Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 4 janvier 2021 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a prononcé son expulsion du territoire français dès sa levée d'écrou et a fixé le pays de destination.
Par un jugement no 2102413 du 30 mars 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 25 mai 2023, M. B... A..., représenté par Me Ajoyev, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 4 janvier 2021 du préfet des Hauts-de-Seine ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté n'a pas été signé par une autorité compétente, en l'absence de délégation visant expressément les arrêtés d'expulsion ;
- le préfet a entaché sa décision d'erreur manifeste dans l'appréciation de la menace à l'ordre public, dès lors qu'il n'a pas été condamné pour trafic de stupéfiants ni pour association de malfaiteur, contrairement à ce qu'indique l'arrêté contesté, qu'il ne représente pas davantage une menace réelle et actuelle à un intérêt fondamental de la société compte tenu de son comportement irréprochable en détention, qu'il ne présente pas de risque de récidive et montre sa volonté de se réadapter à la vie en société ;
- le préfet a méconnu les articles L. 252-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et porté atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- l'intérêt supérieur de ses enfants a été méconnu, en violation des stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience :
- le rapport de M. de Miguel,
- les conclusions de M. Illouz, rapporteur public,
- et les observations de Me Ajoyev, représentant M. B... A....
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B... A..., ressortissant de nationalité portugaise né le 24 juin 1992, a déclaré être entré en France en 2010. Par un arrêté du 4 janvier 2021, le préfet des Hauts-de-Seine a prononcé son expulsion du territoire français. M. B... A... relève appel du jugement du 30 mars 2023, par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté a été signé par M. Vincent Berton, secrétaire général de la préfecture des Hauts-de-Seine, qui bénéficiait d'une délégation de signature en vertu d'un arrêté PCI n° 2020-148 du 21 décembre 2020, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 22 décembre suivant, à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'État dans le département des Hauts-de-Seine à l'exception de certains actes, parmi lesquels ne figurent pas les arrêtés d'expulsion des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait et ne peut qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 521-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur à la date de l'arrêté en litige : " Les mesures d'expulsion prévues aux articles L. 521-1 à L. 521-3 peuvent être prises à l'encontre des ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou d'un membre de leur famille, si leur comportement personnel représente une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. / Pour prendre de telles mesures, l'autorité administrative tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à leur situation, notamment la durée de leur séjour sur le territoire national, leur âge, leur état de santé, leur situation familiale et économique, leur intégration sociale et culturelle dans la société française ainsi que l'intensité des liens avec leur pays d'origine ".
4. Ces dispositions doivent être interprétées à la lumière des objectifs de la directive du 29 avril 2004, notamment de ses articles 27 et 28. Il appartient à l'autorité administrative d'un État membre qui envisage de prendre une mesure d'éloignement à l'encontre d'un ressortissant d'un autre État membre de ne pas se fonder sur la seule existence d'une infraction à la loi, mais d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française. L'ensemble de ces conditions doivent être appréciées en fonction de la situation individuelle de la personne, notamment de la durée de son séjour en France, de sa situation familiale et économique et de son intégration.
5. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. B... A... s'est rendu coupable de conduite sous l'emprise de stupéfiants, de refus d'obtempérer à une sommation de s'arrêter, ainsi que de vol en bande organisée avec armes, faits pour lesquels il a été condamné respectivement à deux mois d'emprisonnement le 11 avril 2019 et 9 ans d'emprisonnement le 19 juin 2020 par la cour d'assises de l'Essonne. De plus, le rapport établi par le service pénitentiaire d'insertion et de probation daté du 19 novembre 2020, mentionne des faits d'importation non-autorisée de stupéfiants, trafic, transport et détention non-autorisés de stupéfiants, faits pour lesquels il a effectué une peine de 11 mois et 30 jours d'emprisonnement, fixée par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Évry le 24 avril 2017. Pour soutenir qu'il ne représente pas une menace réelle actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt de la société, le requérant se prévaut d'un examen psychiatrique de juin 2018, de son comportement en détention qu'il qualifie " d'exemplaire ", soutient qu'il ne présente pas de risque de récidive et fait part de sa volonté de se réadapter à la vie en société et de mener une activité professionnelle. Toutefois, il ressort du rapport de détention de mai 2020 qu'il a fait l'objet de six antécédents disciplinaires durant son incarcération, dont deux ont donné lieu à sanction. Les bulletins de salaires produits portant sur des périodes non continues entre 2014 et janvier 2017 ne suffisent pas établir la réalité et la stabilité de son insertion professionnelle, alors que la promesse d'embauche au sein de l'entreprise VH Plâtre, datée du 30 novembre 2020, est périmée, l'intéressé ne justifiant pas avoir été employé depuis lors. De plus, les attestations produites émanant de sa mère, de ses sœurs et de son ex-compagne, déjà produites en première instance, ne sont pas actualisées ni circonstanciées. Enfin, par un avis du 18 décembre 2020, la commission départementale d'expulsion a émis un avis favorable à son expulsion. Dans ces conditions, compte tenu de la gravité des faits reprochés à M. B... A..., pour lesquels il a été condamné en 2019 et 2020, quand bien même les accusations de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime et d'infraction en lien avec les stupéfiants n'ont pas été retenues, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le préfet des Hauts-de-Seine a estimé que le comportement de l'intéressé constituait une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société justifiant qu'une procédure d'expulsion du territoire français soit mise en œuvre à son encontre.
6. D'autre part, si M. B... A... se prévaut d'une présence en France depuis 2010, il ressort des pièces du dossier qu'il a été incarcéré en 2017, soit sept ans après son arrivée sur le territoire et qu'à la date de l'arrêté contesté, il se trouvait placé sous le régime de la liberté conditionnelle, période qui ne peut être assimilée à une résidence régulière sur le territoire français. Par suite, à supposer que l'intéressé ait entendu se prévaloir des dispositions du 6° de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable, il ne justifiait pas d'une durée de dix ans de résidence régulière à la date de l'arrêté en litige.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
8. M. B... A... se prévaut de la durée de son séjour depuis 2010 sur le territoire français, de sa situation professionnelle, de la présence de sa mère et de ses sœurs ainsi que de celle de ses trois enfants. Toutefois, il ne justifie pas que sa présence auprès de sa mère et ses sœurs serait indispensable, ni qu'il serait dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine où réside son père et où il a vécu jusqu'à l'âge de dix-huit ans. Par ailleurs, l'intéressé, qui est séparé des deux mères de ses enfants, n'établit pas contribuer effectivement à l'éducation et à l'entretien de ses enfants ni avoir tissé des liens particuliers avec eux, les pièces et attestations des membres de sa famille et de ses ex-compagnes, dont l'une indique qu'il verse une pension alimentaire, étant à cet égard insuffisamment probantes et identiques à celles produites en première instance. S'agissant de l'activité professionnelle du requérant, il ressort des pièces du dossier que, s'il a travaillé jusqu'en janvier 2017 dans le secteur des bâtiments et travaux publics, les bulletins de salaire délivrés entre juin 2014 et janvier 2017 puis à compter de mars 2022 produits par l'intéressé sont insuffisants à démontrer une insertion professionnelle stable et ancienne sur le territoire. Dans ces conditions, compte tenu de sa situation et eu égard à la gravité des faits et de la menace que l'intéressé représente, l'arrêté d'expulsion attaqué n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni porté atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants au sens de la convention internationale des droits de l'enfant. Par suite, ces moyens doivent être écartés.
9. Il résulte de ce qui précède que M. B... A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par conséquent, la requête de M. B... A... doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles présentées aux fins d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'État, ministre de l'intérieur.
Copie en sera délivrée au préfet des Hauts-de-Seine.
Délibéré après l'audience du 14 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Massias, présidente,
Mme Danielian, présidente assesseure,
M. de Miguel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2025.
Le rapporteur,
F-X de MiguelLa présidente,
N. Massias
La greffière,
T. Tollim
La République mande et ordonne au ministre d'État, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 23VE01123 2