Vu la procédure suivante :
La commune de Haux a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 17 décembre 2012 par laquelle le syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable et d'assainissement de Langoiran (SIAEPA) a validé la convention du 15 novembre 2012 fixant le régime tarifaire applicable à la commune de Haux pour la fourniture d'eau potable. Par un jugement n° 1300558 du 16 novembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 16BX00175 du 6 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par la commune de Haux contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 janvier 2019, 5 avril 2019 et 7 avril 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Haux demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge du SIAEPA la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Thomas Janicot, auditeur,
- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Le Bret-Desaché, avocat de la commune de Haux et à la SCP Hémery, Thomas-Raquin, Le Guerer, avocat du syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable et d'assainissement de de Langoiran (SIAEPA) ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une convention du 21 décembre 2006, ayant pour objet la définition des conditions techniques et financières de fonctionnement de l'interconnexion des réseaux des deux collectivités, le syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable et d'assainissement-Région de Langoiran (SIAEPA) s'est engagé, pour une durée de trois ans renouvelable tacitement, à fournir à la commune de Haux l'intégralité de l'eau potable consommée par ses habitants, c'est-à-dire plusieurs dizaines de milliers de mètres cubes par an. Une rémunération a, alors, été fixée au tarif indexé, préférentiel par rapport aux abonnés ordinaires, de 0,30 euros hors taxe par m3 pour la part dite " fermière " revenant à la société Nantaise des eaux services avec laquelle le syndicat était lié par contrat d'affermage, la commune étant exonérée, eu égard aux travaux directement financés par ses soins et portant à la fois sur son réseau et sur le renforcement du pompage vers le réservoir du Haut Langoiran, de la part dite " collectivité " revenant au syndicat, au titre des dépenses d'investissement à sa charge. Après avoir décidé, par une délibération du 6 décembre 2011, de ne pas renouveler cette convention afin de réviser à la hausse la rémunération qu'elle prévoyait, le syndicat a proposé, le 12 novembre 2012, un nouveau projet de convention à la commune, avec une part " fermière " de 0,35 euros hors taxe par m3 et une part " collectivité " de 0,256 euros hors taxe par m3. A la suite de réserves émises par la commune sur cette dernière part, le syndicat, par une délibération du 17 décembre 2012, a " validé " la convention telle qu'elle avait été proposée en précisant qu'en l'absence de signature avant le 31 décembre 2012 par la commune, celle-ci deviendrait un abonné ordinaire, ce qui impliquait des tarifs plus élevés pour chacune des deux parts. La commune de Haux n'a pas signé la convention mais a continué à s'alimenter auprès du syndicat et a demandé l'annulation de la délibération du 17 décembre 2012. Elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 novembre 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel qu'elle a formé contre le jugement du 16 novembre 2015 du tribunal administratif de Bordeaux rejetant cette demande.
2. En premier lieu, les parties à un contrat administratif peuvent saisir le juge d'un recours de plein contentieux contestant la validité du contrat qui les lie. Il appartient alors au juge, lorsqu'il constate l'existence d'irrégularités, d'en apprécier l'importance et les conséquences, après avoir vérifié que les irrégularités dont se prévalent les parties sont de celles qu'elles peuvent, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, invoquer devant lui. Il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité commise et en tenant compte de l'objectif de stabilité des relations contractuelles, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, la résiliation du contrat ou, en raison seulement d'une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, son annulation. Cette action est ouverte aux parties au contrat pendant toute la durée d'exécution de celui-ci. En second lieu, lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat. Toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel.
3. Il ressort des éléments de fait rappelés au point 1 que le présent litige a trait aux modalités financières selon lesquelles le SIAEPA a continué à fournir à la commune de Haux l'eau potable consommée par ses habitants, à la convention conclue entre elles le 21 décembre 2006, dont les clauses tarifaires doivent être regardées comme ayant été modifiées, en l'absence d'accord entre les parties, par la délibération du 17 décembre 2012, laquelle n'est, dès lors, pas détachable des conditions d'exécution du contrat. Par suite, en statuant comme juge de l'excès de pouvoir sur les conclusions de la commune de Haux tendant à l'annulation de cette délibération, la cour a méconnu son office.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il besoin de se prononcer sur les moyens du pourvoi, que l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux doit être annulé.
5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune de Haux et du SIAEPA présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 6 novembre 2018 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la commune de Haux et le syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable et d'assainissement de Langoiran sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Haux et au syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable et d'assainissement de Langoiran.