Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 janvier 2001 présentée pour M. Habou X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 2 décembre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 4 octobre 1999 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Mahé, Maître des Requêtes ;
- les observations de Me de Nervo, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité malienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification de la décision du 9 avril 1999 du préfet de police lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : à 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des documents produits par M. X... que celui-ci résidait habituellement sur le territoire français depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté de reconduite à la frontière contesté ; qu'il était ainsi en droit de bénéficier d'une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" en application des dispositions précitées ; qu'il suit de là qu'il est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 4 octobre 1999 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : Le jugement du 2 décembre 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 4 octobre 1999 du préfet de police ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Habou X..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.