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06/10/2021 | FRANCE | N°439913

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 06 octobre 2021, 439913


Vu les procédures suivantes :

1° La société civile immobilière Weinstein a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 3 octobre 2018 du maire du Raincy retirant à la société civile de construction vente Boulevard de l'Ouest-Le Raincy-IDF le permis délivré le 12 juillet 2018 pour la construction d'un immeuble collectif de 43 logements sur un terrain situé 11/11 bis boulevard de l'Ouest, parcelles cadastrées AK 0011 et 0012, valant permis de démolir. Par un jugement n° 1812123, 1812131 du 4 février 2020, le tribunal admini

stratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Sous le n° 439913, par un ...

Vu les procédures suivantes :

1° La société civile immobilière Weinstein a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 3 octobre 2018 du maire du Raincy retirant à la société civile de construction vente Boulevard de l'Ouest-Le Raincy-IDF le permis délivré le 12 juillet 2018 pour la construction d'un immeuble collectif de 43 logements sur un terrain situé 11/11 bis boulevard de l'Ouest, parcelles cadastrées AK 0011 et 0012, valant permis de démolir. Par un jugement n° 1812123, 1812131 du 4 février 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Sous le n° 439913, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 2 avril et 25 juin 2020 et le 8 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Weinstein demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre la somme de 4 000 euros à la charge de la commune du Raincy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sous le n° 440043, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 9 avril et 10 juillet 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Boulevard de l'Ouest-Le Raincy-IDF demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre la somme de 3 000 euros à la charge de la commune du Raincy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la société civile immobilière Weinstein, à la SCP Spinosi, avocat de la commune du Raincy et à la SCP Gaschignard, avocat de la société civile de construction vente Boulevard de l'Ouest-Le Raincy-IDF.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 12 juillet 2018, le maire du Raincy a accordé à la société civile de construction-vente Boulevard de l'Ouest-Le Raincy-IDF un permis de construire, valant permis de démolir, en vue de l'édification d'un immeuble collectif de 43 logements, dont 30 en accession à la propriété et 13 logements aidés, sur les parcelles cadastrées AK 0011 et AK 0012 d'un terrain situé 11/11 bis boulevard de l'Ouest. Par un arrêté du 3 octobre 2018 le maire a retiré ce permis. La société Weinstein, propriétaire du terrain d'assiette, et la société Boulevard de l'Ouest-Le Raincy-IDF demandent au Conseil d'Etat, par deux pourvois qu'il y a lieu de joindre, d'annuler le jugement du 4 février 2020 du tribunal administratif de Montreuil rejetant leurs demandes d'annulation de l'arrêté de retrait.

2. Aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique. / Le permis de démolir peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les travaux envisagés sont de nature à compromettre la protection ou la mise en valeur du patrimoine bâti ou non bâti, du patrimoine archéologique, des quartiers, des monuments et des sites ".

3. Il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que, pour retirer l'autorisation qu'il avait accordée, le maire du Raincy a retenu quatre motifs. Les trois premiers étaient fondés sur la méconnaissance de dispositions du règlement du plan local d'urbanisme. Le dernier était tiré de ce que, si la maison située en fonds de parcelle AK0012 n'avait pas été répertoriée dans le " Patrimoine architectural 7.1 " du plan local d'urbanisme, elle appartenait à la " première génération de maisons individuelles bourgeoises au Raincy " et méritait d'être préservée car comme constituant un " jalon non négligeable de l'architecture de cette ville ", ce dont le maire a déduit qu'" il serait regrettable que sa démolition soit entreprise ". Après avoir accueilli les moyens dirigés contre les trois autres motifs fondant l'arrêté retirant l'autorisation délivrée, le tribunal administratif a écarté le moyen dirigé contre le dernier motif en estimant que le deuxième alinéa de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme devait être regardé comme ayant nécessairement fondé en droit cette décision et que le maire aurait pris la même décision en se fondant sur ce seul motif.

4. Il ressort des énonciations du jugement attaqué, d'une part, que le bâtiment dont la démolition avait été autorisée n'est pas répertorié par le règlement du plan local d'urbanisme comme remarquable à un titre quelconque et ne fait l'objet d'aucune autre protection particulière, d'autre part, que l'arrêté litigieux se borne à déplorer le caractère " regrettable " de sa démolition dans des termes généraux sans identifier de caractéristique particulière de nature à justifier la préservation du bâtiment, dont la démolition n'a au demeurant fait l'objet d'aucune observation par l'architecte des bâtiments de France. En jugeant au vu de ces éléments que l'autorisation accordée méconnaissait les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme et que son retrait était ainsi légalement fondé, le tribunal administratif de Montreuil a commis une erreur de droit.

5. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer les autres moyens des pourvois, le jugement attaqué doit être annulé.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune du Raincy une somme de 1 500 euros à verser à la société Weinstein et à la société Boulevard-de-L'Ouest-Le Raincy-IDF au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font en revanche obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune du Raincy présentées au même titre.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 4 février 2020 du tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Montreuil.

Article 3 : La commune du Raincy versera une somme de 1 500 euros à chacune des sociétés Weinstein et Boulevard-de-l'Ouest-Le Raincy-IDF au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune du Raincy présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société civile immobilière Weinstein, à la société civile de construction-vente Boulevard-de-l'Ouest-Le Raincy-IDF et à la commune du Raincy


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 439913
Date de la décision : 06/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 oct. 2021, n° 439913
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP GASCHIGNARD ; SCP SPINOSI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:439913.20211006
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