Vu la requête, enregistrée sous le n°06DA00658 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 19 mai 2006, présentée pour Mme Z... demeurant ..., par la SCP Deleforge et Franchi ; Mme demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 0601172 du 4 mai 2006 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à ce que soit prescrite une expertise aux fins d'obtenir un avis sur son inaptitude ou son aptitude au poste de chargée de mission qui était le sien au sein de l'association Flandre Création, voire au poste de secrétaire ;
2°) de faire droit à sa demande présentée en première instance en désignant un médecin expert ayant pour mission de :
- recevoir Mme et procéder à son examen contradictoire ;
- l'autoriser à se faire assister de tout médecin de son choix ;
- se faire communiquer l'ensemble des documents soumis jusqu'ici aux divers médecins du travail qui sont intervenus ;
- se faire communiquer les divers rapports de la médecine du travail ;
- donner avis sur l'aptitude professionnelle de Mme au poste de chargée de mission ;
- donner avis de la même au poste de secrétaire ;
- donner avis sur toute responsabilité de reclassement éventuel de Madame à un poste dans l'entreprise ;
- entendre tout sachant si besoin est ;
- du tout dresser rapport dans tel délai qu'il plaira pour qu'il soit fait droit ;
Elle soutient que l'ordonnance attaquée est intervenue sans audience préalable et sans qu'elle ait eu le temps de répliquer ; que plusieurs avis médicaux, contraires à ceux de la médecine du travail justifient la nécessité de l'expertise sollicitée ; que notamment le médecin de la caisse primaire d'assurance maladie l'a déclarée apte à la reprise du travail avec un mi-temps thérapeutique ; que c'est à tort que la direction régionale du travail soutient qu'elle ne remet pas en cause l'avis d'inaptitude physique mais la décision de licenciement dont la légalité relève de la juridiction prud'homale ; que le juge des référés n'a pas rejeté sa demande d'expertise pour cause d'inutilité mais parce qu'il ne disposait pas d'éléments suffisants pour l'ordonner ; qu'elle s'appuie sur le dossier soumis antérieurement au juge des référés près le Tribunal administratif de Lille ;
Vu, enregistré les 19 juin 2006 (télécopie) et 21 juin (original), le mémoire en défense présenté par le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement par lequel il n'apporte aucune observation particulière ;
Vu, enregistrée le 21 juin 2006, la lettre de la SCP Deleforge et Franchi indiquant que Me Sabine X... intervient désormais pour les intérêts de Mme ;
Vu, enregistré le 14 août 2006, le mémoire en défense présenté pour l'association Flandre Création, par la société d'avocats Selafa Fidal par lequel l'association conclut à la confirmation de l'ordonnance n° 0601172 du 4 mai 2006 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Lille a rejeté la demande d'expertise sollicitée par Mme et à la condamnation de Mme à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
L'association soutient que Mme ne justifie pas l'utilité d'une expertise médicale ; que Mme s'appuie sur l'avis du médecin de la caisse primaire d'assurance maladie de Dunkerque l'ayant déclarée apte au travail et considère que les avis du médecin du travail ne seraient pas fondés sur des considérations d'ordre médical ; que Mme ayant attendu trois mois pour contester la décision, il n'y a pas d'urgence ; que Mme n'apporte pas la preuve de l'existence d'un trouble illicite ; que l'attestation du docteur Y en date du 17 janvier 2006 déclarant Mme apte à une reprise du travail intervient deux mois après son licenciement et ne saurait remettre en cause les avis du médecin du travail et du médecin inspecteur régional ; que seul le médecin du travail est compétent pour apprécier l'aptitude médicale de Mme à son poste ; que Mme n'apporte pas la preuve que des difficultés d'ordre subjectif auraient été à l'origine de son licenciement ; que les difficultés relatives au contrat de travail relèvent de la compétence du conseil de prud'hommes ; que contrairement à ce que soutient Mme , son inaptitude n'a été soumise au recours du médecin régional qu'après réception par ses soins de sa lettre de licenciement ; que si Mme soutient avoir évoqué qu'elle avait effectué des démarches auprès de la caisse primaire d'assurance maladie afin d'obtenir un mi-temps thérapeutique, ce n'est que le 17 juillet 2006 que l'association a reçu l'accord de la caisse primaire d'assurance maladie de Dunkerque, pour une durée de deux mois à compter du 1er octobre 2005 ; qu'elle n'en avait pas fait état lors de sa réponse au courrier du 12 octobre 2005 ni lors de l'enquête contradictoire devant l'inspecteur du travail de Dunkerque le 1er décembre 2005, ni auprès du médecin inspecteur régional ; que l'attestation du médecin généraliste de Mme en date du 10 septembre 2005 lui signifiant son aptitude à reprendre le travail intervient alors que ce même médecin avait renouvelé son arrêt de travail le 30 août 2005, jusqu'au 30 septembre 2005 ; qu'eu égard aux frais qu'elle a engagés pour l'instance, l'association est fondée à solliciter la condamnation de Mme à lui verser une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu, enregistré les 24 août 2006 (télécopie) et 28 août 2006 (original), le mémoire en réplique présenté pour Mme Z... , par Me X... par lequel elle conclut aux mêmes fins que sa requête ; elle soutient que s'agissant d'un référé instruction, le défaut d'urgence invoqué par l'association Flandre création est sans fondement ; qu'elle connaît parfaitement les compétences respectives du médecin de la caisse primaire d'assurance maladie et du médecin du travail ; que les attestations produites viennent étayer sa contestation conformément au second considérant de l'ordonnance attaquée ; que l'association a été informée, suite à l'examen du médecin de la caisse primaire d'assurance maladie, de la décision de reprise du travail de Mme à mi-temps thérapeutique ; que l'association n'a pas cherché à mettre en oeuvre le mi-temps thérapeutique mais à la licencier ; que son médecin généraliste a considéré qu'elle pouvait reprendre son travail dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique évoqué par la médecine du travail ; que l'expert médical de la compagnie d'assurance AXA considérait que son arrêt total d'activité n'était plus justifié dès le 1er septembre 2005 ; que l'examen de l'aptitude ou inaptitude de Mme a été effectué par le médecin inspecteur régional du travail en prenant en considération un contexte non médical ; que la mesure d'expertise sera utile d'une part pour une saisine éventuelle du juge administratif sur la légalité de la décision de l'inspection du travail et, d'autre part, pour la détermination de saisir ou non la juridiction prud'homale d'un éventuel recours pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, enfin, pour l'employeur puisque confiée à une autorité indépendante, il pourra s'en prévaloir si elle va dans le sens de la confirmation de la mesure incriminée ; qu'elle ne sollicite pas la condamnation de l'association et ne doit pas être condamnée à lui verser une quelconque somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu, enregistré le 8 septembre 2006, le mémoire en réplique présenté pour l'association Flandre création qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 555-1 du code de justice administrative : « Sans préjudice des dispositions du titre II du livre V du présent code, le président de la cour administrative d'appel ou le magistrat qu'il désigne à cet effet est compétent pour statuer sur les appels formés devant les cours administratives d'appel contre les décisions rendues par le juge des référés » ; qu'aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : « Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ... » ;
Considérant que le juge administratif est compétent pour prescrire une expertise en référé dès lors que le litige de fond auquel elle est susceptible de se rattacher relève - fût-ce pour partie seulement - de sa compétence ; que le différend qui oppose Mme au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement ainsi qu'à l'association Flandre création est pour partie relatif à la légalité d'une décision administrative la déclarant inapte à occuper son emploi de chargée de mission et de secrétaire au sein de l'association ; que dans cette mesure le litige éventuel relève pour partie de la compétence de la juridiction administrative ;
Considérant que l'article R. 532-1 du code de justice administrative ne subordonne la prescription en référé d'une expertise ni à une condition d'urgence ni à une condition de trouble manifestement illicite ;
Considérant qu'eu égard aux pièces produites devant le juge d'appel - notamment les pièces médicales - il est utile de demander à un expert de donner un avis sur l'aptitude ou l'inaptitude médicale de Mme à occuper un emploi de chargée de mission et de secrétaire dans les effectifs de l'association Flandre création à la date de la décision prise par l'inspectrice du travail le 26 décembre 2005 ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que Mme n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante ; que par suite l'association Flandre création n'est pas fondée à demander que la requérante soit condamnée à lui verser une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
ORDONNE :
Article 1er : L'ordonnance susvisée n° 0601172 en date du 4 mai 2006 du juge des référés du Tribunal administratif de Lille est annulée.
Article 2 : Mme le docteur Cécile Z - consultation de médecine légale au C.H.U. Nord à Amiens cedex 1 (80054) - est chargée en qualité d'expert de donner un avis médical sur l'aptitude ou l'inaptitude, à la date du 26 décembre 2005, de Mme Z... à occuper l'emploi de chargée de mission ou l'emploi de secrétaire dans les effectifs de l'association Flandre création ainsi qu'à occuper un emploi similaire dans le cadre d'un reclassement dans un environnement différent. Après avoir prêté serment par écrit, l'expert procèdera à l'examen médical de Mme . Chacune des parties pourra, le cas échéant, désigner un médecin chargé de la représenter lors de cet examen. L'expert pourra se faire communiquer toute pièce, notamment médicale, utile à l'accomplissement de sa mission. Il déposera son rapport en cinq exemplaires au greffe de la Cour au plus tard le 31 décembre 2006.
Article 3 : Les conclusions de l'association Flandre création tendant l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Z... , à l'association Flandre création, à Y... Cécile Z, es qualité d'expert ainsi qu'au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.
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