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23/04/2013 | FRANCE | N°12-17522

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 avril 2013, 12-17522


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 décembre 2011), rendu sur renvoi après cassation (deuxième chambre civile, 3 juillet 2008, n° 06-11.920), que la société Champagne Bricout et Koch (le tiré) ayant remis à la société Champagne Gremillet (le bénéficiaire) une lettre de change acceptée d'un montant de 151 500 euros, la Banque Sanpaolo (la banque), devenue ultérieurement la Banque Palatine, a rejeté l'effet que le tiré avait domicilié dans

ses livres, au motif qu'il était "sans provision" ; qu'après la mise en redr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 décembre 2011), rendu sur renvoi après cassation (deuxième chambre civile, 3 juillet 2008, n° 06-11.920), que la société Champagne Bricout et Koch (le tiré) ayant remis à la société Champagne Gremillet (le bénéficiaire) une lettre de change acceptée d'un montant de 151 500 euros, la Banque Sanpaolo (la banque), devenue ultérieurement la Banque Palatine, a rejeté l'effet que le tiré avait domicilié dans ses livres, au motif qu'il était "sans provision" ; qu'après la mise en redressement judiciaire du tiré, le bénéficiaire a poursuivi la banque en paiement de cet effet ; que sa demande ayant été déclarée irrecevable par le tribunal devant lequel il avait indiqué exercer l'action oblique, il a interjeté appel en soutenant que la responsabilité de la banque était directement engagée à son égard ; que l'arrêt du 2 décembre 2005 ayant été cassé, le bénéficiaire a, devant la cour d'appel de renvoi, repris ses demandes ;
Attendu que le bénéficiaire fait grief à l'arrêt du rejet de ses demandes indemnitaires, alors, selon le moyen, que commet une faute susceptible d'engager sa responsabilité envers les tiers le banquier qui, ayant accordé un découvert durable et régulier d'un certain montant, refuse, sans préavis et hors tout comportement gravement répréhensible du débiteur de payer un effet dont le montant n'aboutirait pas à outrepasser le montant convenu ; que lorsqu'il n'est pas déterminé de façon expresse, le montant du découvert tacitement autorisé doit être déterminé concrètement au regard des variations constatées du solde débiteur du compte ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui avait constaté, « - un découvert entre le 31 mars 2002 et le 31 octobre 2002, qui, sauf le mois de mai 2002 où il atteindra la somme de 425 006,03 euros, sera systématiquement supérieur à la somme de 450 000 euros, atteignant, à deux reprises, des montants supérieurs à 1 000 000 euros (28 juin 2002 et 30 septembre 2002) et le 31 octobre 2002, une somme supérieure à 2 000 000 euros, - un découvert qui se fixera jusqu'à la dénonciation du compte bancaire, le 7 mars 2003, aux montants de : 29 novembre 2002 : 523 580,76 euros, 31 décembre 2002 : 761 864,95 euros, 31 janvier 2003 : 432 667,44 euros, 17 février 2003 : 450 138,88 euros, 25 février 2003 : 646 452,12 euros », en a déduit que l'évolution du compte témoignait de ce que la banque n'avait consenti qu'un découvert devant être ramené à 450 000 euros à la fin de l'année 2002 et a considéré que celle-ci n'avait, en conséquence, commis aucune faute en rejetant l'effet présenté par le bénéficiaire ; qu'en statuant ainsi alors que les montants de découverts particulièrement relevés par la cour pour la fin de l'année 2002 et pour l'année 2003 excédaient, comme le soutenait le bénéficiaire, très largement la prétendue limite de 450 000 euros de l'autorisation de découvert, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard des articles L. 313-12 du code monétaire et financier et 1382 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir constaté qu'il n'est pas utilement contredit que la convention de compte ne contenait aucune autorisation de découvert et relevé qu'au 30 septembre 1998, la banque avait accordé une facilité de caisse pour un montant de 762 245,08 euros et que la seule lettre par laquelle la banque revendique la limitation du découvert à la somme de 450 000 euros, datée du 7 mars 2003, n'a fait l'objet d'aucune protestation, à réception, de la part du tiré, l'arrêt retient qu'il importe de rechercher si les relations de la banque et de sa cliente révélaient un commun accord des parties de limiter le découvert à un certain montant, lequel peut être établi par l'évolution du compte ; qu'après avoir encore constaté que le découvert du compte qui s'élevait, au 31 décembre 2001, à la somme de 204 119,41 euros, avait progressé régulièrement pour atteindre, au 31 mars 2002, la somme de 421 149,26 euros, entre le 31 mars et le 31 octobre 2002, sauf pour le mois de mai 2002, une somme supérieure à la somme de 450 000 euros, atteignant à deux reprises des montants supérieurs à 1 million d'euros et le 31 octobre 2002, une somme supérieure à 2 millions d'euros, le 29 novembre 2002, celle de 523 580,76 euros, le 31 décembre 2002, celle de 761 864,95 euros, le 31 janvier 2003, celle de 432 667,44 euros, le 17 février 2003, celle de 450 138,88 euros et le 25 février 2003, celle de 646 452,12 euros, la cour d'appel a pu décider, par une appréciation souveraine des faits et de l'évolution du compte, que la banque n'avait consenti qu'un découvert qui devait être réduit, à la fin de l'année 2002, à la somme de 450 000 euros ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'autre grief ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Champagne Gremillet aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois avril deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour la société Champagne Gremillet.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Champagne Gremillet de sa demande indemnitaire dirigée à l'encontre de la société Banque Palatine et tendant à sa condamnation à lui payer la somme de 151.000 euros à titre de dommages et intérêts, outre intérêts au taux légal à compter du 28 février 2003, et celle de 15.000 euros pour résistance abusive, avec capitalisation sur le fondement de l'article 1154 du Code civil ;
AUX MOTIFS QUE la Cour de Cassation a cassé l'arrêt rendu le 2 décembre 2005, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Banque Palatine à payer à la société Champagne Gremillet la somme de 151 500 euros à titre de dommages et intérêts, au motif que la Cour n'a pas recherché le montant du découvert consenti par la banque et n'a pas vérifié si le paiement de l'effet n'a pas entraîné un dépassement de ce découvert ; qu'au regard de la cassation prononcée, la seule question qui reste à trancher est celle relative au point de savoir si le rejet de l'effet, le 4 mars 2003, avait pour effet de dépasser le découvert consenti ; qu'il n'est pas utilement contredit que la convention de compte ne contenait aucune autorisation de découvert ; qu'au 30 septembre 1998, la Banque Sanpaolo, aux droits de laquelle vient la Banque Palatine, avait accordé une facilité de caisse pour un montant de 762 245,08 euros ; que la seule lettre par laquelle la société Banque Palatine revendique la limitation du découvert à la somme de 450 000 euros, datée du 7 mars 2003, n'a fait l'objet d'aucune protestation, à réception, de la part de la société Bricout et Koch ; qu'ainsi, il importe de rechercher si les relations de la banque et de sa cliente révélaient un commun accord des parties de limiter le découvert à un certain montant lequel peut être établi par l'évolution du compte ; que, pour déterminer le découvert autorisé, la société appelante, se réfère à l'évolution du compte depuis le mois d'août 2002 tandis que la banque remonte à la date du 31 décembre 2000 ; qu'en l'absence de tout autre élément, il y a lieu d'examiner l'évolution du compte depuis cette dernière date ; que l'évolution du compte révèle :- un découvert, au 31 décembre 2001, de 204 119,41 euros, progressant régulièrement pour atteindre, au 31 mars 2002, la somme de 421 149,26 euros, - un découvert entre le 31 mars 2002 et le 31 octobre 2002, qui, sauf le mois de mai 2002 où il atteindra la somme de 425 006,03 euros, sera systématiquement supérieur à la somme de 450 000 €, atteignant, à deux reprises, des montants supérieurs à 1.000.000 euros (28 juin 2002 et 30 septembre 2002) et le 31 octobre 2002, une somme supérieure à 2 000 000 euros, - un découvert qui se fixera jusqu'à la dénonciation du compte bancaire, le 7 mars 2003, aux montants de : 29 novembre 2002 : 523 580,76 euros, 31 décembre 2002 : 761 864,95 euros, 31 janvier 2003 : 432 667,44 euros, 17 février 2003 : 450 138,88 euros, 25 février 2003 : 646 452,12 euros ; qu'après la présentation d'effets dont celui de la société Champagne Gremillet, venu à échéance le 28 février 2003, le solde débiteur du compte à été porté à cette date, à la somme de 755 285,92 euros, provoquant le rejet de cet effet, comme celui des autres, par la banque ; que par lettre du 7 mars 2003, la banque s'est plainte de ce que le compte, arrêté au 1er mars 2003, présentait un solde débiteur de 599 127,50 euros en dépassement de la facilité de caisse de 450 000 € ; qu'il ressort de ces éléments que la banque n'avait consentis qu'un découvert qui devait être ramené, à la fin de l'année 2002, à la somme de 450 000 €, ainsi qu'en témoigne l'évolution du compte ; que le solde débiteur remontant et dépassant sensiblement la limite précitée à la fin du mois de février 2003, il s'avère, sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise sollicitée par l'appelante, la Cour disposant des éléments suffisants pour se prononcer, que la banque était fondée à rejeter l'effet de la société Champagne Gremillet ; qu'en l'absence de faute démontrée de la part de la société Banque Palatine, les demandes de la société Champagne Gremillet doivent être rejetées (arrêt, p. 6 et 7).
1) ALORS QUE commet une faute susceptible d'engager sa responsabilité envers les tiers le banquier qui, ayant accordé un découvert durable et régulier d'un certain montant, refuse, sans préavis et hors tout comportement gravement répréhensible du débiteur de payer un effet dont le montant n'aboutirait pas à outrepasser le montant convenu ; que lorsqu'il n'est pas déterminé de façon expresse, le montant du découvert tacitement autorisé doit être déterminé concrètement au regard des variations constatées du solde débiteur du compte ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui avait constaté, « - un découvert entre le 31 mars 2002 et le 31 octobre 2002, qui, sauf le mois de mai 2002 où il atteindra la somme de 425 006,03 euros, sera systématiquement supérieur à la somme de 450 000 €, atteignant, à deux reprises, des montants supérieurs à 1.000.000 euros (28 juin 2002 et 30 septembre 2002) et le 31 octobre 2002, une somme supérieure à 2 000 000 euros, - un découvert qui se fixera jusqu'à la dénonciation du compte bancaire, le 7 mars 2003, aux montants de : 29 novembre 2002 : 523 580,76 euros, 31 décembre 2002 : 761 864,95 euros, 31 janvier 2003 : 432 667,44 euros, 17 février 2003 : 450 138,88 euros, 25 février 2003 : 646 452,12 euros », en a déduit que l'évolution du compte témoignait de ce que la banque n'avait consenti qu'un découvert devant être ramené à 450.000 euros à la fin de l'année 2002 et a considéré que celle-ci n'avait, en conséquence, commis aucune faute en rejetant l'effet présenté par la société Champagne Gremillet ; qu'en statuant ainsi alors que les montants de découverts particulièrement relevés par la cour pour la fin de l'année 2002 et pour l'année 2003 excédaient, comme le soutenait la Société Champagne Grémillet, très largement la prétendue limite de 450.000 euros de l'autorisation de découvert, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard des articles L. 313-12 du Code monétaire et financier et 1382 du Code civil ;
2) ALORS QUE tout jugement ou arrêt doit être motivé et que le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; qu'à l'appui de sa demande indemnitaire, la société Champagne Gremillet avait soutenu que la société Banque Sanpaolo, en délivrant un avis de sort le 3 mars 2003 pour ensuite, le 4 mars 2003, rejeter l'effet présenté, avait commis une faute engageant sa responsabilité ; qu'en rejetant la demande indemnitaire de la société Champagne Gremillet sans se prononcer sur l'existence de la faute imputée à la banque, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-17522
Date de la décision : 23/04/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 décembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 23 avr. 2013, pourvoi n°12-17522


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Blanc et Rousseau, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.17522
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