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31/03/2025 | LUXEMBOURG | N°48307

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 31 mars 2025, 48307


Tribunal administratif N° 48307 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:48307 2e chambre Inscrit le 23 décembre 2022 Audience publique du 31 mars 2025 Recours formé par Monsieur (A), …, contre une décision du conseil communal de Flaxweiler et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 48307 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 23 décembre 2022 par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES SA, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre

des avocats du Barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2146 Luxembo...

Tribunal administratif N° 48307 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:48307 2e chambre Inscrit le 23 décembre 2022 Audience publique du 31 mars 2025 Recours formé par Monsieur (A), …, contre une décision du conseil communal de Flaxweiler et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 48307 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 23 décembre 2022 par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES SA, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du Barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2146 Luxembourg, 63-65, rue de Merl, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B240929, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), demeurant à L-…, tendant à l’annulation :

1) de « la décision du conseil communal de Flaxweiler datée du 10 février 2022 portant adoption du projet de refonte du PAG de la commune de Flaxweiler » ; et 2) de « la décision du ministre de l’Intérieur prise en date du 26 septembre 2022, approuvant la prédite décision du conseil communal » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Christine KOVELTER, en remplacement de l’huissier de justice Martine LISÉ, demeurant à Luxembourg, du 11 janvier 2023, portant signification de ce recours à l’administration communale de Flaxweiler, ayant sa maison communale à L-6926 Flaxweiler, 1, rue Berg, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour déposée au greffe du tribunal administratif le 16 janvier 2023 par la société à responsabilité limitée Etude d’avocats PIERRET & associés SARL, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du Barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1730 Luxembourg, 8, rue de l’Hippodrome, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B263981, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Georges PIERRET, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Flaxweiler, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 21 mars 2023 par le délégué du gouvernement ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 7 avril 2023 par la société à responsabilité limitée Etude d’avocats PIERRET & associés SARL, au nom de l’administration communale de Flaxweiler, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 8 mai 2023 par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES SA, au nom de Monsieur (A), préqualifié ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 23 mai 2023 par le délégué du gouvernement ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 2 juin 2023 par la société à responsabilité limitée Etude d’avocats PIERRET & associés SARL, au nom de l’administration communale de Flaxweiler, préqualifiée ;

Vu l’acte de reprise d’instance déposé le 21 mars 2025 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES SA, au nom de Monsieur (A), demeurant à L-…, lequel déclare agir en sa qualité d’héritier suite au décès de son père, feu Monsieur (A), préqualifié, en date du … ;

Vu les pièces versées en cause ainsi que les actes attaqués ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Sébastien COUVREUR, en remplacement de Maître Georges KRIEGER, Maître Sébastien COÏ, en remplacement de Maître Georges PIERRET, et Madame le délégué du gouvernement Danitza GREFFRATH, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 4 novembre 2024.

___________________________________________________________________________

Lors de sa séance publique du 13 décembre 2019, le conseil communal de Flaxweiler, ci-après dénommé « le conseil communal », fut saisi par le collège des bourgmestre et échevins de la même commune, ci-après dénommé « le collège échevinal », en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après désignée par « la loi du 19 juillet 2004 », d’un projet d’aménagement général pour la commune de Flaxweiler qu’il mit sur orbite en conséquence à travers un vote positif, de sorte que le collège échevinal put procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004.

Par courrier de son litismandataire du 27 janvier 2020, adressé au collège échevinal, Monsieur (A), propriétaire des parcelles inscrites au cadastre de la commune de Flaxweiler, section … de …, sous les numéros (P1), (P2) et (P3), soumit ses observations et objections à l’encontre du projet d’aménagement général.

Lors de sa séance publique du 10 février 2022, le conseil communal décida d’adopter le projet d’aménagement général en y apportant des modifications tenant compte des avis ministériels et des objections, tout en rejetant les observations et objections émises par Monsieur (A) à l’encontre dudit projet.

Par courrier de son litismandataire du 25 février 2022, Monsieur (A) introduisit auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », une réclamation à l’encontre de la délibération du conseil communal du 10 février 2022 portant adoption du projet de refonte du plan d’aménagement général (« PAG »).

Par décision du 16 septembre 2022, le ministre approuva la délibération du conseil communal du 10 février 2022 portant adoption du projet de refonte du PAG et déclara non fondée la réclamation de Monsieur (A). Les passages de la décision ministérielle précitée se rapportant à cette réclamation sont libellés comme suit :

« […] Ad réclamation (A) (rec 17) Le réclamant formule une réclamation en deux branches.

Dans un premier temps, le réclamant sollicite le reclassement de la parcelle cadastrale n° (P3), sise à …, en zone destinée à être urbanisée.

Dans un deuxième temps, le réclamant sollicite le reclassement des parcelles cadastrales n° (P2) et (P1), sises à …, en zone destinée à être urbanisée. L’urbanisation des deux terrains en question contribuerait au développement tentaculaire de la localité, ce qu’il importe d’éviter. Leur urbanisation serait partant contraire à un développement concentrique et rationnel d’une localité tel que prôné par l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain.

Les parcelles longent encore la …, d’une valeur écologique importante.

Une urbanisation aurait ainsi un impact non négligeable sur l’environnement et sur la protection des espèces présentes à cet endroit.

Puis, les parcelles présentent une topographie accidentée rendant leur urbanisation peu opportune.

Cette problématique est encore renforcée à la lumière de la sécurité routière. En effet, dans la mesure où elles sont situées à l’entrée du village et dans un virage, la vue des conducteurs automobiles, à la sortie et à l’entrée des parcelles, est limitée, ce qui est susceptible de réduire la sécurité routière en ces lieux.

Finalement, le classement actuel permet d’atteindre un arrondissement cohérent du tissu urbain existant et de contribuer partant au développement harmonieux du tissu rural existant en ces lieux.

Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, une urbanisation des parcelles en question serait déraisonnable.

Une telle manière de procéder est d’ailleurs conforme à la jurisprudence en la matière (Cour administrative, 7 février 2019, n°41201CA et 41208CA du rôle).

Les réclamations sont donc non fondées. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 23 décembre 2022, Monsieur (A) a fait introduire un recours tendant à l’annulation 1) de « la décision du conseil communal de Flaxweiler datée du 10 février 2022 portant adoption du projet de refonte du PAG de la commune de Flaxweiler » et 2) de « la décision du ministre de l’Intérieur prise en date du 26 septembre 2022, approuvant la prédite décision du conseil communal ».

A titre préliminaire, le tribunal constate que la référence, faite dans la requête introductive d’instance, à une décision du ministre prise en date du 26 septembre 2022 est manifestement constitutive d’une simple erreur matérielle alors qu’il ressort sans équivoque des pièces versées à l’appui de la requête et de l’ensemble des circonstances de la cause que la décision ministérielle visée est bien celle du 16 septembre 2022, qui a été notifiée au litismandataire du demandeur par courrier du 26 septembre 2022, les parties communale et étatique ne s’étant d’ailleurs pas méprises sur l’objet du recours.

I. Quant à l’admissibilité du mémoire en réplique Dans le cadre de son mémoire en duplique, la partie communale se rapporte à prudence de justice quant à l’admissibilité du mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 8 mai 2023. Elle fait valoir qu’elle aurait notifié son mémoire en réponse aux parties adverses le 6 avril 2023, avant de le déposer au greffe du tribunal administratif le lendemain. Par conséquent, si la date du 6 avril 2023 était considérée comme valant notification de son mémoire en réponse, conformément à l’article 5 (5) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », alors le mémoire en réplique, notifié le 8 mai 2023, serait intervenu hors délai et devrait être déclaré irrecevable. Toutefois, si la date de dépôt de son mémoire en réponse au greffe du tribunal administratif le 7 avril 2023 devait être considérée comme valant notification dudit mémoire, alors le mémoire en réplique serait recevable, étant donné que le 7 mai 2023 aurait été un dimanche.

A l’audience publique des plaidoiries, le litismandataire de la partie requérante s’est rapporté à prudence de justice quant à l’admissibilité du mémoire en question.

Le tribunal relève que l’article 5 (5) de la loi du 21 juin 1999 prévoit que « Le demandeur peut fournir une réplique dans le mois de la communication de la réponse ; la partie défenderesse et le tiers intéressé sont admis à leur tour à dupliquer dans le mois. ».

Si le point de départ pour le mémoire en réplique est la communication de la réponse à la partie défenderesse, c’est-à-dire que c’est à partir de la réception du mémoire en réponse par cette dernière que court le délai de fourniture de la réplique1, il n’en reste pas moins qu’en présence de plusieurs parties admises à fournir une réponse, le délai pour répliquer court en principe à partir du dernier dépôt, sinon de communication des mémoires en réponse fournis2.

En l’espèce, il ressort du rapport de transmission versé en cause par la partie communale que son mémoire en réponse, déposé au greffe du tribunal administratif après celui de la partie étatique, a été notifié par télécopie à la partie requérante le 6 avril 2023, de sorte qu’a priori le délai pour fournir le mémoire en réplique a expiré le 6 mai 2023.

Il n’en reste pas moins que comme le 6 mai 2023 était un samedi et qu’en vertu de l’article 5 de la Convention européenne sur la computation des délais signée à Bâle le 16 mai 1972, approuvée par la loi du 30 mai 1984, « [i]l est tenu compte des samedis, dimanches et fêtes légales dans la computation d’un délai. Toutefois, lorsque le dies ad quem d’un délai 1 Cour adm., 18 mai 2006, n° 21112C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 953 et les autres références y citées.

2 Trib. adm. 12 juin 2002, n° 13063 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 955 et les autres références y citées.

avant l’expiration duquel un acte doit être accompli est un samedi, un dimanche, un jour férié légal ou considéré comme tel, le délai est prolongé de façon à englober le premier jour ouvrable qui suit. », le délai pour déposer le mémoire en réplique a été prorogé au jour ouvrable suivant, soit au lundi 8 mai 2023.

Le mémoire en réplique de la partie requérante ayant été déposé au greffe du tribunal administratif à cette dernière date, le mémoire en question est admissible.

II. Quant à la compétence du tribunal et quant à la recevabilité du recours Le tribunal relève que les décisions sur les projets d’aménagement, lesquels ont pour effet de régler par des dispositions générales et permanentes l’aménagement des terrains qu’ils concernent et le régime des constructions à ériger, ont un caractère réglementaire. La décision d’approbation du ministre participe au caractère réglementaire de l’acte approuvé3, étant précisé qu’en ce qui concerne la procédure d’adoption du PAG, le caractère réglementaire ainsi retenu s’étend également au volet de la décision ministérielle du 16 septembre 2022 ayant statué sur la réclamation introduite par le demandeur, intervenue dans le processus général de l’élaboration de l’acte approuvé.

Conformément à l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, seul un recours en annulation est susceptible d’être introduit contre un acte administratif à caractère réglementaire.

Le tribunal est partant compétent pour connaître du recours en annulation introduit en l’espèce, lequel est, par ailleurs, recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

III. Quant à la loi applicable Le tribunal précise que la procédure d’adoption d’un PAG est prévue par la loi du 19 juillet 2004. Or, celle-ci a été modifiée à plusieurs reprises et dernièrement (i) par une loi du 28 juillet 2011 entrée en vigueur, en application de son article 45, en date du 1er août 2011, (ii) par la loi du 30 juillet 2013 concernant l’aménagement du territoire, publiée au Mémorial A, n° 160 du 6 septembre 2013, (iii) par la loi du 14 juin 2015 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, publiée au Mémorial A, n° 113 du 17 juin 2015, (iv) par la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus », entrée en vigueur, en application de son article 76, le 1er avril 2017, (v) par la loi du 17 avril 2018 concernant l’aménagement du territoire, (vi) par la loi du 18 juillet 2018 portant modification de l’article 108 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, (vii) par la loi du 30 juillet 2021 relative au Pacte logement 2.0, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, en application de son article 16, (viii) par la loi du 7 août 2023 relative au logement abordable et (ix) par la loi du 4 novembre 2024 portant modification de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain.

Etant donné, d’une part, que le tribunal vient de retenir que seul un recours en annulation a pu être introduit à l’encontre des actes déférés et, d’autre part, que dans le cadre 3 Cour adm., 10 juillet 1997, n° 9804C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Actes réglementaires, n° 59 et les autres références y citées.

d’un tel recours, le juge administratif est amené à en apprécier la légalité en considération de la situation de droit et de fait ayant prévalu au jour où ils ont été pris4, les modifications apportées à la loi du 19 juillet 2004 par les lois précitées du 7 août 2023 et du 4 novembre 2024, entrées en vigueur postérieurement à la délibération du conseil communal du 10 février 2022 portant adoption du projet d’aménagement général ne sont pas à prendre en considération en l’espèce, étant plus particulièrement précisé à cet égard que les actes de tutelle administrative, tels que la décision ministérielle litigieuse, rétroagissent à la date de la décision approuvée et tombent dès lors sous le champ d’application des lois en vigueur à la date de la prise de décision de l’acte initial.

Il s’ensuit que la version de la loi du 19 juillet 2004 applicable au présent litige est celle résultant des modifications opérées par les lois des 28 juillet 2011, 30 juillet 2013, 14 juin 2015, 3 mars 2017, 17 avril 2018, 18 juillet 2018 et 30 juillet 2021.

IV. Quant au fond Arguments et moyens des parties A l’appui de son recours, tout en rappelant les faits et rétroactes à la base des décisions déférées, le demandeur soutient que sous l’empire de l’ancien PAG, toutes les parcelles litigieuses auraient été constructibles. Ainsi, la parcelle (P2) aurait été classée en totalité dans une zone de faible densité superposée d’une zone soumise à un plan d’aménagement particulier (« PAP »), tandis que les parcelles (P1) et (P3) auraient connu un triple classement pour avoir été classées en zone de faible densité superposée d’une zone soumise à un PAP, en zone agricole [AGR], ci-après désignée par « zone [AGR] », et en zone de moyenne densité.

Toutefois, avec la refonte du PAG, le secteur soumis à l’élaboration d’un PAP aurait été supprimé et les parcelles litigieuses auraient toutes connu un nouveau classement, consistant pour la parcelle (P1) dans son exclusion partielle du périmètre d’agglomération avec un reclassement partiel en zone forestière [FOR], ci-après désignée par « zone [FOR] », et en zone [AGR], pour la parcelle (P2) dans une réaffectation intégrale en zone [AGR] et pour la parcelle (P3) dans un classement en trois zones différentes, à savoir en zone d’habitation 1 [HAB-1], ci-après désignée par « zone [HAB-1] », – le demandeur précisant, à cet égard, que la délimitation du périmètre d’agglomération aurait été réalisée « sur la façade » de sa maison d’habitation –, en zone [FOR] et en zone [AGR].

En droit, le demandeur reproche, en premier lieu, tant à la commune qu’au ministre un dépassement de leur marge d’appréciation. Il conteste, à ce sujet, les motifs invoqués à la base des décisions déférées pour justifier les différents classements de ses parcelles.

Ainsi, en ce qui concerne le motif relatif à un prétendu développement tentaculaire en cas d’intégration de ses parcelles en zone constructible, Monsieur (A), tout en donnant à considérer que sa parcelle (P3) accueillerait déjà une construction, soutient que ses parcelles ne seraient pas isolées du reste de la localité de …, mais feraient partie d’un quartier d’habitation et seraient entourées par d’autres maisons d’habitation. S’il conçoit que ses terrains se situent à la limite actuelle « de l’urbanisation » et que la maison sise au numéro … – située sur la parcelle inscrite au cadastre sous le numéro (P4), ci-après désignée par « la parcelle (P4) » – pouvait être considérée comme étant un prolongement « de l’urbanisation », il estime toutefois 4 Trib. adm., 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en annulation, n° 22 et les autres références y citées.

qu’il serait exagéré d’employer, dans ce contexte, la notion d’« extensions tentaculaires », alors (i) que la maison en question se trouverait proche de l’angle formé par les rues …, …, … et …, et (ii) que ses terrains se trouveraient à proximité immédiate d’un des deux centres de la localité de …. Il reproche, dans ce contexte, à la commune d’avoir fait volte-face lors de sa délibération du 10 février 2022, en décidant d’adopter une stratégie différente de celle poursuivie jusque-là. Il soutient à cet égard que comme avant la procédure de refonte du PAG, ses terrains auraient tous été classés dans une zone constructible et que l’objectif de la commune aurait été d’y construire à plus ou moins long terme, le revirement d’attitude de la commune en ce qu’il a eu pour effet de rendre ses terrains non constructibles devrait être motivé de manière particulièrement fondée et étayée.

En outre, le demandeur fait plaider, face à l’argumentation du ministre relative à la nécessité d’un développement concentrique et rationnel de la localité de …, tel que préconisé à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, qu’une urbanisation de ses parcelles n’aurait pas pour conséquence une extension de ladite localité. Il précise, à cet égard, qu’en raison de la proximité immédiate de ses parcelles avec la voie desservante, elles disposeraient de tous les équipements publics requis, tels que l’eau, les égouts et l’électricité. Il ne serait, d’ailleurs, pas dans l’intérêt général, et plus particulièrement dans le but d’une utilisation rationnelle du sol, de classer d’un côté de la rue une parcelle en zone d’habitation tout en classant la parcelle adjacente à celle-ci, ainsi que la parcelle située « de l’autre côté », en zone [AGR].

En ce qui concerne ensuite l’impact écologique mis en avant par le ministre, Monsieur (A) s’interroge sur l’opportunité d’effectuer une « Strategische Umweltprüfung » (« SUP ») sur un terrain classé, sous l’empire de l’ancien PAG, en zone constructible. En effet, si les auteurs de la SUP avaient justifié le répertoriage de ses terrains en zone verte, et plus particulièrement dans les secteurs N_U04 et N_06 de la SUP, en invoquant la densification du tissu urbain, il n’en resterait pas moins que le projet de refonte du PAG aurait déjà prévu un reclassement en zone constructible des terrains inscrits dans le secteur N_01 de la SUP. Comme les terrains repris dans ces trois secteurs N_01, N_06 et N_U04 représenteraient à peu près la même sensibilité environnementale, il estime que les conclusions de la SUP « pour les deux sites précités » seraient sensiblement les mêmes et qu’en fin de compte, il se dégagerait expressément de la SUP que les secteurs N_06 et N_U04 auraient été « sacrifiés » pour les exclure des périmètres d’agglomération au profit de l’urbanisation projetée notamment sur le « terrain N01 ». Etant donné que, selon le demandeur, il n’aurait existé aucune obligation de réaliser une SUP pour des terrains appartenant au périmètre d’agglomération et eu égard au manque d’objectivité de la SUP, il devrait être admis que les auteurs de la SUP avaient commis un abus de pouvoir, impliquant que l’argument du ministre concernant la protection des espèces sur ses parcelles serait à écarter.

Quant au motif tenant à la sécurité routière, tel que mis en avant tant par les autorités communale que ministérielle pour justifier le refus de classer intégralement les parcelles litigieuses dans la zone constructible, le demandeur estime que des considérations tenant à la sécurité routière et à la circulation ne relèveraient de la compétence, ni de la commune, ni du ministre, dans la mesure où les permissions de voirie directes seraient accordées par les préposés des Services régionaux de l’administration des Ponts et Chaussées sur base d’un cahier de charges approuvé par le ministre de la Mobilité et des Travaux publics. Il s’ensuivrait que si ses parcelles étaient classées en zone constructible, l’obtention d’une permission de voirie, qui traiterait alors toute question éventuelle de sécurité routière, serait nécessaire avant toute nouvelle construction sur ses parcelles.

Le demandeur conteste dans ce contexte également que le classement de la parcelle (P3) en zone constructible entraînerait l’existence d’un risque d’accident. En effet, et en se référant à des photographies reproduites dans sa requête introductive d’instance, il argue que la parcelle en question ne serait concernée par aucun virage, tout en proposant de procéder, le cas échéant, à une visite des lieux.

Pour le surplus, le demandeur souligne que dans la mesure où une construction se trouverait déjà sur la parcelle (P3), le classement litigieux le contraindrait, le cas échéant, à accepter une dégradation de l’immeuble existant, alors que toute demande de remise en état ou de transformation devrait être formulée auprès du ministre ayant l’Environnement dans ses attributions.

Quant aux parcelles (P2) et (P1), s’il admet que la route …, longeant ces deux autres parcelles, pourrait effectivement poser un problème en termes de sécurité routière, il existerait toutefois la possibilité d’installer des panneaux de signalisation, de même que d’aménager la route de manière à obliger les automobilistes à ralentir à l’approche des terrains en question. Il rappelle, à ce propos, que la compétence en la matière reviendrait exclusivement au ministre de la Mobilité et des Travaux publics.

Le demandeur réfute ensuite le motif de la commune tiré du fait que la parcelle (P1) ne disposerait pas d’un accès direct à la voie publique et qu’elle serait située dans une zone à risque élevé pour les évènements de précipitations intenses, en relevant qu’il ressortirait de l’avis de la commission d’aménagement du 25 janvier 2021 que « le territoire de la commune de Flaxweiler ne comprend pas de zones inondables couvertes par les cartes des zones inondables et des cartes des risques d’inondation déclarées obligatoires par le règlement grand-ducal du 5 février 2015 y relatif ». Il s’ensuivrait qu’une telle zone serait inexistante sur le site concerné. Afin d’appuyer son argumentation, il verse encore en cause des photographies relatives aux inondations de 2009 desquelles il se dégagerait que lors de ces inondations, la « … » ne serait pas montée « au-delà de ces limites » et n’aurait pas touché la parcelle (P1), comme la commune semblerait le croire à tort. Il ajoute encore, à ce sujet, que la parcelle en question disposerait de deux accès carrossables, à savoir à la rue … et à la rue ….

En deuxième lieu, Monsieur (A) s’empare d’une violation du principe d’égalité de traitement en ce qu’il n’existerait aucune justification pour la différence de traitement frappant ses parcelles et celles du secteur N_03, lequel aurait été classé sous l’empire de l’ancien PAG en zone verte pour être reclassé en zone [HAB-1] à la suite de la refonte du PAG, dans la mesure où « leur classement dans le PAG en vigueur [serait] identique et leurs caractéristiques environnementales [seraient] comparables ». Il en irait de même pour les secteurs « N01 et N03 » qui auraient été classés sous l’empire de l’ancien PAG en zone [AGR] pour être reclassés dans le nouveau PAG dans une zone [HAB-1] superposée d’une zone soumise à l’élaboration d’un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » (« PAP NQ »). Il ajoute que le fait de permettre l’urbanisation des secteurs N_01 et N_03, tout en excluant les secteurs N_06 et N_U04, constituerait une « absurdité urbanistique » et résulterait d’« une forme de marchandage avec le ministère de l’Environnement », tout en soutenant que par le fait de rendre constructible la surface N_03, l’administration communale rendrait constructible des terrains avec des vestiges archéologiques connus.

En troisième lieu, Monsieur (A) soulève une violation du principe de confiance légitime de la part de la commune, dans la mesure où ses parcelles auraient été soumises à l’élaboration d’un PAP depuis au moins la dernière modification ponctuelle du PAG de la commune, à savoir en 2013. La commune aurait ainsi manifesté, jusqu’à la refonte du PAG, de manière continue et non équivoque son intention d’urbaniser ces terrains. Or, suite à la refonte du PAG, sa situation serait devenue moins favorable, sans que le changement d’attitude de la commune ne réponde à une quelconque motivation urbanistique circonstanciée. Il s’ensuivrait que le reclassement de ses parcelles ne serait ni conforme à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, qui prévoirait, notamment, un développement harmonieux des structures urbaines, ni à la qualité urbanistique des localités.

Enfin, le demandeur se plaint de la perte de constructibilité de ses parcelles, au motif qu’environ 30% de ses terrains auraient fait l’objet d’un classement en zone verte, ce qui le priverait de facto des attributs essentiels de son droit de propriété et lui causerait un préjudice financier substantiel. Il estime que les classements litigieux ne pourraient pas intervenir sans qu’une juste et préalable indemnité, telle qu’elle serait garantie par l’article 16 de la Constitution en vigueur jusqu’au 1er juillet 2023, ne soit prévue et sans qu’une vérification des motifs d’utilité publique à la base de ces classements ne soit effectuée. Il met, dans ce contexte, l’accent sur le fait qu’un tel dédommagement financier à son égard serait à supporter par le budget communal, de sorte à devoir être supporté, au final, par l’ensemble des citoyens de la commune de Flaxweiler, ce qui aurait comme conséquence que le reclassement partiel des parcelles litigieuses en zone verte serait contraire à l’intérêt général, et ce d’autant plus si l’objectif était de favoriser, par compensation, la reconversion d’autres terrains « actuellement » non constructibles en terrains constructibles.

Dans le cadre de son mémoire en réplique, le demandeur maintient, en substance, ses développements antérieurs, tout en précisant par rapport au motif tenant à la valeur écologique des parcelles litigieuses que ses parcelles (P1) et (P2) seraient des champs agricoles intensifs labourés, de sorte à n’avoir aucune valeur environnementale. Pour ce qui est de la parcelle (P3), si elle accueillait certes des biotopes, il n’en resterait pas moins que comme elle serait constructible, seules des compensations environnementales seraient à mettre en place.

Pour ce qui est du motif tenant à la sécurité routière, le demandeur insiste sur le fait que le ministre de la Mobilité et des Travaux publics disposerait d’une compétence propre dans la matière relative à la sécurité routière et qu’un PAG ne pourrait pas réglementer la sécurité publique et routière, dans la mesure où il serait cantonné à réglementer le mode et le degré d’utilisation du sol, tel que cela ressortirait de l’article 6 du règlement grand-ducal modifié du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune.

En ce qui concerne la violation du principe d’égalité de traitement à travers les décisions déférées, le demandeur renonce tout d’abord, au vu du contenu des mémoires en réponse respectifs, à son argumentation relative au secteur N_01, tout en maintenant ses développements relatifs au secteur N_03. Il n’en resterait pas moins que comme les motifs invoqués par les parties défenderesses seraient inexacts tant en fait qu’en droit en ce qui concernerait ses parcelles, les différents secteurs de la SUP invoqués par lui seraient bien comparables.

Tant la commune que la partie étatique concluent au rejet du recours sous analyse pour n’être fondé en aucun de ses moyens.

Analyse du tribunal Le tribunal rappelle à titre liminaire qu’en présence de plusieurs moyens invoqués, il n’est pas lié par l’ordre dans lequel les moyens ont été présentés par les parties à l’instance, mais qu’il lui appartient de déterminer la suite du traitement des moyens et arguments des parties compte tenu de la logique juridique dans laquelle ils s’insèrent.

i. Quant aux contestations ayant trait à la justification du classement des parcelles litigieuses Le tribunal relève que les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, doivent être mues par des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur le territoire donné, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général et, dans ce contexte, lesdites autorités doivent veiller tant à la conservation de l’esthétique urbaine qu’au développement rationnel des agglomérations5.

Dans ce contexte, il y a lieu de préciser que saisi d’un recours en annulation, le juge administratif est appelé à vérifier, d’un côté, si, au niveau de la décision administrative querellée, les éléments de droit pertinents ont été appliqués et, d’un autre côté, si la matérialité des faits sur lesquels l’autorité de décision s’est basée est établie. Au niveau de l’application du droit aux éléments de fait, le juge de l’annulation vérifie encore s’il n’en est résulté aucune erreur d’appréciation se résolvant en dépassement de la marge d’appréciation de l’auteur de la décision querellée. Le contrôle de légalité à exercer par le juge de l’annulation n’est pas incompatible avec le pouvoir d’appréciation de l’auteur de la décision qui dispose d’une marge d’appréciation. Ce n’est que si cette marge a été dépassée que la décision prise encourt l’annulation pour erreur d’appréciation. Ce dépassement peut notamment consister dans une disproportion dans l’application de la règle de droit aux éléments de fait. Le contrôle de légalité du juge de l’annulation s’analyse alors en contrôle de proportionnalité6.

S’il est certes vrai que le choix d’entériner ou de ne pas entériner la modification d’un plan d’aménagement relève d’une dimension politique et échappe comme tel au contrôle des juridictions de l’ordre administratif saisies d’un recours en annulation, il n’en demeure pas moins que tout acte administratif doit reposer sur un motif dont le juge administratif vérifie tant l’existence que la légalité. Cette exigence découle du fait que le juge administratif a l’obligation de vérifier si les autorités administratives compétentes n’ont pas violé la loi, commis un excès de pouvoir ou un détournement de pouvoir et cette obligation de motivation existe également pour les actes à caractère réglementaire qui, quoique discrétionnaires, doivent être pris dans l’intérêt général, de sorte qu’il importe que les autorités administratives compétentes fassent connaître le ou les motifs qui les ont guidées dans leur décision, le contrôle exercé par le juge de l’annulation ne portant dès lors pas sur l’opportunité, mais sur la réalité et la légalité des motifs avancés7.

Quant aux objectifs devant guider les autorités communales, lorsqu’elles initient des modifications de leurs plans d’aménagement, ainsi que l’autorité ministérielle, dans le cadre de l’exercice de son contrôle tutélaire, il y a lieu de se référer à l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004, aux termes duquel « Les communes ont pour mission de garantir le respect de l’intérêt 5 Trib. adm., 20 octobre 2004, n° 17604 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 217 et les autres références y citées.

6 Cour adm., 9 novembre 2010, n° 26886C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en annulation, n° 40 et les autres références y citées.

7 Trib. adm., 26 avril 2004, n° 17315 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 847 et les autres références y citées.

général en assurant à la population de la commune des conditions de vie optimales par une mise en valeur harmonieuse et un développement durable de toutes les parties du territoire communal par :

(a) une utilisation rationnelle du sol et de l’espace tant urbain que rural en garantissant la complémentarité entre les objectifs économiques, écologiques et sociaux ;

(b) un développement harmonieux des structures urbaines et rurales, y compris les réseaux de communication et d’approvisionnement compte tenu des spécificités respectives de ces structures, et en exécution des objectifs de l’aménagement général du territoire ;

(c) une utilisation rationnelle de l’énergie, des économies d’énergie et une utilisation des énergies renouvelables ;

(d) le développement, dans le cadre des structures urbaines et rurales, d’une mixité et d’une densification permettant d’améliorer à la fois la qualité de vie de la population et la qualité urbanistique des localités ;

(e) le respect du patrimoine culturel et un niveau élevé de protection de l’environnement naturel et du paysage lors de la poursuite des objectifs définis ci-

dessus ;

(f) la garantie de la sécurité, la salubrité et l’hygiène publiques. ».

L’article 6 de la loi du 19 juillet 2004 prévoit, quant à lui, que « Le plan d’aménagement général a pour objectif la répartition et l’implantation judicieuse des activités humaines dans les diverses zones qu’il arrête aux fins de garantir le développement durable de la commune sur base des objectifs définis par l’article 2 de la loi. ».

Il convient encore de noter que la décision d’adopter, respectivement de modifier un PAG est, dans son essence même, prise dans l’intérêt général, cette caractéristique étant présumée jusqu’à preuve du contraire8.

Par ailleurs, il échet de rappeler que la mutabilité des PAG relève de leur essence même, consistant à répondre à des contraintes variables à travers le temps concernant à la fois les aspects urbanistiques de l’aménagement des agglomérations et le volet politique de la vie en commun sur le territoire donné9. Il s’ensuit qu’en se fondant sur des considérations d’ordre urbanistique correspondant à une finalité d’intérêt général, les autorités communales peuvent procéder à des modifications de leur règlementation urbanistique, pourvu toutefois que la décision soit proportionnelle à son objectif et qu’elle soit dépourvue d’un dépassement dans le chef des autorités compétentes de leur marge d’appréciation, analyse qui sera effectuée ci-

après.

Force est au tribunal de constater qu’il est constant en cause qu’une partie des parcelles litigieuses, se trouvant de part et d’autre dans la rue … en sortie de la localité de …, était classée, sous l’empire de l’ancien PAG, à l’intérieur du périmètre d’agglomération et plus particulièrement en zone de faible densité, superposée d’une zone soumise à un PAP. Dans le nouveau PAG, les parcelles litigieuses ont été classées comme suit :

- la parcelle (P2) : dans une zone [AGR] ;

8 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en annulation, n° 10 et les autres références y citées.

9 Trib. adm., 7 mars 2001, n° 12233 du rôle, confirmé par Cour adm., 20 décembre 2001, n° 13291C du rôle, Pas.

adm. 2023, V° Urbanisme, n° 231 (1er volet) et les autres références y citées.

- la parcelle (P1) : pour partie dans une zone [AGR], dans une zone [FOR] et dans une zone [HAB-1], superposée d’une servitude « urbanisation – cours d’eau » ; et - la parcelle (P3) : pour partie dans une zone [AGR], dans une zone [FOR] et dans une zone [HAB-1], superposée, à titre indicatif, d’un « Biotope protégé (relevé non exhaustif) ».

Il y a lieu de relever que le demandeur conteste, dans le cadre du présent recours, uniquement les divers classements en zone non aedificandi de ses parcelles, à savoir le classement en zone [AGR] de l’intégralité de sa parcelle (P2) et le classement partiel de ses parcelles (P1) et (P3), ci-après désignées par les « parties concernées des parcelles litigieuses », en zone [AGR] et en zone [FOR]. Dans la mesure où le demandeur n’a soulevé aucun moyen par rapport au classement partiel de sa parcelle (P1) en zone [HAB-1], superposée d’une servitude « urbanisation – cours d’eau », respectivement au classement partiel de sa parcelle (P3) en zone [HAB-1], superposée, à titre indicatif, d’un « Biotope protégé (relevé non exhaustif) », la légalité de ces classements n’a pas à être examinée par le tribunal.

En ce qui concerne les différents classements litigieux des parcelles en cause, il échet de constater qu’ils sont motivés par la commune, dans sa délibération du 10 février 2022, par le « souhait de mettre un frein au développement tentaculaire dans la vallée du « … », au-delà des constructions existantes », afin de garantir un développement urbanistique et cohérent de la localité de ….

S’agissant, dans ce contexte, plus particulièrement de la parcelle (P1), la commune a encore justifié le classement partiel de celle-ci en zones [FOR] et [AGR] par le fait (i) que cette partie de la parcelle ne serait pas en limite avec la voirie publique et empêcherait un accès direct à cette voirie, (ii) qu’elle-même serait propriétaire du talus de route d’une largeur d’environ 5 mètres qu’elle n’envisagerait toutefois pas de céder et (iii) que suivant des cartes publiées en relation avec les évènements à fortes chutes de pluie (« Starkregenereigniskarte »), la partie concernée de la parcelle litigieuse se situerait dans une zone à risque élevé, de sorte que le « respect du secteur de risque projetée exclu[rait] toute construction raisonnable ».

En ce qui concerne ensuite la parcelle (P3), la commune, après avoir précisé que la parcelle en question, partiellement classée en zone verte, comprendrait une ancienne carrière avec des affleurements rocheux, des débris d’exploitation et des parois rocheuses couvertes d’une végétation de haute qualité, partiellement boisée, a considéré que toute construction sur ce site nécessiterait des travaux de déblaiement et d’excavation, ainsi que l’aménagement de murs de soutènement imposants, ce qui impliquerait « une destruction d’un site paysager d’intérêt à l’entrée de la localité en plus de causer un impact important dans le sous-sol rocheux suite à ces aménagements ». Elle a encore mis en avant que « [l]’aménagement d’un accès carrossable à cet endroit, une courbe de la route (…) à caractère inter localité voire régional, risquerait de générer un point accidentogène en raison de la difficulté d’y garantir un/des accès sécurisés pour les résidents et les utilisateurs de [cette] route », de sorte que le terrain en question serait inapproprié pour une urbanisation à des fins d’habitation.

La partie communale a, notamment, encore précisé dans son mémoire en réponse que comme les parcelles du demandeur seraient peu propices à l’urbanisation en raison de la forte pente qui existerait à cet endroit, il serait préférable de privilégier le développement urbanistique d’autres zones, plus accessibles, de la localité de ….

Le ministre a confirmé le choix communal de classer partiellement les parcelles du demandeur en zone non aedificandi, en soulignant que l’inclusion intégrale des parcelles (P2) et (P1) dans une zone urbanisable contribuerait à un développement tentaculaire de la localité de …, ce qui serait contraire à un développement concentrique et rationnel de ladite localité.

Après avoir encore mis en avant le risque d’un impact significatif sur l’environnement et sur la protection des espèces présentes sur toutes les parcelles du demandeur, il a considéré qu’une urbanisation des parcelles litigieuses serait peu opportune en raison de la topographie accidentée qu’elles présenteraient. Enfin, il a estimé que le classement des parcelles litigieuses tel que retenu lors de la refonte du PAG permettrait d’atteindre un arrondissement cohérent du tissu urbain existant et de contribuer ainsi au développement harmonieux du tissu rural y existant.

Dans le cadre de son mémoire en réponse, la partie étatique a insisté sur le fait que le classement en zone constructible des parcelles litigieuses ne permettrait pas la réalisation d’un développement concentrique et constituerait même le début d’une extension tentaculaire en direction de l’espace vert, tout en relevant qu’en outre, la topographie des parcelles concernées serait peu propice à la construction et ce en particulier en raison du fait que la parcelle (P3) afficherait une pente de plus de 6 mètres sur une distance de 14 mètres, représentant ainsi une déclivité de près de 43%. Elle a ajouté que si une construction sur un tel site pouvait être techniquement réalisable, il n’en resterait toutefois pas moins qu’en raison de l’ampleur des excavations nécessaires et du risque inévitable d’éboulement, une urbanisation n’y serait pas opportune, de sorte à ne pas être conforme aux objectifs d’une utilisation rationnelle du sol, de sécurité et de développement harmonieux.

Le tribunal se doit de constater qu’au regard des pièces versées en cause et notamment de la partie graphique du PAG, le classement litigieux des parcelles (P2), (P1) et (P3), tel qu’opéré par la commune et entériné par le ministre pour les raisons indiquées ci-avant, se trouve justifié par des considérations d’ordre urbanistique s’inscrivant dans une finalité d’intérêt général, à savoir une utilisation rationnelle du sol et de l’espace urbain, ainsi qu’un développement cohérent et harmonieux du territoire de la commune de Flaxweiler.

En effet, les parcelles en cause, dont le demandeur sollicite actuellement le classement intégral en zone constructible, se trouvent localisées à l’extrémité nord-ouest de la localité de … et, plus particulièrement des deux côtés de la rue …, immédiatement avant le virage de la route …. S’il ressort certes de la partie graphique du PAG que la parcelle (P3) est partiellement classée en zone [HAB-1], avec pour limite de la zone aedificandi la construction déjà existante sur ladite parcelle, il n’en reste pas moins que celle-ci est, pour le surplus, au nord et à l’ouest, entourée de verdure et de forêt – tel qu’en témoignent les photos reproduites dans les écrits respectifs des parties demanderesse et étatique – pour être adjacente à une zone [FOR] et à une zone [AGR]. La même situation se présente pour les parcelles (P2) et (P1). En effet, la partie concernée de la parcelle (P1) est, pour partie à son extrémité nord, est et sud-est attenante à une zone [HAB-1] et, pour le surplus, entourée de zones [FOR] et [AGR]. La parcelle (P2), quant à elle, est à son extrémité est attenante à une zone [HAB-1] et, pour le surplus, entourée de zones [AGR] et [FOR].

Il y a ensuite lieu de relever, à l’instar de la commune, qu’il se dégage encore de la partie graphique du PAG que le nord de la localité de … à la hauteur de la vallée du « … », où se situent les parcelles litigieuses, est déjà caractérisée par un développement tentaculaire. Le classement de l’intégralité des parcelles litigieuses en zone constructible aurait, dès lors, pour conséquence d’aggraver la situation existante en renforçant ce développement tentaculaire que la commune souhaite pourtant freiner.

Le tribunal se doit encore de relever que la délimitation de la zone aedificandi à la hauteur des deux constructions existantes sur les parcelles (P3) et (P4) permet non seulement d’éviter l’extension du tentacule déjà présent à cet endroit, et ainsi d’empêcher l’aggravation de la situation existante, mais également de garantir un arrondissement du tissu urbain à cet endroit précis de la localité de …. Ainsi, cette limitation de la zone aedificandi au niveau des constructions existantes est cohérente pour assurer une utilisation rationnelle du sol et un développement harmonieux de la localité de … à son extrémité nord-ouest.

Dans ce contexte et au vu du fait que la motivation des autorités communale et étatique repose sur l’existence d’un risque d’extension du tentacule déjà présent en cas d’inclusion de l’intégralité des parcelles litigieuses en zone constructible, l’argumentation du demandeur selon laquelle ses parcelles feraient partie d’un quartier résidentiel, et ne seraient donc pas isolées du reste de la localité de …, n’est pas pertinente. Il en est de même de la prétendue proximité des parcelles litigieuses avec l’un des deux centres de la localité de …, étant donné que même si cette proximité était avérée, elle ne suffirait pas à exclure une extension du développement tentaculaire à l’extrémité nord-ouest de la localité de ….

Au vu de tout ce qui précède, le tribunal est amené à retenir que l’inclusion intégrale des parcelles litigieuses dans le périmètre d’agglomération, telle que sollicitée par le demandeur, ne serait pas conforme à une urbanisation cohérente de la localité de … dans la mesure où ladite inclusion favoriserait, tel que constaté ci-avant, nécessairement une aggravation de la situation tentaculaire d’ores et déjà existant aux abords de ladite localité, de même qu’elle entraverait l’arrondissement du tissu urbain à l’extrémité nord-ouest de cette même localité, tel que justement voulu par la commune pour mettre un frein au développement tentaculaire. Il s’ensuit que le choix opéré par l’autorité communale et entériné par l’autorité de tutelle de classer les parcelles litigieuses pour partie en dehors de la zone aedificandi se justifie par des arguments vérifiés quant à leur matérialité et tirés d’une saine urbanisation, tendant à une finalité d’intérêt général, à savoir une utilisation rationnelle du sol et de l’espace urbain ainsi qu’un développement cohérent et harmonieux de la localité de …, et partant du territoire de la commune de Flaxweiler, conformes aux objectifs d’intérêt général inscrits aux points a) et b) de l’article 2, précité, de la loi du 19 juillet 2004. Les développements de Monsieur (A) tendant à voir intégrer entièrement ses parcelles dans le périmètre d’agglomération laissent dès lors d’être fondés.

Etant donné que ce seul constat suffit pour permettre au tribunal de retenir que le classement de la parcelle (P2) et des parties concernées des parcelles (P1) et (P3) de Monsieur (A) en zone non aedificandi est légalement justifié, il devient surabondant de prendre position quant aux contestations du demandeur ayant trait à l’argumentaire supplémentaire des autorités communale et étatique relatif à l’impact écologique non négligeable qu’auraient les classements sollicités et à la sécurité routière en ces lieux. Il s’ensuit également qu’il n’y a pas lieu de procéder à une visite des lieux, telle que sollicitée par Monsieur (A), afin d’évaluer le risque d’accident lié à un classement intégral de la parcelle (P3) en zone constructible.

Le moyen ayant trait à une absence de justification suffisante du classement partiel des parcelles litigieuses en zone non aedificandi est dès lors à rejeter.

ii. Quant au moyen tenant à une violation du principe de confiance légitime par la commune S’agissant de l’argument du demandeur ayant trait à une violation par la commune du principe de confiance légitime, il y a lieu de relever que le principe général de la confiance légitime s’apparente au principe de la sécurité juridique et a été consacré tant par la jurisprudence communautaire en tant que principe du droit communautaire10, que par la jurisprudence nationale en tant que principe général du droit.

Ce principe général du droit tend à ce que les règles juridiques ainsi que l’activité administrative soient empreintes de clarté et de prévisibilité, de manière à ce qu’un administré puisse s’attendre à un comportement cohérent et constant de la part de l’administration dans l’application d’un même texte de l’ordonnancement juridique par rapport à une même situation administrative qui est la sienne.

En vertu de ce principe, l’administré peut exiger de l’autorité administrative qu’elle se conforme à une attitude qu’elle a suivie dans le passé, ce principe garantissant la protection de l’administré contre les changements brusques et imprévisibles de l’attitude de l’administration.

D’une manière générale, un administré ne peut toutefois prétendre au respect d’un droit acquis que si, au-delà de ses expectatives, justifiées ou non, l’autorité administrative a créé à son profit une situation administrative acquise et réellement reconnu ou créé un droit subjectif dans son chef. Ce n’est qu’à cette condition que peut naître dans le chef d’un administré la confiance légitime que l’administration respectera la situation par elle créée, les deux notions de droits acquis et de légitime confiance étant voisines.

En l’espèce, le tribunal se doit d’abord de rappeler de manière générale qu’il est de jurisprudence constante que la mutabilité des PAG relève de leur essence même, consistant à répondre à des contraintes variables à travers le temps concernant à la fois les aspects urbanistiques de l’aménagement des agglomérations et le volet politique de la vie en commun sur le territoire donné11. Compte tenu de la mutabilité intrinsèque des situations générales, due aux changements de circonstances de fait et de droit, les actes réglementaires ne créent, en principe, que des droits précaires et maintiennent dans le chef de l’autorité administrative le pouvoir soit de changer soit d’abroger un acte réglementaire, en faisant usage des pouvoirs qui lui sont conférés dans l’exercice de sa mission12. Dans cette optique, l’invocation de l’intérêt général motivé par une utilisation rationnelle du sol et de l’espace urbain, ainsi que par un développement harmonieux du territoire de la commune de Flaxweiler, conformément aux objectifs inscrits aux points a) et b) de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004 peut justifier des changements dans les parties graphique et écrite d’un PAG13.

Dans la mesure où, en l’espèce, il vient d’être retenu que le choix opéré par la commune, entériné par la décision ministérielle, s’inscrit dans une finalité d’intérêt général, à savoir une utilisation rationnelle du sol et de l’espace urbain, de même qu’un développement cohérent et harmonieux de la localité de …, étant donné que le classement retenu des parcelles litigieuses permet de mettre à un frein à l’extension du développement tentaculaire d’ores et déjà existant au nord de la localité de …, ainsi que, par la fixation de la limite de la zone aedificandi le long 10 CJUE 5 juin 1973, aff. 81/72, Commission c/ Conseil.

11 Trib. adm., 7 mars 2001, n°12233 du rôle, confirmé par Cour adm., 20 décembre 2001, n° 13291C du rôle, Pas.

adm. 2023, V°Urbanisme, n° 231 (1er volet) et les autres références y citées.

12 Trib. adm., 9 juin 2004, n°11415a du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 231 (3e volet) et les autres références y citées.

13 En ce sens : trib. adm. 14 février 2001, n° 11414 du rôle, confirmé par Cour adm., 27 novembre 2001, n° 13130C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Urbanisme, n° 229 et les autres références y citées.

de la construction existante sur la parcelle (P3), d’arrondir le tissu urbain, le tribunal se doit de retenir que la commune n’a pas commis de violation du principe de confiance légitime. Le moyen afférent est dès lors à rejeter.

iii. Quant au moyen tenant à une violation du principe d’égalité de traitement En ce qui concerne la violation alléguée par le demandeur du principe d’égalité de traitement en raison de la différence de classement de ses parcelles situées dans les secteurs N_06 et N_U04 de la SUP, par rapport à celles situées dans le secteur N_03 de la SUP, il y a lieu de relever que le principe constitutionnel d’égalité devant la loi, tel que consacré par l’article 10bis de la Constitution en vigueur jusqu’au 1er juillet 2023, suivant lequel tous les Luxembourgeois sont égaux devant la loi, applicable à tout individu touché par la loi luxembourgeoise si les droits de la personnalité, et par extension les droits extrapatrimoniaux sont concernés, ne s’entend pas dans un sens absolu, mais requiert que tous ceux qui se trouvent dans la même situation de fait et de droit soient traités de la même façon. Le principe d’égalité de traitement est compris comme interdisant le traitement de manière différente de situations similaires, à moins que la différenciation soit objectivement justifiée. Il appartient, par conséquent, aux pouvoirs publics, tant au niveau national qu’au niveau communal, de traiter de la même façon tous ceux qui se trouvent dans la même situation de fait et de droit. Par ailleurs, lesdits pouvoirs publics peuvent, sans violer le principe d’égalité, soumettre certaines catégories de personnes à des régimes légaux différents, à condition que les différences instituées procèdent de disparités objectives, qu’elles soient rationnellement justifiées, adéquates et proportionnées à leur but14.

Il y a tout d’abord lieu de relever qu’il ressort de la SUP que les secteurs N_06 et N_U04 incluent la parcelle (P2), classée suite à la refonte du PAG en zone [AGR], ainsi que les parties concernées des parcelles (P1) et (P3), classées en zones [FOR] et [AGR], classements qui, tel que retenu ci-avant, sont justifiés au regard des objectifs inscrits à l’article 2 a) et b) de la loi du 19 juillet 2004, alors que leur intégration en zone constructible provoquerait l’extension du développement tentaculaire existant d’ores et déjà à l’extrémité nord-ouest de la localité de …, et empêcherait un arrondissement du tissu urbain à cet endroit, tel que voulu par le ministre.

Il s’avère toutefois, au regard de la SUP15 et des explications circonstanciées des parties défenderesses, que la situation des parcelles appartenant au secteur N_03 qui ont été intégrées dans le cadre de la refonte du PAG dans la zone aedificandi n’est pas comparable à celle des parcelles du demandeur, dans la mesure où l’intégration des parcelles du secteur N_03 dans le périmètre d’agglomération permet de renforcer le développement concentrique à cet endroit de la localité de …, sans y créer ni étendre un développement tentaculaire.

Au vu de ce qui précède et plus particulièrement des conséquences urbanistiques distinctes résultant d’une intégration des différents secteurs dans une zone urbanisable, le moyen relatif à une violation du principe d’égalité de traitement est à rejeter pour être non fondé.

iv. Quant aux critiques du demandeur relatives à une atteinte à son droit de propriété et à son droit à une indemnisation 14 Trib. adm., 6 décembre 2000, n° 10019 du rôle, Pas. adm. 2023, V° Lois et règlements, n° 9 (2e volet) et les autres références y citées.

15 SUP: Umweltbericht – Teil 1, Umwelterheblichkeitsprüfung, April 2017, p. 162.

Force est de constater que le demandeur fait valoir que le classement partiel de ses parcelles en dehors du périmètre d’agglomération le priverait des attributs essentiels de son droit de propriété et lui causerait un préjudice financier substantiel.

A cet égard, il convient d’abord de rappeler que l’article 16 de la Constitution en vigueur jusqu’au 1er juillet 2023, dispose que : « Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et moyennant juste indemnité, dans les cas et de la manière établis par la loi. ».

Il convient, en l’espèce, en premier lieu, de constater qu’aucun transfert de propriété des parcelles litigieuses n’a été décidé ou ne s’est opéré, de sorte qu’en principe, aucune expropriation au sens de l’article 16 de la Constitution ne peut être constatée.

Ensuite et en ce qui concerne la prétendue violation du droit de propriété tel que consacré à travers l’article 16 précité de la Constitution, il y a lieu de se référer au prédit arrêt rendu par la Cour Constitutionnelle en date du 4 octobre 201316, par lequel celle-ci, tout en consacrant le principe de la mutabilité des PAG et en soulignant que le juge administratif n’était pas autorisé à sanctionner un reclassement d’un terrain précédemment classé en zone constructible en zone non constructible, mais que les propriétaires concernés pouvaient se pourvoir, le cas échéant, devant le juge judiciaire en vue de l’allocation d’une indemnité éventuelle, a déclaré contraires à l’article 16 de la Constitution les dispositions de la loi du 19 juillet 2004 posant en principe que les servitudes résultant d’un PAG n’ouvrent droit à aucune indemnité et prévoyant des exceptions à ce principe qui ne couvrent pas toutes les hypothèses dans lesquelles la privation de la jouissance du terrain frappé par une telle servitude est hors de proportion avec l’utilité publique.

Dans le même arrêt, la Cour Constitutionnelle a réaffirmé la considération qu’elle avait retenue dans son arrêt du 26 septembre 200817, selon laquelle un changement dans les attributs de la propriété, qui est à tel point substantiel qu’il prive celle-ci d’un de ses aspects essentiels, peut constituer une expropriation.

Dans ledit arrêt, la Cour Constitutionnelle n’a ainsi pas retenu que, de manière générale, toute servitude d’urbanisme constituait une expropriation, mais elle a, en revanche, retenu de manière nuancée que seul un changement dans les attributs de la propriété à tel point substantiel qu’il prive celle-ci d’un de ses aspects essentiels peut constituer une expropriation.

En l’espèce, s’il est vrai que le classement finalement retenu, en ce que la parcelle (P2) et les parties concernées des parcelles (P1) et (P3) ont été classées en zone non aedificandi, limite d’une certaine manière l’usage de la propriété du demandeur, celui-ci reste toutefois en défaut de démontrer que ledit classement entrave dans son cas les attributs du droit de propriété d’une manière telle que la limitation opérée puisse être qualifiée d’équivalente à une expropriation.

En tout état de cause et au vu de la solution ainsi dégagée par la Cour Constitutionnelle, le tribunal est amené à retenir qu’il n’appartient pas au juge administratif de sanctionner le reclassement d’un terrain d’une zone constructible en zone non constructible, pour autant, évidemment, que le classement ait été effectué dans un but d’intérêt général. Or, en l’espèce, 16 Cour constitutionnelle, arrêt du 4 octobre 2013, inscrit sous le numéro 00101 du registre.

17 Cour constitutionnelle, arrêt du 26 septembre 2008, inscrit sous le numéro 00046 du registre.

le tribunal vient de retenir que le classement des parties concernées des parcelles litigieuses s’est opéré selon des considérations urbanistiques poursuivant un but d’intérêt général.

Finalement il convient encore de relever que le tribunal de céans n’est en tout état de cause pas compétent pour allouer une quelconque indemnisation au demandeur, ce dernier devant faire valoir ses prétentions indemnitaires éventuelles devant le juge judiciaire, seul compétent en la matière, auquel il appartiendra alors de faire la balance entre les servitudes imposées et l’utilité publique à leur base18.

Il s’ensuit que les développements du demandeur relatifs à une atteinte à son droit de propriété et à son droit à une indemnisation sont à rejeter.

Au vu de tout ce qui précède, le recours est à rejeter pour n’être fondé en aucun de ses moyens, sans qu’il n’y ait lieu de procéder à une visite des lieux, tel que cela a été suggéré par le demandeur.

V. Quant à la demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure Le demandeur sollicite la condamnation de l’Etat, ainsi que de l’administration communale de Flaxweiler, à lui payer une indemnité de procédure de 5.000 euros en application de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999, aux termes duquel « Lorsqu’il paraît inéquitable de laisser à la charge d’une partie les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le juge peut condamner l’autre partie à lui payer le montant qu’il détermine ».

Au vu de l’issue du litige, cette demande encourt toutefois le rejet.

Le même sort est à réserver à la demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 euros formulée par la partie communale et fondée sur la même disposition légale, étant donné qu’elle n’établit pas qu’il serait inéquitable de laisser les frais non répétibles à sa charge.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande tendant à voir procéder à une visite des lieux ;

rejette les demandes en allocation d’une indemnité de procédure, telles que formulées respectivement par le demandeur et la partie communale ;

condamne le demandeur aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

18 Voir, sur ce dernier point : Cour adm., 18 décembre 2014, n° 34916C du rôle, cité in R. Ergec et F. Delaporte, Contentieux administratif luxembourgeois, Pas. adm. 2023, n° 274bis.

Alexandra Castegnaro, vice-président, Alexandra Bochet, vice-président, Annemarie Theis, premier juge, et lu à l’audience publique du 31 mars 2025 par le vice-président Alexandra Castegnaro, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Alexandra Castegnaro 19


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 48307
Date de la décision : 31/03/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2025-03-31;48307 ?

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