Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune d'Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine) à lui verser la somme de 90 000 euros en réparation des préjudices résultant de la faute commise en omettant de l'affilier à la Caisse nationale d'assurance vieillesse et à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques pendant sa période d'emploi dans la commune, du 1er octobre 1986 au 31 décembre 2004. Par un jugement n° 2004386 du
12 septembre 2023, ce tribunal a rejeté sa demande.
Par une ordonnance n° 23VE02441 du 28 novembre 2023, le président de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré au greffe de cette cour le 3 novembre 2023, formé par M. B... contre ce jugement.
Par ce pourvoi et un nouveau mémoire, enregistré le 9 février 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) de déclarer nul et non avenu, par règlement de juges, le précédent jugement n° 1608415 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 19 novembre 2019 en tant qu'il a rejeté sa demande à fin d'indemnisation dirigée contre l'établissement public territorial Grand Paris Seine Ouest pour les mêmes faits et au titre de la même période ;
2°) d'annuler le jugement n° 2004386 du 12 septembre 2023 ;
3°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes ;
4°) de mettre à la charge de l'établissement public territorial Grand Paris Seine Ouest et de la commune d'Issy-les-Moulineaux la somme de 5 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Benoît Chatard, auditeur,
- les conclusions de M. Bastien Lignereux, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de M. B..., à la SCP Foussard, Froger, avocat de la commune d'Issy-les-Moulineaux et au cabinet Rousseau, Tapie, avocat de l'établissement public territorial Paris Grand Ouest Seine ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 17 janvier 2025, présentée par
M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif de Cergy-Pontoise que M. B..., fonctionnaire titulaire de l'Etat entre le 1er février 1973 et le
31 octobre 2005, a été employé entre le 1er octobre 1986 et le 31 décembre 2004 par la commune d'Issy-les-Moulineaux en qualité de professeur de musique contractuel. Il a ensuite été transféré en cette qualité, à compter du 1er janvier 2005, dans les effectifs de la communauté d'agglomération Arc de Seine, devenue compétente en matière d'enseignement de la musique, de la danse et de l'art dramatique, à laquelle ont succédé la communauté d'agglomération Grand Paris Seine Ouest au 1er janvier 2010, puis l'établissement public territorial du même nom au
1er janvier 2016. Ayant fait valoir ses droits à la retraite au titre de son activité de professeur de musique à compter du 1er novembre 2015, M. B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'établissement public territorial Grand Paris Seine Ouest à lui verser la somme de 90 000 euros correspondant au montant des cotisations salariales et patronales qu'auraient dû verser la commune d'Issy-les-Moulineaux puis la communauté d'agglomération Arc de Seine entre le 1er octobre 1986 et le 31 octobre 2005 au titre de son emploi de professeur d'enseignement musical contractuel, ainsi qu'aux pensions de retraite dont il a été privé pour la période comprise entre le 1er décembre 2015 et la date de paiement de l'indemnité égale au montant des cotisations non versées. Par un jugement du
19 novembre 2019, ce tribunal a condamné l'établissement public territorial Grand Paris Seine Ouest à verser à M. B..., dans la limite de 90 000 euros, une indemnité correspondant au montant des cotisations salariales et patronales dont la communauté d'agglomération Arc de Seine aurait dû s'acquitter entre le 1er janvier 2005 et le 31 octobre 2005 pour son affiliation à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités, et au montant des pensions de retraite dont il a été privé en raison de ce défaut d'affiliation, mais a rejeté le surplus des conclusions de sa demande au motif tiré de ce que les conclusions du requérant tendant à la condamnation de l'établissement public territorial Grand Paris Seine Ouest à réparer le préjudice né de son défaut d'affiliation aux régimes obligatoire et complémentaire de sécurité sociale avant le 1er janvier 2005 étaient mal dirigées, celles-ci devant être dirigées contre la commune d'Issy-les-Moulineaux. Toutefois, par un jugement ultérieur du 12 septembre 2023, ce même tribunal a rejeté la demande de M. B... tendant à la condamnation de la commune d'Issy-les-Moulineaux à lui verser la somme de 90 000 euros en raison des mêmes faits au cours de sa période d'emploi dans la commune, du 1er octobre 1986 au
31 décembre 2004, au motif tiré de ce que les conclusions de M. B... dirigées contre la commune d'Issy-les-Moulineaux auraient dû être dirigées contre l'établissement public territorial Grand Paris Seine Ouest. M. B... se pourvoit contre le jugement du 12 septembre 2023 et demande que le jugement du 19 novembre 2019 soit déclaré nul et non avenu.
2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. / Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) / 7° Sur les litiges en matière de pensions de retraite des agents publics ; / 8° Sauf en matière de contrat de la commande publique sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées n'excède pas le montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 (...) ". En vertu de l'article R. 222-14, le montant des indemnités visées par le 8° de l'article R. 811-1, déterminé conformément à ce que prévoit l'article R. 222-15, est fixé à 10 000 euros.
3. Il résulte de ces dispositions que le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort sur les litiges en matière de pensions de retraite des agents publics, ainsi que sur les litiges indemnitaires se rapportant à de tels litiges, quel que soit le montant des indemnités demandées. Il en va toutefois différemment dans le cas où un litige indemnitaire, relevant de la compétence de la juridiction administrative, se rapporte à un litige relatif à une pension dont le contentieux ne ressortit pas à la compétence de la juridiction administrative, auquel cas le jugement rendu en première instance par le tribunal administratif, si la demande excède le montant déterminé à l'article R. 222-14, est susceptible d'appel.
4. L'action de M. B... tend à obtenir la somme de 90 000 euros en réparation des préjudices résultant de la faute commise en omettant de l'affilier à la Caisse nationale de l'assurance vieillesse des travailleurs salariés et à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités (IRCANTEC) pendant sa période d'emploi par la commune d'Issy-les-Moulineaux. Dès lors que cette action indemnitaire se rapporte à un litige relatif à des pensions ne relevant pas de la compétence de la juridiction administrative et que la somme demandée est supérieure à 10 000 euros, la requête de M. B... dirigée contre le jugement rendu en première instance par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise présente le caractère non d'un pourvoi en cassation mais d'un appel, qui ressortit à la compétence de la cour administrative d'appel de Versailles. Il y a lieu, par suite, d'en attribuer le jugement à cette cour.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement de la requête de M. B... est attribué à la cour administrative d'appel de Versailles.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B..., à la commune d'Issy-les-Moulineaux, à l'établissement public territorial du Grand Paris Seine Ouest et à la présidente de la cour administrative d'appel de Versailles.
Délibéré à l'issue de la séance du 17 janvier 2025 où siégeaient :
M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, conseillers d'Etat ; M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire et M. Benoît Chatard, auditeur-rapporteur.
Rendu le 5 février 2025
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
Le rapporteur :
Signé : M. Benoît Chatard
La secrétaire :
Signé : Mme Fehmida Ghulam
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :