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08/02/2018 | FRANCE | N°16VE02488-16VE03416

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 08 février 2018, 16VE02488-16VE03416


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts D... ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 27 janvier 2014 par lequel le préfet du Val-d'Oise a déclaré d'utilité publique l'opération d'acquisitions et d'aménagement de terrains situés à Bezons en vue de la réalisation de la zone d'aménagement concertée (ZAC) " coeur de ville " et mis en compatibilité le plan local d'urbanisme de la commune de Bezons et d'annuler l'arrêté en date du

19 mars 2014 par lequel le préfet du Val-d'Ois

e a déclaré cessibles divers immeubles situés sur le territoire de la commune de Bezon...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts D... ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 27 janvier 2014 par lequel le préfet du Val-d'Oise a déclaré d'utilité publique l'opération d'acquisitions et d'aménagement de terrains situés à Bezons en vue de la réalisation de la zone d'aménagement concertée (ZAC) " coeur de ville " et mis en compatibilité le plan local d'urbanisme de la commune de Bezons et d'annuler l'arrêté en date du

19 mars 2014 par lequel le préfet du Val-d'Oise a déclaré cessibles divers immeubles situés sur le territoire de la commune de Bezons nécessaires à la réalisation de la ZAC " coeur de ville ".

Par un jugement n° 1409558 du 24 mars 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

I) Par une requête enregistrée le 1er août 2016, M. et Mme C...D..., représentés par Me Coll, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, ces arrêtés ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme D...soutiennent que :

- c'est à tort que les premiers juges ont jugé irrecevables les conclusions dirigées contre l'arrêté déclarant l'utilité publique de projet de réalisation de la ZAC " coeur de ville " alors qu'il leur est possible d'en contester la légalité par la voie de l'exception d'illégalité de l'arrêté de cessibilité ;

- le résumé non technique de l'étude d'impact de la déclaration d'utilité publique n'a pas été rendu accessible au public ;

- le projet en cause est dépourvu d'utilité publique puisqu'il prévoit de privilégier l'installation de grandes surfaces commerciales au détriment du parc de Bezons et de la création d'installations sportives ;

- des modifications substantielles ont été apportées au projet prévu par la déclaration d'utilité publique, ce qui rend l'arrêté de cessibilité dénué de base légale ;

- l'intérêt général du projet n'est pas démontré puisqu'il a pour effet de porter atteinte au caractère du centre de la commune de Bezons en privilégiant les constructions et la bétonisation d'un zone jusqu'alors principalement composée du parc Bettencourt sans tenir compte de l'opposition manifestée par de nombreux habitants de cette zone ;

- le projet porte en revanche une atteinte excessive à leur propriété.

.....................................................................................................................

II) Par une requête enregistrée le 28 novembre 2016, M. A... D..., représenté par Me Onillon, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, ces arrêtés ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que les premiers juges ont jugé irrecevables les conclusions dirigées contre l'arrêté déclarant l'utilité publique de projet de réalisation de la ZAC " coeur de ville " alors qu'il leur est possible d'en contester la légalité par la voie de l'exception d'illégalité de l'arrêté de cessibilité ;

- le résumé non technique de l'étude d'impact de la déclaration d'utilité publique n'a pas été rendu accessible au public ;

- le projet en cause est dépourvu d'utilité publique puisqu'il prévoit de privilégier l'installation de grandes surfaces commerciales au détriment du parc de Bezons et de la création d'installations sportives ;

- des modifications substantielles ont été apportées au projet prévu par la déclaration d'utilité publique, ce qui rend l'arrêté de cessibilité dénué de base légale ;

- l'intérêt général du projet n'est pas démontré puisqu'il a pour effet de porter atteinte au caractère du centre de la commune de Bezons en privilégiant les constructions et la bétonisation d'un zone jusqu'alors principalement composée du parc Bettencourt sans tenir compte de l'opposition manifestée par de nombreux habitants de cette zone ;

- le projet porte en revanche une atteinte excessive à leur propriété.

.....................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces des dossiers ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Colrat,

- les conclusions de Mme Ribeiro-Mengoli, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour la SADEV 94.

1. Considérant que les deux requêtes susvisées ont fait l'objet d'une instruction commune et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par le même arrêt ;

2. Considérant que, par deux requêtes enregistrées sous les n° 16VE02488 et n° 16VE03416, M. C...D...et son épouse Mme E...D..., d'une part, et M. A... D..., d'autre part, relèvent appel du jugement en date du 24 mars 2016 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 27 janvier 2014 par lequel le préfet du Val-d'Oise a déclaré d'utilité publique l'acquisition et l'aménagement de terrains en vue de la réalisation de la ZAC " coeur de ville " à Bezons et à l'annulation de l'arrêté en date du 19 mars 2014 par lequel le préfet du Val-d'Oise a déclaré cessibles lesdits terrains ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées par le ministre de l'intérieur et par la société SADEV 94 :

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " ; qu'aux termes de l'article R. 123-14 du code de l'urbanisme : " Font l'objet des mesures de publicité et d'information édictées à l'article

R. 123-25 : (...) c) le décret ou l'arrêté prononçant la déclaration d'utilité publique " ; qu'aux termes de l'article R. 123-25 du même code : " Tout acte mentionné à l'article R. 123-24 est affiché pendant un mois (...) en mairie. Mention de cet affichage est insérée en caractères apparents dans un journal diffusé dans le département. / Il est en outre publié : (...) c) au Recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département lorsqu'il s'agit d'un arrêté préfectoral (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en date du 27 janvier 2014 du préfet du Val-d'Oise portant déclaration d'utilité publique a été publié au recueil des actes administratifs du département le 31 janvier 2014 et affiché à la mairie de Bezons à compter de cette date pendant plus d'un mois ; que la mention de cette affichage a fait l'objet d'une publication dans l'édition du Val-d'Oise du journal Le Parisien datée du 30 janvier 2014 ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré comme tardives les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 27 janvier 2014 présentées dans la requête enregistrée au greffe du Tribunal administratif le 29 septembre 2014 nonobstant la circonstance que les demandeurs aient présenté le 2 juin 2014 un recours gracieux dirigé contre ledit arrêté, lui-même formé hors délai ; que, si les requérants soutiennent que cette tardiveté ne s'oppose pas à la contestation de l'arrêté du 27 janvier 2014 par la voie de l'exception, ce moyen n'est pas de nature à démontrer l'irrégularité du jugement attaqué dont les termes indiquent que les premiers juges ont examiné cette exception d'illégalité ;

5. Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas des écritures de première instance que les consorts D...auraient soulevé le moyen tiré de l'absence dans le dossier soumis à enquête publique du résumé non technique de l'étude d'impact ; qu'il ressort, d'autre part, des motifs du jugement attaqué que le Tribunal a répondu dans ces points 9, 10 et 11 au moyen tiré de l'absence d'intérêt général du projet de ZAC faisant l'objet de la déclaration d'utilité publique ; que, par suite, le moyen tiré de l'omission à statuer sur ces deux moyens doit être écarté ;

Sur le fond du litige :

6. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, les conclusions des requérants sont tardives en tant qu'elles sont dirigées contre l'arrêté en date du 27 janvier 2014 par lequel le préfet du Val-d'Oise a déclaré d'utilité publique la réalisation de la ZAC " coeur de ville " à Bezons ; que, toutefois, les requérants sont recevables à invoquer l'illégalité de cet arrêté par la voie de l'exception à l'appui de leurs conclusions dirigées contre l'arrêté de cessibilité pris par le préfet du Val-d'Oise le 19 mars 2014 ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-8 dans sa rédaction applicable à la date des arrêtés litigieux : " Le dossier soumis à enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. Le dossier comprend au moins : 1° Lorsqu'ils sont requis, l'étude d'impact et son résumé non technique. (...)" ; que la page 20 du rapport d'enquête publique comporte une attestation du commissaire enquêteur indiquant la présence au dossier de l'étude d'impact ; qu'il ressort des pièces du dossier que cette étude comportait un résumé non technique ; qu'en l'absence ce toute contestation par un habitant de la commune de la présence de ce résumé dans le dossier soumis à la consultation du public, les requérants ne peuvent valablement contester la régularité de la composition du dossier d'enquête publique ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet soumis à l'enquête publique a finalement subi deux modifications adoptées par la délibération du conseil municipal de Bezons en date du 11 décembre 2013, à savoir l'exclusion du lot G du champ de la déclaration d'utilité publique et le maintien du parc Bettencourt en zone UP du plan local d'urbanisme et la renonciation à construire un stade et à réaliser des logements sur une partie de son emprise ; que ces modifications ont été introduites pour prendre en compte les réserves et recommandations du commissaire-enquêteur ; que l'exclusion du lot G porte sur une surface de 4 000 m2 sur les 13, 8 hectares que comporte le projet de réaménagement de la ZAC " coeur de ville " ; que le maintien du parc Bettencourt en zone UP se situe dans le sens du projet de la ZAC, tel qu'il est défini dans la notice de présentation, du maintien et de l'extension de la surface du parc Bettencourt, seul espace vert du centre-ville ; qu'ainsi, ces modifications ne peuvent être regardées comme modifiant l'économie générale du projet et ont pu être adoptées sans qu'il soit préalablement procédé à une enquête publique complémentaire prévue à l'article L. 123-14 du code de l'environnement dans sa version applicable à la date de l'arrêté litigieux déclarant d'utilité publique la réalisation de la ZAC " coeur de ville " ;

9. Considérant qu'il appartient au juge, lorsqu'il doit se prononcer sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet d'aménagement de la ZAC " coeur de ville " a pour objet, à l'occasion de l'aménagement d'une ligne de tramway, de restructurer le centre-ville de Bezons au croisement des axes routiers que sont les boulevards Gabriel Péri et Edouard Vaillant et autour de la place de la Grace de Dieu ; que le projet prévoit l'agrandissement de parc Bettencourt, seul espace vert du centre-ville, la piétonisation de l'avenue de Préssensé, le déplacement de la mairie et de la salle polyvalente sur la place de la Grace de Dieu, la création de 67 000 m2 de logement dont 40 % de logement social, le renforcement de l'équipement sportif de la ville, la création de passages couverts abritant des commerces et le regroupement d'un établissement scolaire et d'un centre de loisirs ; que le projet affiche pour objectif de ramener l'offre de commerces vers le centre-ville et de lutter contre l'évaporation des activités commerciales en périphérie par la création de passages couverts destinés à abriter des commerces de détail et d'une seule grande surface en sous-sol ; que le projet maintient la surface des espaces verts ; qu'enfin, la commune de Bezons a la maîtrise de 90 % des terrains nécessaires à l'aménagement de la ZAC ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le projet emporterait la " bétonisation " du centre-ville de Bezons, privilégierait les grandes surfaces au détriment du commerce de détail et porterait une atteinte excessive à la propriété privée et qu'il présenterait un bilan globalement négatif ; que l'atteinte à l'état de santé d'un des requérants n'est, en tout état de cause, pas démontrée ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les consorts D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société SADEV 94 fondées sur les mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes susvisées n° 16VE02488 et n° 16VE03416 sont jointes.

Article 2 : La requête de M. et Mme C...D...et la requête de M. A... D... sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la société SADEV 94 présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

2

N° 16VE02488...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE02488-16VE03416
Date de la décision : 08/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

34-02-03 Expropriation pour cause d'utilité publique. Règles générales de la procédure normale. Arrêté de cessibilité.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: Mme RIBEIRO-MENGOLI
Avocat(s) : CABINET COLL ; CABINET COLL ; ONILLON

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-02-08;16ve02488.16ve03416 ?
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