Vu la procédure suivante :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 10 août 2011 par laquelle le directeur de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes lui a infligé une pénalité financière de 5 546 euros et, subsidiairement, de ramener cette pénalité à 500 euros. Par un jugement n° 1103843 du 9 juillet 2013, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 13MA03655 du 13 février 2015, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. A...contre le jugement du tribunal administratif de Nice du 9 juillet 2013.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 8 juin 2015, 8 septembre 2015 et 19 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 13 février 2015 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes la somme de 3 000 euros à verser à son avocat, Me Le Prado, sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2005-1016 du 23 août 2005 ;
- le décret n° 2009-982 du 20 août 2009 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie Sirinelli, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat de M.A..., et à la SCP Boutet, Hourdeaux, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...était bénéficiaire depuis le 1er novembre 2001 d'une pension d'invalidité versée par la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes. Sur la base de déclarations aux termes desquelles il affirmait résider en France, il a perçu en complément, entre le 1er décembre 2005 et le 31 mai 2007, l'allocation supplémentaire d'invalidité prévue par l'article L. 815-24 du code de la sécurité sociale, pour la somme totale de 4 753,43 euros. A la suite d'une enquête menée en 2008 par un agent de la caisse primaire, cet organisme a estimé qu'il ne résidait pas en France et lui a réclamé le trop-perçu correspondant, avant de ramener sa dette à la somme de 3 403,87 euros. Par une décision du 10 août 2011, la caisse primaire lui a également infligé une pénalité financière de 5 546 euros, au motif qu'il s'était livré à de fausses déclarations. M. A...a contesté cette dernière décision sans succès devant le tribunal administratif de Nice puis la cour administrative d'appel de Marseille. Il se pourvoit désormais en cassation contre l'arrêt rendu par cette cour le 13 février 2015.
2. Aux termes de l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie, en vigueur à la date des faits sanctionnés : " L'inobservation des règles du présent code par les professionnels de santé, les établissements de santé, les employeurs ou les assurés, ayant abouti à une demande de remboursement ou de prise en charge ou à un remboursement ou à une prise en charge indus (...) peuvent faire l'objet d'une pénalité prononcée par le directeur de l'organisme local d'assurance maladie, après avis d'une commission composée et constituée au sein du conseil de cet organisme. (...) / (...) / Les modalités d'application du présent article, notamment les règles mentionnées au premier alinéa et le barème des pénalités, sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article R. 147-6 du même code, dans sa rédaction issue du décret du 23 août 2005 pris pour l'application de l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale, en vigueur à la même date : " Peuvent faire l'objet d'une pénalité : / 1° Les assurés : / - qui fournissent de fausses déclarations relatives à l'état civil, la résidence, la qualité d'assuré ou d'ayant droit ou les ressources dans le but d'obtenir ou de faire obtenir une prestation d'assurance maladie ou d'accident du travail (...) ".
3. Les dispositions citées ci-dessus de l'article R. 147-6 du code de la sécurité sociale prévoient la possibilité d'appliquer la sanction mentionnée à l'article L. 162-1-14 du même code aux seuls assurés ayant fourni de fausses déclarations en vue de l'obtention de prestations d'assurance maladie ou d'accident du travail. Le champ d'application de cet article n'a été étendu aux prestations d'invalidité, telles que celle perçue par M.A..., que par le décret du 20 août 2009 relatif aux pénalités financières prévues à l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale et à diverses mesures intéressant la lutte contre la fraude. Dès lors, en ne relevant pas d'office le moyen d'ordre public, dont le bien-fondé ressortait des pièces du dossier dont elle était saisie, tiré de ce que le directeur de la caisse primaire avait fait application des dispositions de l'article R. 147-6 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction issue du décret du 20 août 2009, à des agissements commis par M. A...avant l'entrée en vigueur de ce décret, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.
4. Par suite, l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille doit être annulé. Le moyen retenu suffisant à entraîner cette annulation, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres moyens du pourvoi.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
6. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 3 que le directeur de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes a méconnu le champ d'application des dispositions sur lesquelles il s'est fondé en faisant application de l'article R. 147-6 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret du 20 août 2009 pour sanctionner des agissements commis par M. A...avant l'entrée en vigueur de ce décret. Il suit de là que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions tenant à l'annulation de la décision du directeur de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes du 10 août 2011. Ce moyen suffisant à entraîner l'annulation de la sanction en litige, il n'est pas nécessaire d'examiner les moyens de la requête.
7. M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Le Prado, avocat de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes une somme de 2 000 euros à verser à Me Le Prado.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 13 février 2015 et le jugement du tribunal administratif de Nice du 9 juillet 2013 sont annulés.
Article 2 : La décision du 10 août 2011 par laquelle le directeur de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes a infligé à M. A...une pénalité financière de 5 546 euros est annulée.
Article 3 : La caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes versera à Me Le Prado, avocat de M.A..., une somme de 2 000 euros au titre des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Le Prado renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes.
Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.