LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre septembre deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GUIHAL, les observations de la société civile professionnelle TIFFREAU, de Me HÉMERY et de la société civile professionnelle PARMENTIER et DIDIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DAVENAS ;
REJET des pourvois formés par Y... Lucienne, Z... Gabriel, contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 7e chambre, en date du 6 mars 2006, qui, sur renvoi après cassation, les a condamnés, pour destruction involontaire du bien d'autrui par l'effet d'un incendie, chacun, à 1 500 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire commun aux demandeurs et les mémoires en défense produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3 et 322-5, alinéa 1er, du code pénal, L. 322-3 du code forestier, 15 et 16 de l'arrêté préfectoral portant règlement permanent en vue de prévenir les incendies de forêts sur le territoire des Bouches-du-Rhône, en date du 30 avril 1992, modifié par arrêté du 11 août 1993, 591 et 593 du code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gabriel Z... et Lucienne Y... coupables d'avoir, par manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, involontairement détruit, dégradé ou détérioré des bois et landes, par l'effet d'une substance explosive, d'un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes, a condamné Gabriel Z... et Lucienne Y... à une amende de 1 500 euros sans sursis, et a reçu les parties civiles en leurs constitutions ;
" aux motifs que " Lucienne Y... est propriétaire, depuis le 11 avril 1995, d'un terrain inconstructible, cadastré AN 141, situé à Peynier, en secteur ND de protection de la nature au plan d'occupation des sols de la commune, en zone naturelle dont le maintien à l'état naturel doit être assuré et dans le périmètre de protection des bois et forêts soumis au régime forestier, ainsi que cela résulte de l'extrait de l'acte de vente qu'elle a produit ; que, sur ce terrain, est implantée une maison d'habitation occupée par la prévenue et par le concubin de celle-ci, Gabriel Z... ; que cette maison est alimentée en électricité par deux groupes électrogènes ; que, le 9 juillet 1998, vers 14 heures, un incendie s'est déclaré à proximité immédiate de ce terrain ; que cet incendie a détruit des bois et des maquis sur une surface de 260 hectares correspondant à cent quarante et une parcelles, toutes propriétés non bâties selon les registres cadastraux, appartenant, selon ces mêmes registres, à soixante et un propriétaires dont la commune de Peynier pour 36, 5 hectares ; qu'outre le représentant de cette commune et celui de la société de chasse " Société des chasseurs et propriétaires forestiers de la commune de Peynier ", Jean-Pierre A..., dont le territoire de chasse a été détruit, huit de ces propriétaires, victimes de la destruction de leurs bois, ont déposé plainte, à savoir : Gaston X..., Alain B..., Pierre C..., Emile D..., Léon D..., Gérard E..., Josette F..., épouse C..., copropriétaire avec Monique F..., épouse G..., et Yvonne F... de 47 hectares de terrain boisé, et la fondation " Le Foyer de charité " représentée par son secrétaire général, François H... ; que les gendarmes de Trets, qui se sont aussitôt transportés sur les lieux du départ de l'incendie, ont mentionné dans leur procès-verbal : " à 15 heures 30, nous nous transportons sur les lieux présumés du départ de l'incendie ; nos investigations n'amènent la découverte d'aucun système de mise à feu ; par contre, dans cette zone de recherches, à l'intérieur de la propriété de Gabriel Z.../ Lucienne Y..., dans un " trou " où se trouvent des objets métalliques divers, nous remarquons qu'une importante combustion s'est produite ; Gabriel Z..., présent, nous indique qu'un panneau de bois plaqué de polystyrène couvrait l'endroit ; il nous précise que le tuyau d'échappement de son groupe électrogène se trouvait sous ce panneau ; nous constatons, d'une part, que le panneau a été détruit par le feu et que des particules de suie sont visibles ; nous en déduisons que le système d'échappement du groupe électrogène a pu générer le départ de l'incendie ; à ce stade de nos recherches, il nous semble peu vraisemblable que l'incendie s'est propagé à l'intérieur de la propriété de Gabriel Z.../ Lucienne Y... ; par contre, il nous semble plus probable que le feu a pris naissance dans l'excavation pour gagner la zone boisée à une dizaine de mètres dans la propriété voisine " ; que, dans son procès-verbal de constatations, le maréchal des logis-chef, Eric I..., officier de police judiciaire, technicien en identification criminelle à la brigade de recherches d'Aix-en-Provence, a précisé : " la zone présumée de départ de feu est située sur la commune de Peynier, à l'ouest de cette agglomération, quartier de Tourenne, les Michels ; cette zone est accessible par C. D. 57 a puis par un chemin de terre parcourant deux kilomètres à travers la garrigue et se terminant en impasse au portail de la propriété de Gabriel Z...... la zone présumée de départ de feu est située à l'est de la propriété ; à l'extérieur de celle-ci, elle est constituée à la limite du feu, d'une végétation similaire à la propriété et également débroussaillée sur une trentaine de mètres ; par contre, la zone calcinée qui est située à proximité de la clôture était en cours de débroussaillement et la végétation était comme l'origine, raison pour laquelle le feu a été activé à cet endroit ; à l'intérieur de la propriété, celle-ci présente à l'est des traces de feu sur une surface d'environ 70 mètres carrés ; l'environnement de la zone brûlée de la propriété présente les caractéristiques suivantes :- nous avons à faire à une zone tout d'abord débroussaillée, mais dont la surface non carbonisée laisse voir une végétation au sol peu fournie mais sèche en cette période de l'année ;- nous constatons également la présence d'une excavation de 6, 30 mètres sur 2, 30 mètres contenant dans sa partie la plus profonde, environ 1, 70 mètre, des débris de métal et de pierre et, dans sa partie la moins profonde, une armature métallique à quatre pieds ainsi qu'un enchevêtrement de bois, matériel isolant et plastique fondu ; sortent de terre à ce niveau, un tuyau plastique ainsi qu'à proximité, un tuyau métallique ; la combustion a été importante en regard de la carbonisation d'un bout de bois dont nous avons effectué un prélèvement, de la matière isolante et également de l'état du tuyau plastique qui est complètement fondu à ce niveau ; d'autre part, le sol présente une carbonisation laissant penser à une très forte température à cet endroit ;- à 1, 50 mètre de cette excavation, nous constatons la présence d'un système de récupération d'eau de pluie, constitué de tuiles et tôles en fibrociment épousant la pente naturelle et conduisant l'eau reçue à une gouttière en ciment ; sous ces tuiles, la végétation a été brûlée par un feu au sol ;- il est à noter que nous avons procédé à des mesures concernant le débroussaillement effectué par Gabriel Z... aux alentours de sa propriété ; celles-ci établissent qu'à l'angle nord-ouest de la maison, la propriété est débroussaillée sur 10 mètres puis sur 22 mètres à l'extérieur ; de ce fait, le débroussaillement s'est effectué de l'angle à la végétation sur 32 mètres ;- la mesure prise de l'angle nord-ouest du garage par rapport à la clôture et à la zone brûlée, dont le débroussaillement était en cours, donne 14 mètres ; l'excavation à la clôture donne 9 mètres " ;
que cet officier de police judiciaire a également indiqué, dans son procès-verbal, que les recherches concernant un éventuel incendie volontaire s'étaient révélées négatives ; qu'il a précisé que, lors de son transport sur les lieux, à 17 heures, soit trois heures après le départ de l'incendie, le vent était faible, " s'orientant nord nord-ouest et tourbillonnant par endroits " ; qu'il a annexé à son procès-verbal diverses photographies ainsi qu'un plan des lieux dont il ressort que l'habitation des prévenus se situait à dix mètres environ de la zone brûlée, en cours de débroussaillement (cote D 30 de la procédure) ; qu'entendu par procès-verbal du 10 juillet 1998, Robert J..., sapeur forestier, parmi les premiers à intervenir sur les lieux, a déclaré : " je me souviens avoir remarqué un trou dans lequel se trouvaient des immondices, des flammes sortaient de ce trou ; ce qui m'a paru bizarre aussi, c'est la présence de 10 mètres carrés environ d'éverites ; des flammes sortaient également de cet endroit ; les évents étaient posées à même le sol " ; qu'entendu par les enquêteurs à la même date, Michel K..., agent technique forestier, parvenu plus tard sur les lieux, a indiqué : " une partie de la forêt avait déjà brûlé et en me rendant sur les lieux du départ de feu, j'ai constaté que c'était éteint et qu'il y avait une palette vide qui fumait ; cette palette se trouvait à la limite d'une zone débroussaillée entièrement ; d'après mes premières constatations, j'ai vu des petites flammèches sous des tôles et des tuiles posées à même le sol ; j'ai demandé à la dame (Lucienne Y...) ce qu'il y avait dessous, elle m'a répondu il n'y a rien, ces tôles et ces tuiles servent à récupérer l'eau de pluie, j'ai soulevé une tôle et en dessous se trouvaient des feuilles sèches qui brûlaient " ; que Max L..., expert près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, requis par les enquêteurs, s'est transporté sur les lieux de l'incendie le 10 juillet 1998 à 11 heures ; qu'à l'issue de ses investigations, il a déposé, le 29 septembre 1998, un rapport dans lequel il a écrit : " sur le terrain de ladite propriété (Y...) d'une superficie de 5 000 mètres carrés, les parties brûlées sont relativement limitées ; elles sont localisées essentiellement au niveau d'une petite excavation creusée dans le sol (1 mètre environ) et dans sa périphérie ; une autre excavation plus profonde (1, 70 mètre) qui lui est contiguë ne présente aucune trace de foyer de combustion ; ce vide était occupé auparavant par une cuve à mazout ; l'excavation de faible profondeur creusée dans le sol abrite un cadre métallique sur lequel sont fixés verticalement quatre cornières ; ces éléments sont particulièrement noircis par le feu ; on distingue également dans le volume délimité par les éléments métalliques des résidus divers carbonisés dont les fragments de bois et de panneaux de toiture composite résultant d'un foyer de combustion important à ce niveau ; sur la partie supérieure des cornières était posé avant les faits un panneau de toiture composite (bois + mousse isolante + partie ondulée en polyester) qui abritait la sortie du tuyau d'évacuation des gaz d'échappement du groupe électrogène produisant l'énergie électrique pour la villa (absence d'alimentation EDF) ; des traces soutenues de combustion sont visibles sur une face de l'excavation ; elles se dirigent en partie supérieure en s'évasant sur le sol en direction de la clôture grillagée côté nord-ouest pour rejoindre la végétation ligneuse et boisée détruite par le feu aux abords de la clôture ; de même, des traces de combustion affectent le sol sur le côté gauche de l'excavation (côté sud-est) et s'étendent jusqu'à la clôture grillagée où la végétation non débroussaillée est brûlée ; d'autres traces de combustion au sol sont visibles à droite de l'excavation, à quelques mètres, situées sous des tuiles et sous les panneaux de toiture composite dont certaines ont leur sous-face en bois partiellement brûlée ; il est à noter l'absence de dégradation par le feu sur la partie supérieure de ces matériaux, y compris sur les aiguilles de pin et les feuilles de chêne desséchées qui y reposent ; à proximité de l'excavation, un tuyau en matière plastique (P. C. diamètre 130 mm) qui sort du sol en position horizontale met en évidence de sévères dégradations thermiques ; l'extrémité de ce conduit qui se prolongeait dans la petite excavation est totalement détruite (longueur estimée à 1 mètre environ) ; ce tuyau assurait l'évacuation des gaz de combustion d'un groupe électrogène de 9 KVA à motorisation diesel type FOD9HN 380V/ 220V n° 53013/ 2 disposé dans un petit local en dur en contrebas, distant de 6 mètres environ de la petite excavation ; ledit local en dur ne met pas en évidence de traces significatives de combustion ; cependant, des traces noirâtres sont distinctes au niveau des orifices d'aération et les parois internes du local sont relativement noircies, notamment le plafond ; à la sortie du local, le tuyau d'évacuation des gaz d'échappement du groupe électrogène est particulièrement encrassé par les dépôts de suie ; le feu s'est propagé à la végétation non débroussaillée située hors de la clôture grillagée de la propriété distante de 9 mètres de l'excavation dans sa partie la plus proche ; la propagation a été favorisée, de surcroît, par les conditions de sécheresse et la présence d'un vent de nord-ouest (inférieur à 25 kilomètres/ heure) ; même si l'emprise de la propriété est débroussaillée, y compris dans certaines parties au-delà de la clôture, il convient de préciser que les distances réglementaires de débroussaillement ne sont pas conformes, en particulier dans la zone où est implantée l'excavation ; en effet, la distance de 100 mètres adoptée par la délibération du conseil municipal de Peynier, en date du 5 avril 1990, en application du code forestier, n'est pas respectée autour de la villa et des installations de toute nature (local du groupe électrogène et sortie du tuyau des gaz de combustion dans l'excavation) ; de même, il n'est pas respecté la distance minimale de 50 mètres prescrite par le code forestier (article L. 322-3) et par l'arrêté préfectoral n° 1793 du 30 avril 1992 (articles 15 et 16) modifié par l'arrêté n° 3441 du 11 août 1993 (article 3) portant règlement permanent en vue de prévenir les incendies de forêts sur le territoire des Bouches-du-Rhône " ; que cet expert a conclu : " l'incendie de forêt survenu sur le territoire de la commune de Peynier le 9 juillet 1998 résulte d'une cause accidentelle ; l'éclosion du feu s'est initiée dans le terrain de la propriété appartenant à Gabriel Z... et Lucienne M... (Y...), à l'intérieur d'une petite excavation dans laquelle débouchait le tuyau d'évacuation des gaz de combustion d'un groupe électrogène ; la source de chaleur a été constituée très probablement par des projections de particules incandescentes de suies accompagnées d'une forte émission de chaleur consécutives à un petit feu dans le tuyau d'évacuation des gaz ; les matériaux environnants panneau de toiture composite) ont permis le développement du feu ; en outre, la faible distance entre l'excavation et la végétation non débroussaillée hors clôture de la propriété ont conduit à la propagation du sinistre ; l'installation et l'entretien relatifs à l'évacuation des produits de combustion du groupe électrogène s'opposait à une prévention contre le risque d'incendie dans un milieu boisé, tout comme le débroussaillement insuffisant dans les parties contiguës à la propriété " ; qu'il résulte des dispositions de l'article L. 322-3 du code forestier que, dans les communes où se trouvent des bois classés en application de l'article L. 321-1 du même code ou inclus dans les massifs forestiers mentionnés à l'article L. 321-6, le débroussaillement et le maintien en état débroussaillé sont obligatoires sur les zones situées à moins de 200 mètres de terrains en nature de bois, forêts, landes, maquis, garrigue, plantations ou reboisements et répondant à l'une des situations suivantes :
a) abords des constructions, chantiers, travaux et installations de toute nature, sur une profondeur de 50 mètres, ainsi que des voies privées y donnant accès sur une profondeur de 10 mètres de part et d'autre de la voie,
b) terrains situés dans les zones urbaines,
c) terrains servant d'assiette à l'une des opérations régies par les articles L. 311-1 (zones d'aménagement concerté), L. 315-1 (lotissements) et L. 322-1 (associations foncières urbaines) du code de l'urbanisme,
d) terrains mentionnés à l'article L. 443-1 du code de l'urbanisme (terrains de camping),
e) terrains situés dans les zones délimitées et spécifiquement définies comme devant être débroussaillées et maintenues en état débroussaillé en vue de la protection des constructions par un plan de prévention des risques naturels prévisibles établi en application des articles L. 562-1 à L. 562-7 du code de l'environnement ;
que ce texte précise que les travaux de débroussaillement et de maintien en état débroussaillé sont à la charge, dans le cas mentionné au " a ", " du propriétaire des constructions, chantiers, travaux et installations et de ses ayants droit ", dans le cas mentionné au " e ", " des propriétaires des constructions pour la protection desquelles la servitude est établie ou de leurs ayants droit " ; qu'aux termes de l'article 15 de l'arrêté préfectoral portant règlement permanent en vue de prévenir les incendies de forêts sur le territoire du département des Bouches-du-Rhône, en date du 30 avril 1992, modifié par l'arrêté préfectoral du 11 août 1993, " les zones particulièrement exposées " aux incendies de forêts pour l'application des dispositions de l'article L. 321-1 du code forestier couvrent la totalité de ce département ; que ce même texte dispose : " en application des dispositions de ce même article, les propriétaires ou leurs ayants droit sont tenus de maintenir leur terrain en état débroussaillé jusqu'à une distance de 50 mètres des habitations, dépendances, chantiers, ateliers et usines leur appartenant ; lorsqu'un bâtiment est destiné à l'usage d'habitation, à titre temporaire ou permanent, et compte tenu de l'importance du risque qui justifie des précautions particulières pour la protection des vies humaines, le débroussaillement est rendu obligatoire sur les fonds voisins jusqu'à une distance de 50 mètres de l'habitation " ; qu'aux termes de l'article 16 de cet arrêté modifié par l'arrêté du 11 août 1993, le débroussaillement et le maintien en état débroussaillé sont obligatoires dans les cas suivants :
a) abords des constructions, chantiers, travaux et installations de toute nature, sur une profondeur de 50 mètres, ainsi que des voies privées y donnant accès sur une profondeur de 10 mètres de part et d'autre de la voie,
b) terrains situés dans les zones urbaines délimitées par un plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé, ou un document d'urbanisme en tenant lieu,
c) terrains servant d'assiette à des zones d'aménagement concerté, lotissements... (articles L. 311-1, L. 315-1 et L. 322-2 du code de l'urbanisme),
d) terrains mentionnés à l'article L. 443-1 du code de l'urbanisme (terrains de camping et stationnement de caravanes) ;
que l'article 16 de l'arrêté précise : " les travaux sont à la charge du propriétaire des constructions, chantiers, travaux et installations et de ses ayants droit dans les cas mentionnés en a et, d'autre part, du propriétaire et de ses ayants droit pour les cas signalés aux alinéas b, c et d ; si les intéressés n'exécutent pas les travaux prescrits en application des dispositions de l'article L. 322-3, la commune peut y pourvoir d'office après mise en demeure du propriétaire et à la charge de celui-ci " ; qu'à l'appui de leur défense, les prévenus produisent deux rapports établis, à la demande de leur assureur, par Henri N..., expert agricole, foncier et immobilier, et Roger O..., ingénieur conseil en matière de " bâtiments, génie civil, chemins de fer, fonciers, immobiliers, commerciaux ", lesquels, après s'être transportés sur les lieux plus d'un an après les faits, ont conclu que l'incendie du 9 juillet 1998, dont ils n'ont pas su déterminer l'origine, n'avait pu se propager à partir de la propriété des prévenus car il aurait dû " remonter contre le vent " et que la responsabilité du sinistre incombait à la commune de Peynier qui s'était abstenue de faire appliquer la réglementation et aux parties civiles qui ne l'avaient pas appliquée ; que Roger O... a notamment écrit : " la brigade de gendarmerie a recensé soixante et un propriétaires se déclarant victimes de l'incendie ; parmi ceux-ci, dix propriétaires et l'association des chasseurs ont demandé à être entendus ; neuf d'entre eux ont déposé plainte ; les parcelles de ces neuf propriétaires se trouvent à plusieurs kilomètres de la zone de départ de feu ; ces parcelles sont bordées ou traversées par des routes ou chemins ; les abords de ces voies de communication avaient ils été débroussaillés, comme prévu par les textes par les propriétaires concernés ? ; le dixième propriétaire, M. P..., n'a pas déposé plainte ; pourtant sa parcelle numéro 145 est limitrophe de la propriété Y.../ Z... ; M. P... a reconnu que les abords de la propriété Y.../ Z... étaient parfaitement débroussaillés ; on peut supposer qu'il estime que l'incendie n'a pu avoir son origine dans la propriété Y.../ Z... ; il y a onze propriétaires dont les parcelles se trouvent dans la zone de départ de feu ; aucun d'entre eux n'a déposé plainte ; cette attitude permet de penser qu'ils estimaient que le départ de feu n'a pu avoir lieu dans la propriété Y.../ Z... " ; que cette démonstration, pour le moins peu probante, étant rappelé que l'incendie a détruit des bois mais également des maquis dont la destruction ne justifiait pas nécessairement un dépôt de plainte, permet de douter du caractère sérieux des conclusions de cet " expert " quand il affirme : " nous avons démontré :- qu'il ne pouvait pas y avoir de production d'étincelles d'origine électrique lors du fonctionnement du moteur thermique,- qu'il ne pouvait pas y avoir de production d'étincelles d'origine mécanique lors du fonctionnement du moteur thermique " ; que les conclusions d'Henri N... et Roger O... quant à la direction de l'incendie ne tiennent aucun compte des constatations faites sur le terrain, trois heures après le départ de l'incendie, par le maréchal des logis-chef, Eric I..., technicien en identification criminelle à la brigade de recherches d'Aix-en-Provence, selon lesquelles le vent s'orientait nord nord-ouest en " tourbillonnant par endroits " ; qu'en outre, contrairement à ce que soutiennent les prévenus dans leurs écritures, il ressort des plans, des photographies et des registres cadastraux annexés à la procédure que les propriétés voisines de la leur et celles des parties civiles, non bâties, n'entraient pas dans les catégories mentionnées aux articles L. 322-3 du code forestier, 15 et 16 de l'arrêté préfectoral du 30 avril 1992 modifié par l'arrêté préfectoral du 11 août 1993 ; que leurs propriétaires n'étaient donc pas soumis, contrairement à ce qu'affirment Henri N... et Roger O..., à une obligation de débroussaillement ; que, si la commune peut se substituer aux propriétaires soumis à cette obligation et défaillants, il n'en demeure pas moins que cette obligation incombe principalement aux personnes visées par ces textes ; qu'en application des articles susvisés, il appartenait à Lucienne Y..., propriétaire d'un terrain situé en zone naturelle, dans un périmètre de protection des bois et forêts soumis au régime forestier, dans une zone particulièrement exposée aux incendies de forêts, sur lequel étaient implantées une construction à usage d'habitation et des installations de toute nature, tels le local du groupe électrogène et la sortie du tuyau des gaz de combustion dans l'excavation, de procéder au débroussaillement et au maintien en état débroussaillé du terrain sur les fonds voisins jusqu'à une distance de 50 mètres de l'habitation et sur une profondeur de 50 mètres aux abords de ces installations ; que cette obligation incombait également à Gabriel Z..., ayant droit de Lucienne Y... puisqu'il tenait de celle-ci un droit d'usage sur cette propriété ; qu'il résulte des constatations faites par Eric I... le 9 juillet 1998 et de celles faites par Max L... le 10 juillet 1998 que cette obligation n'a pas été respectée ; qu'il ressort suffisamment de ces constatations et du rapport circonstancié de cet expert, éléments corroborés par les témoignages de Robert J... et de Michel K..., que l'incendie a pris naissance dans la propriété appartenant à Lucienne Y... et occupée par les deux prévenus, à l'intérieur de l'excavation dans laquelle débouchait le tuyau d'évacuation des gaz de combustion du groupe électrogène par suite de l'échauffement de ce tuyau et que cet incendie s'est propagé à l'entour, détruisant 260 hectares de bois et de maquis, en raison du défaut de débroussaillement des fonds voisins sur la distance réglementaire de 50 mètres de l'habitation et de 50 mètres des installations de toute nature implantées sur le terrain, notamment celle correspondant à la sortie du tuyau des gaz de combustion à l'origine de l'incendie ; que les deux prévenus ne pouvaient ignorer, en raison de la situation du terrain qu'ils occupaient, ni l'obligation de débroussaillement qui leur incombait personnellement ni le risque majeur d'incendie qu'ils faisaient encourir à autrui en ne respectant pas cette obligation ; qu'ils ont créé la situation ayant permis la réalisation du dommage et n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter et ainsi commis une faute caractérisée ; que c'est à bon droit que le tribunal les a déclarés coupables du délit de destruction involontaire de biens appartenant à autrui par l'effet d'un incendie provoqué par manquement à une obligation de sécurité imposée par la loi et par le règlement " ;
" 1°) alors que l'obligation de débroussaillement aux abords des " constructions, chantiers, travaux et installations " prévue aux articles L. 322-3 du code forestier et 15 de l'arrêté préfectoral du 30 avril 1992 modifié, incombe aux propriétaires des terrains situés dans la zone à débroussailler, chaque propriétaire n'étant tenu de débroussailler que sa propre parcelle ; que seul le coût du débroussaillement est " à la charge " du propriétaire des " constructions, chantiers, travaux et installations " ; que ce dernier n'a donc pas l'obligation de débroussailler lui-même d'office le terrain d'autrui ; qu'en jugeant au contraire que l'article L. 322-3 du code forestier et l'arrêté préfectoral du 30 avril 1992 modifié auraient imposé au propriétaire des " constructions, chantiers, travaux et installations " et à ses ayant droits l'obligation de procéder au débroussaillement " sur les fonds voisins ", et en reprochant aux prévenus d'avoir manqué à cette obligation, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
" 2°) alors que, dans leurs conclusions d'appel (page 9), les prévenus soutenaient, en se prévalant à cet égard du rapport de Roger O... (page 9) se référant à l'expertise L..., conforme sur ce point, qu'en toute hypothèse, ils n'avaient pas " commis la moindre faute quant à l'utilisation d'un groupe électrogène parfaitement légal, offrant toutes les garanties de sécurité, dont il n'est absolument pas établi qu'il ait connu le moindre dysfonctionnement " ; qu'en déclarant la culpabilité des prévenus sans répondre à ces chefs péremptoires de défense, la cour d'appel a violé les textes précités " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 9 juillet 1998, deux-cent-cinquante hectares de forêts et de maquis ont été détruits sur le territoire de la commune de Peynier (Bouches-du-Rhône) par un incendie ayant pour origine le tuyau d'évacuation des gaz du groupe électrogène dont était équipée une maison appartenant à Lucienne Y... ; que cette dernière et son concubin, Gabriel Z..., ont été poursuivis pour avoir involontairement détruit ou dégradé des bois ou des landes appartenant à autrui par l'effet d'un incendie provoqué par le manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ;
Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables des faits reprochés, l'arrêt retient qu'en application de l'article L. 322-3 du code forestier ainsi que de l'article 15 de l'arrêté préfectoral du 30 avril 1992, modifié, portant règlement permanent en vue de prévenir les incendies de forêts sur le territoire du département des Bouches-du-Rhône, il appartenait à Lucienne Y..., qui était propriétaire, dans un périmètre de protection des bois et forêts soumis au régime forestier et dans une zone particulièrement exposée aux incendies de forêts, d'un terrain sur lequel étaient implantées une construction à usage d'habitation et diverses installations, telles que le local du groupe électrogène et la sortie du tuyau d'évacuation des gaz de combustion, de procéder au débroussaillement des abords, sur les fonds voisins, jusqu'à une distance de cinquante mètres de l'habitation ; que les juges énoncent encore que les parcelles voisines n'étant pas bâties, leurs propriétaires n'étaient pas assujettis à l'obligation de débroussaillement ; qu'ils ajoutent qu'il résultait de l'enquête que l'incendie avait pris naissance dans la propriété que Lucienne Y... occupait avec son concubin, du fait de l'échauffement du tuyau d'échappement du groupe électrogène, et s'était propagé à l'entour en raison du défaut de débroussaillement des fonds voisins sur la distance réglementaire de cinquante mètres autour de la maison ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre au moyen inopérant tiré de l'entretien normal du groupe électrogène, a justifié sa décision ;
Qu'en effet, le débroussaillement jusqu'à une distance de cinquante mètres des constructions, le cas échéant sur l'héritage d'autrui, est une obligation de résultat mise à la charge du propriétaire et de ses ayants droit, dans les cas prévus par l'article L. 322-3 du code forestier ainsi que par l'article 15 de l'arrêté préfectoral portant règlement permanent en vue de prévenir les incendies de forêts sur le territoire du département des Bouches-du-Rhône, en date du 30 avril 1992, modifié par un arrêté du 11 août 1993, pris sur le fondement de l'article L. 322-1 du même code dans sa rédaction alors en vigueur ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3 et 322-5, alinéa 1er, du code pénal, L. 322-3 du code forestier, 15 et 16 de l'arrêté préfectoral portant règlement permanent en vue de prévenir les incendies de forêts sur le territoire des Bouches-du-Rhône, en date du 30 avril 1992, modifié par arrêté du 11 août 1993, 591 et 593 du code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gabriel Z... coupable d'avoir, par manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, involontairement détruit, dégradé ou détérioré des bois et landes, par l'effet d'une substance explosive, d'un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes, a condamné Gabriel Z... à une amende de 1 500 euros sans sursis, et a reçu les parties civiles en leurs constitutions ;
" aux motifs, notamment, que " Lucienne Y... est propriétaire, depuis le 11 avril 1995, d'un terrain (...) situé à Peynier (...) ; que, sur ce terrain, est implanté une maison d'habitation occupée par la prévenue et par le concubin de celle-ci, Gabriel Z... ; (...) qu'en application des articles (L. 322-3 du code forestier, 15 et 16 de l'arrêté préfectoral portant règlement permanent en vue de prévenir les incendies de forêts sur le territoire des Bouches-du-Rhône, en date du 30 avril 1992, modifié par arrêté du 11 août 1993), il appartenait à Lucienne Y..., propriétaire d'un terrain situé en zone naturelle, dans un périmètre de protection des bois et forêts soumis au régime forestier, dans une zone particulièrement exposée aux incendies de forêt, sur lequel étaient implantés une construction à usage d'habitation et des installations de toute nature, tels le local du groupe électrogène et la sortie du tuyau des gaz de combustion dans l'excavation, de procéder au débroussaillement et au maintien en état débroussaillé du terrain sur les fonds voisins jusqu'à une distance de 50 mètres de l'habitation et sur une profondeur de 50 mètres aux abords de ces installations ; que cette obligation incombait également à Gabriel Z..., ayant droit de Lucienne Y..., puisqu'il tenait de celle-ci un droit d'usage sur cette propriété ; (...) que cette obligation n'a pas été respectée ; (...) que l'incendie a pris naissance dans la propriété appartenant à Lucienne Y... et occupée par les deux prévenus, à l'intérieur de l'excavation dans laquelle débouchait le tuyau d'évacuation des gaz de combustion du groupe électrogène par suite de l'échauffement de ce tuyau et que cet incendie s'est propagé alentours, détruisant 260 hectares de bois et de maquis, en raison du défaut de débroussaillement des fonds voisins sur la distance réglementaire de 50 mètres de l'habitation et de 50 mètres des installations de toute nature implantées sur le terrain (...) " ;
" alors qu'en retenant, pour déclarer la culpabilité de Gabriel Z..., qu'en vertu des dispositions des articles L. 322-3 du code forestier, 15 et 16 de l'arrêté préfectoral du 30 avril 1992 modifié, une obligation de débroussaillement lui aurait aussi personnellement incombé, aux motifs qu'il aurait été " ayant droit de Lucienne Y... " puisqu'il aurait tenu de celle-ci " un droit d'usage " sur sa propriété, sans mieux s'expliquer sur l'origine et la nature de ce " droit d'usage ", et sans permettre ainsi de s'assurer de ladite qualité d'" ayant droit ", la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;
Attendu que, faute d'avoir été proposé devant les juges du fond, le moyen, mélangé de fait, est nouveau et, comme tel, irrecevable ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 2 000 euros la somme que Lucienne Y... et Gabriel Z... devront payer solidairement à chacune des deux parties civiles, la commune de Peynier et Gaston X..., au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Farge conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Guihal conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;