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18/07/2018 | FRANCE | N°420043

France | France, Conseil d'État, 4ème et 1ère chambres réunies, 18 juillet 2018, 420043


Vu les procédures suivantes :

La commune de Val-de-Reuil, l'association Collectif PMF Agglo, Mme M..., la commune de Poses, le conseil départemental des parents d'élèves des écoles publiques de l'Eure - FCPE 27, Mme C...H..., Mme F...I..., Mme G...J..., Mme B...L..., Mme C...E..., Mme F... A...et M. D...K...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Rouen, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la délibération du conseil départemental de l'Eure en date du 11 décembre 2017 adoptant la nouvelle

carte scolaire sur le territoire de la communauté d'agglomération S...

Vu les procédures suivantes :

La commune de Val-de-Reuil, l'association Collectif PMF Agglo, Mme M..., la commune de Poses, le conseil départemental des parents d'élèves des écoles publiques de l'Eure - FCPE 27, Mme C...H..., Mme F...I..., Mme G...J..., Mme B...L..., Mme C...E..., Mme F... A...et M. D...K...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Rouen, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la délibération du conseil départemental de l'Eure en date du 11 décembre 2017 adoptant la nouvelle carte scolaire sur le territoire de la communauté d'agglomération Seine-Eure avec fermeture du collège Pierre Mendès France à Val-de-Reuil et mise à jour des secteurs de recrutement. Par une ordonnance n° 1800993-1801029 du 16 avril 2018, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté cette demande.

1° Sous le n° 420043, par un pourvoi, un nouveau mémoire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 23 avril, 1er juin, 22 juin et 29 juin 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Val-de-Reuil demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge du département de l'Eure la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 420184, par un pourvoi et deux mémoires en réplique, enregistrés les 27 avril, 22 et 29 juin 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Collectif PMF Agglo, MmeM..., la commune de Poses, le conseil départemental des parents d'élèves des écoles publiques de l'Eure - FCPE 27, Mme C...H..., Mme F...I..., Mme C...E..., Mme F...A...et M. D...K...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la même ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à leur demande ;

3°) de mettre à la charge du département de l'Eure la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la charte de l'environnement ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de la commune de Val de Reuil, de l'Association Collectif PMF Agglo, de MmeM..., de la commune de Poses, du conseil départemental des parents d'élèves des écoles publiques de l'Eure - Fcpe 27, de Mme C...H..., de Mme F...I..., de Mme C...E..., de Mme F...A...et de M. D...K...et à et la SCP Piwnica, Molinié, avocat du département de l'Eure ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 4 juillet 2018 sous le numéro 420043, présentée par la commune de Val-de-Reuil ;

1. Considérant que les pourvois de la commune de Val-de-Reuil et de l'association Collectif PMF Agglo et autres sont dirigés contre la même ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Rouen; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 213-1 du code de l'éducation : " Le conseil départemental établit, après accord de chacune des communes concernées (...) le programme prévisionnel des investissements relatifs aux collèges qui résulte du schéma prévisionnel des formations mentionné à l'article L. 214-1 du présent code. / A ce titre, le conseil départemental arrête après avis du conseil départemental de l'éducation nationale, en tenant compte de critères d'équilibre démographique, économique et social, la localisation des établissements, leur capacité d'accueil, leur secteur de recrutement et le mode d'hébergement des élèves. (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la délibération contestée du conseil départemental de l'Eure du 11 décembre 2017 avait pour objet, en vertu de la compétence conférée aux départements par ces dispositions, de modifier la localisation des collèges du département en supprimant celle de Val-de-Reuil et d'établir, en conséquence, les nouveaux secteurs de recrutement de l'ensemble des collèges sur le territoire de la communauté d'agglomération Seine-Eure ; qu'une telle délibération revêt le caractère d'un acte faisant grief, susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;

4. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'ordonnance attaquée que, pour rejeter la demande qui lui était présentée sur le fondement des dispositions citées plus haut de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, le président du tribunal administratif de Rouen a jugé que la délibération contestée constituait une simple mesure préparatoire de la décision de fermeture du collège Pierre Mendès-France de Val-de-Reuil, prise par le préfet de l'Eure le 12 décembre suivant ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que le président du tribunal administratif a, ce faisant, entaché son ordonnance d'une erreur de droit ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leurs pourvois, la commune de Val-de-Reuil et l'association Collectif PMF Agglo et autres sont fondés à demander l'annulation de l'ordonnance qu'ils attaquent ;

6. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par les mêmes requérants, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

7. Considérant que la commune de Val-de-Reuil et l'association PMF Agglo et autres soutiennent que la délibération contestée du conseil départemental de l'Eure du 11 décembre 2017 a été précédée d'une consultation du conseil départemental de l'éducation nationale entachée d'irrégularité en ce que les nouveaux secteurs de recrutement finalement retenus n'ont été présentés qu'en cours de séance ; qu'elle a été prise au vu d'une information fournie aux conseillers départementaux qui méconnaissait les dispositions de l'article L. 3121-19 du code général des collectivités territoriales ; qu'elle est irrégulière, faute d'avoir été précédée d'un avis du conseil d'administration du collège concerné ; qu'elle n'a pas été précédée de l'avis du comité technique paritaire du département, requis par les dispositions de l'article 33 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; qu'elle méconnaît l'article L. 213-1 du code de l'éducation en ce que seul le critère social est pris en compte pour définir la nouvelle sectorisation des élèves ; qu'elle méconnaît la compétence du conseil départemental en ce que celui-ci s'estime, à tort, lié par la décision de l'Etat de limiter le nombre de collèges du département de l'Eure ainsi que par sa propre délibération du 20 juin 2016 approuvant le plan pluriannuel d'investissement des collèges ; qu'elle est illégale en raison des illégalités qui entachent la décision de l'Etat de limiter à cinquante-six le nombre de collèges du département ; qu'elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et de violation des dispositions de l'article L. 213-1 du code de l'éducation en ce qu'elle se fonde sur une situation démographique de la commune de Val-de-Reuil qui n'est que temporaire, retient une présence d'amiante que l'on constate dans d'autres collèges et prévoit une nouvelle carte scolaire portant préjudice aux dispositifs d'éducation prioritaire et entraînant un accroissement des temps de trajet des élèves ; qu'elle est, enfin, entachée de violation des dispositions de l'article 7 de la Charte de l'environnement et des articles L.120-1 et L. 123-19-1 du code de l'environnement en ce qu'elle n'a pas été précédée d'une consultation du public ;

8. Considérant qu'aucun de ces moyens ne paraît, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la délibération attaquée ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Val-de-Reuil et l'association Collectif PMF Agglo et autres ne sont pas fondés à demander la suspension de l'exécution de la délibération qu'ils contestent ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le département de l'Eure au titre de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Rouen du 16 avril 2018 est annulée.

Article 2 : Les demandes présentées par la commune de Val-de-Reuil et l'association Collectif PMF Agglo et autres devant le juge des référés du tribunal administratif de Rouen ainsi que leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions du département de l'Eure présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Val-de-Reuil, à l'association collectif PMF Agglo, premier requérant dénommé pour le pourvoi enregistré sous le n° 420184, et au département de l'Eure.

Copie en sera adressée au ministre de l'éducation nationale.


Synthèse
Formation : 4ème et 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 420043
Date de la décision : 18/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ACTES - ACTES ADMINISTRATIFS - NOTION - ACTES À CARACTÈRE DE DÉCISION - ACTES PRÉSENTANT CE CARACTÈRE - DÉLIBÉRATION D'UN CONSEIL DÉPARTEMENTAL MODIFIANT LA LOCALISATION DES COLLÈGES CONDUISANT À LA FERMETURE D'UN COLLÈGE - ACTE FAISANT GRIEF - EXISTENCE - MESURE PRÉPARATOIRE DE LA DÉCISION PRÉFECTORALE DE FERMETURE DU COLLÈGE - ABSENCE [RJ1].

01-01-05-02-01 Une délibération d'un conseil départemental ayant pour objet, en vertu de la compétence conférée aux départements par l'article L. 213-1 du code de l'éducation, de modifier la localisation des collèges du département en supprimant celle d'une commune et d'établir, en conséquence, les nouveaux secteurs de recrutement de l'ensemble des collèges sur le territoire d'une communauté d'agglomération, revêt le caractère d'un acte faisant grief, susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Elle ne constitue pas une simple mesure préparatoire de la décision de fermeture du collège prise par le préfet.

COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - DÉPARTEMENT - ATTRIBUTIONS - COMPÉTENCES TRANSFÉRÉES - COLLÈGES - DÉLIBÉRATION MODIFIANT LA LOCALISATION DES COLLÈGES CONDUISANT À LA FERMETURE D'UN COLLÈGE - ACTE FAISANT GRIEF - EXISTENCE - MESURE PRÉPARATOIRE DE LA DÉCISION DU PRÉFET DE FERMETURE DU COLLÈGE - ABSENCE [RJ1].

135-03-02-01-03 Une délibération d'un conseil départemental ayant pour objet, en vertu de la compétence conférée aux départements par l'article L. 213-1 du code de l'éducation, de modifier la localisation des collèges du département en supprimant celle d'une commune et d'établir, en conséquence, les nouveaux secteurs de recrutement de l'ensemble des collèges sur le territoire d'une communauté d'agglomération, revêt le caractère d'un acte faisant grief, susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Elle ne constitue pas une simple mesure préparatoire de la décision de fermeture du collège prise par le préfet.

ENSEIGNEMENT ET RECHERCHE - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT DU SECOND DEGRÉ - ADMINISTRATION ET FONCTIONNEMENT DES LYCÉES ET COLLÈGES - DÉLIBÉRATION D'UN CONSEIL DÉPARTEMENTAL MODIFIANT LA LOCALISATION DES COLLÈGES CONDUISANT À LA FERMETURE D'UN COLLÈGE - ACTE FAISANT GRIEF - EXISTENCE - MESURE PRÉPARATOIRE DE LA DÉCISION DU PRÉFET DE FERMETURE DU COLLÈGE - ABSENCE [RJ1].

30-02-02-03 Une délibération d'un conseil départemental ayant pour objet, en vertu de la compétence conférée aux départements par l'article L. 213-1 du code de l'éducation, de modifier la localisation des collèges du département en supprimant celle d'une commune et d'établir, en conséquence, les nouveaux secteurs de recrutement de l'ensemble des collèges sur le territoire d'une communauté d'agglomération, revêt le caractère d'un acte faisant grief, susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Elle ne constitue pas une simple mesure préparatoire de la décision de fermeture du collège prise par le préfet.


Références :

[RJ1]

Rappr. CE, décision du même jour, Commune du Val-de-Reuil, Association Collectif PMF agglo, n° 420047 420185, à mentionner aux Tables.


Publications
Proposition de citation : CE, 18 jui. 2018, n° 420043
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno Bachini
Rapporteur public ?: Mme Sophie-Justine Lieber
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN, STOCLET ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:420043.20180718
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