Vu les procédures suivantes :
Le directeur général de l'agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d'Azur a porté plainte contre M. B... devant la chambre de première instance de Provence-Alpes-Côte d'Azur et Corse de l'ordre des chirurgiens-dentistes. Le conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes s'est associé à la plainte. Par une décision du 25 mai 2019, la chambre de première instance a infligé à M. A... la sanction de l'interdiction d'exercer la profession de chirurgien-dentiste pendant une durée de deux ans.
Par une décision du 10 juin 2020, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes a, sur appel de M. A..., réformé la sanction prononcée en première instance pour l'assortir du sursis pour une durée de six mois et dit que la sanction serait exécutée du 1er septembre 2020 au 8 février 2022.
1° Sous le numéro 442661, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés les 10 août et 10 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette décision ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le numéro 446306, par une requête enregistrée le 10 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'ordonner le sursis à exécution de la même décision de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes ;
2°) de mettre à la charge du conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Edouard Solier, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Spinosi, avocat de M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Le pourvoi par lequel M. A... demande l'annulation de la décision du 10 juin 2020 de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes et sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cette décision présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
2. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".
3. Pour demander l'annulation de la décision de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes qu'il attaque, M. A... soutient qu'elle est entachée :
- d'incompétence en ce qu'elle statue sur sa demande de renvoi pour cause de suspicion légitime au lieu de la transmettre au Conseil d'Etat, juridiction qui lui est immédiatement supérieure ;
- d'irrégularité, au regard des exigences garanties par l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce qu'elle a été rendue en méconnaissance du principe d'impartialité en raison, d'une part, de la composition de la chambre disciplinaire nationale et, d'autre part, de la circonstance que cette même chambre lui avait infligé une sanction pour des faits fautifs antérieurs ;
- d'erreur de droit et d'inexacte qualification juridique des faits au regard des exigences garanties par l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce qu'elle juge que la procédure suivie devant la chambre disciplinaire de première instance de Provence-Alpes-Côte d'Azur et Corse de l'ordre des chirurgiens-dentistes n'a pas méconnu le principe d'impartialité ;
- d'erreur de droit, d'inexacte qualification juridique des faits et de dénaturation des pièces du dossier en ce qu'elle juge que la procédure ayant conduit au dépôt de la plainte du directeur général de l'agence régionale de santé a été régulière alors que, d'une part, les dispositions du second alinéa de l'article L. 1421-1 du code de la santé publique, qui permettent aux médecins inspecteurs de santé publique de se faire accompagner, lors d'une inspection, par une personnalité qualifiée non assermentée lors d'une inspection, méconnaissent les exigences garanties par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que, d'autre part, celle-ci a été entachée d'un détournement de procédure dès lors que les pouvoirs de police administrative dont disposent les médecins inspecteurs de santé publique au titre des articles L. 1421-1 à L. 1421-3 du code la santé publique, ne peuvent servir à motiver une sanction de nature disciplinaire ;
- de dénaturation des pièces du dossier en ce qu'elle estime que sa patiente n'a pas été mise à même de donner un consentement éclairé aux soins en litige ;
- d'inexacte qualification juridique des faits en qu'elle lui reproche d'avoir omis de déclarer à l'agence régionale de santé la perte de connaissance de sa patiente survenue le 13 février 2018 ainsi que l'arrêt cardio-respiratoire dont elle a été victime le 24 mars 2018 et à la suite duquel elle est décédée ;
- d'erreur de droit et d'insuffisance de motivation en ce qu'elle juge qu'il a commis une faute disciplinaire en s'abstenant de verser immédiatement après les interventions des 13 février et 24 mars 2018 au dossier de sa patiente, les compte-rendu opératoires alors que l'article L. 1111-7 du code de la santé publique ne fixe aucun délai pour s'acquitter de cette obligation ;
- d'erreur de droit, d'inexacte qualification juridique des faits et de dénaturation des pièces du dossier en ce qu'elle lui reproche d'avoir réalisé des soins qui ne sont pas compatibles avec les données acquises de la science.
Il soutient en outre qu'elle lui inflige une sanction hors de proportion avec la gravité des fautes retenues.
4. Aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi.
5. Le pourvoi de M. A... n'étant pas admis, les conclusions de sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de la décision attaquée sont devenues sans objet. Il n'y a donc pas lieu d'y statuer.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement au conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. A... n'est pas admis.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A... tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de la décision de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des chirurgiens-dentistes du 10 juin 2020.
Article 3 : M. A... versera au conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de M. A... présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B... et au conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des chirurgiens-dentistes.
Copie en sera adressée à l'agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d'Azur et au Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes.