Vu la procédure suivante :
La société Aramis a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler, d'une part, l'arrêté du 10 mai 2016 par lequel le maire de Régny (Loire) a constaté l'état de péril imminent d'un immeuble situé 1, 3 et 5 rue du Pont, l'a mise en demeure de procéder, dans le délai de quinze jours, à divers travaux urgents afin de garantir la sécurité publique, à défaut de quoi il y serait pourvu d'office et à ses frais par la commune et a ordonné l'évacuation de l'immeuble dans le délai de cinq jours et, d'autre part, l'arrêté du 10 octobre 2016 par lequel le maire de Régny l'a mise en demeure d'évacuer l'immeuble. Par un jugement n° 1605672-1607864 du 15 mars 2018, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 18LY01796 du 23 avril 2019, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de la société Aramis, annulé ce jugement et les arrêtés des 10 mai et 10 septembre 2016.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 juin et 20 septembre 2019, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Régny demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de la société Aramis la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme B... A..., auditrice,
- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat de la commune de Régny et à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de la société Aramis.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le maire de Régny (Loire) a, par un arrêté du 10 mai 2016 pris au titre de la procédure de péril imminent prévue par l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, ordonné l'évacuation, dans un délai de cinq jours, de l'immeuble appartenant à la société Aramis et mis cette dernière en demeure de réaliser, dans un délai de quinze jours, les travaux jugés nécessaires pour garantir la sécurité publique. Par un second arrêté du 10 octobre 2016, pris sur le même fondement, le maire a ordonné l'évacuation sans délai de l'immeuble. La commune de Régny se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 23 avril 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de la société Aramis, d'une part, annulé le jugement du 15 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon avait rejeté sa demande dirigée contre les arrêtés du 10 mai et du 10 octobre 2016 et, d'autre part, annulé ces deux arrêtés.
2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 511-1 code de la construction et de l'habitation, alors applicable : " Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices quelconques lorsqu'ils menacent ruine et qu'ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité ou lorsque, d'une façon générale, ils n'offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique, dans les conditions prévues à l'article L. 511-2. Toutefois, si leur état fait courir un péril imminent, le maire ordonne préalablement les mesures provisoires indispensables pour écarter ce péril, dans les conditions prévues à l'article L. 511-3 ". Aux termes de l'article L. 511-3 du même code : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate. / Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l'évacuation de l'immeuble. / Dans le cas où ces mesures n'auraient pas été exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d'office. En ce cas, le maire agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais. / Si les mesures ont à la fois conjuré l'imminence du danger et mis fin durablement au péril, le maire, sur le rapport d'un homme de l'art, prend acte de leur réalisation et de leur date d'achèvement. / Si elles n'ont pas mis fin durablement au péril, le maire poursuit la procédure dans les conditions prévues à l'article L. 511-2 ".
3. Il résulte des termes mêmes de l'arrêt attaqué que, pour statuer sur la légalité des arrêtés de péril imminent pris, ainsi qu'il a été dit, sur le fondement des dispositions citées ci-dessus de l'article L.511-3 du code de la construction et de l'habitation, la cour administrative d'appel s'est fondée sur les circonstances de droit et de fait à la date de leur édiction et non, ainsi qu'il lui appartenait de le faire en qualité de juge du plein contentieux, à la date à laquelle elle se prononçait. Par suite, la cour ayant ainsi méconnu son office, il y a lieu, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les moyens du pourvoi, d'annuler son arrêt.
4. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
5. Il résulte de l'instruction que, par un arrêté de péril du 20 juillet 2017, pris sur le fondement de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation, le maire de Régny a mis fin à la procédure de péril imminent ouverte par les arrêtés attaqués des 10 mai et 10 octobre 2016. Par suite, la demande de la société Aramis avait perdu son objet à la date à laquelle elle a été, le 15 mars 2018, rejetée par le tribunal administratif de Lyon. Il y a lieu, par suite, d'annuler ce jugement, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les moyens d'appel de la société.
6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes d'annulation présentées par la société Aramis devant le tribunal administratif de Lyon. Il résulte de ce qui vient d'être dit qu'il n'y a plus lieu d'y statuer.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Aramis le versement à la commune de Régny d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise, au même titre, à la charge de la commune de Régny, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 23 avril 2019 de la cour administrative d'appel de Lyon et le jugement du 15 mars 2018 du tribunal administratif de Lyon sont annulés.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes présentées par la société Aramis devant le tribunal administratif de Lyon.
Article 3 : La société Aramis versera à la commune de Régny une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la commune de Régny, présenté au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée la commune de Régny et à la société Aramis.