LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 640-1, alinéa 1er, du code de commerce ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, qu'un jugement du 25 septembre 2007, statuant sur la demande de l'URSSAF de la Marne, a ouvert le redressement judiciaire de Mme X..., exerçant, à titre principal, une activité libérale indépendante d'agent mandataire d'une société d'assurances et nommé M. Y... mandataire judiciaire ; qu'un jugement du 22 avril 2008 a prononcé la liquidation judiciaire de Mme X... et nommé M. Y... liquidateur judiciaire ;
Attendu que pour confirmer cette dernière décision, l'arrêt retient que Mme X... n'a formulé aucune proposition sérieuse de redressement et n'a jamais cherché à régulariser sa situation auprès des organismes sociaux, que si elle n'a pas payé ses cotisations auprès de l'URSSAF de la Marne au titre de ses activités de travailleur libéral, elle n'avait pas davantage réglé à la mutualité sociale agricole les cotisations afférentes à son activité de chef d'exploitation, de sorte que cet organisme a dû déclarer une créance de plus de 31 000 euros, qu'en outre elle n'a pas répondu aux lettres du mandataire judiciaire et à la convocation du tribunal ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs impropres à établir que le redressement de Mme X... était manifestement impossible, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement du 28 avril 2008 prononçant la liquidation judiciaire de Mme X..., l'arrêt rendu le 10 novembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne l'URSSAF de la Marne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mai deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils pour Mme X...
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR prononcé la liquidation judiciaire de Mme X... ;
AUX MOTIFS QU'à l'appui de ses prétentions tendant à la réformation du jugement du 25 septembre 2007, Mme X... fait valoir qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements alors que l'article L. 631-1, alinéa 1 er du code de commerce demande au juge de prendre en compte le passif exigible et que les dettes doivent également être certaines et liquides ; qu'elle soutient qu'en l'espèce, la créance revendiquée par l'Urssaf de la Marne n'est pas certaine ; que l'appelante rappelle, à cette fin, que par lettre du 31 décembre 1996, l'Urssaf de la Marne a pris la décision de faire procéder à la radiation de son compte " travailleur indépendant " ouvert en janvier 1994 et lui a également indiqué qu'elle pouvait considérer comme nul et non avenu le montant des cotisations réclamé par elle pour un montant de 14. 420 francs ; qu'elle précise que, par lettre du 24 février 1997, l'Urssaf de la Marne l'a informée qu'elle avait procédé à l'annulation de son compte alors que cet organisme lui réclame aujourd'hui une somme de 78. 552, 51 euros pour une période de dix ans comprise entre 1997 et 2008 que Mme X... poursuit en indiquant qu'elle a dû reprendre l'exploitation de son mari, décédé, activité au titre de laquelle elle a acquitté des cotisations auprès de la mutualité sociale agricole et que le créancier ne prouve pas qu'elle est en état de cessation des paiements ; Mais attendu qu'il ressort des pièces versées aux débats que Mme X... a été affiliée à l'Urssaf de la Marne le 7 octobre 1999 avec effet rétroactif au 1er octobre 1996 au titre de son activité libérale ; que cette affiliation d'office faisait suite à une information transmise à l'Urssaf de la Haute-Marne selon laquelle Mme X... avait perçu des commissions en qualité d'agent mandataire d'une compagnie d'assurances ; que l'Urssaf de la Marne a établi un décompte des sommes dues par l'intéressée après avoir obtenu du service des impôts de Vitry-le-François le montant de ses revenus professionnels pour les années 1996 et 1997 ; que Mme X... a formé opposition aux contraintes signifiées pour la période du quatrième trimestre 1996 au quatrième trimestre 1999 en invoquant sa radiation des contrôles de l'Urssaf à la suite de la visite d'un inspecteur de cet organisme le 13 décembre 1996 et sa situation professionnelle inchangée ; qu'elle avait cependant été radiée à la suite d'un contrôle à l'issue duquel il avait été constaté que son activité prépondérante était agricole et qu'elle cotisait, auprès de la mutualité sociale agricole, sur l'ensemble de ses revenus, et ce, par application du décret n° 91-628 du 4 juillet 1991 qui prévoit que, lorsque l'activité principale est non salariée agricole, les personnes sont affiliées et cotisent au seul régime agricole dès lors que les recettes provenant de l'activité accessoire n'excèdent pas 10 % du montant total des recettes de l'intéressé pour l'ensemble des revenus imposés dans la catégorie des bénéfices agricoles ; que, du fait de la régularisation des revenus tirés de l'activité libérale par les services fiscaux afférents aux années 1996, 1997 et 1998, les revenus tirés de son activité d'agent mandataire sont devenus plus importants que ses revenus de chef d'exploitation agricole ; que cet état de fait a été confirmé par la mutualité sociale agricole par lettre du 26 juillet 2000 dans laquelle cet organisme a rappelé que les cotisations avaient été calculées sur les seuls revenus agricoles ; que, par lettre du 12 avril 2001, la mutualité sociale agricole a précisé qu'à compter du 1 er juillet 2000, Mme X... était considérée comme exploitante agricole à titre secondaire, que ses bénéfices non commerciaux étaient supérieurs aux bénéfices agricoles et qu'en fonction des revenus des années précédentes elle aurait dû être considérée comme chef d'exploitation à titre secondaire depuis plus longtemps ; que c'est dans ces conditions que l'Urssaf de la Marne a rouvert un compte en application de l'article L. 615-4 du code de la sécurité sociale et a adressé à l'intéressée des mises en demeure et des contraintes, lesquelles n'ont pas été contestées ; que, par ailleurs, pour les années 2004 à 2006, l'Urssaf de la Marne a dû procéder à des taxations provisionnelles à la suite du refus de Mme X... de communiquer ses revenus professionnels ; qu'enfin, Mme X... n'a pas contesté dans les formes les réclamations contentieuses et les actes de poursuite et d'exécution ; qu'il s'ensuit que Mme X... ne peut valablement contester le caractère certain de la créance de l'Urssaf de la Marne ; Attendu qu'il ressort des pièces de la procédure que Mme X... n'est pas à même de faire face à son passif exigible avec son actif disponible et était donc bien en état de cessation des paiements au sens de l'article L. 631-1 du code de commerce ; que l'état provisoire des créances établi au 27 juin 2008 fait apparaître un montant total de créances déclarées pour 110. 034, 73 euros, outre, d'une part, une créance de 144. 3 52, 45 euros déclarée par la Cadpce au titre d'un prêt impayé et en application d'un arrêt prononcé le 13 octobre 1998 par la Cour d'appel de Reims condamnant Mme X... au paiement de cette somme et, d'autre part, une créance de 25. 946, 36 euros déclarée tardivement par Me Philippe Z..., administrateur provisoire de l'indivision X... ; que face à ce passif, l'appelante ne peut se prévaloir utilement d'aucun actif disponible qui ne soit pas grevé de sûretés ; qu'en outre, l'Urssaf de la Marne fait justement observer que l'intention manifestée par l'appelante de " réunir la somme due " constitue un aveu explicite de l'absence de tout actif disponible pour régler le passif exigible ; Attendu qu'il n'y a pas lieu d'accorder à Mme X... des délais de paiement alors qu'elle n'est pas assignée en paiement par ces créanciers dans le cadre de la présente instance et que la situation de cessation des paiements est une condition nécessaire et suffisante pour l'ouverture de la procédure collective ; Attendu qu'il convient, dès lors, de confirmer le jugement du 25 septembre 2007 en ce qu'il a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de Mme X... ; Attendu que Mme X... conclut au mal fondé de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à son égard au motif que l'article L. 640-1 du code de commerce exige un état de cessation des paiements et l'impossibilité manifeste d'un redressement ; que, sur le premier point, elle reprend l'argumentation soutenue dans le cadre de l'appel formé contre le jugement du 25 septembre 2007 tirée, pour l'essentiel, de l'absence de créance certaine et liquide de l'Urssaf de la Marne ; qu'elle sollicite, à titre subsidiaire, l'octroi de délais de paiement ; Mais attendu que, pour les motifs développés ci-dessus et auxquels il est expressément référé, Mme X..., qui ne peut pas prétendre à l'octroi de délais de paiement, est bien en état de cessation des paiement ; Que, par ailleurs, elle n'a formulé aucune proposition sérieuse de redressement et n'a jamais cherché à régulariser sa situation auprès des organismes sociaux ; que la Cour relèvera que si Mme X... n'a pas payé ses cotisations auprès de l'Urssaf de la Marne au titre'de ses activités de travailleur libéral, elle n'avait pas davantage réglé à la mutualité sociale agricole les cotisations afférentes à son activité de chef d'exploitation de sorte que cet organisme a dû déclarer une créance de plus de 31. 000 euros ; qu'en outre, Mme X... n'a pas répondu pas aux lettres du mandataire judiciaire et à la convocation du tribunal ; Qu'il convient, dans ces conditions, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 22 avril 2008 ;
ALORS QUE le prononcé de la liquidation judiciaire est subordonné à la condition que le redressement du débiteur soit manifestement impossible ; qu'en se bornant à énoncer que Mme X... est en état de cessation des paiements et qu'elle n'a formulé aucune proposition sérieuse de redressement, ni cherché à régulariser sa situation auprès des organismes sociaux, la Cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à établir que son redressement était manifestement impossible ; qu'ainsi, elle a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L 640-1 du Code de commerce.