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31/03/2021 | FRANCE | N°428029

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 31 mars 2021, 428029


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 14 février 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie - Confédération générale du travail (FNME - CGT) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note du directeur de la Caisse nationale des industries électriques et gazières du 17 octobre 2017 en ce qu'elle prévoit que la Commission nationale des accidents du travail ne peut être saisie que par la victime ou ses ayants droit en matière de re

connaissance de la faute inexcusable de l'employeur et d'attribution des presta...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 14 février 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie - Confédération générale du travail (FNME - CGT) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note du directeur de la Caisse nationale des industries électriques et gazières du 17 octobre 2017 en ce qu'elle prévoit que la Commission nationale des accidents du travail ne peut être saisie que par la victime ou ses ayants droit en matière de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur et d'attribution des prestations afférentes et la décision implicite rejetant sa demande de retrait de cette décision formée le 16 octobre 2018 ;

2°) de mettre à la charge de la Caisse nationale des industries électriques et gazières la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 46-2426 du 30 octobre 1946 ;

- la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 ;

- le décret n° 53-531 du 28 mai 1953 ;

- le décret n° 2004-1354 du 10 décembre 2004 ;

- le décret n° 2008-627 du 27 juin 2008 ;

- l'arrêté du 20 mai 1950 portant création d'une commission nationale des rentes à allouer par suite d'accidents du travail aux agents soumis au statut national du personnel des industries électriques et gazières ;

- l'arrêté du 30 juillet 1991 portant institution de la commission nationale chargée d'émettre des avis en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles survenus aux agents soumis au statut national du personnel des industries électriques et gazières ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Agnès Pic, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Vincent Villette, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie - Confédération générale du travail et à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la Caisse nationale des industries électriques et gazières ;

Considérant ce qui suit :

1. En vertu de l'article 3 du décret du 28 mai 1953 relatif à l'application aux régimes spéciaux de la loi n° 46-2426 du 30 octobre 1946 sur la prévention et la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles, dans les entreprises qui assumaient directement la charge totale de la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles survenus à leur personnel, il était institué une ou plusieurs commissions composées pour moitié de représentants du personnel désignés par les organisations syndicales les plus représentatives et pour moitié de représentants de l'entreprise employeur, chargée de donner son avis sur le droit de la victime ou de ses ayants droit à une rente et sur le montant de celle-ci. L'entreprise employeur prenait sa décision au vu de cet avis. Sur le fondement de ces dispositions, le ministre des affaires sociales et de l'intégration et le ministre délégué à l'industrie et au commerce extérieur ont prévu, par l'article 1er de l'arrêté du 30 juillet 1991 portant institution de la commission nationale chargée d'émettre des avis en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles survenus aux agents soumis au statut national du personnel des industries électriques et gazières, abrogeant l'arrêté du 20 mai 1950 portant création d'une commission nationale des rentes : " Il est institué une commission nationale chargée, en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles survenus aux agents bénéficiaires des dispositions du statut national du personnel des industries électriques et gazières, de donner un avis sur le droit à rente de la victime ou de ses ayants droit et le montant de celle-ci ". Par une décision du 10 septembre 1991, les directeurs généraux d'Electricité de France et de Gaz de France ont prévu notamment que : " La commission peut soulever la faute inexcusable de l'employeur concurremment avec la victime ".

2. L'article 16 de la loi du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières a confié la gestion du régime spécial d'assurance vieillesse, invalidité, décès, accidents du travail et maladies professionnelles des industries électriques et gazières à la Caisse nationale des industries électriques et gazières, organisme de sécurité sociale de droit privé chargé, à compter du 1er janvier 2005, " de verser aux affiliés les prestations en espèces correspondantes (...) ". En vertu du 3° du I de l'article 1er du décret du 10 décembre 2004 relatif à la Caisse nationale des industries électriques et gazières, cette caisse a notamment pour rôle d'assurer le service des prestations en espèces au titre du risque accidents du travail et maladies professionnelles. Aux termes des II et III de l'article 6 du même décret : " II. - Le conseil d'administration peut désigner en son sein des commissions et leur déléguer une partie de ses attributions. Le conseil d'administration désigne, chaque année, les membres participant à des commissions du conseil (...). La composition, les attributions et le mode de fonctionnement de ces commissions sont définis dans le règlement intérieur de la caisse prévu au 1° du II de l'article 3. / III. - Les réclamations formées contre les décisions prises par la caisse en ce qui concerne les missions prévues aux 1°, 2° et 3° de l'article 1er sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil d'administration de la caisse. (...) / La commission (...) est composée pour moitié de représentants des salariés et pour moitié des représentants des employeurs (...) ".

3. La Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie - Confédération générale du travail demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la note du directeur de la Caisse nationale des industries électriques et gazières du 17 octobre 2017, en ce qu'elle prévoit que la Commission nationale des accidents du travail ne peut être saisie que par la victime ou ses ayants droit en matière de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur et d'attribution des prestations afférentes, ainsi que la décision implicite rejetant sa demande de retrait de cette décision.

4. Les documents de portée générale émanant d'autorités publiques, matérialisés ou non, tels que les circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif peuvent être déférés au juge de l'excès de pouvoir lorsqu'ils sont susceptibles d'avoir des effets notables sur les droits ou la situation d'autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de les mettre en oeuvre. Ont notamment de tels effets ceux de ces documents qui ont un caractère impératif ou présentent le caractère de lignes directrices.

5. Par les dispositions de la loi du 9 août 2004 et du décret du 10 décembre 2004 mentionnées au point 2, la charge de la réparation, par des prestations en espèces, des accidents du travail et des maladies professionnelles survenus au personnel relevant du statut national du personnel des industries électriques et gazières a été transférée des entreprises les employant à la Caisse nationale des industries électriques et gazières. Dès lors, à compter du 1er janvier 2005, les dispositions de l'article 3 du décret du 28 mai 1953 prévoyant l'intervention d'une commission paritaire chargée de donner son avis à l'entreprise employeur sur le droit de la victime ou de ses ayants droit à une rente et sur le montant de celle-ci ne se sont plus appliquées aux industries électriques et gazières. Il suit de là qu'à supposer que le conseil d'administration de la Caisse nationale des industries électriques et gazières ait entendu, sous la dénomination de Commission nationale des accidents du travail, prévoir une commission paritaire chargée de donner un avis sur le droit à une rente et sur son montant, la décision des directeurs généraux d'Electricité de France et de Gaz de France du 10 septembre 1991 précisant ses attributions ne lui était, en tout état de cause, pas applicable. Par suite, le directeur de la Caisse nationale des industries électriques et gazières, en ce qu'il indique, par sa note du 17 octobre 2017, ainsi qu'il avait compétence pour le faire, que la décision du 10 septembre 1991 n'est plus applicable et que la Commission nationale des accidents du travail ne peut soulever de sa propre initiative la faute inexcusable de l'employeur, ne méconnaît pas le sens et la portée des dispositions qu'il interprète. En particulier, la fédération requérante ne peut utilement invoquer, ni le rôle des caisses primaires d'assurance maladie dans le régime général, auxquelles la Commission nationale des accidents du travail ne saurait, en tout état de cause, se substituer, ni la méconnaissance de l'article 3 du décret du 28 mai 1953 et de l'article 1er de l'arrêté du 30 juillet 1991, qui, ainsi qu'il a été dit, ne sont plus susceptibles de s'appliquer aux industries électriques et gazière depuis le 1er janvier 2005, quelle que soit la portée de l'abrogation ultérieure, par l'article 3 du décret du 27 juin 2008 relatif au régime de retraite et d'invalidité du personnel des industries électriques et gazières, des dispositions réglementaires antérieurement applicables à l'attribution d'un droit aux prestations prévues par l'annexe 3 au statut national du personnel de ces industries.

6. Il résulte de ce qui précède que la Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie - Confédération générale du travail n'est pas fondée à demander l'annulation de la note du directeur de la Caisse nationale des industries électriques et gazières du 17 octobre 2017 en ce qu'elle indique que la Commission nationale des accidents du travail ne peut soulever de sa propre initiative la faute inexcusable de l'employeur, non plus que le refus de la retirer.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la Caisse nationale des industries électriques et gazières, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la Caisse nationale des industries électriques et gazières au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie - Confédération générale du travail est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la Caisse nationale des industries électriques et gazières présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie - Confédération générale du travail et à la Caisse nationale des industries électriques et gazières.

Copie en sera adressée au ministre des solidarités et de la santé.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 428029
Date de la décision : 31/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 31 mar. 2021, n° 428029
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Agnès Pic
Rapporteur public ?: M. Vincent Villette
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP GATINEAU, FATTACCINI, REBEYROL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:428029.20210331
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