Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 février 1993 et 9 juin 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Caisse centrale de réassurance (C.C.R.), dont le siège est ... ; la Caisse centrale de réassurance demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule un arrêt du 3 décembre 1992 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation d'un jugement en date du 17 mai 1991 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande de condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 5 645 272 F outre intérêts de droit, à raison de la destruction le 1er novembre 1984 d'un rotor destiné à une centrale thermique d'EDF ;
2°) condamne l'Etat à verser à la Caisse centrale de réassurance la somme de 5 645 272 F avec intérêts de droit à compter du 18 juin 1987, capitalisés le 10 février 1993 ;
3°) condamne l'Etat, en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, à verser à la Caisse centrale de réassurance la somme de 12 000 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et notamment son article 75-I ;
Vu la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 et notamment son article 92 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Laigneau, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Baraduc-Benabent, avocat de la Caisse centrale de réassurance,
- les conclusions de Mme Pécresse, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 92 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 : "L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre des personnes, soit contre des biens" ;
Considérant qu'il résulte des pièces versées au dossier soumis à la Cour et souverainement appréciées par elle, que le 1er novembre 1984, sur le port d'Ajaccio, un convoi transportant un rotor destiné à la centrale électrique du Vazzio a été précipité dans la mer par un groupe d'une douzaine d'individus, masqués et porteurs de barres de fer, et que si une manifestation contre le déchargement de ce convoi se déroulait alors à proximité, les auteurs des faits, qui n'ont pu être identifiés, ne faisaient pas partie des manifestants, lesquels n'ont pas pris part à l'opération ;
Considérant que la Cour s'est livrée à une exacte qualification juridique des faits et n'a pas commis d'erreur de droit en estimant que ces actes délictueux, eu égard notamment à leur caractère clandestin et organisé, n'avaient pas été commis par un attroupement ou un rassemblement au sens de l'article 92 précité ;
Considérant que la Cour n'a pas dénaturé les écritures de première instance en écartant comme nouveau en appel et irrecevable le moyen tiré de la responsabilité pour faute de l'Etat ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Caisse centrale de réassurance n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt en date du 3 décembre 1992 de la cour administrative d'appel de Lyon rejetant sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice subi par elle du fait de ces incidents ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à la Caisse centrale de réassurance la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la Caisse centrale de réassurance est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Caisse centrale de réassurance et au ministre de l'intérieur.