Tribunal administratif N° 49368 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:49368 3e chambre Inscrit le 30 août 2023 Audience publique du 2 avril 2025 Recours formé par Monsieur (A), …, contre deux actes de l’établissement public FONDS DU LOGEMENT en matière de logement locatif
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 49368 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 août 2023 par Maître Maria Ana REAL GERALDO DIAS, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), né le …, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une « décision », qualifiée comme telle, de l’établissement public FONDS DU LOGEMENT, établi et ayant son siège social à L-1311 Luxembourg, 52, boulevard Marcel Cahen, inscrit au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro J2, représenté par le président de son comité de direction en fonctions, du 5 mai 2023 annulant la proposition de logement faite le 20 février 2023, ainsi que de la « décision », qualifiée comme telle, de l’établissement public FONDS DU LOGEMENT du 6 juin 2023, intervenue sur « recours gracieux » ;
Vu le mémoire en réponse déposé le 30 octobre 2023 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc THEWES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’établissement public FONDS DU LOGEMENT, préqualifié ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 28 novembre 2023 par Maître Maria Ana REAL GERALDO DIAS au nom et pour le compte de Monsieur (A), préqualifié ;
Vu le mémoire en duplique déposé le 18 décembre 2023 par Maître Marc THEWES au nom et pour le compte de l’établissement public FONDS DU LOGEMENT, préqualfié ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les actes attaqués ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Léa FAUVERTEIX, en remplacement de Maître Maria Ana REAL GERALDO DIAS, et Maître Pierre DURAND, en remplacement de Maître Marc THEWES, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 21 janvier 2025.
1 Début 2019, Monsieur (A) introduisit une demande auprès du FONDS DU LOGEMENT en vue de se voir attribuer un logement locatif subventionné, le concerné ayant indiqué à cette occasion demeurer à ….
Suite à une enquête sociale subséquente à l’introduction de cette même demande, le dossier de Monsieur (A) fut accepté par la Commission Consultative en date du 20 juillet 2021.
Par courrier du 11 avril 2022, le directeur-adjoint ainsi que le directeur du FONDS DU LOGEMENT informèrent Monsieur (A) que « le Fonds du logement conformément à l’avis de la Commission Consultative envisage de [lui] attribuer [un] logement » à ….
Il se dégage du dossier administratif, de même que des développements non contestés du FONDS DU LOGEMENT que le logement ainsi proposé à Monsieur (A) ne put finalement lui être attribué, compte tenu du fait que sa situation personnelle avait entretemps changé dans la mesure où il avait déménagé à une nouvelle adresse à ….
Au regard de cette nouvelle adresse, la situation de Monsieur (A) fut réévaluée et le concerné se vit finalement informer, par courrier du directeur adjoint et du directeur du FONDS DU LOGEMENT du 20 février 2023, que « le Fonds du logement conformément à l’avis de la Commission Consultative envisage de [lui] attribuer [un] logement » à …. Dans ce même courrier, Monsieur (A) fut encore informé du fait qu’il allait être contacté pour une visite de ce logement et qu’en cas d’acceptation de sa part, il lui appartiendrait de soumettre au FONDS DU LOGEMENT, pour le 7 mars 2023 au plus tard, « l’ensemble des documents dont la liste figure au recto du présent courrier », à savoir des documents confirmant que sa situation personnelle et financière telle qu’il l’avait décrite dans sa demande était restée inchangée. Monsieur (A) fut également rendu attentif au fait qu’à défaut de sa part de verser les pièces requises « le contrat de location ne pourra pas être signé et le Fonds du logement sera dans l’obligation de proposer le logement à un autre candidat locataire ».
Par courrier électronique du 8 mars 2023, le FONDS DU LOGEMENT rendit Monsieur (A) attentif au fait qu’il ne l’avait toujours pas informé de sa décision relative au logement locatif proposé et qu’il ne lui a pas adressé les documents sollicités.
Par courrier électronique du même jour, Monsieur (A) informa le FONDS DU LOGEMENT qu’il n’aurait pas reçu le courrier prémentionné du 20 février 2023, raison pour laquelle il n’y aurait pas donné suite, tout en précisant qu’il souhaiterait occuper le logement lui proposé et qu’il allait faire le nécessaire pour remettre les documents lui demandés dans les plus brefs délais.
Par courrier électronique du 9 mars 2023, Monsieur (A) s’adressa au FONDS DU LOGEMENT dans les termes suivants :
« […] Suite à notre entretien téléphonique, je vous transmets mon adresse : L-…. Je vous transmettrai également les documents demandés au plus tard mardi 15 mars pour tenir compte d’éventuels retards des services de l’administration.
Mon téléphone rest inchangé : […] et mon mail est : […].
2Dans l’attente de la visite, je vous souhaite une bonne journée. […] ».
Le 25 avril 2023, les parties en cause procédèrent à une visite du logement locatif en question.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 5 mai 2023, le directeur et le directeur-adjoint du FONDS DU LOGEMENT s’adressèrent à Monsieur (A) dans les termes suivants :
« […] Par courrier daté du 20 février 2023, le Fonds du Logement vous a fait parvenir une proposition pour un logement situé au … à L-… accompagné d’une liste de pièces justificatives requises en vue de la conclusion du bail pour le logement susvisé.
Or, vu que vous avez déménagé, vous n’avez pas donné suite à ce courrier qui vous a été adressé à l’adresse que vous aviez renseigné lors de la l’actualisation de votre demande en date du 19 septembre 2022.
Par conséquent, le Fonds du Logement est contraint de considérer cette promesse de logement comme nulle et non avenue.
Toutefois, nous vous confirmons que votre demande reste enregistrée dans notre registre des candidats-locataires et sera réexaminée en cas de vacance d’un logement adapté à votre nouvelle situation.
« Nous vous informons que vous pouvez introduire un recours contentieux contre la présente décision devant le tribunal administratif. Ce recours doit être intenté par requête signée d’un avocat à la cour dans les trois mois à compter de la notification de la présente.
Dans le même délai, vous pouvez adresser un recours gracieux par écrit au Ministre ou à l’administration ayant pris la décision.
Dans ce cas, le délai pour introduire un recours contentieux est suspendu.
Si dans les trois mois à compter de l’introduction du recours gracieux une nouvelle décision intervient ou si aucune décision n’intervient, un nouveau délai de trois mois pour introduire le recours contentieux devant le tribunal administratif commence à courir. […] ».
Par missive datée au 17 mai 2023 et réceptionné par le FONDS DU LOGEMENT le 23 mai 2023, Monsieur (A) introduisit un « recours gracieux » contre le courrier précité du 5 mai 2023.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 juin 2023, le directeur et le directeur-adjoint du FONDS DU LOGEMENT prirent position comme suit :
« […] Nous faisons suite à votre courrier que vous nous avez adressé le 14 mai 2023, dans lequel vous nous faites part de votre recours gracieux contre une annulation d’une promesse de logement.
3Par courrier daté du 20 février 2023, le Fonds du Logement vous avait fait parvenir une proposition pour un logement situé au … à L-… et accompagnée d’une liste de pièces justificatives requises en vue de la conclusion du bail pour ce logement.
Nous attirons votre attention sur le fait que vous n’avez pas donné suite à ce courrier qui vous a été adressé à l’adresse que vous nous aviez renseignée lors de l’actualisation de votre demande en date du 19 septembre 2022, or, vous aviez changé d’adresse en date du 1er janvier 2023.
Toutefois, nous vous confirmons que votre demande reste enregistrée dans notre registre des candidats-locataires, sachez qu’à chaque changement de situation une nouvelle enquête sociale est réalisée et le dossier est à nouveau présenté à la Commission Consultative. […] ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 30 août 2023, Monsieur (A) a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la « décision », qualifiée comme telle, du FONDS DU LOGEMENT du 5 mai 2023 annulant la proposition d’attribution de logement du 20 février 2023, ainsi que de la « décision », qualifiée comme telle du 6 juin 2023, intervenue sur « recours gracieux ».
Quant à la compétence du tribunal Dans la mesure où aucune disposition légale ne prévoit de recours au fond dans la présente matière, seul un recours en annulation a pu être introduit contre les actes litigieux.
Il s’ensuit que le tribunal est compétent pour statuer sur le recours en annulation tel qu’introduit par Monsieur (A).
Quant à l’admissibilité du mémoire en réplique Avant tout autre progrès en cause, le tribunal est amené à analyser l’admissibilité ratione temporis du mémoire en réplique déposé le 28 novembre 2023, au greffe du tribunal administratif.
Il résulte en effet tant des pièces versées en cause et plus particulièrement de « l’acte de notification » du mémoire en réplique, que des développements circonstanciés de la partie défenderesse, que ledit mémoire ne lui a été notifié qu’en date du 5 décembre 2023, le FONDS DU LOGEMENT en concluant que le mémoire en réplique devrait être écarté pour ne pas avoir été notifié dans le délai légal.
Aux termes de l’article 5, paragraphe (5) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, désignée ci-après par « la loi du 21 juin 1999 », « le demandeur peut fournir une réplique dans le mois de la communication de la réponse ; la partie défenderesse et le tiers intéressé sont admis à leur tour à dupliquer dans le mois », et aux termes de l’article 5, paragraphe (6) de la même loi « les délais prévus aux paragraphes 1 et 5 sont prévus sous peine de forclusion […] ».
Suivant l’article 8, paragraphe (1) de la loi du 21 juin 1999 : « (1) Le dépôt et la signification des mémoires en réponse, en réplique et en duplique produits par les parties 4autres que le délégué du Gouvernement se font d’après les règles fixées aux articles 2 et 4 pour la requête introductive. ».
Il résulte des dispositions qui précèdent qu’il appartient à la partie demanderesse de fournir son mémoire en réplique dans un délai d’un mois à compter de la signification du mémoire en réponse, ce délai étant prévu à peine de forclusion. Il échet à cet égard de relever que le délai d’un mois de la communication du mémoire en réplique inclut - implicitement, mais nécessairement - l’obligation de le déposer au greffe du tribunal et de le communiquer aux autres parties en cause dans ledit délai d’un mois.
S’agissant de la forme, l’article 8, paragraphe (1) prévoit que le dépôt et la signification du mémoire en réplique doit se faire conformément à l’article 2 de la loi du 21 juin 1999, aux termes duquel : « La requête introductive est déposée au greffe du tribunal, en original et quatre copies. […] ».
En l’espèce, le mémoire en réponse du FONDS DU LOGEMENT a été déposé au greffe du tribunal administratif et notifié au demandeur en date du 30 octobre 2023, de sorte que le délai d’un mois pour déposer le mémoire en réplique, tel que fixé au paragraphe (5) de l’article 5 de la loi du 21 juin 1999, a expiré, le jeudi 30 novembre 2023 à minuit.
Si l’original du mémoire en réplique a certes était déposé au greffe du tribunal administratif dans le prédit délai légal, force est toutefois de constater qu’il n’a été notifié au FONDS DU LOGEMENT qu’en date du 5 décembre 2023. Il s’ensuit qu’il doit être écarté pour être tardif.
Cette conclusion n’est pas ébranlée par les affirmations du litismandataire du demandeur à l’audience des plaidoiries selon lesquelles le retard de notification au FONDS DU LOGEMENT s’expliquerait par des problèmes internes et que ce dernier n’en aurait subi aucun préjudice, alors que le délai d’un mois prémentionné est un délai de rigueur dont le dépassement est sanctionné.
Dans la mesure où le mémoire en réplique est inadmissible pour être tardif, le mémoire en duplique subséquent de la partie défenderesse est, à son tour, à écarter des débats.
Quant à la recevabilité du recours Avant tout progrès en cause, il convient de constater que le recours sous analyse n’a pas été signifié par voie d’huissier au FONDS DU LOGEMENT. Dans la mesure où d’une part, il ressort toutefois des indications figurant dans le mémoire en réponse que ledit établissement public s’est bien vu notifier ledit recours, et que d’autre part, il a pu utilement défendre ses droits à travers le dépôt de son mémoire en réponse, le défaut de signification par voie d’huissier est, au vu des circonstances de l’espèce, sans incidence quant à la recevabilité en la forme du recours sous analyse, étant rappelé à cet égard qu’aux termes de l’article 29 de la loi du 21 juin 1999 « L’inobservation des règles de procédure n’entraîne l'irrecevabilité de la demande que si elle a pour effet de porter effectivement atteinte aux droits de la défense ».
5Force est ensuite de constater que dans son mémoire en réponse le FONDS DU LOGEMENT conclut à l’irrecevabilité du recours sous analyse au motif que les actes litigieux ne causeraient aucun grief au demandeur. A l’appui de ses conclusions, il fait, en substance, valoir que contrairement aux développements de Monsieur (A) dans sa requête introductive d’instance, ce seraient non pas les actes attaqués qui auraient affecté la situation juridique de celui-ci, mais le changement de sa situation factuelle. Les actes litigieux ne seraient en effet que des actes préparatoires qui ne feraient qu’annoncer au demandeur que son dossier va être réévalué compte tenu du changement de sa situation factuelle, la partie défenderesse précisant dans ce contexte que dans la procédure d’attribution d’un logement social, seuls deux actes seraient susceptibles de causer grief à l’administré à savoir d’une part, la décision attribuant un rang de priorité à la demande de ce dernier, et, d’autre part, la décision attribuant définitivement un logement.
Dans la mesure où le recours sous analyse ne serait toutefois dirigé que contre des actes préparatoires, qui n’auraient d’ailleurs pas mis fin à la procédure administrative entamée par l’introduction de la demande en obtention d’un logement locatif de Monsieur (A), le FONDS DU LOGEMENT, tout en relevant encore que le demandeur serait toujours éligible à l’attribution d’un logement social, conclut au caractère prématuré du recours sous analyse et partant à l’irrecevabilité de celui-ci.
Compte tenu du fait que le mémoire en réplique du demandeur vient d’être écarté des débats pour avoir été signifié tardivement à la partie défenderesse, aucune prise de position de celui-ci quant au moyen d’irrecevabilité lui ainsi opposé n’a été utilement soumise au tribunal.
Le tribunal relève qu’aux termes de l’article 2, paragraphe (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, un recours est ouvert « […] contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible d’après les lois et règlements ».
Cette disposition limite l’ouverture d’un recours devant les juridictions administratives notamment aux conditions cumulatives que l’acte litigieux doit constituer une décision administrative, c’est-à-dire émaner d’une autorité administrative légalement habilitée à prendre des décisions unilatérales obligatoires pour les administrés et qu’il doit s’agir d’une véritable décision, affectant les droits et intérêts de la personne qui la conteste1.
L’acte émanant d’une autorité administrative, pour être sujet à un recours contentieux, doit dès lors constituer, dans l’intention de l’autorité qui l’émet, une véritable décision, à qualifier d’acte de nature à faire grief, c’est-à-dire un acte de nature à produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle ou patrimoniale de celui qui réclame2.
Plus particulièrement n’ont pas cette qualité de décision faisant grief, comme n’étant pas destinées à produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, les informations données par l’administration, tout comme les déclarations d’intention ou les actes préparatoires d’une 1 Trib. adm., 6 octobre 2004, n° 16533 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Actes administratifs, n° 9 et les autres références y citées.
2 Trib. adm., 18 juin 1998, nos 10617 et 10618, Pas. adm. 2024, V° Actes administratifs, n° 51, et les autres références y citées.
6décision3 qui ne font que préparer la décision finale et qui constituent des étapes dans la procédure d’élaboration de celle-ci4.
Pour pouvoir se prononcer sur le caractère décisionnel des actes attaqués, il appartient d’abord au tribunal d’examiner la procédure d’attribution d’un logement locatif subventionné telle que prévue par le règlement grand-ducal modifié du 16 novembre 1998 fixant les mesures d’exécution relatives aux logements locatifs, aux aides à la pierre ainsi qu'aux immeubles cédés sur la base d'un droit d'emphytéose et d'un droit de superficie, prévus par la loi modifiée du 25 février 1979 concernant l’aide au logement, ci-après désigné par le « règlement grand-ducal du 16 novembre 1998 », ce même règlement étant entretemps abrogé5, mais s’appliquant au présent litige compte tenu du fait que le tribunal siège en l’espèce, en tant que juge de l’annulation et est ainsi amené à prendre en considération de la situation de fait et de droit telle qu’elle a existé au moment de la prise de la décision litigieuse.
A cet égard, il échet de constater qu’aux termes de l’article 11 du règlement grand-ducal du 16 novembre 1998 « Le logement vacant est attribué au ménage selon l'ordre de priorité établi conformément à l'article 10. À priorité égale, le logement est attribué au ménage dont l'inscription dans le registre des demandes est la plus ancienne. […] ».
Aux termes de l’article 10 du même règlement grand-ducal « Le promoteur attribue un ordre de priorité aux ménages retenus conformément à l'article 8, en prenant en considération notamment les critères financiers, d'hygiène et socio-familiaux suivants :
- le revenu du ménage;
- la situation précaire du ménage qui:
- doit quitter un logement • insalubre, ayant fait l'objet d'une décision d'inhabitabilité par le bourgmestre chargé de l'exécution des lois et règlements de police conformément aux dispositions de la loi communale du 13 décembre 1988, telle qu'elle a été modifiée ;
• suite à une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique ;
• suite à une condamnation au déguerpissement, le ménage ayant été de bonne foi ;
- occupe un logement non-équipé d'une douche ou d'une salle de bain respectivement d'un WC, en distinguant si le ménage n'a pas accès à un tel équipement ou si l'accès ne lui est pas réservé exclusivement ;
- occupe un logement non-adapté conformément aux critères de l'article 8 ; portant atteinte à la salubrité, à l'habitabilité ou à la sécurité du logement ;
- occupe un logement non conforme quant à sa structure ou aux matériaux utilisés portant atteinte à la salubrité, à l’habitabilité ou à la sécurité du logement ;
- occupe un logement pour lequel il doit payer un loyer mensuel conforme aux dispositions de la loi modifiée du 21 septembre 2006 sur le bail à usage d'habitation et modifiant certaines dispositions du Code civil et qui dépasse 30% 3 Trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658, confirmé sur ce point par Cour adm., 19 février 1998, n° 10263C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Actes administratifs, n° 69 et les autres références y citées.
4 Cour adm., 22 janvier 1998, nos 9647C, 9759C, 10080C et 10276C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Actes administratifs, n° 68 et les autres références y citées 5 Abrogé par le règlement grand-ducal du 13 octobre 2023 relatif à la location de logements destinés à la location abordable prévue par la loi relative au logement abordable.
7de son revenu mensuel net disponible ;
- l'effort personnel du ménage sur le marché du travail et sur le marché du logement pour trouver un emploi et/ou un logement ;
- le comportement antérieur du ménage ;
- l'âge des personnes composant le ménage. ».
Il résulte des dispositions règlementaires qui précèdent, que les logements locatifs vacants son attribués aux personnes inscrites dans le registre des demandes, lequel est établi en considération de divers critères tenant à la situation financière et personnelle des ménages demandeurs et de leur précarité, l’article 10 précité mettant plus particulièrement l’accent sur la situation du logement qu’occupe le ménage en question non seulement au moment de la demande, mais également au moment de l’attribution d’un logement locatif, l’article 14 du règlement grand-ducal du 16 novembre 1998 prévoyant en effet que « Le ménage doit satisfaire aux conditions définies à l’article 10 et 11 à la date de la signature du contrat à conclure entre parties par application de l’article 15. ».
Il s’ensuit qu’avant d’attribuer définitivement un logement locatif subventionné à une personne inscrite au registre des demandes, il appartient au FONDS DU LOGEMENT de réévaluer la situation de celle-ci pour voir si elle remplit toujours les critères prévus aux articles 10 et 11 du règlement grand-ducal du 16 novembre 1998.
En l’espèce, il convient de constater qu’entre le moment de l’introduction de sa demande en obtention d’un logement locatif subventionné et la prise des actes litigieux, le demandeur a déménagé à deux reprises. Il résulte à cet égard des explications non contestées du FONDS DU LOGEMET qu’en 2019, année d’introduction de sa demande en vue de se voir attribuer un logement locatif subventionné, Monsieur (A) vivait à … dans un logement certes salubre et adapté, mais dont le loyer mensuel constituait une charge de 58% de ses revenus. En 2022, il a déménagé à … dans un logement partiellement inadapté dont le loyer mensuel constituait une charge de 46% de ses revenus. En 2023, il s’est finalement installé à … dans un logement adapté dont le loyer représente entre 35% et 46% de son revenu.
Force est dès lors de constater que suite à ses déménagements successifs, la situation factuelle du demandeur, tant au niveau de la qualité de son logement qu’au niveau du loyer de celui-ci, a évolué, la situation du concerné telle qu’elle s’était présentée au moment de l’introduction de sa demande n’étant plus comparable à celle s’étant présentée en 2023, après son déménagement à ….
Au vu des dispositions réglementaires citées ci-avant, les déménagements du demandeur ont, à chaque fois, nécessité un réexamen de sa situation, réexamen ayant, conformément aux explications circonstanciées et non contestées du FONDS DU LOGEMENT, entraîné un changement du classement du concerné au niveau du rang de priorité attribué à sa demande en obtention d’un logement locatif subventionné.
Il ressort en effet des pièces figurant au dossier administratif, que ces décisions de classement, prises en fonction d’un système d’attribution de points ont, en l’espèce, été prises et communiquées au demandeur en 2019, suite à l’introduction de sa demande en obtention d’un logement locatif, et en 2022, suite à son premier déménagement, ces décisions se matérialisant par un bordereau d’attribution ainsi qu’un extrait du registre de demandes renseignant le rang de priorité et du nombre de points du demandeur. Il en ressort encore, au 8vu du bordereau d’attribution du 10 août 2023, qu’une nouvelle décision de classement allait être prise à la suite de son itératif déménagement, ce qui est d’ailleurs confirmé par les explications circonstanciées et non contestées du FONDS DU LOGEMENT.
Dans la mesure où il est constant en cause que l’attribution d’un logement locatif subventionné à une personne déterminée se fait en fonction du rang de priorité accordé à la demande de celle-ci, le tribunal rejoint le FONDS DU LOGEMENT en ses conclusions qu’à côté de la décision finale attribuant un logement à un demandeur, les seules décisions susceptibles de lui causer grief sont celles attribuant un rang de priorité à sa demande en obtention d’un logement locatif subventionné.
Il s’ensuit que les propositions de logement que le demandeur s’est vu soumettre de la part du FONDS DU LOGEMENT en date des 11 avril 2022 et 20 février 2023 et qui sont intervenues suite aux décisions de classement prémentionnées, étaient dépourvues de tout caractère décisionnel pour ne pas avoir créée elles-mêmes des effets juridiques affectant la situation du demandeur. Il ne s’agissait, en effet, que de simples actes préparatoires pris en vue de la conclusion éventuelle et future d’un contrat de location, ces mêmes propositions étant intervenues suite aux décisions successives d’attribution de rang de la demande en obtention d’un logement locatif de Monsieur (A), décisions auxquelles elles sont intimement liées.
Par voie de conséquence, les actes litigieux, lesquels ont pour objet le retrait pour l’avenir de la proposition de logement faite au demandeur en date du 20 février 2023, constituent également des actes préparatoires dans la procédure d’attribution d’un logement locatif subventionné au demandeur, intervenus en conséquence des décisions d’attribution prises au préalable, ces derniers n’ayant en aucune façon impacté la situation juridique de celui-ci et n’étant ainsi pas susceptibles de lui faire grief pour ne créer aucun changement de la situation juridique du demandeur.
Au vu de ces considérations, le tribunal est amené à retenir que le recours sous analyse est prématuré pour avoir été dirigé contre des actes préparatoires pris en amont de la décision définitive d’attribution ou de refus d’attribution d’un logement locatif subventionné au demandeur, étant encore souligné à cet égard, qu’il ressort sans équivoque du libellé des actes litigieux que ce dernier reste toujours éligible pour se voir attribuer un tel logement.
Cette conclusion n’est pas énervée par le fait que le courrier du 5 mai 2023 ait mentionné des voies de recours, alors que la simple indication erronée de voies de recours dans un courrier émanant d’une autorité administrative ne saurait, en tout état de cause, créer un droit et conférer un quelconque caractère décisionnel à l’acte en question6.
A titre superfétatoire, il convient encore de relever que se pose également un problème d’intérêt à agir dans le cadre du présent recours, tel que relevé à juste titre par le FONDS DU LOGEMENT dans le cadre de son mémoire en réponse, problème non utilement énervé par le demandeur compte tenu de l’irrecevabilité de son mémoire en réplique.
A cet égard, il échet d’abord de rappeler que l’intérêt à agir d’un demandeur est 6 Trib adm. 19 juin 2018, n°39513 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Actes administratifs, n° 82 (1er volet), et les 9l’utilité que présente pour celui-ci la solution du litige qu’il demande au juge d’adopter7, étant souligné que l’intérêt à agir n’est pas à confondre avec le fond du droit en ce qu’il se mesure non au bien-fondé des moyens invoqués à l’appui d’une prétention, mais à la satisfaction que la prétention est censée procurer à une partie, à supposer que les moyens invoqués soient justifiés8.
Il convient par ailleurs de souligner que l'intérêt à agir conditionnant la recevabilité d'un recours administratif ne doit pas seulement être personnel et direct, effectif, né et actuel, mais encore être légitime et ne pas viser à voir consacrer une situation contraire à la loi9.
Or, en l’espèce, et tel que relevé à juste titre par le FONDS DU LOGEMENT le recours du demandeur vise à ce que ledit établissement public prenne une décision non conforme à la loi.
Il échet en effet de constater qu’à travers son recours, le demandeur entend se voir attribuer le logement lui proposé sur base d’un classement non actuel de sa demande dans le registre des demandes. En effet, et au vu des considérations qui précèdent, le classement sur base duquel le demandeur s’est vu adresser la proposition de logement du 20 février 2023, est non conforme à sa situation factuelle telle qu’elle se présenterait au moment de l’attribution du logement en question, pour ne pas avoir pris en compte son dernier déménagement et les conséquences qui s’en sont suivies tant au niveau de la qualité du logement actuel du concerné, qu’au niveau de sa situation financière.
Une telle décision d’attribution serait manifestement contraire à l’article 14 du règlement grand-ducal du 16 novembre 1998, lequel prévoit, tel que relevé ci-avant que « Le ménage doit satisfaire aux conditions définies à l’article 10 et 11 à la date de la signature du contrat à conclure entre parties par application de l’article 15. ».
Au vu des considérations qui précèdent, le demandeur ne justifie dès lors pas d’un intérêt à agir légitime de sorte que le recours sous analyse doit être déclaré irrecevable à cet égard.
Dans son mémoire en réponse, le FONDS DU LOGEMENT sollicite encore la condamnation de Monsieur (A) au paiement d’une indemnité de procédure de 1.000,- euros sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, demande qui est toutefois à rejeter étant donné que la partie défenderesse omet de spécifier la nature des sommes exposées non comprises dans les dépens et ne précise pas en quoi il serait inéquitable de laisser des frais non répétibles à sa charge.
7 Trib adm. 22 mars 2006, n°20355 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n°3 et les autres références y citées.
8 Trib. adm. 1er octobre 2003, n°16156 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n°3 et les autres références y citées.
9 Trib. adm. 27 janvier 1999, n°10858 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n°23 et les autres références y citées.
10 Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;
écarte des débats le mémoire en réplique déposé en date du 28 novembre 2023 au greffe du tribunal administratif, ainsi que le mémoire en duplique y déposé le 18 décembre 2023 ;
déclare le recours en annulation irrecevable ;
rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure du FONDS DU LOGEMENT ;
condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 2 avril 2025 par :
Thessy Kuborn, premier vice-président, Laura Urbany, premier juge, Sibylle Schmitz, premier juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.
s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 03 avril 2025 Le greffier du tribunal administratif 11