Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'avis des sommes à payer n°489099 émis le 7 octobre 2016 par le centre hospitalier universitaire Amiens-Picardie pour obtenir le paiement de la somme de 5 850 euros au titre des frais de conservation du corps de sa défunte mère en chambre mortuaire pour la période du 31 mai au 27 septembre 2016, la mise en demeure valant commandement de payer la somme de 5 850 euros notifiée par la trésorerie d'Amiens " établissements hospitaliers " le 23 janvier 2018, les trois oppositions à tiers détenteur notifiées par le comptable public de la trésorerie d'Amiens " établissements hospitaliers " les 23 mars, 16 avril, 14 juin 2018 pour le recouvrement auprès de la Caisse d'épargne Ile-de-France et de la Banque Postale de Lille de la somme de 5 850 euros correspondant à la créance résultant de l'avis des sommes à payer du 7 octobre 2016, l'opposition à tiers détenteur notifie par le comptable public de la trésorerie d'Amiens " établissements hospitaliers " le 6 novembre 2018 pour le recouvrement, auprès de la banque Postale située à La Source (45900), d'une somme totale de 5 731,59 euros relatifs à des frais de conservation en chambre mortuaire à hauteur de 5 850 euros et à la facturation de photocopies de dossier médical à hauteur de 6,99 euros, déduction faite d'un acompte versé de 125,40 euros, les deux mises en demeure valant commandement de payer la somme de 5 731,59 euros notifiées les 15 mars 2019 et 17 août 2020 par le comptable public de la trésorerie d'Amiens " établissements hospitaliers ", à titre subsidiaire, de limiter à 150 euros le montant de la créance du centre hospitalier universitaire d'Amiens-Picardie et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par un jugement n° 1803228 du 15 juillet 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 14 septembre, 15 novembre 2021, 30 juin et 31 août 2022, Mme B... A..., représentée par Me Stéphanie Calot-Foutry, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre principal, d'annuler l'avis des sommes à payer du 7 octobre 2016, les mises en demeure de payer en date des 23 janvier 2018, 15 mars 2019 et 17 août 2020 et les oppositions à tiers détenteur en date des 23 mars, 16 avril, 14 juin et 6 novembre 2018 ;
3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de la créance du centre hospitalier universitaire d'Amiens-Picardie à la somme de 450 euros correspondant à neuf jours de garde mortuaire facturés à 50 euros et d'ordonner la compensation de cette créance avec le montant de la saisie pratiquée ;
4°) à titre infiniment subsidiaire, de réduire le montant de la créance du centre hospitalier universitaire d'Amiens-Picardie à la somme de 3 550 euros correspondant à soixante et onze jours de garde mortuaire facturés 50 euros par jour et d'ordonner la compensation de cette créance avec le montant de la saisie pratiquée ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, en contrepartie de sa renonciation au versement de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- sa requête n'est pas tardive dès lors qu'elle n'a pas été destinataire de l'avis des sommes à payer qui a été envoyé à une adresse erronée et qu'elle n'a eu connaissance des sommes qui lui étaient réclamées que le 24 janvier 2018, date à laquelle une mise en demeure lui a été adressée ;
- c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur l'acte de décès pour estimer que le nombre de jours de chambre mortuaire à facturer était de 117 jours alors que l'acte de décès comportait une erreur sur la qualité du déclarant, laquelle a été rectifiée le 24 juillet 2021 conformément à la décision rendue le 16 juillet 2021 par l'officier d'état civil de la commune d'Amiens ; la période de 117 jours est erronée et doit être réduite à 71 jours à 50 euros avec pour point de départ le 7 juillet 2016, date du courrier adressé au centre hospitalier dans lequel elle a indiqué avoir été informée du décès de sa mère, ce qui fait un coût total de 3 550 euros ;
- l'acte d'état civil rectifié n'émane pas d'une autorité incompétente ;
- la période de garde mortuaire aurait dû en réalité être ramenée à neuf jours en application des dispositions de l'article R. 112-76 du code de la santé publique, déduction faite des trois premiers jours gratuits mentionnés à l'article R. 2223-89 du code général des collectivités territoriales, dès lors que n'étant pas informée du décès de sa mère, elle n'a pu réclamer le corps de la défunte qui aurait dû être inhumée dans un délai de douze jours suivant son décès ;
- elle n'a jamais demandé la conservation du corps de sa mère en chambre mortuaire dans son courrier du 17 juillet 2016 et, prévenue quarante-six jours après le décès, elle n'a pas été en mesure de respecter les dispositions de l'article R. 2223-89 du code général des collectivités territoriales et donc de ne pas dépasser le délai de gratuité de trois jours de séjour en chambre mortuaire, de sorte que les frais générés n'ont pas à lui être imputés ;
- les frais mortuaires de la défunte étant pris en charge par la collectivité, elle doit être dispensée du règlement de ces frais en application des dispositions de l'article L. 2223-19 et L. 2223-27 du code général des collectivités territoriales.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 23 mai et 8 juillet 2022, le centre hospitalier Amiens-Picardie, représenté par Me Yannick Francia et Me Clément Pons, conclut au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce que le montant de sa créance soit déterminé à 4 650 euros correspondant à 93 jours de garde mortuaire facturés 50 euros par jour.
Il soutient que :
- la rectification de l'acte de décès de la mère de Mme A... effectuée par l'officier d'état civil est illégale, dès lors que l'identité du déclarant constitue un élément essentiel de l'acte qui ne peut faire l'objet d'une simple rectification administrative, l'officier d'état civil, qui était incompétent pour procéder à la rectification, devait en informer l'appelante afin que sa demande puisse être instruite sur le plan judiciaire ;
- en tout état de cause, la demande de rectification était infondée en fait dès lors que Mme A... n'établit pas ne pas avoir réalisé la déclaration de décès de sa mère, alors que l'original de l'acte comporte sa signature ;
- la conservation du corps en chambre mortuaire pendant 120 jours résulte d'une demande manifeste de la part de Mme A..., cette dernière lui ayant indiqué expressément, par courrier du 17 juillet 2016, qu'elle souhaitait prendre en charge le corps de sa mère afin de lui assurer une sépulture digne ;
- l'appelante ne peut se prévaloir des dispositions des article L. 2223-19 et L. 2223-27 du code général des collectivités territoriales pour réclamer la gratuité des frais de garde dès lors qu'ils ne concernent que les chambres funéraires ;
- à titre subsidiaire, la requête est tardive dès lors que le titre de recettes n'a pas été contesté dans le délai de deux mois mais plus d'un an et demi après sa réception ;
- l'appelante n'est pas fondée à solliciter que la durée de conservation soit réduite à 71 jours dès lors qu'elle a eu connaissance du décès de sa mère avant le 17 juillet 2016, le centre des finances lui ayant adressé un courrier le 27 juin 2016 l'invitant à récupérer les valeurs ayant appartenu à la défunte et elle-même ayant reçu copie de l'acte de décès le 4 juillet 2016.
Par une ordonnance du 19 septembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 octobre 2022 à 12h00.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 octobre 2021.
Par lettre du 18 janvier 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence de la cour pour statuer sur les conclusions tendant à l'annulation des mises en demeure valant commandement de payer en date des 23 janvier 2018, 15 mars 2019 et 17 août 2020 et des oppositions à tiers détenteurs en date des 23 mars, 16 avril, 14 juin et 6 novembre 2018 dès lors qu'il n'appartient pas au juge administratif d'annuler un acte de poursuite.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la code général des collectivités territoriales ;
- le livre des procédures fiscales,
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sylvie Stefanczyk, rapporteure,
- et les conclusions de M. Guillaume Toutias, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. ..., admise le 30 juin 2016 au centre hospitalier universitaire Amiens-Picardie, y est décédée le lendemain. Le corps de la défunte a alors été déposé dans une chambre mortuaire de l'établissement de santé. Mme B... A..., née le 1er mars 1961 et fille de l'intéressée a, par courrier en date du 17 juillet 2016, demandé au centre hospitalier Amiens-Picardie la communication du dossier médical de sa mère tout en indiquant qu'étant étudiante en Belgique, elle n'avait pas les moyens financiers de prendre en charge immédiatement cette dernière et qu'elle souhaitait venir récupérer le corps dès qu'elle pourrait retravailler et que, le cas échéant, elle se contenterait de venir se recueillir sur le lieu prévu par l'hôpital pour les indigents. L'intéressée ne s'étant plus manifestée auprès du centre hospitalier Amiens-Picardie, celui-ci a procédé à l'inhumation de sa mère dans le cadre d'obsèques en indigence le 27 septembre 2016. Il a émis, le 7 octobre 2016, à l'encontre de Mme A... un avis des sommes à payer en vue du recouvrement de la somme de 5 850 euros correspondant aux frais de conservation du corps de sa mère en chambre mortuaire pour la période du 31 mai au 27 septembre 2016.
2. En l'absence de règlement, le comptable public de la trésorerie d'Amiens " établissements hospitaliers " a adressé le 23 janvier 2018 à l'intéressée une mise en demeure valant commandement de payer la somme de 5 850 euros. Mme A... a contesté le 4 février 2018 le bien-fondé de cette créance mais, par courrier du 27 février 2018, le centre hospitalier Amiens-Picardie a rejeté son recours. Le comptable public a notifié à Mme A... les 23 mars, 16 avril, 14 juin 2018 trois oppositions à tiers détenteur pour le recouvrement de la somme de 5 850 euros, que celle-ci a contestées les 4 et 28 juin 2018. L'intéressée a de nouveau été destinataire d'une opposition à tiers détenteur notifiée le 18 novembre 2018 en vue du recouvrement d'une somme totale de 5 731,59 euros relatifs à des frais de conservation en chambre mortuaire à hauteur de 5 850 euros et à la facturation de photocopies du dossier médical à hauteur de 6,99 euros, déduction faite de la somme de 125,40 euros ayant fait l'objet d'une saisie administrative le 28 juin 2020. Elle s'est vu également notifier les 15 mars 2019 et 17 août 2020 deux mises en demeure valant commandement de payer la somme de 5 731,59 euros.
3. Mme A... relève appel du jugement du 15 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation de l'avis des sommes à payer du 7 octobre 2016, des mises en demeure de payer des 23 janvier 2018, 15 mars 2019 et 17 août 2020 et des oppositions à tiers détenteur des 23 mars, 16 avril, 14 juin et 6 novembre 2018 et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de la créance du centre hospitalier universitaire d'Amiens-Picardie à la somme de 450 euros avec compensation de cette créance avec le montant de la saisie pratiquée.
Sur la régularité du jugement attaqué :
4. Aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances, amendes, condamnations pécuniaires et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / (...) Les contestations relatives au recouvrement ne peuvent pas remettre en cause le bien-fondé de la créance. Elles peuvent porter : / 1° Sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° A l'exclusion des amendes et condamnations pécuniaires, sur l'obligation au paiement, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués et sur l'exigibilité de la somme réclamée. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés dans le cas prévu au 1° devant le juge de l'exécution. Dans les cas prévus au 2°, ils sont portés : / a) Pour les créances fiscales, devant le juge de l'impôt prévu à l'article L. 199 ; / b) Pour les créances non fiscales de l'Etat, des établissements publics de l'Etat, de ses groupements d'intérêt public et des autorités publiques indépendantes, dotés d'un agent comptable, devant le juge de droit commun selon la nature de la créance ; /c) Pour les créances non fiscales des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des établissements publics de santé, devant le juge de l'exécution. "
5. Il ressort de ces dispositions que l'ensemble du contentieux du recouvrement des créances non fiscales des établissements publics de santé relève de la compétence du juge de l'exécution, tandis que le contentieux du bien-fondé de ces créances relève de celle du juge compétent pour en connaître sur le fond.
6. Mme A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la mise en demeure valant commandement de payer la somme de 5 850 euros relative aux frais de séjour en chambre mortuaire de sa mère, notifiée par la trésorerie d'Amiens " établissements hospitaliers " le 23 janvier 2018, les trois oppositions à tiers détenteur émises les 23 mars, 16 avril, 14 juin 2018 pour le recouvrement auprès de la Caisse d'épargne Ile-de-France et de la Banque Postale de Lille de la somme de 5 850 euros, l'opposition à tiers détenteur émise le 6 novembre 2018 pour le recouvrement, auprès de la banque Postale, d'une somme totale de 5 731,59 euros et les deux mises en demeure valant commandement de payer la somme de 5 731,59 euros notifiées les 15 mars 2019 et 17 août 2020. Cependant, un tel litige se rattache à la contestation d'actes de poursuite délivrés en vue du recouvrement d'une créance non fiscale d'un établissement public de santé, dont il n'appartient pas à la juridiction administrative de connaître. Il y a lieu, en conséquence, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a retenu sa compétence sur ce point et, statuant immédiatement par voie d'évocation, de rejeter les conclusions de la demande Mme A... comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
7. Aux termes de l'article R. 2223-89 du code général des collectivités territoriales : " Le dépôt et le séjour à la chambre mortuaire d'un établissement de santé public ou privé du corps d'une personne qui y est décédée sont gratuits pendant les trois premiers jours suivant le décès. " Aux termes de l'article R. 2223-93 de ce code : " Dans toute la mesure du possible, la famille a accès auprès du défunt avant que le corps ne soit déposé dans la chambre mortuaire sans que ce dépôt ne soit différé, de ce fait, d'un délai supérieur à dix heures tel que prévu au cinquième alinéa de l'article R. 2223-76 ". Aux termes de l'article R. 2223-94 de ce code : " Le directeur s'il s'agit d'un établissement public ou son organe qualifié s'il s'agit d'un établissement privé fixe les prix de séjour en chambre mortuaire au-delà du délai de trois jours prévu à l'article R. 2223-89. " Par ailleurs, l'article R. 1112-69 du code de la santé publique dispose que : " La famille ou les proches sont prévenus dès que possible et par tous moyens appropriés de l'aggravation de l'état du malade et du décès de celui-ci. (...) ". Aux termes de l'article R. 1112-75 du même code : " La famille ou, à défaut, les proches disposent d'un délai de dix jours pour réclamer le corps de la personne décédée dans l'établissement. (...) ". Aux termes de l'article R. 1112-76 de ce code : " (...) / II.-En cas de non-réclamation du corps dans le délai de dix jours mentionné à l'article R. 1112-75, l'établissement dispose de deux jours francs : / 1° Pour faire procéder à l'inhumation du défunt dans des conditions financières compatibles avec l'avoir laissé par celui-ci ; en l'absence de ressources suffisantes, il est fait application des dispositions de l'article L. 2223-27 du code général des collectivités territoriales (...) ".
8. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'avis des sommes à payer émis le 7 octobre 2016 par le centre hospitalier universitaire Amiens-Picardie porte sur une créance d'un montant de 5 850 euros constituée par les frais de conservation, dans une chambre mortuaire, du corps de la mère de Mme A... pour la période du 31 mai au 27 septembre 2016, soit 120 jours desquels l'établissement de santé a soustrait les trois premiers jours gratuits qui ont suivi le décès, en application des dispositions précitées de l'article R. 2223-89 du code général des collectivités territoriales. Mme A... soutient qu'elle ne peut être regardée comme ayant eu connaissance du décès de sa mère le 3 juin 2016, date à laquelle a été établi l'avis de décès, dès lors que ce document comporte une erreur sur la qualité du déclarant, qui a été rectifiée le 24 juillet 2021 à la suite de la décision de l'officier d'état civil de la commune d'Amiens du 16 juillet 2021 et qu'il en résulte que le point de départ de la période de garde mortuaire doit être fixé au 17 juillet 2016, date du courrier qu'elle a adressé au centre hospitalier Amiens-Picardie mentionnant qu'elle était informée du décès de mère. Toutefois, la date de connaissance effective par l'appelante du décès de sa mère n'a pas incidence sur le calcul de la créance en litige, la période de garde mortuaire ayant commencé, en application des dispositions précitées de l'article R. 2223-93 du code général des collectivités territoriales, au plus tard dans les dix heures ayant suivi le décès de la mère de la requérante, le 31 mai 2016. Au surplus, il ressort des mentions de l'acte de décès établi le 3 juin 2016 que celui-ci comportait la signature de l'appelante et non celle d'un autre déclarant.
9. En deuxième lieu, il est constant que la durée pendant laquelle le centre hospitalier universitaire Amiens-Picardie a conservé dans sa chambre mortuaire le corps de la mère de Mme A... a excédé la période de douze jours résultant des obligations de conservation prescrites par les dispositions précitées des articles R. 1112-75 et R. 1112-76 du code de la santé publique. Il résulte cependant de l'instruction, ainsi qu'il a été dit au point 1, que Mme A..., informée du décès de sa mère, a, par courrier du 17 juillet 2016, indiqué qu'étant étudiante en Belgique, elle n'avait pas les moyens financiers de prendre en charge sa mère " actuellement " et que dès qu'elle pourrait retravailler, elle souhaitait " venir la chercher " afin de " lui trouver une place car rien n'est prévu par personne " et que si cela n'était pas possible, elle se contenterait de venir se recueillir sur le lieu prévu dans l'hôpital pour les indigents. Il ressort des termes de son courrier que sa demande visait, non un projet de transfert du corps de sa mère du lieu d'inhumation à Amiens vers le caveau familial, mais la conservation du corps de celle-ci en chambre mortuaire dans l'attente de l'obtention des fonds suffisants pour l'organisation des obsèques. Le centre hospitalier universitaire Amiens-Picardie a ainsi pu conserver le corps de la défunte jusqu'à l'inhumation intervenue le 27 septembre 2016. En outre, Mme A... ne démontre pas, eu égard à la teneur de son courrier du 17 juillet 2016 et à ses tergiversations, que si elle avait été informée plus rapidement du décès de sa mère, elle aurait réclamé immédiatement le corps afin d'éviter ou de réduire les frais de conservation en chambre mortuaire. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que l'avis des sommes à payer est dépourvu de base légale et à solliciter la réduction du montant de la créance à la somme de 450 euros correspondant à neuf jours de conservation en chambre mortuaire, déduction faite des trois premiers jours gratuits visés à l'article R. 2223-89 du code général des collectivités territoriales.
10. En troisième lieu, si Mme A... soutient que les frais de conservation du corps de sa mère en chambre mortuaire n'ont pas à lui être imputés dès lors que, d'une part, elle a été prévenue du décès de l'intéressée quarante-six jours après celui-ci et n'a donc pas été mise à même de ne pas dépasser le délai des trois jours de gratuité et, d'autre part, elle a eu connaissance tardivement du tarif de la conservation en chambre mortuaire du corps de la défunte, ces circonstances, eu égard à ce qui a été dit aux points précédents, ne sont pas de nature à remettre en cause le bien-fondé de la créance du centre hospitalier universitaire Amiens-Picardie. De la même manière, Mme A... ne peut utilement soutenir que les frais de conservation du corps en chambre mortuaire doivent être pris en charge par la collectivité en application des dispositions des articles L. 2223-19 et L. 22223-27 du code général des collectivités territoriales dès lors que celles-ci ne sont pas relatives aux chambres mortuaires mais concernent le service extérieur des pompes funèbres.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation de l'avis des sommes à payer du 7 octobre 2016 et, à titre subsidiaire, à la limitation du montant de la créance du centre hospitalier universitaire Amiens-Picardie.
Sur les frais liés à l'instance :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que le centre hospitalier universitaire Amiens-Picardie, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à Mme A... la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation des mises en demeure valant commandement de payer des 23 janvier 2018, 15 mars 2019 et 17 août 2020 et des oppositions à tiers détenteur des 23 mars, 16 avril, 14 juin et 6 novembre 2018 notifiés par le comptable public de la trésorerie d'Amiens " établissements hospitaliers ".
Article 2 : La demande de Mme A... tendant à l'annulation des mises en demeure valant commandement de payer des 23 janvier 2018, 15 mars 2019 et 17 août 2020 et des oppositions à tiers détenteur des 23 mars, 16 avril, 14 juin et 6 novembre 2018 est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., au centre hospitalier universitaire Amiens Picardie et à Me Stéphanie Calot-Foutry.
Délibéré après l'audience publique du 24 janvier 2023 à laquelle siégeaient :
- Mme Anne Seulin, présidente chambre,
- M. Marc Baronnet, président-assesseur,
- Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 février 2023.
La rapporteure,
S. StefanczykLa présidente de chambre,
A. Seulin
La greffière,
A.S. Villette
La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière
Anne-Sophie Villette
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N°21DA02205