Vu la procédure suivante :
M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 19 janvier 2016 par laquelle le comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) a rejeté sa demande d'indemnisation des conséquences dommageables de la maladie dont il souffre et de condamner sous astreinte ce comité à l'indemniser. Par un jugement n° 1601145 du 20 mars 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 17LY02016 du 21 février 2019, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de M. D..., annulé ce jugement et la décision du CIVEN puis enjoint à celui-ci de réexaminer la demande d'indemnisation de l'intéressé.
Par un pourvoi, enregistré le 8 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le CIVEN demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. D....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 ;
- la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 ;
- la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 ;
- le décret n° 2014-1049 du 15 septembre 2014 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme A... C..., auditrice,
- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 19 janvier 2016, le comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) a rejeté la demande de M. D... d'indemnisation des conséquences dommageables de la maladie dont il est atteint. Par un jugement du 20 mars 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation de l'Etat à l'indemniser. Le CIVEN se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 21 février 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a annulé ce jugement et lui a enjoint de proposer une indemnisation à M. D....
2. Aux termes de l'article 1er de la loi du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français : " I. Toute personne souffrant d'une maladie radio-induite résultant d'une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français et inscrite sur une liste fixée par décret en Conseil d'Etat conformément aux travaux reconnus par la communauté scientifique internationale peut obtenir réparation intégrale de son préjudice dans les conditions prévues par la présente loi. / II. Si la personne est décédée, la demande de réparation peut être présentée par ses ayants droit. (...) ". Aux termes de l'article 2 de cette même loi : " La personne souffrant d'une pathologie radio-induite doit avoir résidé ou séjourné : / 1° Soit entre le 13 février 1960 et le 31 décembre 1967 au Centre saharien des expérimentations militaires, ou entre le 7 novembre 1961 et le 31 décembre 1967 au Centre d'expérimentations militaires des oasis ou dans les zones périphériques à ces centres ; / 2° Soit entre le 2 juillet 1966 et le 31 décembre 1998 en Polynésie française. / (...) ". Aux termes du I de l'article 4 de la même loi : " I. - Les demandes individuelles d'indemnisation sont soumises au comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (...) " En vertu du V du même article 4, dans sa rédaction résultant de l'article 113 de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, dont les dispositions sont applicables aux instances en cours à la date de son entrée en vigueur, soit le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française : " V. - Ce comité examine si les conditions de l'indemnisation sont réunies. Lorsqu'elles le sont, l'intéressé bénéficie d'une présomption de causalité (...) ". Désormais, le V de l'article 4, dans sa rédaction issue de l'article 232 de la loi du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, dispose : " Ce comité examine si les conditions sont réunies. Lorsqu'elles le sont, l'intéressé bénéficie d'une présomption de causalité, à moins qu'il ne soit établi que la dose annuelle de rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français reçue par l'intéressé a été inférieure à la limite de dose efficace pour l'exposition de la population à des rayonnements ionisants fixée dans les conditions prévues au 3° de l'article L. 1333-2 du code de la santé publique ".
3. En modifiant les dispositions du V de l'article 4 de la loi du 5 janvier 2010 issues de l'article 113 de la loi du 28 février 2017, l'article 232 de la loi du 28 décembre 2018 élargit la possibilité, pour l'administration, de combattre la présomption de causalité dont bénéficient les personnes qui demandent une indemnisation lorsque les conditions de celle-ci sont réunies. Il doit être regardé, en l'absence de dispositions transitoires, comme ne s'appliquant qu'aux demandes qui ont été déposées après son entrée en vigueur, intervenue le lendemain de la publication de la loi du 28 décembre 2018 au Journal officiel de la République française.
4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que M. D... a déposé sa demande au CIVEN le 20 mars 2013. Par suite, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 3 ci-dessus que la cour administrative d'appel de Lyon n'a pas commis d'erreur de droit en faisant application des dispositions du V de l'article 4 de la loi du 5 janvier 2010 dans leur rédaction issue de la loi du 28 février 2017 et non de la loi du 28 décembre 2018. Dès lors, le CIVEN n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du CIVEN est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires.
Copie en sera adressée à M. B... D... et à la ministre des armées.