N° P.19.0128.N
VERVOIR FRERES, société privée à responsabilité limitée,
prévenue,
demanderesse en cassation,
Me Vincent Van der Mast, avocat au barreau de Flandre occidentale.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 3 janvier 2019 par le tribunal correctionnel de Louvain, statuant en degré d'appel.
La demanderesse invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.
L'avocat général délégué Alain Winants a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le moyen :
1. Le moyen est pris de la violation de l'article 5 du Code pénal, tel qu'applicable au moment des faits le 14 avril 2017 : le jugement attaqué refuse l'application de la cause d'excuse absolutoire prévue à l'article 5, alinéa 2, du Code pénal, dans sa version applicable, parce que le chauffeur du camion était un travailleur salarié et n'était pas une personne habilitée à représenter la demanderesse ; toutefois, l'article 5, alinéa 2, du Code pénal n'impose aucune condition quant à la qualité ou au pouvoir de représentation dont devrait être investie la personne ayant physiquement commis l'infraction ; par conséquent, le jugement attaqué ajoute à la disposition précitée une condition qu'elle ne comporte pas.
2. L'article 5, alinéas 1 et 2, du Code pénal, dans sa version applicable, est libellé ainsi qu'il suit :
« Toute personne morale est pénalement responsable des infractions qui sont intrinsèquement liées à la réalisation de son objet ou à la défense de ses intérêts, ou de celles dont les faits concrets démontrent qu'elles ont été commises pour son compte.
Lorsque la responsabilité de la personne morale est engagée exclusivement en raison de l'intervention d'une personne physique identifiée, seule la personne qui a commis la faute la plus grave peut être condamnée. Si la personne physique identifiée a commis la faute sciemment et volontairement, elle peut être condamnée en même temps que la personne morale responsable ».
Ces dispositions ne requièrent pas, pour l'applicabilité de la règle de décumul prévue à l'alinéa 2, que la personne physique identifiée ait été investie d'une qualité bien déterminée ou du pouvoir de représenter la personne morale.
3. Le jugement attaqué repose sur le soutènement contraire, ajoute à cette disposition une condition qu'elle ne comporte pas et, ainsi, ne justifie pas légalement la décision.
Le moyen est fondé.
Sur l'étendue de la cassation :
4. L'illégalité de la condamnation à une peine n'entache pas la légalité de la déclaration de culpabilité.
Le contrôle d'office pour le surplus :
5. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Casse le jugement attaqué en tant qu'il condamne la demanderesse à une peine, à des contributions et aux frais ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement partiellement cassé ;
Condamne la demanderesse aux deux tiers des frais ;
Réserve le surplus des frais afin qu'il soit statué sur celui-ci par le juge de renvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, au tribunal correctionnel néerlandophone de Bruxelles, siégeant en degré d'appel.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Paul Maffei, président, Filip Van Volsem, Alain Bloch, Antoine Lievens et Erwin Francis, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt et un mai deux mille dix-neuf par le président Paul Maffei, en présence de l'avocat général Alain Winants, avec l'assistance du greffier Kristel Vanden Bossche.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Eric de Formanoir et transcrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.