Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La chambre de commerce et d'industrie de Bayonne Pays basque a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner la société Ets Benninger 64, prise en la personne de son liquidateur la société Guérin et associés, et le bureau d'études techniques Assistance et maîtrise technique (AMT) à lui verser, à titre principal, la somme de 1 772 770,84 euros toutes taxes comprises (TTC), au titre des travaux de réfection intégrale de l'installation de chauffage climatisation VMC et de remplacement des centrales de traitement d'air du bâtiment Estia 1 sis à la technopole Izarbel à Bidart.
Par un jugement n° 1901154 du 13 juillet 2022, le tribunal administratif de Pau a condamné in solidum la société Guérin et associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ets Benninger 64, et la société Home technologie management, venant aux droits de la société AMT, à verser à la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne Pays basque une somme globale de 355 342,80 euros TTC au titre des préjudices subis du fait des désordres affectant les installations de chauffage, de climatisation et de ventilation mécanique contrôlée du bâtiment Estia 1 à Bidart, avec intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2019 et capitalisation des intérêts à partir du 20 mai 2020, a mis à la charge in solidum de ces société les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme totale de 39 612,78 euros TTC ainsi qu'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a mis à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne Pays basque une somme de 1 200 euros au titre des frais d'instance exposés par la société Inter énergies.
Procédure devant la cour :
I) Sous le n° 22BX02449, par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 septembre 2022 et 28 septembre 2023, la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne Pays basque, représentée par la société Pécassou-Camebrac, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de porter la somme que la société Guérin et associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ets Benninger 64, et la société Home technologie management ont été condamnées in solidum à lui verser au montant total de 1 216 807,52 euros TTC, et d'indexer cette somme selon l'indice INSEE du coût de la construction ;
2°) de réformer dans cette mesure le jugement du tribunal administratif de Pau du 13 juillet 2022 ;
3°) de mettre à la charge, in solidum ou séparément, de la société Guérin et associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ets Benninger 64, et de la société Home technologie management une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a fait une insuffisante évaluation du coût des travaux de reprise et de maitrise d'œuvre ; la solution préconisée par l'expert ne permettait pas de mettre fin de manière définitive aux désordres et n'était pas réalisable ; s'agissant d'un marché public, seule une reprise en totalité de l'installation était envisageable ; l'expert avait préconisé le recours aux services d'un maître d'œuvre au vu de la complexité de l'installation ; il s'est avéré, lors de la réalisation des travaux de reprise, que les conclusions de l'expert étaient incomplètes sur la nature des travaux permettant de mettre fin aux désordres et sur leur montant ;
- le coût total de la maîtrise d'œuvre s'est élevé à 69 845,72 euros TTC ; les coûts des missions d'assistance à la maîtrise d'ouvrage se sont élevés à 2 930 euros TTC s'agissant de la mission de contrôle technique et à 2 764,80 euros TTC s'agissant de la mission coordination sécurité et protection de la santé ; elle a conclu avec la société Bobion et Joanin un marché de remplacement partiel des installations de chauffage, ventilation et climatisation pour un montant initial de 1 510 956,73 euros TTC ; durant les travaux, il s'est avéré nécessaire de réaliser de nouvelles dépenses, que l'expert n'avait pas chiffrées, liées à la reprise des faux-plafonds, au remplacement des réseaux horizontaux de chauffage qui présentaient des fuites récurrentes, et aux travaux rendus nécessaires pour le passage des gaines ;
- elle produit un rapport d'expertise permettant d'avoir une analyse technique du coût des travaux réalisés et effectivement nécessaires à la réparation des désordres, poste par poste, dont il résulte que certains postes ont effectivement été oubliés ou sous-évalués par l'expert judiciaire et que certains travaux n'étaient pas absolument nécessaires à la remise en état de l'installation ; sur la base de cette analyse technique, elle établit que son préjudice lié aux travaux de reprise de l'installation s'élève, pour des travaux de réfection, à la somme de 888 160,78euros TTC, pour les travaux de reprise des faux-plafonds à 107 642,53 euros TTC, et pour les frais supplémentaires à 56 005 euros TTC, soit une somme totale de 1 051 808,31 euros TTC ;
- l'indemnisation de son préjudice de jouissance doit être portée à 165 000 euros et il convient de lui allouer une somme de 1 038,40 euros TTC au titre de son préjudice matériel.
Par un mémoire enregistré le 13 novembre 2023, la société Home technologie management, représentée par Me Tortigue, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne d'une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et demande à la cour, par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a retenu un préjudice de jouissance de la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne Pays basque.
Elle soutient que :
- il n'est pas établi que la solution retenue par l'expert judiciaire ne permettait pas de remédier aux désordres en cause ; le régime des marchés publics n'est pas exclusif de prestations préparatoires ; un seul appel d'offre ne suffit pas à démontrer la prétendue inefficience de la solution préparatoire validée par l'expert judiciaire ;
- l'expertise produite par la chambre de commerce et d'industrie, qui ne revêt pas un caractère contradictoire, ne remet pas valablement en cause les conclusions de l'expertise judiciaire ;
- la chambre de commerce et d'industrie n'a pas procédé à une maintenance adéquate de l'installation dans l'attente d'une solution de réparation pérenne ; son préjudice de jouissance n'est pas établi ; c'est ainsi à tort que le tribunal l'a indemnisée d'un tel préjudice.
Par une ordonnance du 13 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 15 décembre 2023.
II) Sous le n° 23BX02465, par une requête enregistrée le 15 septembre 2023, la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne Pays basque, représentée par la société Pécassou-Camebrac, demande à la cour, sur le fondement de l'article R. 621-1 du code de justice administrative, d'ordonner une expertise aux fins, notamment, d'indiquer si les travaux de réfection de l'installation de chauffage, ventilation et climatisation du bâtiment Estia 1 à Bidart étaient indispensables à la reprise des désordres affectant cette installation, de préciser si une reprise de ces désordres conforme aux préconisations de l'expertise judiciaire était techniquement réalisable et d'apporter tout élément permettant de chiffrer le préjudice subi à raison des travaux de réparation de ladite installation.
Elle soutient que cette expertise complémentaire est utile à la résolution du litige.
Par une ordonnance du 9 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 30 avril 2024.
Un mémoire a été enregistré pour la société Home technologie management le 9 octobre 2024, postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,
- les conclusions de M. Julien Dufour, rapporteur public,
- les observations de Me Logeais, représentant la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne Pays basque,
- et les observations de Me Tortigue, représentant la société Home technologie management.
Considérant ce qui suit :
1. Par un marché conclu le 3 mai 2006, la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Bayonne Pays basque a confié à la société Ets Benninger 64 la réalisation des travaux de réhabilitation des installations de chauffage-ventilation-climatisation du bâtiment Estia 1 du centre technopole Irzabel à Bidart, qui héberge un établissement d'enseignement supérieur. La maîtrise d'œuvre de ces travaux a été confiée à la société Assistance et maîtrise technique (AMT). La réception des travaux a été prononcée le 20 novembre 2008. Postérieurement à cette réception, des désordres consistant en la rupture fréquente des raccords, entrainant des fuites d'eau dans le bâtiment, ont été constatés. Par un jugement du 24 mars 2016, le tribunal administratif de Pau a condamné la société Ets Benninger 64, sur le fondement de la garantie décennale, à verser à la CCI de Bayonne la somme de 22 375,20 euros toutes taxes comprises (TTC) en réparation des préjudices liés à ces désordres.
2. A la suite de l'apparition de désordres affectant le fonctionnement du système de chauffage et de climatisation du bâtiment, la CCI de Bayonne Pays basque a, par une requête enregistrée le 3 juillet 2014, demandé au juge des référés du tribunal administratif de Pau d'ordonner une expertise aux fins de déterminer l'origine de ces désordres et de décrire les travaux propres à y remédier. Le juge des référés a prescrit l'expertise sollicitée. Le rapport d'expertise a été remis le 15 janvier 2018. La CCI a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner la société Ets Benninger 64, prise en la personne de son liquidateur la société Guérin et associés, et la société AMT à lui verser la somme de 1 772 770,84 euros TTC au titre des travaux de réfection de l'installation de chauffage- climatisation-ventilation du bâtiment Estia 1 de la technopole Izarbel. Par un jugement du 13 juillet 2022, le tribunal a condamné in solidum la société Guérin et associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ets Benninger 64, et la société Home technologie management, venant aux droits de la société AMT, sur le fondement de la garantie décennale, à verser à la CCI de Bayonne Pays basque une somme globale de 355 342,80 euros TTC en réparation de ses préjudices, avec intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2019 et capitalisation des intérêts à partir du 20 mai 2020, et a mis à la charge in solidum de ces sociétés les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme totale de 39 612,78 euros TTC.
3. Par la requête enregistrée sous le n° 22BX02449, la CCI de Bayonne Pays Basque demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures, de porter la somme que la société Guérin et associés, liquidateur judiciaire de la société Ets Benninger 64, et la société Home technologie management ont été condamnées in solidum à lui verser au montant total de 1 216 807,52 euros TTC et d'indexer cette somme sur l'indice INSEE du coût de la construction. Par la voie de l'appel incident, la société Home technologie management demande à la cour de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a retenu un préjudice de jouissance de la CCI de Bayonne Pays Basque. Par la requête enregistrée sous le n° 23BX02465, la CCI de Bayonne Pays Basque demande à la cour, sur le fondement de l'article R. 621-1 du code de justice administrative, d'ordonner une expertise aux fins, notamment, d'indiquer si les travaux de réfection de l'installation de chauffage, ventilation et climatisation du bâtiment Estia 1 à Bidart étaient indispensables à la reprise des désordres affectant cette installation, de préciser si une reprise de ces désordres conforme aux préconisation de l'expertise judiciaire était techniquement réalisable et d'apporter tout élément permettant de chiffrer le préjudice subi à raison des travaux de réparation de ladite installation. Il y a lieu de joindre ces deux requêtes pour y statuer par un seul arrêt.
Sur l'évaluation des préjudices de la CCI de Bayonne Pays Basque :
4. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise judiciaire, que les installations de chauffage, de climatisation et de ventilation mécanique contrôlée (VMC) du bâtiment Estia 1 présentaient divers dysfonctionnements faisant obstacle au maintien des conditions de confort nécessaires à l'utilisation des locaux. Ces dysfonctionnements avaient pour origine, selon l'expert judiciaire, la défaillance d'organes et composants des ventilo-convecteurs et des centrales de traitement d'air traitant l'atrium et les amphithéâtres " Mari " et " Suggar ", un défaut de raccordement des vannes de régulation sur les ventilo-convecteurs, un manque d'équilibrage des réseaux aérauliques et hydrauliques, un sous-dimensionnement des vannes de régulation du réseau d'eau glacée, des défauts affectant la gaine textile de l'atrium, l'emploi d'équipements de diffusion inadaptés, l'absence d'accessoires de réglage sur l'ensemble de la VMC double flux et des réseaux " non rincés et chargés " et, pour partie, non calorifugés. L'expert judiciaire a préconisé, aux fins de remédier aux désordres, de réaliser des travaux de réparation consistant à procéder au remplacement de l'ensemble des organes et composants défectueux, au remplacement des deux centrales de traitement d'air traitant l'atrium, à la modification de la régulation des amphithéâtres " Mari " et " Suggar ", au changement des vannes trois voies du réseau glacée des ventilo-convecteurs, à l'équilibrage des réseaux hydrauliques eau chaude et eau glacée, au remplacement de la gaine textile de l'atrium, à la réparation de la gestion technique centralisée (GTC) et à la réparation ou au remplacement du groupe froid. L'ensemble de ces travaux de réfection, incluant le changement du groupe froid, a été chiffré au montant total de 304 500 euros TTC.
En ce qui concerne le coût des travaux nécessaires à la reprise des désordres :
5. Le montant du préjudice dont le maître d'ouvrage est fondé à demander la réparation aux constructeurs à raison des désordres affectant l'immeuble qu'ils ont réalisé correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection, sans que l'indemnisation qui lui est allouée à ce titre puisse dépasser le montant des travaux strictement nécessaires pour rendre l'ouvrage conforme à sa destination et à ses caractéristiques contractuelles en usant des procédés de remise en état les moins onéreux possibles.
6. En l'espèce, postérieurement au dépôt du rapport d'expertise judiciaire, le 15 janvier 2018, la CCI de Bayonne Pays basque a conclu le 24 juillet 2020 avec la société Altéréa ingénierie un marché de maîtrise d'œuvre relatif à la réfection du système de climatisation, de ventilation et de chauffage (CVC) du bâtiment Estia 1. Au vu du rapport de la société Altéréa ingénierie, la CCI a lancé un appel d'offres sur la base d'un scénario " 1 " de remplacement complet des installations CVC et d'un scénario " 2 " de remplacement partiel de ces installations. La société Bobion et Joanin, seule candidate, a chiffré le scénario " 1 " à 2 156 149,26 euros et le scénario " 2 " à 1 547 047,28 euros TTC. La CCI a opté pour le scénario " 2 " et confié à la société Bobion et Joanin la réalisation des travaux de réfection de l'installation CVC. Ces travaux, qui ont démarré en 2021, ont notablement excédé la solution de réparation préconisée par l'expert, consistant notamment au remplacement complet, outre du groupe froid, de l'ensemble des ventilo-convecteurs et des grilles de soufflage et de rejet des condensats, des centrales de traitement d'air des amphithéâtres " Mari " et " Suggar ", ainsi que de la VMC double flux de la GTC. La CCI soutient que les travaux réalisés par la société Bobion et Joanin étaient indispensables pour remédier aux désordres à raison desquels la responsabilité décennale des sociétés Ets Benninger 64 et AMT est engagée. Sur la base d'une nouvelle expertise non contradictoire du 21 juillet 2023, sur laquelle la cour peut régulièrement s'appuyer à titre d'élément d'information en ce qui concerne les éléments de pur fait non contestés par les parties ou qui sont corroborés par d'autres éléments du dossier, la CCI demande de rehausser l'indemnité de 304 500 euros, correspondant au chiffrage de l'expert judiciaire, qui lui a été allouée par le tribunal au titre des travaux nécessaires à la reprise des désordres.
S'agissant du groupe froid :
7. Il résulte de l'instruction que l'expert judiciaire a préconisé la réparation du groupe froid ou, après audit, son remplacement. L'étude préalable réalisée en 2021 par la société Altéréa Ingénierie a révélé que cet équipement, vétuste et dysfonctionnel, devait être remplacé. Si l'expert judiciaire avait chiffré à 77 000 euros TTC le coût de remplacement du groupe froid, ces travaux se sont en réalité élevés à la somme totale de 167 657,32 euros HT, soit 201'188,78 euros TTC. L'expert diligenté par la CCI de Bayonne Pays basque explique que cette différence de montant est justifiée par l'adjonction d'un ballon tampon, requis pas les règles de l'art, le remplacement des pompes de circulation, indispensable à la mise en œuvre pérenne du groupe froid, et par la mise en place d'une double alimentation électrique, une seule alimentation étant insuffisamment puissante. Dans ces conditions, il y a lieu d'évaluer le coût de remplacement du groupe froid à la somme de 201'188,78 euros TTC.
8. Il résulte en outre de l'instruction que le remplacement du groupe froid, situé à l'extérieur du bâtiment, impliquait l'abattage d'un peuplier planté contre cet équipement ainsi que la coupe au pied des arbustes gênant pour le passage des gaines. En revanche, les travaux d'élagage d'un albizia, destinés à éviter les chutes de feuilles dans l'installation, relèvent de travaux d'entretien et ne sont donc pas directement en lien avec la réalisation des travaux de remplacement du groupe froid. Sur la base des factures versées au dossier, il y a lieu d'allouer à la CCI de Bayonne Pays basque, au titre des travaux paysagers nécessités par la reprise des désordres litigieux, une somme de 816,60 euros TTC.
S'agissant de la GTC :
9. Si l'expert judiciaire a préconisé une réparation de la GTC, évaluée à 13 800 euros TTC, l'expert diligenté par la CCI indique toutefois que l'appareil était dysfonctionnel depuis sa pose, et que l'adjonction d'équipements nouveaux sur des automates d'ancienne génération est complexe, voire impossible, en raison de l'évolution rapide des technologies et de l'obsolescence de certains équipements de régulation, de sorte qu'il était indispensable de procéder au remplacement de cet équipement. Dans ces conditions, la CCI établit le caractère nécessaire des travaux de remplacement de la GTC. Il y a lieu de lui allouer à ce titre une somme de 46 088,85 euros TTC, correspondant au coût exposé pour la réalisation de ces travaux.
S'agissant de la gaine textile de l'atrium :
10. Conformément aux préconisations de l'expert judiciaire, il y a lieu d'allouer à la CCI de Bayonne Pays basque une somme de 33 200 euros TTC en réparation du préjudice tenant au coût de remplacement de la gaine textile de l'atrium du bâtiment Estia 1.
S'agissant de la VMC :
11. Aux fins de remédier aux désordres affectant la VMC double flux, l'expert judiciaire a préconisé une solution réparatoire consistant à mettre en place des registres de réglage. Il n'est pas établi par les éléments de l'instruction que cette solution réparatoire aurait été insuffisante pour corriger les dysfonctionnements constatés. Dans ces conditions, il y a lieu d'allouer à la CCI une somme de 26 400 euros TTC correspondant à l'évaluation, faite par l'expert judiciaire, du coût de la solution réparatoire préconisée.
S'agissant des centrales de traitement d'air :
12. En premier lieu, compte tenu des désordres affectant les deux centrales de traitement d'air de l'atrium, l'expert judiciaire a préconisé leur remplacement. La CCI a fait procéder à des travaux réparatoires sur ces équipements, et il ne résulte pas de l'instruction que ces travaux ne suffiraient pas à remédier aux désordres constatés. Dès lors, il y a lieu lui allouer à ce titre une somme de 2 432,75 euros TTC, correspondant au coût exposé pour la réalisation de ces travaux.
13. En deuxième lieu, alors que l'expert judiciaire avait préconisé la régulation des amphithéâtres " Mari " et " Suggar ", en chiffrant les travaux correspondants à 8 500 euros TTC, il a été procédé au remplacement des centrales de traitement d'air dédiées à ces amphithéâtres. L'expert diligenté par la CCI de Bayonne Pays basque indique, sur ce point, que le débit de ces équipements était insuffisant pour rafraîchir les amphithéâtres. Il ajoute que l'expert judiciaire n'a pas relevé d'insuffisance de rafraîchissement de ces deux amphithéâtres car les enregistrements de température ont été réalisés sur d'autres locaux ou sur des périodes au cours desquelles les températures hivernale et estivale n'étaient pas significatives. Toutefois, il n'est fait état d'aucune mesure de température complémentaire sur les amphithéâtres " Suggar " et " Mari " qui aurait révélé, après l'expertise judiciaire, une insuffisance de rafraichissement de ces locaux. La nécessité de remplacer ces deux centrales n'est ainsi pas suffisamment établie. Par suite, il y a lieu de retenir la solution préconisée par l'expert judiciaire et d'allouer en conséquence à la CCI de Bayonne Pays Basque une somme de 8 500 euros TTC.
14. Enfin, il résulte de l'instruction qu'il a été décidé, au cours des travaux de réfection des installations thermiques du bâtiment Estia 1, d'installer une nouvelle centrale de traitement d'air spécifiquement dédiée à l'amphithéâtre " Sorgin ". L'expert diligenté par la CCI de Bayonne Pays basque explique qu'au cours de la phase études du marché de réfection, il a été constaté que l'amphithéâtre " Sorgin " était traité par la centrale de l'amphithéâtre " Mari ", au bénéfice d'un piquage situé dans un vide sanitaire. Il indique qu'en raison de cette alimentation par piquage, la température de l'amphithéâtre " Sorgin " variait en fonction des conditions d'occupation de l'amphithéâtre " Mari ". Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que l'inconfort occasionné par le mode d'alimentation de l'amphithéâtre " Sorgin " aurait été tel qu'il aurait rendu les locaux impropres à leur destination. Ce désordre ne revêtant ainsi pas un caractère décennal, la CCI de Bayonne Pays basque n'est pas fondée à solliciter la condamnation des sociétés défenderesses à lui verser la somme de 23 555,79 euros correspondant au coût de mise en place de cette nouvelle centrale.
S'agissant des réseaux :
15. En premier lieu, l'expert judiciaire ayant relevé que les réseaux étaient non rincés et chargés et n'étaient pas entièrement calorifugés, la CCI justifie suffisamment de la nécessité de réaliser, avant le démarrage des travaux, une étude métallographique de ces réseaux. Elle est ainsi fondée à solliciter le versement à son profit de la somme de 7 956 euros TTC correspondant au coût du diagnostic facturé par la société Asterm.
16. D'autre part, la CCI soutient que la réfection des installations thermiques du bâtiment nécessitait le remplacement intégral des réseaux d'eau chaude et d'eau glacée. Toutefois, contrairement à ce qu'elle soutient, les conclusions de l'étude métallographique ci-dessus mentionnée, réalisée en 2021, ne comportent pas une telle recommandation. En outre, l'expert diligenté par la CCI indique qu'il est probable que les réseaux aient continué à se dégrader entre janvier 2018, date du dépôt du rapport d'expertise judicaire, et 2021. Dans ces conditions, la nécessité de procéder au remplacement complet de l'ensemble des réseaux n'est pas établie. Il convient dès lors d'allouer à la CCI de Bayonne Pays Basque la somme correspondant au coût, tel que chiffré par l'expert judiciaire, des travaux de réfection préconisés par ce dernier, soit une somme de 5 200 euros TTC au titre du traitement des canalisations et une somme de 32 300 euros TTC au titre de l'équilibrage complet des réseaux hydrauliques.
S'agissant des ventilo-convecteurs :
17. Ainsi qu'il a été dit, l'expert judiciaire a préconisé le remplacement des vannes trois voies d'eau glacée et l'équilibrage des ventilo-convecteurs. Si l'expert diligenté par la CCI indique que les ventilo-convecteurs présentaient " différents défauts " nécessitant leur remplacement, cette seule indication ne permet pas d'établir que la solution réparatoire préconisée par l'expert judiciaire, qui incluait notamment le changement de divers organes et composants, aurait été insuffisante pour remédier aux désordres. Par suite, il y a lieu de retenir la solution préconisée par l'expert judiciaire et d'allouer en conséquence à la CCI de Bayonne Pays Basque, en se basant sur le chiffrage de l'expert, une somme de 58 600 euros TTC au titre du changement des vannes trois voies.
18. Par ailleurs, dès lors que la nécessité de remplacer la totalité des ventilo-convecteurs n'est pas établie, la CCI de Bayonne Pays Basque n'est pas fondée à solliciter le versement d'une somme au titre du coût de remplacement des grilles de soufflage et de rejet des condensats. Au demeurant, l'expert diligenté par ses soins indique que le changement des ventilo-convecteurs n'implique pas nécessairement celui des grilles en cause.
S'agissant du changement des organes et composants défectueux :
19. Il y a lieu d'allouer à la CCI de Bayonne Pays basque, conformément aux préconisations de l'expert, une somme de 19 800 euros TTC correspondant au coût du changement des organes et composants défaillants des installations thermiques du bâtiment Estia 2.
S'agissant des faux-plafonds :
20. Il résulte de l'instruction que les travaux de réfection des ventilo-convecteurs, placés dans les sous-plafonds, implique la dépose et la repose de 200 dalles de faux-plafonds. Si l'expert diligenté par la CCI fait état d'un " risque de détérioration " de ces dalles durant les travaux, cette seule indication, peu précise, ne suffit pas à justifier de la nécessité de remplacer à neuf les 200 dalles en cause.
21. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que, lors des travaux de dépose des grilles de soufflage, il a été constaté que les ossatures porteuses des faux-plafonds avaient été coupées pour intégrer ces grilles, leur faisant ainsi jouer un rôle porteur. La dépose des grilles a entrainé un phénomène général d'instabilité des faux-plafonds, constaté par huissier les 14 octobre 2021 et 6 décembre suivant. A la suite de l'effondrement des faux-plafonds dans les salles " Zezengorri " et " Akerbeltz ", il a été procédé au nettoyage de ces salles, à des travaux de plâtrerie consistant en la dépose urgente des faux-plafonds de ces deux salles, puis au remplacement des faux-plafonds de ces deux salles. La CCI a également fait procéder, dans un premier temps, à des travaux de mise en sécurité de l'ensemble des autres faux-plafonds du bâtiment, et a fait chiffrer le coût de remplacement de l'ensemble des faux-plafonds. Elle demande à la cour de l'indemniser à raison des coûts ainsi exposés, y compris les frais de constats d'huissier, et de la dépense à engager en vue du remplacement de la totalité des faux-plafonds. Toutefois, le phénomène d'instabilité des faux-plafonds, qui étaient au demeurant anciens, trouve son origine dans la réalisation des travaux de remplacement des grilles de soufflage et de rejet des condensats. Or, et ainsi qu'il a été dit, de tels travaux n'étaient pas indispensables pour remédier aux désordres en cause. Le chef de préjudice invoqué, subséquent à la réalisation de travaux non indispensables, doit ainsi être écarté.
S'agissant de la dépose des équipements à remplacer :
22. Il résulte de l'instruction que les travaux de dépose du groupe froid et de la gaine textile de l'atrium se sont élevés, respectivement, à 1 041,49 euros HT, soit 1 249,78 euros TTC, et à 2 673,06 euros HT, soit 3 207,67 euros TTC. En revanche, la CCI n'est pas fondée à solliciter l'indemnisation du coût de dépose d'équipements dont le remplacement n'était pas indispensable pour remédier aux désordres litigieux. Dans ces conditions, il y a lieu de lui allouer une somme totale de 4 457,45 euros TTC au titre des travaux de dépose des équipements à remplacer.
S'agissant des installations de chantier :
23. La CCI de Bayonne Pays basque fait valoir que le marché de réfection des installations thermiques du bâtiment Estia 1 impliquait inéluctablement un coût forfaitaire afférent aux installations de chantier, que l'expert judiciaire a omis de chiffrer. Il résulte de l'instruction que ce coût a représentée 2,63 % du montant HT du marché conclu avec la société attributaire. Eu égard au coût des travaux nécessaires à la reprise des désordres tel qu'évalué par le présent arrêt, d'un montant de 465 435,08 euros TTC, et en se basant sur un pourcentage équivalent, il y a lieu d'évaluer ce chef de préjudice à la somme de 10 000 euros TTC.
S'agissant des frais de maîtrise d'œuvre :
24. Ainsi que l'a indiqué l'expert judiciaire, la réalisation des travaux de reprise des désordres des installations thermiques nécessite des prestations de maîtrise d'œuvre. Au vu du montant des travaux tel qu'évalué par le présent arrêt, et en se basant sur le pourcentage d'usage de 10 %, il y a lieu d'évaluer ces frais à la somme de 47 000 euros TTC.
S'agissant des missions de contrôle technique et de coordination et de sécurité :
25. Ainsi que l'a relevé le tribunal, l'opération de reprise des désordres implique le recours aux prestations d'un contrôleur technique et d'un coordonnateur SPS. Le tribunal a fait une exacte évaluation de ce chef de préjudice en allouant à la CCI de Bayonne Pays basque les sommes respectives de 6 930 euros TTC et 2 764,80 euros TTC, correspondant au montant des frais effectivement exposés dans le cadre du marché de réfection des installations thermiques du bâtiment Estia 1.
S'agissant des diagnostics préalables à la réalisation des travaux :
26. Il résulte de l'instruction que la CCI a fait réaliser, avant le lancement des travaux, un diagnostic amiante, auquel elle était réglementairement tenue. Ce diagnostic s'est élevé au coût de 1 098 euros TTC selon la facture correspondante. Il y a ainsi lieu d'allouer à la CCI une somme de 1 098 euros TTC à raison de la réalisation de ce diagnostic.
27. En revanche, la CCI n'établit pas la nécessité de réaliser, avant le lancement des travaux, une étude de capacité de la dalle. Sur ce point, ses prétentions indemnitaires ne peuvent donc être accueillies.
28. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 à 26 que le dommage subi par la CCI de Bayonne Pays basque au titre des travaux de reprise des installations thermiques du bâtiment Estia 1 et des frais y afférents doit être évalué à la somme totale de 514 733,23 euros TTC.
29. Enfin, les conséquences dommageables des désordres doivent être évaluées à la date où, leur cause ayant pris fin et leur étendue étant connue, il peut être procédé aux travaux destinés à les réparer. Il n'en va autrement que si ces travaux sont retardés pour une cause indépendante de la volonté de la victime. Ainsi, la CCI, qui n'établit ni même n'allègue avoir été dans l'impossibilité financière, technique ou juridique de faire procéder aux travaux à la date du dépôt du rapport d'expertise judiciaire, n'est pas fondée à demander que le coût des travaux soit indexé sur l'indice INSEE du coût de la construction.
En ce qui concerne le préjudice de jouissance :
30. Il résulte de l'instruction, en particulier du constat d'huissier du 5 décembre 2017, que les désordres affectant les installations thermiques du bâtiment Estia 1 ont conduit à la mise en place de seaux de récupération des fuites d'eau et à l'utilisation de radiateurs d'appoint. Contrairement à ce que soutient la société Home technologie management, la CCI de Bayonne Pays basque justifie de l'existence d'un préjudice de jouissance, ce quand bien même elle a pu continuer à utiliser les locaux.
31. Toutefois, il n'est pas établi que les désagréments ainsi occasionnés, qui n'ont été constatés par huissier qu'en 2017, auraient existé antérieurement à 2014, année au cours de laquelle la CCI a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Pau afin que soit prescrite une expertise portant sur les dysfonctionnements affectant les installations thermiques. Il n'est pas davantage démontré qu'il ne pouvait être remédié à ces désordres par l'engagement, dès le dépôt en janvier 2018 du rapport d'expertise judiciaire, des travaux de réfection des installations thermiques.
32. Dans ces conditions, eu égard à son ampleur limitée, il sera fait une juste évaluation du préjudice de jouissance dont la réparation est demandée à la somme de 8 000 euros.
33. Il résulte de tout ce qui précède que la somme de 355 342,80 euros que la société Guérin et associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ets Benninger 64, et la société Home technologie management, venant aux droits de la société AMT, ont été condamnées, in solidum, à verser à la CCI de Bayonne Pays basque doit être portée à la somme totale de 522 733,23 euros TTC. La CCI de Bayonne Pays basque est fondée, dans cette seule mesure, à demander la réformation du jugement attaqué.
Sur la demande d'expertise :
34. Aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision. La mission confiée à l'expert peut viser à concilier les parties ".
35. La cour est en mesure de se prononcer, au vu de l'expertise judiciaire et de l'expertise diligentée par la CCI de Bayonne Pays basque, sur la réparation des désordres à raison desquels la responsabilité de la société Ets Benninger 64 et de la société Home technologie management, venant aux droits de la société ATM, est engagée. Il s'ensuit que les conclusions de la requête enregistrée sous le n° 23BX02465 tendant à ce que soit ordonnée, avant-dire droit, une nouvelle expertise, doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
36. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La somme de de 355 342,80 euros que la société Guérin et associés, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ets Benninger 64, et la société Home technologie management, venant aux droits de la société AMT, ont été condamnées, in solidum, à verser à la CCI de Bayonne Pays basque, est portée au montant de 522 733,23 euros TTC.
Article 2 : Le jugement n°1901154 du 13 juillet 2022 du tribunal administratif de Pau est reformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la chambre de commerce et d'industrie de Bayonne Pays basque, à la Selarl Guérin et associés en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ets Benninger 64, à la société Home technologie management et à la société Inter énergies.
Copie en sera adressée à M. A... B..., expert.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Laurent Pouget, président,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
M. Vincent Bureau, conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.
La rapporteure,
Marie-Pierre Beuve-Dupuy
Le président,
Laurent Pouget Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°s 22BX02449, 23BX02465