évaluation. Le conseil communal pourrait, en outre, rejeter le projet de PAP NQ, voire relancer la procédure y relative dans la mesure où il entendrait apporter audit projet des modifications autres que celles suggérées par la cellule d’évaluation ou par un réclamant. La société demanderesse donne, à cet égard, à considérer que si le conseil communal avait décidé de relancer la procédure d’adoption du projet de PAP NQ litigieux, les dispositions de la loi modifiée du 30 juillet 2021 relative au Pacte logement avec les communes en vue d’augmenter l’offre de logement abordables et durables se seraient appliquées audit projet.

Elle avance encore qu’étant donné qu’en l’espèce un certain nombre de modifications urbanistiques, notamment au niveau des anciens lots numéro … et numéro …, auraient été apportées par la société (BB) au projet de PAP NQ, affectant, dès lors, les délimitations de l’assiette dudit projet de PAP NQ, il y aurait lieu de s’interroger quant à la question de savoir si l’ajout ou le retrait de certaines parcelles à un projet de PAP NQ constitueraient de simples modifications, conformément aux dispositions de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, ou s’il s’agirait de facto de la création d’un nouveau projet de PAP NQ.

La société demanderesse estime qu’indépendamment de la réponse à donner à la question susmentionnée, la modification litigieuse opérée en l’espèce - qui aurait consisté à modifier l’assiette du PAP NQ afin d’en exclure une partie de la parcelle (P2) ayant initialement fait partie de l’assiette dudit PAP NQ - serait, en vertu de l’article 30 prémentionné, de toute façon irrégulière, alors qu’elle n’aurait été sollicitée ni directement, ni indirectement par un réclamant, respectivement par la cellule d’évaluation. Il s’ensuivrait que la modification des délimitations initiales de l’assiette du projet de PAP NQ litigieux aurait été opérée par le conseil communal en dehors des conditions strictes prévues à l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, de sorte que les décisions déférées seraient à annuler.

La société (AA) invoque ensuite une violation de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, en faisant valoir que suivant ledit article, un PAP devrait, pour pouvoir être approuvé par l’autorité de tutelle, être conforme aux objectifs de l’aménagement communal, ce qui ne serait pas le cas du PAP NQ sous analyse, en ce que celui-ci serait contraire aux points a) et d) dudit article 2.

Bien que le PAP NQ sous analyse aurait été modifié afin de permettre la création de deux accès carrossables vers la parcelle (P3), ladite parcelle serait cependant considérée comme étant purement résiduelle de sorte à rendre impossible une « planification urbanistique raisonnable » sur celle-ci. Ladite parcelle ne serait, en effet, urbanisable que dans une « seconde phase », sous condition (i) d’une décision autorisant la réalisation d’un PAP NQ sur celle-ci et (ii) que la société (BB), ayant réalisé la « première phase » d’urbanisation, accepte de lever « la situation de blocage » qu’elle aurait elle-même créée illégalement.

Or, en raison de la configuration de la parcelle (P3) et de sa profondeur relativement limitée, se situant entre 9 et 14 mètres par rapport à la rue …, la société demanderesse estime que l’urbanisation de sa parcelle s’avérerait compliquée, respectivement de « piètre qualité ». Ceci serait notamment démontré par le « plan directeur » du « croquis » contenu dans le rapport justificatif du 22 mars 2022, qui illustrerait, à une échelle inconnue, la construction ultérieure, 10parallèlement à la rue …, de quatre maisons d’habitation sur la parcelle (P3). La société (AA) donne, dans ce contexte, à considérer qu’en supposant que les reculs latéraux minimum imposés entre les futures constructions et les limites des lots numéros … à … du PAP NQ soient de 3 mètres - ce qui ne constituerait, par rapport aux constructions situées perpendiculairement et parallèlement à la rue …, pas un grand écart - la largeur de chacune des quatre maisons à construire oscillerait, sous réserve d’un mesurage exact, entre 3 et 8 mètres maximum, ce qui ne serait pas conforme aux objectifs d’utilisation rationnelle du sol et de développement harmonieux, alors que lesdits objectifs nécessiteraient une cohérence urbanistique et esthétique des constructions projetées sur toutes les parcelles situées dans la zone « Rue … ». En outre, la réalisation de plusieurs PAP NQ impliquerait l’application de différentes réglementations urbanistiques sur la zone concernée, ce qui risquerait de rendre un développement harmonieux de ladite zone encore plus difficile.

La société demanderesse affirme que ce problème aurait, par ailleurs, bien été compris par la cellule d’évaluation, puisque celle-ci aurait, dans son avis du 26 janvier 2022, dénoncé le manque de qualité de vie résultant de la « situation « en vis-à-vis » » créée par la volonté de la société (BB) « de faire cavalier seul ». La cellule d’évaluation aurait, en outre, préconisé d’inclure, dans un concept global, les trois à quatre parcelles situées dans la même zone soumise à l’élaboration d’un PAP NQ afin de proposer une unique urbanisation « en première ligne » vis-

à-vis de la rue … et de créer « une densification » à cet endroit. La société (AA) avance, dans ce contexte, qu’un tel projet aurait par conséquent impliqué des compensations entre elle et la société (BB) dans le cadre d’un remembrement urbain.

Elle fait ensuite valoir que la solution retenue par la commune et la société (BB), outre de consister à proposer une urbanisation « de piètre qualité », aurait pour conséquence une augmentation des surfaces à céder au domaine public communal, ce qui grèverait le budget communal. Il s’ensuivrait que le PAP NQ sous analyse ne serait pas conforme aux objectifs relatifs à l’aménagement communal ainsi qu’à l’intérêt général, de sorte qu’il y aurait lieu d’annuler les décisions déférées.

La société (AA) soutient, finalement, que le PAP NQ serait contraire au schéma directeur et partant contraire à l’article 29, paragraphe (2) de la loi du 19 juillet 2004, ainsi qu’à l’intérêt général.

Elle avance, à cet égard, que bien que le schéma directeur prévoirait la réalisation de constructions ayant des accès depuis la rue … et l’urbanisation de la parcelle (P3) ensemble « avec les autres parcelles », le « maître d’ouvrage » aurait, de manière totalement arbitraire, exclu sa parcelle du projet d’urbanisation, ce qui impliquerait qu’elle serait contrainte de développer elle-

même un PAP-NQ sur la « portion restant du[dit] schéma directeur », malgré le fait qu’une urbanisation ultérieure de sa parcelle semblerait impossible en raison de la taille de celle-ci et en raison de la configuration du PAP NQ litigieux.

Il s’ensuivrait que ledit PAP NQ serait fondamentalement contraire aux objectifs prévus par le schéma directeur, lesdits objectifs visant, plus particulièrement, à garantir, lors de l’exécution des différentes phases du schéma directeur en question, que la réalisation de ces phases ne tienne pas en échec l’urbanisation ultérieure prévue sur les autres parcelles couvertes par ledit schéma directeur, ce qui serait justement le cas en l’espèce.

La société demanderesse donne, à cet égard, encore à considérer que le schéma directeur prévoirait uniquement la création de « connexions » de mobilité douce en bordure du PAP NQ et qu’une dérogation sur ce point aurait été apportée au schéma directeur, tel que cela aurait été 11recommandé par la cellule d’évaluation. En revanche, la cellule d’évaluation n’aurait pas recommandé de créer deux axes de circulation perpendiculaires à la rue … en vue de la construction de quatre maisons sur la parcelle (P3).

Elle s’opposerait, dès lors, avec la plus grande vigueur et la plus grande conviction à l’affirmation de la société (DD) respectivement de la partie communale selon laquelle les modifications apportées au schéma directeur - relatives à l’exclusion de sa parcelle de l’assiette du PAP NQ sous analyse et à la création de deux voies d’accès internes vers ladite parcelle -

seraient soit indispensables à la réalisation dudit PAP NQ, soit indispensables à une amélioration de la qualité urbanistique ou paysagère de la zone superposée du PAP NQ en question, tout en donnant à considérer que la volonté d’un promoteur d’éviter de devoir partager le développement urbanistique, les lots à bâtir, les frais d’infrastructures et les frais « d’études » avec un « co-

lotisseur » et d’exclure, pour ce faire, un « propriétaire gênant » de l’élaboration d’un PAP NQ, ne constituerait certainement pas un motif permettant de déroger à un schéma directeur.

Tout en s’appuyant sur un arrêt de la Cour d’administrative du 20 juin 2019, inscrit sous le numéro 42280C du rôle, la société demanderesse affirme encore qu’un schéma directeur aurait pour vocation de garantir un développement cohérent de l’ensemble d’une zone soumise à l’élaboration d’un PAP NQ, « en cas de mise en exécution de la zone par plusieurs PAP NQ successifs ». Or le non-respect du schéma directeur ne se justifierait, en l’espèce, par aucune des conditions fixées par « la disposition précitée » et engendrerait un développement inharmonieux du site à urbaniser, en « hypothéquant », par ailleurs, une urbanisation ultérieure de la parcelle (P3).

Dans son mémoire en réplique, la société demanderesse se réfère en substance aux développements avancés dans le cadre de son recours.

Concernant la violation de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004, elle réfute les affirmations des parties défenderesses et tierce intéressée selon lesquelles (i) les modifications apportées au projet de PAP NQ - concernant plus particulièrement la création d’un accès carrossable aux lots numéro … et numéro … et la modification des délimitations de l’assiette dudit projet de PAP NQ - résulteraient des objections qu’elle aurait adressées au collège échevinal, respectivement de l’avis de la cellule d’évaluation et (ii) la création de voiries, en lieu et place des anciens lots numéro … et numéro … initialement envisagés comme étant des espaces verts privés, permettrait l’urbanisation future de la parcelle (P3).

Tout en concédant que la modification du PAP NQ en vue d’y prévoir deux accès carrossables en lieu et place des espaces verts privés initialement prévus, aurait été faite dans l’intérêt général et sur base d’une demande qu’elle aurait elle-même formulée, la société demanderesse fait valoir qu’elle n’aurait toutefois pas sollicité que l’assiette du PAP NQ soit modifiée en ce sens que la société (BB) puisse ultérieurement bloquer l’exécution d’un PAP NQ « qu’elle mettr[a] en procédure ». Une demande de modification des délimitations de l’assiette du PAP NQ litigieux ne saurait, dès lors, ni implicitement, ni explicitement être déduite de sa réclamation ni, par ailleurs, de l’avis de la cellule d’évaluation tel que l’affirmeraient, à tort, la partie étatique et la société (BB).

Dans son avis, la cellule d’évaluation aurait, au contraire, proposé « une esquisse de développement qui reprend[rait] l’emprise du PAP initial » et aurait soulevé une contradiction entre la « version initiale » de la partie graphique du PAP NQ - qui aurait prévu un espace vert sur le lot numéro … et non pas l’implantation d’une maison empiétant sur ledit lot numéro … - et le rapport justificatif qui prévoirait, quant à lui, l’implantation au moins d’une partie d’une maison 12sur ledit lot 3 initial. Les contradictions entre le PAP NQ et le rapport justificatif, indiquant, en outre, qu’il serait possible d’ériger « ultérieurement » quatre maisons sur la parcelle (P3), ne feraient que confirmer la nécessité d’un projet global, ou à tout le moins « d’un projet mieux réfléchi ab initio ».

La société demanderesse affirme, à cet égard, comprendre que la commune ait entendu modifier le projet de PAP NQ afin de regrouper le lot numéro … - situé partiellement sur sa parcelle et partiellement sur une des parcelles appartenant à la société (BB) - dans un même PAP NQ. Elle réitère cependant qu’elle n’aurait, tout comme la cellule d’évaluation, pas demandé que les délimitations de l’assiette du projet de PAP NQ soient modifiées de telle sorte à « hypothéquer », à travers la voirie carrossable à créer, l’accès vers sa propre parcelle. Elle réitère, dans ce contexte, qu’en raison de la modification de l’assiette du projet de PAP NQ, une urbanisation de sa parcelle et la réalisation d’une maison sur celle-ci ne seraient possibles qu’avec l’accord de la société (BB). Ladite modification renforcerait, dès lors, les préoccupations formulées dans sa réclamation et dans l’avis de la cellule d’évaluation relatives aux possibilités d’urbanisation de la parcelle (P3).

La société (AA) explique encore que l’exclusion d’une partie de la parcelle numéro (P2) du PAP NQ litigieux, de même que la création de voiries, en lieu et place des lots numéros … et … prévus initialement dans ledit PAP NQ, ne rendraient pas l’urbanisation de sa parcelle plus aisée. Elle réitère qu’étant donné la configuration de sa parcelle, eu égard notamment à sa profondeur relativement limitée, l’urbanisation de celle-ci s’avérerait très compliquée, tout en avançant que la partie communale aurait fait le même constat dans le cadre de son mémoire en réponse puisqu’elle aurait affirmé qu’une urbanisation « en seconde position par rapport à la rue existante et de manière perpendiculaire à cette dernière comportera des défis ».

A l’appui de son argument selon lequel le PAP NQ serait contraire à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, la société demanderesse explique que la société (BB) aurait, dans son mémoire en réponse, produit un plan suivant lequel la profondeur de la parcelle (P3) serait de 15 mètres, en laissant supposer que cette mensuration serait la même sur la totalité de ladite parcelle. Elle conteste toutefois cette mensuration, tout en réitérant que sa parcelle serait dotée d’une configuration particulière, alors qu’elle afficherait une profondeur très limitée variant entre 9 et 14 mètres, de sorte que la largeur des maisons à y implanter oscillerait, sous réserve d’un mesurage exact, entre 3 et 8 mètres brut maximum. La « surface nette habitable » desdites maisons oscillerait, quant à elle, entre 1 et 6 mètres, ce qui ne constituerait pas une surface habitable envisageable, de sorte que le PAP NQ ne serait pas conforme aux objectifs relatifs à une utilisation rationnelle du sol et à un « développement harmonieux, de cohérence urbanistique et esthétique ».

Concernant ensuite le moyen ayant trait à une violation de l’article 29, paragraphe (2), alinéa 6 de la loi du 19 juillet 2004, la société (AA) affirme que bien qu’il soit vrai qu’en théorie des voies de circulation auraient été prévues sur la partie graphique du PAP NQ afin de garantir un accès direct depuis la parcelle (P3) à la rue …, il s’avèrerait que ladite parcelle n’aurait aucun accès direct vers la voirie projetée entre les lots numéro … et numéro …, en raison du fait que la société (BB) aurait conservé, entre cette voirie et la parcelle (P3), un petit morceau de terrain permettant de bloquer ledit accès, afin de « le monnayer ultérieurement ». La société demanderesse réitère, cet égard, que seules deux des quatre maisons unifamiliales initialement prévues dans le rapport justificatif seraient « garanties ». Etant donné que le rapport justificatif ne préciserait pas le schéma directeur « « de façon à ce que l’utilisation rationnelle et cohérente de l’ensemble des fonds reste garantie », l’utilisation cohérente de l’ensemble des fonds n[e serait] précisément pas garantie ».

13La commune, de même que la partie étatique et la société (BB) concluent, quant à elles, au rejet du recours pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

Analyse du tribunal Le tribunal relève tout d’abord qu’il n’est pas lié par l’ordre des moyens dans lequel ils lui ont été soumis et qu’il détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile qui s’en dégagent.

Le tribunal relève ensuite que les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, doivent être mues par des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général et, dans ce contexte, lesdites autorités doivent veiller tant à la conservation de l’esthétique urbaine qu’au développement rationnel des agglomérations8.

Dans ce contexte, il y a lieu de préciser que saisi d’un recours en annulation, le juge administratif est appelé à vérifier, d’un côté, si, au niveau de la décision administrative querellée, les éléments de droit pertinents ont été appliqués et, d’un autre côté, si la matérialité des faits sur lesquels l’autorité de décision s’est basée est établie. Au niveau de l’application du droit aux éléments de fait, le juge de l’annulation vérifie encore s’il n’en est résulté aucune erreur d’appréciation se résolvant en dépassement de la marge d’appréciation de l’auteur de la décision querellée. Le contrôle de légalité à exercer par le juge de l’annulation n’est pas incompatible avec le pouvoir d’appréciation de l’auteur de la décision qui dispose d’une marge d’appréciation. Ce n’est que si cette marge a été dépassée que la décision prise encourt l’annulation pour erreur d’appréciation. Ce dépassement peut notamment consister dans une disproportion dans l’application de la règle de droit aux éléments de fait. Le contrôle de légalité du juge de l’annulation s’analyse alors en contrôle de proportionnalité9.

S’il est certes vrai que le choix d’entériner ou de ne pas entériner la modification d’un plan d’aménagement relève d’une dimension politique et échappe comme tel au contrôle des juridictions de l’ordre administratif saisies d’un recours en annulation, il n’en demeure pas moins que tout acte administratif doit reposer sur un motif dont le juge administratif vérifie tant l’existence que la légalité. Cette exigence découle du fait que le juge administratif a l’obligation de vérifier si les autorités administratives compétentes n’ont pas violé la loi, commis un excès de pouvoir ou un détournement de pouvoir et cette obligation de motivation existe également pour les actes à caractère réglementaire qui, quoique discrétionnaires, doivent être pris dans l’intérêt général, de sorte qu’il importe que les autorités administratives compétentes fassent connaître le ou les motifs qui les ont guidées dans leur décision, le contrôle exercé par le juge de l’annulation ne portant dès lors pas sur l’opportunité, mais sur la réalité et la légalité des motifs avancés10.

Quant aux objectifs devant guider les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, ainsi que l’autorité ministérielle, dans le cadre de l’exercice de son contrôle tutélaire, il y a lieu de se référer à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, aux termes duquel « Les communes ont pour mission de garantir le respect de l’intérêt général 8 Trib. adm., 20 octobre 2004, n° 17604 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 217 et les autres références y citées.

9 Cour adm., 9 novembre 2010, n° 26886C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en annulation, n° 40 et les autres références y citées.

10 Trib. adm., 23 mars 2005, n° 18463 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Actes réglementaires (Recours contre les), n° 35 et les autres références y citées.

14en assurant à la population de la commune des conditions de vie optimales par une mise en valeur harmonieuse et un développement durable de toutes les parties du territoire communal par:

(a) une utilisation rationnelle du sol et de l’espace tant urbain que rural en garantissant la complémentarité entre les objectifs économiques, écologiques et sociaux ;

(b) un développement harmonieux des structures urbaines et rurales, y compris les réseaux de communication et d’approvisionnement compte tenu des spécificités respectives de ces structures, et en exécution des objectifs de l’aménagement général du territoire ;

(c) une utilisation rationnelle de l’énergie, des économies d’énergie et une utilisation des énergies renouvelables ;

(d) le développement, dans le cadre des structures urbaines et rurales, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie de la population et la qualité urbanistique des localités ;

(e) le respect du patrimoine culturel et un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage lors de la poursuite des objectifs définis ci-dessus ;

(f) la garantie de la sécurité, la salubrité et l’hygiène publiques. ».

i) Quant au moyen tiré de la violation de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004 Le tribunal relève qu’aux termes de l’article 30, alinéa 9 de la loi du 19 juillet 2004, le projet d’aménagement particulier est soumis par le collège échevinal avec l’avis de la cellule d’évaluation, avec les observations et objections, le cas échéant, avec le rapport justificatif et s’il y a lieu, avec les propositions de modifications répondant à l’avis de la cellule d’évaluation et aux observations et objections présentées, au vote du conseil communal. Selon l’article 30, alinéa 10 de la loi du 19 juillet 2004, ce dernier peut soit adopter le projet d’aménagement particulier dans sa présentation originale, soit y apporter des modifications répondant à l’avis de la cellule d’évaluation et aux observations et objections, soit rejeter le projet, hypothèse dans laquelle le dossier est clôturé. L’alinéa 11 dudit article 30 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit ensuite que si le conseil communal souhaite apporter au projet des modifications nouvelles autres que celles visées à l’alinéa précédent, il doit recommencer la procédure.11 Ainsi, les modifications que le conseil communal peut apporter au projet d’aménagement particulier, sans devoir recommencer la procédure, sont celles qui répondent à l’avis de la cellule d’évaluation, respectivement aux observations et objections formulées par le public.

En l’espèce, le tribunal constate qu’il ressort du rapport justificatif du 16 décembre 2021 que dans la version initiale du projet de PAP NQ, l’assiette dudit PAP NQ englobait la parcelle (P2) presque dans son intégralité.

Le tribunal dénote ensuite que certaines modifications ont été apportées audit projet de PAP NQ entre sa mise sur orbite et son adoption par le conseil communal. Ainsi, il ressort des pièces versées en cause, et notamment de la version finale de la partie graphique du PAP NQ, ainsi que du rapport justificatif du 22 mars 2022, que les délimitations de l’assiette du PAP NQ 11 Art. 30, al. 9, 10 et 11 de la loi du 19 juillet 2004 : « Le projet d’aménagement particulier est ensuite soumis par le collège des bourgmestre et échevins avec l’avis de la cellule d’évaluation, avec les observations et objections, le cas échéant, avec le rapport justificatif et s’il y a lieu, avec les propositions de modifications répondant à l’avis de la cellule d’évaluation et aux observations et objections présentées, au vote du conseil communal au plus tard dans les trois mois qui suivent l’écoulement du délai prévu à l’alinéa 3. Le conseil communal décide de la recevabilité en la forme et quant au fond des observations et objections présentées au collège des bourgmestre et échevins et peut, soit adopter le projet d’aménagement particulier dans sa présentation originale, soit y apporter des modifications répondant à l’avis de la cellule d’évaluation et aux observations et objections, soit rejeter le projet. Dans ce dernier cas, le dossier est clôturé. Si le conseil communal souhaite apporter au projet des modifications nouvelles autres que celles visées à l’alinéa précédent, il doit recommencer la procédure prévue aux alinéas 1 et suivants. ».

15prévues dans ledit projet ont été redessinées, afin d’exclure de ladite assiette une partie de la parcelle (P2).

La société demanderesse reproche, dans ce contexte, au conseil communal d’avoir modifié la délimitation initiale de l’assiette du PAP NQ, telle que décrite ci-avant, malgré le fait que, selon elle, ladite modification n’ait répondu ni à l’avis émis le 26 janvier 2022 par la cellule d’évaluation, ni aux objections et observations écrites qu’elle aurait formulées auprès du collège échevinal.

Le tribunal constate qu’il appert, à la lecture de l’avis émis par la cellule d’évaluation le 26 janvier 2022, que celle-ci a remis en cause la configuration initiale de l’assiette prévue dans le projet de PAP NQ en raison du fait que sous cette configuration, la construction future d’une maison unifamiliale envisagée sur la parcelle (P3), parcelle n’ayant jamais été incluse dans l’assiette du PAP NQ sous analyse, « viendrait empiéter sur le lot … du PAP », lot situé pour partie sur la parcelle (P2), étant, quant à elle, incluse dans l’assiette du PAP NQ litigieux.

Il se dégage, à cet égard, des explications des parties défenderesses et tierce intéressée, ainsi que des pièces et rapports soumis au tribunal, que la modification apportée au projet de PAP NQ, telle que reprise dans la version finale de la partie graphique du PAP NQ, consistant à redessiner les délimitations de l’assiette dudit projet de PAP NQ afin d’en exclure une partie de la parcelle (P2), a été prévue pour permettre, dans le cadre de la réalisation d’un futur PAP NQ, la construction d’une maison d’habitation sur la parcelle (P3) et sur la partie de la parcelle (P2) désormais exclue de l’assiette du PAP NQ litigieux, ceci dans un souci d’éviter que ladite future maison d’habitation n’empiète sur l’assiette du PAP NQ sous analyse. Etant donné qu’un tel empiètement, ayant fait l’objet de critiques dans l’avis de la cellule d’évaluation du 26 janvier 2022, est partant - grâce à la modification apportée aux délimitations de l’assiette initialement prévues dans le projet de PAP NQ - évité dans le cadre du PAP NQ litigieux, il convient de retenir que ladite modification répond, contrairement aux affirmations de la société demanderesse, aux considérations mises en avant par la cellule d’évaluation dans son avis du 26 janvier 2022, prémentionné.

A ceci s’ajoute que la société (AA) a, dans ses objections et observations adressées par courrier du 8 février 2022 au collège échevinal, donné à considérer qu’une urbanisation de sa parcelle serait, dans le cadre de la réalisation ultérieure d’un PAP NQ, rendue impossible en raison « de la configuration du site ».

Or, il échet de constater que la modification pré-exposée, ayant consisté à redessiner les délimitations initiales de l’assiette du PAP NQ, a eu pour objectif de répondre non seulement à l’avis de la cellule d’évaluation du 26 janvier 2022, mais également aux objections et observations soumises par la société demanderesse au collège échevinal dans son courrier du 8 février 2022, en ce que la modification en question a été proposée afin de favoriser - dans le cadre de la réalisation d’un futur PAP NQ et tel que développé ci-avant - l’urbanisation de la parcelle (P3) et, plus particulièrement, l’implantation sur celle-ci d’une maison d’habitation sans que les délimitations de l’assiette du PAP NQ sous analyse ne tiennent en échec cette implantation future.

A titre purement superfétatoire et dans un souci d’exhaustivité, le tribunal relève qu’il se dégage encore des explications de part et d’autre qu’une autre modification - ayant consisté à corriger le statut des lots numéros … et … prévus dans le projet initial de PAP NQ afin d’y prévoir, en lieu et en place, des voiries publiques servant d’accès carrossables à la parcelle (P3) en vue de l’implantation de maisons unifamiliales sur celle-ci - a également été apportée au projet initial du PAP NQ sous analyse et que celle-ci a, elle aussi, été opérée en réponse aux objections et 16observations exprimées par la société demanderesse dans son courrier du 8 février 2022, prémentionné. En effet, ladite modification a été opérée afin de répondre à un objectif d’urbanisation future de la parcelle (P3), tel que sollicité par la société (AA) dans son courrier du 8 février 2022, prémentionné, modification qui n’est, par ailleurs, pas contestée en l’espèce par ladite société, cette dernière concédant, au contraire, dans son mémoire en réponse, « que la modification du PAP en vue de prévoir deux accès carrossables au lieu des espaces verts privés, a été fait[e] dans [son] intérêt et sur [sa] demande ».

Au vu de ce qui précède, le tribunal est amené à retenir que, contrairement à ce que fait plaider la société demanderesse, les modifications apportées au projet de PAP NQ initial, telles qu’exposées ci-avant et telles qu’adoptées par le conseil communal lors de sa délibération du 19 mai 2022, ont eu pour objet de répondre non seulement aux remarques ayant figuré dans l’avis de la cellule d’évaluation du 26 janvier 2022, mais également aux objections et observations soumises par la société (AA) elle-même au collège échevinal par courrier du 8 février 2022, de sorte que le moyen tiré d’une violation de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004 est à rejeter pour être non fondé.

ii) Quant au moyen tiré de la violation de l’article 2, points a) et d) de la loi du 19 juillet 2004 Il est constant en l’espèce que la parcelle de la société (AA) est classée en zone HAB-1 et qu’elle est superposée d’une zone soumise à l’élaboration d’un PAP NQ. Il ressort ensuite de la partie graphique du PAP NQ sous analyse, de même que des explications de part et d’autre, que la parcelle (P3) n’a pas été incluse dans l’assiette dudit PAP NQ.

Il échet ensuite de constater que l’ensemble de l’argumentaire de la société demanderesse, relatif à une violation des points a) et d) de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, précités, vise, de l’entendement du tribunal, à critiquer la non-inclusion de sa parcelle dans l’assiette du PAP NQ litigieux, au motif que l’urbanisation de celle-ci, réalisée dans le cadre d’un futur PAP NQ, risquerait de s’avérer « compliquée, respectivement de piètre qualité urbanistique », ce qui serait contraire aux objectifs « d’utilisation du sol, de développement harmonieux, de cohérence urbanistique et esthétique ».

Le tribunal relève, à cet égard, que la société demanderesse reste en tout état de cause en défaut d’expliquer et a fortiori d’établir concrètement pour quelle raison la non inclusion de sa parcelle dans l’assiette dudit PAP NQ n’est pas justifiée par des considérations urbanistiques répondant à l’un des objectifs d’intérêt général prévus à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004. Au vu des explications fournies par la société demanderesse, selon lesquelles la non-inclusion de sa parcelle dans l’assiette du PAP NQ litigieux ne permettrait pas l’urbanisation de celle-ci, respectivement ne permettrait qu’une urbanisation « de piètre qualité » de celle-ci, en raison notamment du fait qu’elle serait en conséquence considérée comme étant « purement résiduelle », le tribunal se doit de constater que la société demanderesse semble, au contraire, être mue par des considérations d’ordre purement privé, tendant à voir intégrer sa parcelle dans l’assiette du PAP NQ sous analyse afin de garantir, sur celle-ci, un développement qui soit, d’un point de vue urbanistique, le plus avantageux possible pour elle.

Le tribunal se doit encore de relever que la société (AA) soutient, tant dans sa requête introductive d’instance que dans son mémoire en réplique, qu’en vertu de calculs effectués par ses soins, relatifs aux dimensions, respectivement « à la profondeur » de sa parcelle, une planification urbanistique de celle-ci serait, dans une seconde phase d’urbanisation, impossible, respectivement de « piètre qualité », sans rapporter la preuve d’une telle impossibilité, 17respectivement la preuve d’une urbanisation de « piètre qualité » de sa parcelle, liée notamment aux dimensions, respectivement « à la profondeur » de ladite parcelle.

En effet, les affirmations formulées à cet égard par la société demanderesse, selon lesquelles sa parcelle serait dotée d’« une profondeur très limitée variant entre 9 mètres et 14 mètres de profondeur » et que la largeur des maisons à construire sur ladite parcelle dans le cadre d’un futur PAP NQ « oscillerait entre 3 et 8 mètres brut maximum », de sorte que la « surface nette habitable » desdites maisons « oscillerait entre 1 et 6 mètres », et que de ce fait aucune construction, voire aucune construction « raisonnable » ne saurait être envisagée sur la parcelle (P3), restent à l’état de pures allégations pour n’être corroborées par aucune pièce probante permettant notamment de vérifier les prétendues dimensions de la parcelle (P3), respectivement les prétendues dimensions des maisons à construire sur cette dernière, telles que présentées par la société demanderesse.

Ce constat n’est pas infirmé par les explications fournies dans ce contexte par la société (AA) à travers lesquelles elle s’efforce d’appuyer ses affirmations concernant les prétendues dimensions de sa parcelle et des maisons à y implanter. En effet, bien qu’elle tente de se baser sur le « croquis illustratif » contenu dans la section 3.2.8 intitulée « Intégration urbanistique » du rapport justificatif du 22 mars 2022 pour soutenir que « la largeur des maisons [à y implanter] oscillerait entre 3 et 8 mètres », force est cependant de constater qu’aucune conclusion valable ne saurait, à cet égard, être tirée dudit « croquis illustratif » en raison du fait que celui-ci ne fait état d’aucune mensuration permettant de cerner les dimensions de la parcelle (P3), respectivement les dimensions des maisons à y implanter, le tribunal étant encore amené à constater que la société demanderesse concède, par ailleurs, elle-même, que « le plan directeur établi [dans le « croquis illustratif », prémentionné], montre à une échelle inconnue12, la réalisation ultérieure sur la parcelle [litigieuse] de 4 maisons » et que « la largeur des[dites] maisons oscillerait entre 3 et 8 mètres sous réserve d’un mesurage exact13 ».

Etant donné qu’il suit de ce qui précède que la société demanderesse reste en défaut d’établir, pièces à l’appui, l’exactitude des dimensions tant de la parcelle (P3) - et notamment de celles relatives à la « profondeur » de cette dernière - que des maisons à y implanter, il échet de constater qu’elle reste, a fortiori, également en défaut de démontrer qu’une urbanisation de ladite parcelle dans le cadre de la réalisation d’un futur PAP NQ serait, en raison des prétendues dimensions de celle-ci, impossible, voire « de piètre qualité ».

Force est, dès lors, au tribunal de conclure qu’étant donné qu’il n’est pas démontré en l’espèce que la parcelle (P3) ne serait, dans le cadre de la réalisation d’un futur PAP NQ, pas urbanisable, respectivement que son urbanisation serait « de piètre qualité », il y a également lieu de conclure que le constat tiré par la société demanderesse sur base de ce qui précède et selon lequel « le PAP litigieux [serait] contraire aux objectifs de l’aménagement communal et contraire à l’intérêt général » au motif que la parcelle (P3) n’aurait pas été incluse dans l’assiette dudit PAP litigieux et ne serait, dès lors, pas constructible, voire que difficilement constructible, ce qui entraînerait, de facto, une violation des points a) et d) de la loi du 19 juillet 2004, reste, lui aussi, à l’état de pure allégation pour ne reposer sur aucun élément objectif et tangible.

Il suit de toutes les considérations qui précèdent qu’aucune violation des objectifs visés à l’article 2, points a) et d) de la loi du 19 juillet 2004 n’est établie en l’espèce, de sorte que le moyen afférent est à rejeter pour ne pas être fondé.

12 Souligné par le tribunal.

13 Ibid.

18 Cette conclusion n’est pas ébranlée par la référence faite par la société (AA) à l’avis de la cellule d’évaluation du 26 janvier 2022, qui aurait dénoncé, dans ledit avis « le manque de qualité de vie résultant de [la] situation « en vis-à-vis » crées par la volonté du promoteur (BB) de faire cavalier seul » et qui aurait, de ce fait, « préconis[é] […] d’englober dans un concept global, les 3-4 parcelles sises dans la même zone soumise à PAP NQ afin de proposer uniquement une urbanisation « en première ligne » vis-à-vis de la rue … et en proposant une densification à cet endroit », alors qu’il ne ressort pas, tel que relevé à juste titre par les parties étatique et communale, dudit avis que la cellule d’évaluation aurait pointé le fait que le projet de PAP NQ lui soumis, n’incluant pas la parcelle (P3) dans l’assiette du PAP NQ, aurait violé les exigences découlant des points a) et d) de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004.

La conclusion du tribunal, selon laquelle aucune violation des objectifs visés à l’article 2, points a) et d) de la loi du 19 juillet 2004 n’est établie en l’espèce, n’est pas non plus énervée par l’affirmation de la société demanderesse selon laquelle sa parcelle ne serait urbanisable « que dans une seconde phase […] à supposer que l[e] promoteur (BB) ayant réalisé la première phase « daigne » accepter de lever la situation de blocage qu’il a lui-même crée illégalement » et par laquelle celle-ci tente, de l’entendement du tribunal, d’avancer qu’étant donné qu’une partie de la parcelle (P2) appartenant à la société (BB) a été, suite à la modification du projet initial du PAP NQ, exclue de l’assiette du PAP NQ sous analyse, ladite société disposerait d’un « moyen juridique et factuel pour bloquer » l’accès vers la parcelle (P3) et, de ce fait, son urbanisation, ladite affirmation restant à l’état de pure allégation pour ne pas être autrement sous-tendue en l’espèce par des éléments probants, tangibles et circonstanciés, étant plus particulièrement relevé que l’affirmation relative à la possibilité d’une prétendue « situation de blocage » dans le chef de la société (BB) manque, en tout état de cause, de pertinence pour concerner, d’une part, une situation purement hypothétique et, d’autre part, la seule exécution d’un PAP NQ futur portant sur l’urbanisation de la parcelle (P3). Le tribunal se doit encore de rappeler, pour les besoins de la cause, que l’exclusion d’une partie de la parcelle (P2) de l’assiette du PAP NQ litigieux a, tel que développé ci-avant, justement été prévue afin de permettre, dans le cadre de la réalisation d’un futur PAP NQ, la construction d’une maison d’habitation sur la parcelle (P3), ladite exclusion étant, par ailleurs, et tel que constaté ci-avant, intervenu dans le respect des dispositions de l’article 30 de la loi du 19 juillet 2004.

iii) Quant au moyen tiré de la violation de l’article 29, paragraphe (2), alinéa 6 de la loi du 19 juillet 2004 Le tribunal tient tout d’abord à relever que le moyen tiré d’une prétendue violation de l’article 29, paragraphe (2), alinéa 6 de la loi du 19 juillet 2004 suivant lequel « Au cas où le plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » ne couvre qu’une partie d’une zone destinée à être urbanisée, telle que définie par le plan d’aménagement général, le rapport justificatif prévu à l’alinéa précédent doit préciser le schéma directeur de façon à ce que l’utilisation rationnelle et cohérente de l’ensemble des fonds reste garantie. », se recoupe en réalité avec le moyen soulevé par la société demanderesse dans le cadre de son recours ayant trait à une violation des objectifs prévus aux points a) et d) de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004 au motif que le PAP NQ litigieux ne serait pas conforme « à l’objectif d’utilisation rationnelle du sol et à l’objectif d’un développement harmonieux ». En affirmant, par renvoi aux explications « supra » visant, de l’entendement du tribunal, celles fournies sous le point 3 de son recours, que « le rapport justificatif ne serait pas précisé en ce sens que l’utilisation rationnelle et cohérente de l’ensemble des fonds soit garantie » la société demanderesse se borne, en effet, à reprocher au PAP NQ litigieux de ne pas être conforme aux objectifs fixés aux points a) et d) de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004.

19 Or, le tribunal a d’ores et déjà écarté ce moyen pour les raisons développées ci-avant, de sorte que le moyen relatif à une prétendue violation de l’article 29, paragraphe (2), alinéa 6 de la loi du 19 juillet 2004, est lui aussi à écarter sur base du même raisonnement.

iv) Quant au moyen tiré de la violation de l’article 29, paragraphe (2), alinéa 3 de la loi du 19 juillet 2004, au motif d’une prétendue contrariété du PAP NQ litigieux par rapport au schéma directeur Le tribunal relève qu’en vertu de l’article 29, paragraphe (2), alinéa 1er de la loi du 19 juillet 2004 : « Le plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » est orienté par le schéma directeur tel que défini à l’article 7 de la présente loi et fixe les règles d’urbanisme et de lotissement de terrains ».

Le paragraphe (2), alinéa 3 du prédit article précise que « Le schéma directeur peut être adapté ou modifié par le plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » à condition qu’une telle modification ou adaptation s’avère indispensable pour réaliser le plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », respectivement pour en améliorer la qualité urbanistique, ainsi que la qualité d’intégration paysagère. ».

S’agissant de la nature juridique d’un schéma directeur, le tribunal relève qu’aux termes des travaux parlementaires relatifs à la loi du 28 juillet 2011 modifiant celle du 19 juillet 2004, il s’agit d’un « […] instrument de planification d’une hiérarchie supérieure, sans effet juridique direct, qui oriente non seulement l’élaboration des plans d’aménagement particulier „nouveau quartier“ mais qui permet également déjà au niveau de l’élaboration du projet d’aménagement général de définir des zones et leurs délimitations en connaissance de cause. »14.

En application de l’article 7, paragraphe (2) de la loi du 19 juillet 2004, le schéma directeur constitue une composante de l’étude préparatoire sur base de laquelle un projet d’aménagement général est élaboré. L’étude préparatoire, tel que son nom l’indique, doit forcément précéder l’adoption d’un nouveau ou la modification d’un PAG. Le schéma directeur, faisant partie de l’étude préparatoire, constitue donc un élément préalable à l’élaboration ou la modification d’un plan d’aménagement général et est partant à considérer comme instrument d’orientation du développement urbain, dépourvu d’effet juridique direct15. Ainsi, un schéma directeur n’est pas une fin en soi, en ce qu’il ne s’agit que d’un instrument de planification, ayant pour objet, notamment, de déterminer les orientations servant à définir et à délimiter les zones du projet d’aménagement général et à élaborer les projets d’aménagement particulier « nouveau quartier ».

Si le schéma directeur est essentiellement un instrument d’orientation servant, notamment, à l’élaboration des PAP NQ, il n’en demeure pas moins qu’un tel PAP ne saurait se départir des orientations s’en dégageant que si cela s’avère indispensable soit pour permettre sa réalisation, soit pour en améliorer la qualité urbanistique, soit pour en améliorer la qualité d’intégration paysagère16.

Le tribunal relève que la société demanderesse invoque une violation, par les décisions déférées, des dispositions de l’article 29, paragraphe (2) de la loi du 19 juillet 2004, au motif que (i) le schéma directeur aurait prévu « la réalisation de construction[s] ayant des accès depuis la 14 Projet de loi n° 6023, exposé des motifs, p. 4.

15 Projet de loi n° 6023, exposé des motifs, p.4 et commentaire des articles, ad article 6, p. 24.

16 Trib. adm., 17 décembre 2018, n°40897 du rôle, confirmé par Cour adm., 20 juin 2019, 42280C, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n°778.

20rue … » et que de tels accès ne seraient pas prévus dans le PAP NQ sous analyse, (ii) « de manière totalement arbitraire le maître de l’ouvrage a[urait] totalement exclu [sa parcelle] du projet d’urbanisation », malgré le fait que le schéma directeur aurait prévu « que [son] terrain devait être urbanisé ensemble avec les autres parcelles » et (iii) « le schéma directeur [n’aurait pas] prév[u] la réalisation de nouvelles voies de dessertes perpendiculairement à la rue … pour réaliser des constructions en seconde position », telles qu’elles seraient cependant prévues dans le PAP NQ sous analyse, alors qu’il aurait uniquement prévu « des connexions de mobilité douces en bordure du PAP projeté ».

Concernant, tout d’abord, l’affirmation de la société demanderesse selon laquelle le schéma directeur aurait prévu la réalisation de constructions ayant des accès depuis la rue …, le tribunal constate qu’il ressort, en effet, de la section … relative au « CONCEPT DE MOBILITE ET D’INFRASTRUCTURES TECHNIQUES » reprise dans le schéma directeur que « [l]a zone est accessible par la rue … ». Le tribunal se doit, dans ce contexte, également de constater, tel que soulevé à juste titre par la partie étatique, que l’indication contenue dans le schéma directeur, précitée, est respectée dans le cadre du PAP NQ sous analyse, étant donné qu’il ressort de la partie graphique dudit PAP NQ que les constructions y prévues restent accessibles depuis la rue … et que les constructions qui seront, le cas échéant, réalisées sur la parcelle (P3) dans le cadre de la réalisation d’un futur PAP NQ seront, elles-aussi, accessibles depuis la rue …, de sorte que le reproche de la société demanderesse selon lequel les constructions à réaliser dans le cadre du PAP NQ litigieux n’auraient, contrairement à ce qui aurait été prévu dans le schéma directeur, aucun accès depuis la rue …, tombe à faux.

Quant à l’affirmation de la société demanderesse selon laquelle sa parcelle n’aurait pas été incluse dans l’assiette du PAP NQ litigieux malgré le fait qu’une telle inclusion aurait expressément été prévue par le schéma directeur, il échet de constater, tel que relevé à juste titre par la partie étatique, qu’il ne ressort d’aucune disposition du schéma directeur que l’ensemble des parcelles situées dans la zone soumise à l’élaboration d’un PAP NQ en question devait être urbanisé par le biais de l’élaboration d’un seul et même PAP NQ, le schéma directeur se contentant, en effet, d’indiquer que « [l]’aménagement de la zone peut être réalisé en une seule phase de développement » sans toutefois interdire que la zone soumise à l’élaboration d’un PAP NQ en question, et à laquelle appartient la parcelle (P3), soit exécutée par plusieurs PAP NQ distincts et successifs. Il s’ensuit qu’aucune contradiction entre le schéma directeur et le PAP NQ sous analyse ne saurait être constatée sur ce point, de sorte que l’affirmation contraire de la société demanderesse tombe également à faux.

Pour ce qui est, finalement, de l’affirmation de la société demanderesse selon laquelle « le schéma directeur [n’aurait pas] prév[u] la réalisation de nouvelles voies de dessertes perpendiculairement à la rue … pour réaliser des constructions en seconde position » et qu’il aurait uniquement prévu « des connexions de mobilité douces en bordure du PAP projeté », le tribunal constate, tel que développé ci-avant, que les voies de mobilité douce prévues dans le projet de PAP NQ initial ont été remplacées par deux voiries carrossables afin de permettre de garantir des accès à la parcelle (P3) depuis la rue …. Le tribunal partage, à cet égard, l’argumentation des parties défenderesses et tierce intéressée selon laquelle cette manière de procéder conduit à une amélioration de la qualité urbanistique du PAP NQ, étant donné que l’implantation desdites voies carrossables permet un accès, depuis la rue …, à des terrains constructibles et, en l’occurrence, à la parcelle (P3), afin de permettre, in fine, leur viabilisation.

Le tribunal relève, à cet égard, que la cellule d’évaluation a, dans son avis du 26 janvier 2022, pointé le fait que le projet PAP NQ était contraire au schéma directeur en ce qui concerne « les connexions de mobilité douce aux extrémités du site et les futurs accès aux terrains à 21l’ouest » en précisant, toutefois, que « le non-respect du schéma directeur est justifié dans la mesure où les connexions piétonnes ne relient aucun point d’intérêt à l’arrière des parcelles du PAP. Il y a lieu de demander une dérogation ».

Dans la mesure où la modification apportée au schéma directeur par le PAP NQ sous analyse, ayant consisté en la création de deux voiries carrossables en lieu et place des voies de mobilité douce prévues initialement par le schéma directeur, a, tel que le tribunal vient de le retenir, permis d’améliorer la qualité urbanistique dudit PAP NQ, il y a lieu de conclure que celui-

ci a été développé en conformité avec les dispositions prévues à l’article 29, paragraphe (2), alinéa 3 de la loi du 19 juillet 2004.

Il suit de toutes les considérations qui précèdent que le moyen tiré de la violation de l’article 29, paragraphe (2), alinéa 3 de la loi du 19 juillet 2004 encourt le rejet pour ne pas être fondé.

A défaut d’autres moyens, le recours sous analyse est, dès lors, à rejeter.

En ce qui concerne encore la demande de la société (AA) tendant à voir condamner l’administration communale de Schengen, sinon l’Etat à lui payer une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 euros sur le fondement de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, celle-ci est à rejeter au vu de l’issue du litige.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 euros, telle que formulée par la société demanderesse ;

condamne la société demanderesse aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Alexandra Castegnaro, vice-président, Annemarie Theis, premier juge, Caroline Weyland, premier juge, et lu à l’audience publique du 9 janvier 2025 par le vice-président, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro 22


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 47937
Date de la décision : 09/01/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2025-01-09;47937 ?

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