Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE DE CREDIT DES SOCIETES D'ASSURANCES A CARACTERE MUTUEL (SOCRAM), dont le siège est ... ; la société demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 9 juillet 1991 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur recours du ministre du budget, d'une part, annulé le jugement du 12 avril 1989 du tribunal administratif de Poitiers qui l'avait déchargée des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle avait été assujettie au titre des années 1980 à 1982, d'autre part, remis intégralement à sa charge ces impositions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Austry, Auditeur,
- les observations de Me Copper-Royer, avocat de la SOCIETE DE CREDIT DES SOCIETES D'ASSURANCES A CARACTERE MUTUEL ;
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "1- Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment : ... 5°) Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables ..." ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice, des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice et qu'elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise ; qu'en outre, des provisions pour perte ne peuvent être déduites que si la perspective d'une perte se trouve établie par la comparaison, pour une opération ou un ensemble d'opérations suffisamment homogènes, entre les coûts à supporter et les recettes escomptées ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE DE CREDIT DES SOCIETES D'ASSURANCES A CARACTERE MUTUEL (SOCRAM), constituée par plusieurs sociétés à caractère mutuel, a pour objet d'offrir des crédits à la consommation aux adhérents de ces sociétés et leur propose des contrats de prêts qui contiennent une clause par laquelle elle renonce à poursuivre le recouvrement du montant des mensualités non échues à la date à laquelle l'emprunteur viendrait à décéder ou à être frappé d'incapacité de travail ;
Considérant qu'après avoir relevé que la SOCIETE DE CREDIT DES SOCIETES D'ASSURANCES A CARACTERE MUTUEL était fondée à soutenir qu'en raison des engagements souscrits dans des contrats conclus au cours des exercices 1980 à 1982, elle pouvait tenir pour probable qu'elle aurait à supporter au cours des exercices ultérieurs couverts par ces contrats la perte, imputable au jeu de la clause susévoquée d'une part du montant des prêts consentis à ses clients, la cour administrative d'appel a jugé que, même si cette société avait évalué avec une précision suffisante le montant de cette perte, elle n'était en droit de porter en provision que l'excédent éventuel de celui-ci sur le montant des recettes dégagées par ces mêmes contrats ou, à tout le moins, de la part de ces recettes, évaluée avec la même précision, destinée à compenser la garantie offerte aux clients qui les avaient souscrits ; que la Cour en a déduit que la société n'eut été fondée à constituer une provision que dans le cas et dans la mesure où le bilan prévisionnel de l'ensemble des contrats de prêts assortis de la clause dont il s'agit aurait fait apparaître un solde négatif, mais que, la société ne soutenant, ni même n'alléguant que ce pût être le cas, elle ne justifiait pas avoir régulièrement constitué les provision en litige ; qu'en statuantainsi, la cour administrative d'appel a fait une exacte application des dispositions précitées de l'article 39 du code général des impôts ; que la SOCIETE DE CREDIT DES SOCIETES D'ASSURANCES A CARACTERE MUTUEL n'est, par suite, pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE DE CREDIT DES SOCIETES D'ASSURANCES A CARACTERE MUTUEL est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE DE CREDIT DES SOCIETES D'ASSURANCES A CARACTERE MUTUEL et au ministre de l'économie et des finances.