Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juillet et 12 octobre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Ali A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision n° 08007368 du 15 février 2010 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 avril 2008 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant sa demande d'asile ;
2°) réglant l'affaire au fond de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Nicolas Labrune, Auditeur,
- les observations de Me Spinosi, avocat de M. A et de Me Foussard, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides,
- les conclusions de M. Julien Boucher, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Spinosi, avocat de M. A et à Me Foussard, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, ressortissant turc d'origine kurde et membre du parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) depuis 1992, a présenté le 13 février 2007 une demande d'asile en France que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejetée le 2 avril 2008, au motif qu'il existait des raisons sérieuses de penser que l'intéressé s'était rendu coupable de crimes graves de droit commun au sens du b) du F de l'article 1er de la convention de Genève, et ne pouvait de ce seul fait se voir reconnaître la qualité de réfugié ; que la Cour nationale du droit d'asile a rejeté le recours de M. A par une décision du 15 février 2010 contre laquelle l'intéressé se pourvoit en cassation ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er, paragraphe F de la convention de Genève du 28 juillet 1951 : " Les dispositions de cette convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser : (...) b) Qu'elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d'accueil avant d'y être admises comme réfugiés (...) " ;
Considérant que la Cour nationale du droit d'asile a jugé que M. A entrait dans le champ des stipulations précitées de l'article 1er, paragraphe F de la convention de Genève en se bornant à mentionner que l'intéressé, qui déclarait avoir exercé des responsabilités à un niveau local au sein du PKK, devait être regardé comme ayant participé directement ou indirectement à la prise de décisions ayant conduit à des crimes graves de droit commun ; qu'en énonçant un tel motif sans préciser la nature des crimes qu'il aurait commis ou contribué à commettre, alors que l'intéressé n'avait pas un rôle dirigeant dans cette organisation, la Cour nationale du droit d'asile n'a pas suffisamment motivé sa décision ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision du 15 février 2010 de la Cour nationale du droit d'asile ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas partie à la présente instance ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du 15 février 2010 de la Cour nationale du droit d'asile est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.
Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. A est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Ali A et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.