Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de délivrance de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2000118 du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés le 24 juillet 2020 et le 9 décembre 2020, M. E..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 juin 2020 du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2019 du préfet des Alpes-Maritimes ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour mention " étudiant " ou, à défaut, de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que son conseil renonce à l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- le préfet a commis une erreur de droit en ce qu'il aurait dû examiner sa demande sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le retard du dépôt de sa demande de renouvellement de titre et l'expiration de son précédent titre de séjour sont imputables à la défaillance du système dématérialisé de prise de rendez-vous en ligne ;
- sa demande ne pouvait en conséquence être considérée comme une première demande de titre de séjour ;
- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie de la progression et du sérieux de ses études ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la mesure sur sa situation personnelle.
La requête et le mémoire ampliatif ont été communiqués au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de défense.
M. E... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 novembre 2020 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- et les observations de M. E....
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant marocain, né le 26 juillet 1997, est entré le 11 septembre 2015 en France en qualité d'étudiant et a bénéficié de ce statut jusqu'au 14 décembre 2018. Il a sollicité le 5 août 2019 le renouvellement de son titre de séjour. Il relève appel du jugement du 18 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant " . (...) ". Il résulte de ces dispositions que le renouvellement de la carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " est subordonné, notamment, à la justification par son titulaire de la réalité et du sérieux des études qu'il déclare suivre.
3. Il ressort des pièces du dossier que M. E... est entré en France le 11 septembre 2015 sous couvert d'un visa de long séjour " étudiant " le dispensant d'un titre de séjour étudiant pour la période du 1er septembre 2015 au 1er septembre 2016 et a été admis en première année de Licence " Economie-Gestion " au titre de l'année 2015/2016. Il a ensuite été mis en possession d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " étudiant " valable du 15 décembre 2016 au 14 décembre 2018. Au cours de l'année universitaire 2016/2017, il a été ajourné au titre de sa deuxième année de Licence. Il a toutefois obtenu cette deuxième année au titre de l'année universitaire 2017/2018. S'il a de nouveau été ajourné au titre de l'année universitaire 2018/2019 pour sa troisième année de Licence, en raison de difficultés personnelles, cette circonstance ne suffit pas à remettre en cause le sérieux et la réalité de ses études. A cet égard, il ressort des pièces du dossier qu'il a obtenu sa Licence " Economie-Gestion " au titre de l'année 2019/2020 et vient d'être admis au sein du Master 1 Finance Contrôle Audit à l'Institut des Techniques Informatiques et Commerciales (ITIC) au titre de l'année 2020/2021. Si sa réussite en Licence 3 et son admission à ce Master sont postérieures à l'arrêté attaqué, il n'en reste pas moins qu'elles confirment, à la date de l'arrêté litigieux, la cohérence de son cursus et de son parcours universitaire. Dans ces circonstances particulières, le préfet des Alpes-Maritimes a ainsi méconnu les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant.
4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2019.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. ".
6. Eu égard aux motifs du présent arrêt, son exécution implique la délivrance à M. E... d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Il ne résulte pas de l'instruction que la situation de l'intéressé ait été modifiée, en fait ou en droit, depuis l'intervention de la décision du préfet des Alpes-Maritimes dans des conditions telles que sa demande de titre de séjour serait devenue sans objet, ou que des circonstances postérieures à la date de cette décision permettraient désormais de fonder légalement une nouvelle décision de rejet. Il y a donc lieu d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. E... ce titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
8. En l'espèce, M. E... ayant obtenu l'aide juridictionnelle totale, son avocat peut, par suite, se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a donc lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me C..., avocat de M. E..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le versement à Me C... de la somme de 1 500 euros.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 18 juin 2020 du tribunal administratif de Nice et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 11 septembre 2019 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer, dans un délai de quinze jours, un titre de séjour mention " étudiant " au bénéfice de M. E... à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me C... une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me C... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nice.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2021, où siégeaient :
- M. D..., président,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme B..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mars 2021.
N° 20MA02491 2
hw