Vu la requête enregistrée le 31 juillet 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Pierre X..., demeurant 42, bis rue Franklin à Sartrouville 78500 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 27 mai 1982, par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions à l'impôt sur le revenu qui ont été mises à sa charge au titre des années 1973 et 1974,
2° prononce la décharge desdites impositions,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu la loi du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984, notamment son article 93-II ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Turot, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 302 ter du code général des impôts relatif au régime d'imposition forfaitaire du chiffre d'affaires et du bénéfice...5. Les forfaits de chiffre d'affaires et de bénéfice sont établis par année civile pour une période de deux ans ;...6. Les forfaits sont conclus après l'expiration de la première année de la période biennale pour laquelle ils sont fixés ...8. Ils peuvent faire l'objet d'une reconduction tacite pour une durée d'un an renouvelable. Dans ce cas, le montant du forfait retenu pour l'application de l'impôt est celui qui a été fixé pour la seconde année de la période biennale. 9. Ces forfaits peuvent être dénoncés : - par l'entreprise avant le 16 février de la deuxième année qui suit la période biennale pour laquelle ils ont été conclus et, en cas de reconduction, avant le 16 février de la deuxième année qui suit celle à laquelle s'appliquait la reconduction ; - par l'administration pendant les trois premiers mois des mêmes années." ; qu'il résulte de ces dispositions, qu'en l'absence de dénonciation du forfait par l'administration, avant le 1er avril de la deuxième année qui suit la période biennale pour laquelle le forfait a été conclu, celui-ci fait l'objet d'une reconduction tacite et son montant est alors égal à celui fixé pour la seconde année de la période biennale précédente ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'eu égard au montant du chiffre d'affaires réalisé par son entreprise, M. X... qui exploitait un fonds de commerce de machines de bureau était passible, pour la période biennale 1973-1974, de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux selon le régime du forfait ; que les forfaits de bénéfice au titre de ladite période biennale ayant été fixés pour des montants supérieurs à ceux qui lui avaient été assignés au titre des années 1971 et 1972 M. X... demande la décharge des impositions à l'impôt sur le revenu correspondantes en faisant valoir que, faut pour l'administration d'avoir dénoncé, avant le 1er avril 1974, les forfaits de la période biennale précédente, ceux-ci se trouvaient tacitement reconduits, conformément aux dispositions précitées du 8 de l'article 302 ter du code et qu'il ne pouvait, par suite, leur en être substitué de nouveaux ;
Considérant que si l'administration soutient que les forfaits dont s'agit ont, au contraire, été régulièrement dénoncés ainsi que l'attesterait l'envoi au contribuable, le 27 mars 1974, par pli recommandé ayant fait l'objet d'un avis de réception postal en date du 28 mars 1974, de l'imprimé modèle 2131 prévu à cet effet, et si le contribuable ne conteste pas avoir reçu le même jour un pli provenant de l'administration fiscale, ce dernier soutient, toutefois, que le pli ainsi reçu contenait non la dénonciation des forfaits des années 1971 et 1972, mais une nouvelle demande de production de la déclaration prévue à l'article 302 sexies du code ; qu'il produit devant le Conseil d'Etat, à l'appui de ses dires, la photocopie d'une lettre, établie sur modèle imprimé n° 951 datée du 21 mars 1971 et dûment signée par laquelle un inspecteur des impôts l'y a effectivement mis seulement en demeure de faire parvenir au service dans un délai de 30 jours ladite déclaration ; que, dans ces conditions, l'administration qui n'a pas été en mesure de produire copie de la lettre de dénonciation du forfait qui, aurait, selon elle, fait l'objet de l'avis de réception du 28 mars 1974 et qui ne soutient pas que la photocopie de la lettre susvisée en date du 21 mars 1974 produite par le requérant présenterait le caractère d'un faux, n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la dénonciation par ses soins en temps utile, du forfait de M. X... ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les impositions à l'impôt sur le revenu, qui correspondent aux forfaits de bénéfices assignés au contribuable au titre de la période biennale 1973-1974 ont été établies selon une procédure irrégulière ;
Considérant cependant que le ministre, qui ne peut renoncer au bénéfice de la loi fiscale , est en droit d'invoquer à tout moment de la procédure tous moyens de nature à faire reconnaître le bien-fondé des impositions contestées ; que l'administration fait valoir à bon droit que si le forfait antérieur à la période biennale 1973 à 1974 n'a pas été régulièrement dénoncé il a été tacitement reconduit au cours des années litigieuses ; que M. X... ne saurait dès lors prétendre à un dégrèvement supérieur à la différence entre les impositions résultant du forfait pour la période biennale 1973 et 1974 et celles résultant de la reconduction en 1973 et 1974 du forfait afférent à l'année 1972, seconde année de la période biennale précédente, soit 20.000 F ;
Article 1er : Décharge est accordée à M. X... de la différence entre les impositions à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti à raison des forfaits de bénéfices industriels et commerciaux qui ont été fixés pour la période biennale 1973 et 1974 et les impositions qui résultent de la reconduction en 1973 et 1974 du forfait de bénéfices industriels et commerciaux qui a été fixé pour l'année 1972.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 27 mai 1982 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre de l'économie, des finances et du budget.