Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie et régularisée par la production de l'original le 10 septembre 2009, présentée pour M. Léandre A, demeurant ..., par Me Léger ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0704658 du 25 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 130 623,96 euros ayant fait l'objet de commandements de payer délivrés le 29 juin 2007 au titre des droits d'occupation du domaine public de la commune de Lens pour les années 1990 à 1993 ;
2°) de le décharger de cette obligation ;
3°) de prononcer la nullité des commandements de payer ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Lens la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que le jugement est entaché d'erreur de droit dans la mesure où il se fonde - sans le qualifier - sur le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée résultant de l'arrêt de la Cour du 11 décembre 2002 et de la décision du Conseil d'Etat du 11 octobre 2004 alors qu'il n'y a identité ni d'objet, dès lors que sont en cause des commandements de payer différents, ni de cause, dans la mesure où le litige précédent portait sur le quantum et non sur la personne du redevable ; que le Tribunal a méconnu le principe du contradictoire puisque ce moyen n'était pas soulevé par la commune et qu'il n'a pas eu la faculté de s'expliquer dessus ; que les commandements n'identifient pas précisément le débiteur, mentionnant A sans préciser s'il agit de Monsieur ou de Madame A, les Floralies Lensoises sans préciser s'il s'agit du fonds de commerce ou de la société et l'adresse du 4 septembre qui peut être son adresse personnelle, celle de l'exploitation du fonds de commerce ou celle du siège social de la SARL ; que s'agissant de personnes juridiques distinctes, la validité du commandement de payer est affectée par ce vice grave qui en interdirait l'exécution ; qu'il n'est pas le débiteur des sommes réclamées ; que le jugement, en reprenant la confusion faite par la commune, se borne à faire état du fait qu'en sa qualité de conjoint collaborateur bénévole et de salarié de son épouse, il est intervenu dans les démarches administratives ayant permis à celle-ci d'obtenir une autorisation d'occupation du domaine public pour l'exploitation du fonds de commerce dont elle était seule propriétaire ; que la dette a été contractée par sa seule épouse dès lors que selon l'extrait K bis produit, elle était seule propriétaire exploitant du fonds de commerce à l'enseigne Floralies Lensoises de 1965 au 1er octobre 1998 et que c'est donc elle seule qui a contracté la dette en cause ; qu'en sa qualité de conjoint collaborateur bénévole et de salarié de son épouse, il ne peut être tenu juridiquement considéré comme propriétaire ou copropriétaire du fonds ; qu'il ressort du rapport du commissaire aux apports pour l'apport du fonds de commerce au profit de la SARL Floralies Lensoises que ce dernier a été effectué par sa seule épouse ; que la dette qui a été transférée à la SARL Floralies Lensoises , sans opposition de la commune de Lens, est désormais éteinte faute pour le Trésor public d'avoir déclaré sa créance au moment du redressement et de la liquidation judiciaire, intervenues respectivement les 15 mars 2005 et 27 septembre 2005 postérieurement à la décision du Conseil d'Etat, en application de l'article 50 alinéa 2 de la loi du 25 janvier 1985 alors applicable ;
Vu le jugement et les décisions attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2009, présenté pour la commune de Lens, représentée par son maire en exercice, dont le siège est situé Hôtel de Ville, place Jean Jaurès à Lens (62300), par Me Gohon, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir que les premiers juges n'ont pas opposé l'autorité de chose jugée au requérant mais se sont bornés à relever, en reprenant un moyen soulevé en défense par la commune de Lens, que l'intéressé, à l'occasion d'une précédente affaire relative également à des commandements de payer, n'avait pas contesté en être personnellement redevable ; que le moyen tiré de ce que les commandements de payer ne précisaient pas suffisamment l'identité du débiteur, ce moyen, qui n'était pas soulevé en première instance, paraît contradictoire avec la requête dès lors que seul M. A les a contestés et il n'est pas fondé puisque les actes en cause l'identifient parfaitement comme le destinataire ; que l'intéressé était responsable de l'enseigne commerciale Les Floralies lensoises , notamment entre 1990 et 1993 et est donc redevable des sommes dues ainsi que cela ressort de divers documents ; qu'il ne saurait sérieusement prétendre que sa dette était celle de son ancienne épouse, les pièces produites pour la plupart relatives à une période postérieure à 1993 ne sont d'aucune pertinence en ce qui concerne son statut et ses fonctions à lui ; qu'il ne saurait davantage soutenir que sa dette aurait été transférée à la SARL Les Floralies lensoises dès lors que comme l'a relevé le Tribunal, il n'apparaît pas que les dettes qu'il aurait contractées aurait effectivement fait partie des apports à cette société ;
Vu les mémoires, enregistrés le 4 décembre 2009 et le 13 décembre 2010 par télécopie régularisé par la production de l'original le 16 décembre 2010, présentés pour M. A, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, en portant en outre à 5 000 euros la somme qu'il demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, que la juridiction administrative est compétente dès lors que sont en cause l'existence et le bien-fondé d'une créance publique relative à des redevances d'occupation du domaine public ; que l'extrait des bilans de la SARL Les Floralies lensoises comporte une mention droit de place pour plus de 42 000 euros au 30 août 2002 ; que c'est l'ensemble du passif attaché au fonds de commerce qui a été apporté à cette société ; qu'il n'a jamais exercé d'activité séparée au sens de l'article L. 121-3 du code de commerce mais n'a fait qu'assister son épouse dans l'exploitation de son commerce, ayant agi pour le compte de celle-ci seule propriétaire du fonds ; que sa collaboration ne l'institue pas débiteur ;
Vu la lettre en date du 7 décembre 2010 par laquelle la Cour a, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, informé les parties de ce que son arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office ;
Vu l'ordonnance en date du 7 décembre 2010 fixant la clôture de l'instruction au 28 décembre 2010 à 12 h 00 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu la loi n° 82-596 du 10 juillet 1982 relative aux conjoints d'artisans et de commerçants travaillant dans l'entreprise familiale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Hubert Delesalle, premier conseiller, les conclusions de M. Xavier Larue, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;
Considérant que M. Léandre A, exerçant une activité dans le commerce des fleurs à Lens, a formé opposition à l'exécution d'un commandement de payer délivré le 20 décembre 1994 par le Trésorier principal de Lens pour valoir paiement à la commune de Lens de redevances d'un montant de 476 989 francs (72 716,50 euros) réclamées au titre de l'installation de son étalage sur la voie publique communale du mois de mai 1990 au mois de novembre 1993 ; que par un arrêt du 11 décembre 2002, la cour administrative d'appel a rejeté sa demande en décharge de l'obligation de payer cette somme ; que par une décision en date du 11 octobre 2004, le Conseil d'Etat a rejeté son pourvoi en cassation dirigé contre cet arrêt ; qu'à sa suite, M. A s'est vu délivrer le 29 juin 2007 quatre commandements de payer n° 221712832, n° 221712932, n° 221705132, n° 221705032 portant sur une somme totale de 64 318,89 euros au titre des droits d'occupation du domaine public communal pour les années 1990 à 1993 et faisant suite à des titres exécutoires émis entre le 27 juillet 1990 et le 15 octobre 1992 ; que, par ailleurs, M. A s'est également vu délivrer le 29 juin 2007 un commandement de payer n° 221696532, faisant suite aux titres exécutoire émis les 12 juin 2003 et 15 novembre 2004, décernés pour le recouvrement de la somme de 4 635,00 euros correspondant aux sommes mises à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des instances passées devant la juridiction administrative ; que si l'ensemble des commandements de payer porte ainsi sur la somme totale de 68 953,89 euros, M. A a saisi le Tribunal administratif de Lille d'une demande tendant à être déchargé de l'obligation de payer la somme de 130 623,96 euros qu'il estimait être celle qui lui était réclamée ; qu'il relève appel du jugement du 25 juin 2009 par lequel le Tribunal a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant au prononcé de la nullité des commandements de payer :
Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif de connaître des conclusions de M. A tendant à la nullité des commandements de payer émis à son encontre le 29 juin 2007 ;
Sur les conclusions tendant à être déchargé de l'obligation de payer :
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :
Considérant que le requérant soutient que les premiers juges ont méconnu le principe de contradictoire dès lors qu'il n'a pu présenter ses observations sur le moyen tiré de l'autorité de chose jugée par l'arrêt de la Cour et la décision du Conseil d'Etat dans la mesure où ce moyen n'avait pas été soulevé en défense ; que, toutefois, si le jugement fait référence à ces décisions de justice, d'une part, la commune les avait mentionnées dans ses écritures en défense, au titre des circonstances de fait parmi d'autres de nature à confirmer la qualité d'exploitant de M. A, et, d'autre part, le jugement n'est pas fondé sur le moyen tiré de l'autorité de chose jugée ; que, dans ces conditions, ce dernier n'est entaché d'aucune irrégularité sur ce point ;
En ce qui concerne l'étendue du litige :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A s'est mépris sur le montant de la somme totale exigée, ajoutant à tort le montant des sommes figurant au bas, respectivement, des deux premières pages et de la première page des commandements de payer n° 221712832 et n° 221705032, qui était toutefois reporté en haut respectivement des deux dernières pages et de la seconde page, et comptabilisant ainsi plusieurs fois la même somme ; que, dans ces conditions, sa demande doit être regardée comme tendant en réalité à la décharge de l'obligation de payer la somme de 68 953,89 euros ;
En ce qui concerne le bien-fondé de la créance :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être exposé que le jugement attaqué n'est pas fondé sur le moyen tiré de l'autorité de chose jugée ; que, dans ces conditions, le requérant ne saurait utilement soutenir que faute d'identité de cause et d'objet, aucune autorité de chose jugée ne pouvait être retenue ;
Considérant, en deuxième lieu, que le contentieux de la régularité en la forme d'un commandement de payer doit être exclusivement porté devant le juge judiciaire ; qu'en conséquence, le moyen tiré de ce que les commandements de payer seraient imprécis quant à leur destinataire, lequel porte sur la régularité en la forme de ces actes, ne peuvent être utilement soulevé par M. A à l'appui de sa contestation, portée devant le juge administratif, de son obligation de payer ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 4 du code de commerce, aujourd'hui repris à l'article L. 121-3 du même code : Le conjoint d'un commerçant n'est réputé lui-même commerçant que s'il exerce une activité commerciale séparée de celle de son époux ; qu'aux termes, par ailleurs, de l'article 9 de la loi susvisée du 10 juillet 1982 alors en vigueur : Le conjoint collaborateur, lorsqu'il est mentionné au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers (...) est réputé avoir reçu du chef d'entreprise le mandat d'accomplir au nom de ce dernier les actes d'administration concernant les besoins de l'entreprise (...) ;
Considérant que M. A conteste pouvoir être constitué débiteur des sommes en cause dès lors qu'il n'exploitait pas le fonds de commerce Les Floralies lensoises créé le 20 octobre 1965 par son épouse, dont il a divorcé le 19 juin 2001, qui en était propriétaire ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que M. A a signé des chèques bancaires tirés sur le compte de cet établissement au cours de l'année 1991 et le faisait à titre habituel ; que, par le passé, il a engagé des démarches en son nom auprès de la trésorerie municipale relativement à sa présence à l'occasion du marché aux fleurs ; qu'il ne conteste pas qu'il en était le responsable pour la population, la clientèle et les salariés, ainsi que le fait valoir la commune de Lens et qu'il résulte d'une coupure de presse ; que M. A se présentait lui-même comme commerçant sous l'enseigne Les Floralies lensoises dans une première demande adressée au Tribunal administratif de Lille le 18 février 1991 et n'a, à aucun moment, contesté cette qualité à l'occasion des instances précédentes qu'il avait engagées devant la juridiction administrative ; qu'accomplissant ainsi de façon habituelle, entre 1990 et 1993 notamment, des actes de gestion et de direction permettant de caractériser l'exploitation du fonds, M. A doit être regardé comme commerçant pour avoir de manière indépendante, effectué des actes de commerce, et en avoir fait sa profession habituelle ; que, par ailleurs, M. A ne pouvait être réputé conjoint collaborateur faute de justifier être lui-même mentionné au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, conformément aux dispositions précitées de l'article 9 de la loi du 10 juillet 1982, et ne se prévaut d'aucun mandat ; qu'au demeurant, le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de Béthune, statuant sur la demande de l'intéressé tendant à ce que le Trésorier municipal de la ville de Lens lui accorde des délais de paiement, a estimé dans un jugement du 3 mars 2005 que les titres exécutoires étaient dépourvus d'ambiguïté quant à leur destinataire qui ne [pouvait] être que le commerçant exerçant en son nom propre sous l'enseigne en question, à savoir M. Léandre A ; qu'il s'ensuit qu'il n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas eu la qualité de débiteur des sommes litigieuses au motif qu'il n'aurait pas exploité le fonds de commerce en cause ;
Considérant, en dernier lieu, que M. A soutient que la créance de la commune de Lens est éteinte en application des dispositions des articles 50 et 53 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, reprises alors aux articles L. 621-43 et L. 621-46 du code de commerce, dès lors que la dette correspondante avait été apportée au titre du passif à la SARL Floralies lensoises , immatriculée au registre du commerce et des sociétés à compter du 3 octobre 1997, et que celle-ci a été placée en redressement puis mise en liquidation judiciaire les 15 mars et 27 septembre 2005 sans que la commune de Lens ne déclare sa créance au représentant des créanciers ;
Considérant, néanmoins, qu'il résulte de ce qui vient d'être exposé que M. A exerçait en son nom propre et pour son compte, sous l'enseigne Les Floralies lensoises , une activité de commerçant en particulier entre 1990 et 1993 ; que, dans ce cadre, c'est à titre personnel qu'il a occupé le domaine public de la commune de Lens durant cette période et, de ce fait, a contracté la dette dont le paiement a été mis à sa charge par quatre des cinq commandements de payer en cause, à la suite de titres exécutoires émis entre 1990 et 1992 dont l'absence d'ambiguïté de leur destinataire, en l'occurrence M. A personnellement, a d'ailleurs été reconnue par le jugement déjà évoqué du 3 mars 2005 ; qu'au demeurant, la SELARL Soinne, chargée de la liquidation de la SARL Floralies lensoises , a répondu au conseil du requérant par un courrier du 19 mai 2005 que le débiteur de la commune n'était pas cette société mais M. A à titre personnel ; que dans ces conditions, l'apport du passif du fonds de commerce propriété de son épouse à la SARL Floralies lensoises , d'ailleurs valorisé en 2002 à la somme de 42 895,95 euros seulement au titre de droits de place , n'a pu avoir pour effet de transférer la dette personnelle de ce dernier, pour un montant désormais de 64 318,89 euros ; qu'il s'ensuit que l'absence de déclaration de la créance correspondante par la commune de Lens dans le cadre de la liquidation de cette société, finalement radiée du registre du commerce et des sociétés à compter du 29 mars 2007, n'a pu avoir pour effet de l'éteindre par application des dispositions des articles L. 621-43 et L. 621-46 du code de commerce ; qu'il en va de même de la créance de 4 635,00 euros correspondant aux sommes mises à la charge personnelle de M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au cours des années 2003 et 2004 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 68 953,89 euros ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par M. A soit mise à la charge de la commune de Lens qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A une somme de 2 500 euros qui sera versée à la commune de Lens au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les conclusions de la requête de M. A tendant au prononcé de la nullité des commandements de payer sont rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.
Article 3 : M. A versera à la commune de Lens une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Léandre A et à la commune de Lens.
''
''
''
''
2
N°09DA01327