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26/12/2022 | FRANCE | N°455267

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 26 décembre 2022, 455267


Vu la procédure suivante :

Mme E... B... a porté plainte contre M. A... C... devant la chambre disciplinaire de première instance de Lorraine de l'ordre des médecins, devenue chambre disciplinaire de première instance du Grand-Est de l'ordre des médecins. Le conseil départemental de Moselle de l'ordre des médecins s'est associé à la plainte. Par une décision du 15 novembre 2018, la chambre disciplinaire de première instance a infligé à M. C... la sanction de l'interdiction d'exercer la médecine pendant une durée de trois mois, dont deux mois assortis du sursis.

Par une décision du 4 juin 2021, la chambre disciplinaire nationale de l'or...

Vu la procédure suivante :

Mme E... B... a porté plainte contre M. A... C... devant la chambre disciplinaire de première instance de Lorraine de l'ordre des médecins, devenue chambre disciplinaire de première instance du Grand-Est de l'ordre des médecins. Le conseil départemental de Moselle de l'ordre des médecins s'est associé à la plainte. Par une décision du 15 novembre 2018, la chambre disciplinaire de première instance a infligé à M. C... la sanction de l'interdiction d'exercer la médecine pendant une durée de trois mois, dont deux mois assortis du sursis.

Par une décision du 4 juin 2021, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a, sur appels de Mme B... et du conseil départemental de Moselle de l'ordre des médecins, réformé la décision de la chambre disciplinaire de première instance et infligé à M. C... la sanction de la radiation du tableau de l'ordre des médecins.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 août et 29 octobre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat d'annuler cette décision.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Fischer-Hirtz, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Richard, avocat de M. C..., à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme B... et à la SARL Matuschansky, Poupot, Valdelièvre, avocat du Conseil national de l'ordre des médecins ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B... a porté plainte contre M. C... devant la chambre disciplinaire de première instance de Lorraine de l'ordre des médecins, devenue chambre disciplinaire de première instance du Grand-Est de l'ordre des médecins, à la suite de relations intimes que M. C... aurait entretenu avec elle depuis qu'elle avait atteint l'âge de seize ans. Le conseil départemental de Moselle de l'ordre des médecins s'est associé à cette plainte. Par une décision du 15 novembre 2018, la chambre disciplinaire de première instance a infligé à M. C... la sanction de l'interdiction d'exercer la médecine pendant une durée de trois mois, dont deux mois assortis du sursis. M. C... se pourvoit en cassation contre la décision du 4 juin 2021 par laquelle la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a, sur appels de Mme B... et du conseil départemental de Moselle de l'ordre des médecins, réformé cette décision et lui a infligé la sanction de la radiation du tableau de l'ordre des médecins.

2. Si le choix de la sanction relève de l'appréciation des juges du fond au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, il appartient au juge de cassation de vérifier que la sanction retenue n'est pas hors de proportion avec la faute commise et qu'elle a pu, dès lors, être légalement prise.

3. Il ressort des énonciations de la décision attaquée que la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a constaté que M. C..., médecin spécialiste, qualifié en médecine générale, avait entretenu avec une jeune patiente de plus de seize ans, dont il était le médecin traitant depuis plusieurs années, une relation intime alors qu'il n'ignorait pas que depuis l'âge de douze ans, elle était confiée à l'aide sociale à l'enfance et hébergée dans un foyer et qu'en outre, en raison d'une souffrance psychique majeure, elle était suivie en pédopsychiatrie et sous traitement médicamenteux. Elle a également relevé que M. C... avait, par son statut de médecin ainsi qu'en raison de l'écart d'âge de plus de quarante ans qui les séparait, une autorité particulière sur cette jeune fille qui lui avait dit, à plusieurs reprises, être à la recherche d'un père de substitution ainsi que former le vœu d'exercer la profession d'infirmière. Enfin, la chambre disciplinaire nationale a énoncé que leurs rapports sexuels se déroulaient dans le cabinet médical de M. C... et avaient pu être précédés de prise d'alcool, M. C... ayant pris l'initiative de proposer à Mme B... de l'alcool en dépit des médicaments qu'elle prenait. En déduisant de ces faits, non argués de dénaturation, que M. C... avait " gravement " manqué à ses obligations déontologiques, notamment à celles résultant des articles R. 4127-2, R. 4127-3, R. 4127-7 et R. 4127-31 du code de la santé publique et que de telles fautes justifiaient qu'il fasse l'objet de la sanction de la radiation, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins, dont la décision est suffisamment motivée, n'a pas prononcé une sanction hors de proportion avec les fautes qu'elle a retenues.

4. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.

5. Mme B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de M. C... une somme de 3 000 euros à verser à la SCP Lyon-Caen et Thiriez, au titre des dispositions précitées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. C... est rejeté.

Article 2 : M. C... versera à la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme B..., une somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... C..., à Mme D... G... B... et au conseil départemental de Moselle de l'ordre des médecins.

Copie en sera adressée au Conseil national de l'ordre des médecins.

Délibéré à l'issue de la séance du 8 décembre 2022 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; M. Jérôme Marchand-Arvier, conseiller d'Etat et Mme Catherine Fischer-Hirtz, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 26 décembre 2022.

La présidente :

Signé : Mme Maud Vialettes

La rapporteure :

Signé : Mme Catherine Fischer-Hirtz

La secrétaire :

Signé : Mme Romy Raquil


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 455267
Date de la décision : 26/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 26 déc. 2022, n° 455267
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Fischer-Hirtz
Rapporteur public ?: M. Jean-François de Montgolfier
Avocat(s) : SCP RICHARD ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:455267.20221226
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