N° F.18.0117.N
VAD, s.p.r.l.,
Me Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation,
contre
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 18 octobre 2017 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le 17 décembre 2019, l'avocat général Johan Van der Fraenen a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Koenraad Moens a fait rapport et l'avocat général Johan Van der Fraenen a été entendu en ses conclusions.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente deux moyens.
III. La décision de la Cour
[...]
Sur le second moyen :
1. En vertu de l'article 13, § 1er, de la loi du 20 juillet 1979 concernant l'assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives à certains cotisations, droits, taxes et autres mesures, applicable au litige, le titre produit par l'autorité étrangère requérante jouit d'une reconnaissance directe et est traité comme un titre exécutoire belge.
L'article 13, § 2, de cette loi prévoit que, pour satisfaire aux exigences relatives à la loi sur l'emploi des langues en matière administrative, le titre produit peut cependant, le cas échéant, être remplacé par un titre permettant son exécution dans le Royaume.
En vertu de l'article 13, § 3, de la même loi, l'article 16 s'applique si le remplacement du titre donne lieu à une contestation concernant la créance ou le titre exécutoire émis par l'autorité étrangère requérante.
L'article 16, § 1er, alinéa 1er, de cette loi précise que si, au cours de la procédure de recouvrement, la créance ou le titre permettant l'exécution de son recouvrement émis dans l'État membre où l'autorité étrangère requérante a son siège sont contestés par un intéressé, il appartient à celui-ci de porter l'action devant l'instance compétente de l'État membre où cette autorité a son siège conformément aux règles de droit en vigueur dans ce dernier État.
Suivant l'article 16, § 2, lorsque la contestation porte sur les mesures d'exécution prises en Belgique, l'action est portée devant l'instance belge compétente conformément à la loi belge.
2. Il suit de la combinaison de ces dispositions légales que la contrainte, décernée en tant que titre de remplacement belge et tendant au recouvrement de droits de douane dus à un État membre requérant de l'Union européenne, n'est pas un titre de taxation originel qui concrétise la dette fiscale et qui constitue un simple acte exécutoire nécessaire à la perception d'une dette fiscale étrangère, mais un acte réalisé uniquement dans le cadre d'une procédure de recouvrement d'une obligation préexistante découlant d'un titre étranger.
Cet acte exécutoire n'est pas un acte administratif, au sens de l'article 1er de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, qui doit faire l'objet d'une motivation formelle.
3. Le moyen, qui repose sur l'hypothèse qu'une contrainte décernée en vue de la perception de droits de douane dus à un État membre requérant de l'Union européenne constitue un acte administratif au sens de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, manque en droit.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il se prononce sur la compensation appliquée par le défendeur et statue sur les dépens ;
Rejette le pourvoi pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé ;
Condamne la demanderesse à la moitié des dépens ;
Réserve le surplus des dépens pour qu'il soit statué sur celui-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d'appel d'Anvers.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Eric Dirix, président, le président de section Alain Smetryns et les conseillers Filip Van Volsem, Koenraad Moens et François Stévenart Meeûs, et prononcé en audience publique du vingt-trois janvier deux mille vingt par le président de section Eric Dirix, en présence de l'avocat général Johan Van der Fraenen, avec l'assistance du greffier Vanity Vanden Hende.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Michel Lemal et transcrite avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.