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15/04/2025 | FRANCE | N°23TL02872

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 15 avril 2025, 23TL02872


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier la condamnation de la commune de Baillargues (Hérault) à lui verser la somme de 228 353,89 euros, ainsi que celle de 426 euros par mois à compter du 1er juillet 2026, en réparation des préjudices subis du fait de l'accident dont elle a été victime alors qu'elle assistait à la manifestation " Labour est dans le pré " organisée le 18 mars 2018 sur le territoire de cette commune.

Par un jugement n° 200

5279 du 10 octobre 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier la condamnation de la commune de Baillargues (Hérault) à lui verser la somme de 228 353,89 euros, ainsi que celle de 426 euros par mois à compter du 1er juillet 2026, en réparation des préjudices subis du fait de l'accident dont elle a été victime alors qu'elle assistait à la manifestation " Labour est dans le pré " organisée le 18 mars 2018 sur le territoire de cette commune.

Par un jugement n° 2005279 du 10 octobre 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée au greffe de la cour le 8 décembre 2023 et un mémoire en réplique du 20 juin 2024, Mme A..., représentée par Me Vajou, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du 10 octobre 2023 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de condamner la commune de Baillargues à lui verser la somme de 228 353,89 euros, la somme de 426 euros par mois à compter du 1er juillet 2026 avec indexation, ainsi que la somme de 179 107, 36 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs arrêtés au 30 janvier 2029, et enfin une rente de 160 euros par mois, avec indexation, au titre de la perte sur retraite à taux plein à compter du 1er février 2029 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Baillargues la somme de 7 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A... soutient que :

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la responsabilité de la commune de Baillargues doit être engagée pour faute du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police, au regard de l'article L 2212-2 du code général des collectivités territoriales ;

- la responsabilité de la commune doit également être engagée en sa qualité d' organisatrice de la manifestation, alors même que deux associations sont intervenues en partenariat ; la commune a commis une faute en choisissant l'emplacement des stands et des dispositifs matériels inadaptés et insuffisants ; elle n'a pas non plus mis en œuvre les moyens adéquats de protection destinés à assurer la sécurité des participants et des spectateurs ; elle aurait dû prévoir une zone de stabulation des chevaux de trait et une zone d'exclusion du public ; elle aurait dû encore mobiliser un nombre suffisant d'agents municipaux ;

- si l'arrêté du maire du 3 mars 2018 comportait un plan matérialisant l'emplacement des stands, notamment celui du maréchal-ferrant où s'est produit l'accident, les barrières métalliques prévues par la commune étaient inadaptées au cadre de la manifestation ; le risque d'un emballement soudain des chevaux aurait dû être pris en compte par la commune ; le fait que les chevaux auraient été placés sous la surveillance du maréchal-ferrant n'exonère pas la commune de sa responsabilité ; les chevaux auraient dû être placés dans un enclos de stabulation ; la commune, qui n'a par ailleurs donné aucune consigne de sécurité aux spectateurs, a commis une faute en permettant au public d'accéder au stand du maréchal-ferrant ; la commune a laissé le maréchal-ferrant s'organiser librement sans prise en compte de la sécurité du public ;

- en ce qui concerne la réparation du préjudice, le barème élaboré par l'ONIAM n'est pas adapté à sa situation dès lors qu'il ne concerne que les victimes d'accidents médicaux ;

- elle a subi des préjudices patrimoniaux temporaires d'un montant de 838 euros au titre des dépenses de santé, de 6 160, 13 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels, et de 10 215,47 euros au titre des frais divers ;

- elle a subi des préjudices patrimoniaux permanents d'un montant de 5 025 euros au titre des dépenses de santé futures, de 89 309, 29 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs et de 426 euros par mois, avec indexation au titre de la perte sur retraite à taux plein à compter du 1er juillet 2026 ; elle subit un préjudice d'un montant de 179 107, 36 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs arrêtés au 30 janvier 2029 ; elle a droit à une rente de 160 euros par mois, avec indexation, au titre de la perte sur retraite à taux plein à compter du 1er février 2029 ; elle subit un préjudice de 40 000 euros au titre de l'incidence professionnelle et de 4 000 euros au titre des dépenses consécutives à la perte d'autonomie ;

-elle a subi, au titre des préjudices extra-patrimoniaux temporaires, un déficit fonctionnel temporaire à hauteur de 3 306 euros, un préjudice lié aux souffrances endurées devant être évalué à 10 000 euros, et un préjudice esthétique temporaire de 1 500 euros ;

- elle a subi, au titre des préjudices extra-patrimoniaux permanents, un déficit fonctionnel permanent devant être évalué à 25 000 euros, un préjudice esthétique permanent de 5 000 euros et divers troubles dans ses conditions d'existence (préjudice d'agrément, préjudice sexuel et préjudice moral) d'un montant qui doit être fixé à 28 000 euros.

Par des mémoires, enregistrés les 1ers et 25 mars 2024, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche, agissant en qualité de mandataire de gestion de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, représentée par Me Rognerud, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) l'annulation du jugement du 10 octobre 2023 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) la condamnation de la commune de Baillargues à lui rembourser la somme, à parfaire, de 147 461, 98 euros au titre des prestations versées consécutivement à l'accident dont Mme A... a été victime, ainsi que la somme de 1 191 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Baillargues la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la responsabilité de la commune de Baillargues doit être engagée pour faute du fait de l'insuffisance des mesures de police destinées à préserver la sécurité publique des personnes et des biens ;

- la responsabilité de la commune, organisatrice de la manifestation, doit être engagée alors même qu'elle a organisé la manifestation en partenariat avec deux associations ; les choix de l'emplacement des stands et des dispositifs matériels mis en place sont fautifs ; les barrières auraient dû être adaptées à l'activité prévue par la mise en place de dispositifs suffisamment solides pour éviter un accident tel que celui qui s'est produit ; aucune signalétique n'avait été mise en place par la commune pour empêcher les spectateurs de s'approcher du stand où se trouvaient les chevaux ;

-elle demande dès lors, l'engagement de la responsabilité de la commune de Baillargues et sa condamnation à l'indemniser de ses débours exposés au bénéfice de Mme A....

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2024, la commune de Baillargues, représentée par Me Audouin, conclut au rejet de la requête de Mme A... et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de cette dernière en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune soutient que :

- la requête est irrecevable, faute pour Mme A... d'avoir lié le contentieux en indiquant, dans sa demande préalable, le fondement juridique de ses prétentions ;

- la requête est mal dirigée dès lors que c'est la responsabilité de l'association régionale d'attelage du Languedoc-Roussillon, organisatrice de la manifestation, qui aurait dû être recherchée ;

- subsidiairement, les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 13 février 2025, la clôture d'instruction a été fixée au 4 mars 2025 à 12h00.

Par un courrier du 17 février 2025, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de la responsabilité de la commune de Baillargues sur le fondement du défaut d'entretien normal de l'ouvrage public constitué par les barrières métalliques de protection.

Par des courriers des 3 et 27 mars 2025, Mme A... a présenté des observations sur le moyen d'ordre public. La commune de Baillargues en a fait de même par courrier du 18 mars 2025.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'arrêté du 18 décembre 2023 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

- le code de justice administrative

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bentolila, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique

- et les observations de Me Audouin pour la commune de Baillargues.

Une note en délibéré a été présentée pour la commune de Baillargues le 2 avril 2025.

Considérant ce qui suit :

1. Le 18 mars 2018, Mme B... A... assistait à la fête agricole dénommée " Labour est dans le pré ", organisée sur le territoire de la commune de Baillargues (Hérault), lorsqu'elle a été percutée par une barrière métallique dont la chute a été provoquée par l'emballement de deux chevaux de traits attachés à proximité de ces barrières au niveau d'un stand, ouvert au public, tenu par un maréchal-ferrant. Blessée au genou droit, elle a été hospitalisée et a subi une intervention chirurgicale le 4 avril 2018. Après que le maire de Baillargues a, le 18 septembre 2020, rejeté sa demande préalable d'indemnisation, Mme A... a saisi le tribunal administratif de Montpellier d'une requête tendant à l'engagement de la responsabilité de la commune dans l'accident qui lui est survenu et à la condamnation de celle-ci à lui verser la somme totale de 228 353,89 euros à titre de dommages et intérêts, ainsi qu'une rente mensuelle de 426 euros à compter du 1er juillet 2026 avec indexation.

2. Mme A... relève appel du jugement du 10 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande et sollicite devant la cour, dans le dernier état de ses écritures, la condamnation de la commune de Baillargues à lui verser, au titre de l'ensemble de ses préjudices, la somme totale de 228 353,89 euros, une rente de 426 euros par mois à compter du 1er juillet 2026 avec indexation, la somme de 179 107, 36 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs arrêtés au 30 janvier 2029, ainsi qu'une rente mensuelle de 160 euros au titre de la perte sur retraite à taux plein à compter du 1er février 2029.

3. La caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche, agissant en qualité de mandataire de gestion de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, demande également à la cour de condamner la commune de Baillargues à l'indemniser des débours médicaux exposés au profit de Mme A... à hauteur de 147 461, 98 euros, sous réserve d'autres paiements à venir, et à lui verser la somme de 1 191 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale .

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :

4. Mme A..., dans sa demande préalable d'indemnisation du 16 juillet 2020, invoquait la responsabilité pour faute de la commune à la fois dans l'organisation de la manifestation et dans l'insuffisance des mesures de police prises par le maire pour assurer la sécurité des spectateurs. Dans ces conditions, et en tout état de cause, la seule circonstance que Mme A... n'ait pas expressément mentionné, dans sa demande préalable, l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, qu'elle a invoqué ensuite dans sa requête, n'a pas fait obstacle à la liaison du contentieux et est, par suite, sans incidence sur la recevabilité de ses conclusions indemnitaires.

Sur la responsabilité de la commune de Baillargues :

5. Il résulte de l'instruction que le maire de Baillargues a, le 15 février 2018, adressé aux services de l'Etat une déclaration préalable mentionnant que la commune organiserait une exposition et un rassemblement d'animaux le 18 mars 2018 dans le cadre d'une manifestation intitulée " Labour est dans le pré ". En vue de permettre cette manifestation, le maire a pris un arrêté du 3 mars 2018 interdisant la circulation le 18 mars 2018 de 6h00 à 20h00 " de la rue du contrôle allant du rond-point du collège jusqu'au pont de Saint-Brès ", cet arrêté faisant en outre état de " l'organisation d'un concours de Labour par la ville ". Dans ces conditions, la commune de Baillargues doit être regardée comme organisatrice de la manifestation, alors même que des associations participant au festival ont contribué sur place à la disposition et à l'attelage des animaux. Dans ces conditions, Mme A... est en droit de rechercher la responsabilité de la commune en sa qualité d'organisatrice de la manifestation, ainsi qu'au titre de l'exercice par le maire de ses pouvoirs de police municipale. Dès lors, contrairement à ce que fait valoir la commune de Baillargues en défense, Mme A... est en droit de diriger ses conclusions contre cette dernière.

Sur la responsabilité pour faute :

6. Il résulte de l'instruction que les blessures subies par Mme A..., qui s'était rendue à la manifestation du 18 mars 2018 en qualité de simple spectatrice, ont pour cause la chute brutale de barrières mobiles à la suite de l'emballement de deux chevaux de trait attachés à ces barrières et se trouvant dans une enceinte tenue par un maréchal-ferrant. Il ressort du plan de la manifestation que la zone dans laquelle se trouvait Mme A... était, sans autre restriction que celle tenant à la pose au sol de simples barrières mobiles, entièrement ouverte au public. Dans ces conditions, en ouvrant cette zone au public sans restriction et en ne veillant pas, en particulier, à ce que des barrières spécifiques, en mesure de résister au poids important d'animaux tels que des chevaux de trait, soient installées pour garantir la sécurité des spectateurs, la commune a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif. Toutefois, il résulte de l'instruction, et il n'est pas contesté, que les chevaux de trait se sont emballés après avoir reçu des cailloux projetés par des enfants. Par ailleurs, ces chevaux étaient sous la garde du maréchal-ferrant, exposant au sein de la manifestation, et responsable à ce titre de ces animaux. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, la commune doit être tenue pour responsable de l'accident survenu à Mme A... à hauteur de 30 % de ses conséquences dommageables.

7. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que Mme A..., qui assistait à la manifestation, ainsi qu'il a été dit, en qualité de simple spectatrice, aurait commis une faute de nature à exonérer, même partiellement, la commune de sa responsabilité. Une telle faute ne saurait se déduire de la seule circonstance selon laquelle Mme A... exerçait la profession de vétérinaire à la date de l'accident.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'engagement de la responsabilité de la commune de Baillargues au titre de l'accident dont elle a été victime le 18 mars 2018 et à en demander l'annulation.

Sur la réparation des préjudices :

9. Il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise contradictoire rendu le 6 juin 2019 sur demande du tribunal de grande instance de Montpellier, que Mme A... a été victime, lors de l'accident du 18 mars 2018, d'une fracture non déplacée du plateau tibial externe en zone non portante, d'une entorse de " grade III " du ligament latéral interne, d'un arrachement du bord postérieur du plateau tibial externe et d'un arrachement du ligament collatéral interne du genou droit. La date de consolidation de ces blessures a été fixée par l'expert au 27 décembre 2018.

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux avant consolidation :

S'agissant des dépenses de santé exposées par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche :

10. La caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche, agissant comme mandataire de gestion de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, justifie, avant la consolidation des blessures de Mme A..., de dépenses de santé pour la somme totale de 4 458,60 euros. La caisse primaire d'assurance de l'Ardèche est donc fondée à demander que la commune de Baillargues lui verse la somme précitée de 4 458,60 euros.

S'agissant des dépenses de santé laissées à la charge de Mme A... :

11. La période à prendre en compte est la période du 18 mars 2018, date de l'accident survenu à Mme A..., au 27 décembre 2018, date de la consolidation de ses blessures.

12. En premier lieu, si Mme A... demande à être indemnisée à hauteur de la somme totale de 233 euros qui aurait été laissée à sa charge, au titre de franchises sur des dépenses de santé, elle n'a pas donné suite à la demande qui lui a été adressée le 3 mars 2025 de produire un document récapitulatif des nombreux feuillets de la caisse primaire d'assurance-maladie qu'elle a produits et qui auraient permis de déterminer ce reste à charge. Dans ces conditions, ses conclusions présentées à ce titre doivent être rejetées.

13. En deuxième lieu, Mme A... justifie d'un reste à sa charge de 505 euros au titre des franchises médicales consécutives à son hospitalisation à la clinique Bonnefon d'Alès, ainsi que le confirme le document établi par cet établissement le 24 avril 2018. Mme A... est donc fondée sur ce point à se prévaloir d'un préjudice indemnisable à hauteur de la somme de 505 euros.

14. En troisième lieu, si Mme A... demande à être indemnisée à hauteur de 100 euros au titre de dépenses effectuées en pharmacie, il ne résulte pas des pièces qu'elle produit à cet égard, à savoir des commandes de gélules effectuées par elle-même sur internet, pour des montants respectifs de 53,98 et 58,77 euros, que de telles commandes seraient en lien direct avec son accident.

S'agissant des pertes de gains professionnels actuels :

15. La période à prendre en compte débute le 18 mars 2018, date à laquelle Mme A..., qui exerçait la profession de vétérinaire, a été placée en arrêt de travail jusqu'à la date de consolidation de ses blessures, intervenue ainsi qu'il a été dit, le 27 décembre 2018. Il résulte de l'attestation de perte de salaire net établie le 4 avril 2019 par l'employeur de Mme A... que celle-ci a subi au cours de la période précitée une perte de salaire de 7 647,13 euros. Il résulte toutefois de l'instruction que la caisse primaire d'assurance maladie a versé à Mme A..., pour la période du 22 mars au 27 décembre 2018, soit pendant 275 jours, des indemnités journalières d'un montant de 44,34 euros, soit la somme de 12 193,50 euros, laquelle couvre la perte de salaires subie par l'intéressée mentionnée dans l'attestation de son employeur du 5 avril 2019. Dans ces conditions, Mme A... doit être regardée comme ayant été remplie dans ses droits au titre des pertes de gains professionnels pour la période du 22 mars au 27 décembre 2018. En revanche, la commune de Baillargues doit être condamnée à verser la somme de 12 193,50 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche, agissant en qualité de mandataire de gestion de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, au titre de la réparation du préjudice subi par l'assurée.

S'agissant des frais divers :

16. En premier lieu, si Mme A... demande à être indemnisée des frais de débroussaillement de sa propriété à hauteur de 500 euros, et produit à cette fin une facture établie le 19 novembre 2018, le lien entre cette dépense et l'accident du 18 mars 2018 n'est aucunement établi au dossier.

17. En deuxième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que l'augmentation des rémunérations octroyées par Mme A... à son aide-ménagère après l'accident du 18 mars 2018 aurait eu un lien direct avec celui-ci. Dans ces conditions, les conclusions de Mme A... tendant au paiement d'une somme de 1 097,38 euros au titre de suppléments de paiement de salaires et de charges sociales ne peuvent être que rejetées.

18. En troisième lieu, Mme A... ne justifie pas de la nécessité dans laquelle elle se serait trouvée de recourir à l'assistance d'un médecin-conseil au cours des opérations d'expertise. Dans ces conditions, les conclusions présentées par Mme A... tendant à la condamnation de la commune de Baillargues à lui verser la somme de 2 280 euros au titre de sommes versées à un médecin désigné comme spécialisé dans les expertises médicales doivent être rejetées.

19. En quatrième lieu, dans les circonstances de l'espèce, il résulte de l'instruction qu'il a été nécessaire de faire réaliser à la jument de Mme A..., qui pratique l'équitation, des exercices d'adaptation à une cavalière souffrant d'une mobilité réduite. Mme A... justifie avoir exposé à ce titre une somme de 800 euros qu'il y a lieu de mettre à la charge de la commune.

20. En cinquième lieu, Mme A... n'établit pas que la somme de 68,85 euros correspondant à des commandes de matériel d'impression dont la destination n'est pas connue, devrait être mise à la charge de la commune de Baillargues à raison de l'accident en litige. Ces conclusions doivent, dès lors, être rejetées.

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux après consolidation :

S'agissant des dépenses de santé futures :

21. Le rapport établi par l'expert désigné par le tribunal de grande instance ne prévoit pas que Mme A... serait amenée à exposer à l'avenir, du fait même de son accident, des dépenses médicales. En particulier, il ne résulte pas de l'instruction que Mme A... serait contrainte de subir une pose de prothèse de genou. Ses conclusions tendant à la condamnation de la commune de Baillargues à lui verser la somme totale de 5 025 euros, au titre des dépenses de santé futures, doivent dès lors être rejetées.

S'agissant des pertes de gains professionnels futurs :

22. Mme A... demande la condamnation de la commune de Baillargues à l'indemniser des pertes de gains professionnels postérieurs à la consolidation. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de son accident, elle a été licenciée de son emploi de vétérinaire, le 12 mars 2019, pour inaptitude physique.

23. Pour la période comprise entre le 1er janvier et le 12 mars 2019, il résulte de l'instruction que la caisse primaire d'assurance maladie a versé à Mme A... des indemnités journalières d'un montant de 44,34 euros, soit la somme de 3 103, 08 euros. Et il ne résulte pas de l'instruction que Mme A... n'aurait pas été ainsi remplie dans ses droits au titre des pertes de gains professionnels subis au cours de la période précitée. En revanche, la commune de Baillargues doit être condamnée à verser la somme de 3 103, 08 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche, agissant en qualité de mandataire de gestion de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône.

24. Il ne résulte pas de l'instruction et notamment du rapport d'expertise, que l'accident survenu à Mme A... lui interdit toute perspective de reprendre, même partiellement, une activité professionnelle. Mme A... ne produit, de son côté, aucun document médical en ce sens alors d'ailleurs qu'il résulte de l'instruction que Mme A... s'est inscrite à Pôle emploi pour la période postérieure au 12 mars 2019. Dans ces conditions, ses conclusions tendant à la condamnation de la commune de Baillargues au titre des préjudices postérieurs à la période du 12 mars 2019 doivent être rejetées. Il en résulte que les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie tendant à la réparation du même chef de préjudice doivent être également rejetées.

S'agissant de l'incidence professionnelle :

25. Ainsi qu'il a été dit, il ne résulte pas de l'instruction que Mme A... serait inapte à la reprise de toute activité professionnelle. Pour autant, il est constant qu'à la suite de son accident, Mme A... a été licenciée de son emploi de vétérinaire pour inaptitude physique. Il résulte néanmoins de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, qu'en raison de sa blessure au genou, Mme A... présente " une gêne à la station debout prolongée et à la marche en terrain accidenté " à l'origine d'un déficit fonctionnel permanent que l'expert a évalué à 13 %. Dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu de ce que Mme A... était âgée de 56 ans à la date de la consolidation de sa blessure, il sera fait une juste appréciation de son préjudice subi au titre de l'incidence professionnelle en l'évaluant à la somme de 10 000 euros à mettre à la charge de la commune de Baillargues.

S'agissant des frais divers :

26. Ainsi qu'il a déjà été dit, Mme A... n'établit pas qu'avant son accident, elle assurait elle-même le débroussaillement de sa propriété. Dans ces conditions, ses conclusions tendant à la condamnation de la commune de Baillargues à lui verser une somme annuelle de 500 euros sur une période de huit ans, soit 4 000 euros, au titre des frais qu'elle sera amenée à exposer pour financer ses opérations d'entretien, en réparation du préjudice inhérent au coût futur du débroussaillement, doivent être rejetées.

En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux :

S'agissant des préjudices extra-patrimoniaux temporaires :

27. Il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise du 4 décembre 2019, que Mme A... a subi, entre le 18 mars et le 2 avril 2018, une incapacité temporaire partielle de 50 %, puis une incapacité totale du 3 au 8 avril 2018. Elle a ensuite subi, entre les 9 avril et 10 juillet 2018, une incapacité temporaire partielle de 50 %, puis de 30 % jusqu'au 27 décembre 2018, date de consolidation de ses blessures. Il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en condamnant la commune de Baillargues à réparer le déficit fonctionnel temporaire subi par Mme A... à hauteur de la somme totale de 3 306 euros.

28. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que les souffrances endurées par Mme A... doivent être évaluées à 3,5 /7. Il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en condamnant la commune de Baillargues à verser à Mme A... la somme de 6 000 euros au titre de ce chef de préjudice.

29. Le rapport d'expertise a évalué le préjudice esthétique temporaire subi par Mme A... pendant une période de deux mois jusqu'à la consolidation de ses blessures à 2, 5/7. Il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en condamnant la commune de Baillargues à verser à Mme A... la somme de 500 euros au titre de ce chef de préjudice.

S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux permanents :

30. Il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise, que Mme A... reste atteinte d'un déficit fonctionnel permanent évalué à 13 %, étant précisé qu'elle était âgée de 56 ans au 27 décembre 2018, date de la consolidation de ses blessures. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par Mme A... au titre du déficit fonctionnel permanent en condamnant la commune de Baillargues à lui verser la somme de 18 000 euros de dommages et intérêts.

31. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que le genou droit de Mme A... présente des formes inesthétiques ainsi que des cicatrices liées à son opération chirurgicale. Ce préjudice esthétique permanent est évalué par l'expert à 2,5/7. Il en sera fait une juste appréciation en condamnant la commune de Baillargues à verser à Mme A... la somme de 3 000 euros au titre de ce chef de préjudice.

32. Il résulte de l'instruction que Mme A... pratiquait régulièrement, avant son accident, des activités d'équitation et d'attelage. L'expert relève que Mme A... présente, du fait des séquelles de son accident, une contre-indication à l'équitation, aux activités d'attelage ainsi qu'aux activités physiques nécessitant un appui monopodal. Il sera fait une juste appréciation du préjudice d'agrément subi par Mme A... en condamnant la commune de Baillargues à verser à cette dernière la somme de 6 000 euros au titre de ce chef de préjudice.

33. Il ne résulte pas de l'instruction que l'accident litigieux aurait causé à Mme A... un préjudice sexuel, lequel a en outre été écarté par l'expert. Par suite, les conclusions de Mme A... tendant à la réparation d'un tel préjudice doivent être écartées.

34. Mme A... demande la condamnation de la commune de Baillargues à lui verser la somme de 10 000 euros au titre du préjudice moral sans toutefois le caractériser alors qu'elle obtient déjà réparation pour son préjudice d'agrément et, au demeurant, pour son déficit fonctionnel permanent. Dans ces conditions, ces conclusions ne peuvent être que rejetées.

35. Il résulte de tout ce qui précède que les préjudices subis par Mme A... s'élèvent à la somme totale de 48 111 euros. Compte tenu, ainsi qu'il est dit au point 6 du présent arrêt, de ce que la commune de Baillargues doit être tenue pour responsable à hauteur de 30 % du montant des conséquences dommageables de l'accident, elle doit être condamnée à verser à Mme A... la somme de 14 443,30 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche (agissant en qualité de mandataire de gestion de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône) :

36. Aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. / Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après. / Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel. / Conformément à l'article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée. / Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice (...) ".

37. Les droits de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche sont fixés aux sommes de 4 458,60 euros, de 12 193,50 euros et de 3 103,08 euros eu égard à ce qui a été dit aux points 10, 15 et 23 ci-dessus. Compte tenu du partage de responsabilité retenu au point 6 du présent arrêt, il y a lieu de condamner la commune de Baillargues à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche, agissant en qualité de mandataire de gestion de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, la somme de 5 926,50 euros.

En ce qui concerne l'indemnité forfaitaire de gestion :

38. En vertu des dispositions du neuvième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie en contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement des prestations servies à la victime. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 18 décembre 2023 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale pour l'année 2024 : " Les montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 118 € et 1 191 € au titre des remboursements effectués au cours de l'année 2024 ".

39. En application des dispositions précitées, il y a lieu, compte tenu de la part de responsabilité de 30 % incombant à la commune de Baillargues, de mettre à la charge de la commune la somme de 357,30 euros à la caisse primaire d'assurance maladie au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Sur les frais liés au litige :

40. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Baillargues demande sur leur fondement. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Baillargues au bénéfice de Mme A... la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et la même somme de 1 000 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche agissant en qualité de mandataire de gestion de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 10 octobre 2023 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : La commune de Baillargues versera à Mme A... la somme de 14 443,30 euros à titre de dommages et intérêts.

Article 3 : La commune de Baillargues versera à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche, agissant en qualité de mandataire de gestion de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, la somme de 5 926,50 euros, ainsi que la somme de 357,30 euros sur le fondement des articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale.

Article 4 : La commune de Baillargues versera la somme de 1 000 euros à Mme A... et la somme de 1 000 euros à la caisse primaire d'assurance-maladie de l'Ardèche, agissant en qualité de mandataire de gestion de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., à la commune de Baillargues, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche et à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2025 à laquelle siégeaient :

M. Faïck, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 avril 2025.

Le rapporteur

P. Bentolila

Le président,

F. Faïck

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23TL02872 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL02872
Date de la décision : 15/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Police - Police générale.

Travaux publics - Différentes catégories de dommages - Dommages sur les voies publiques terrestres - Défaut d'entretien normal.


Composition du Tribunal
Président : M. Faïck
Rapporteur ?: M. Pierre Bentolila
Rapporteur public ?: Mme Perrin
Avocat(s) : SELARL LEXAVOUÉ NÎMES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-15;23tl02872 ?
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