Vu la procédure suivante :
Mme E... D..., née B..., a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2016 par lequel le président de l'université de Reims Champagne-Ardenne a prononcé son licenciement pour motif disciplinaire, sans préavis ni indemnité. Par un jugement n° 1601804 du 11 avril 2017, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 17NC01358 du 3 octobre 2019, la cour administrative d'appel de Nancy a, sur appel de Mme D..., annulé ce jugement et l'arrêté litigieux et a enjoint à l'université de Reims Champagne-Ardenne de réintégrer Mme D... à compter de la date de son licenciement et de reconstituer ses droits sociaux, dans un délai de deux mois suivant la notification de cet arrêt.
Par un courrier enregistré le 30 janvier 2020, Mme D... a demandé à la cour administrative d'appel de Nancy d'assurer l'exécution de cet arrêt et de condamner l'université de Reims Champagne-Ardenne à lui verser les sommes de 30 000 euros à titre d'indemnisation et de 600 euros à titre de remboursement, augmentées des intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2019, en ordonnant la capitalisation de ces intérêts. Par un arrêt n° 20NC02153 du 25 novembre 2021, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté ces conclusions.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 janvier et 25 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme D... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 25 novembre 2021 de la cour administrative d'appel de Nancy ;
2°) de mettre à la charge de l'université de Reims Champagne-Ardenne la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Hervé Cassara, maître des requêtes,
- les conclusions de M. A... C... de Vendeuil, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet Rousseau, Tapie, avocat de Mme D... et à la SCP Buk Lament - Robillot, avocat de l'université de Reims Champagne-Ardenne ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme D... a été recrutée par l'université de Reims Champagne-Ardenne par un contrat à durée déterminée à compter du 1er novembre 2010, transformé en contrat à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2011. Le 9 septembre 2016, le président de l'université a prononcé son licenciement pour motif disciplinaire sans préavis ni indemnité. Par un jugement du 11 avril 2017, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande de Mme D... tendant à l'annulation de cette décision. Par un arrêt du 3 octobre 2019, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé ce jugement et cette décision, et enjoint à l'université de Reims Champagne-Ardenne de réintégrer Mme D... à compter de la date de son licenciement et de reconstituer ses droit sociaux. Par un arrêt du 25 novembre 2021, contre lequel Mme D... se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté ses conclusions tendant à l'exécution de l'arrêt du 3 octobre 2019 et à la condamnation de l'université à lui verser des indemnités d'un montant total de 30 600 euros. Eu égard aux moyens soulevés, son pourvoi doit être regardé comme dirigé contre l'arrêt attaqué en tant seulement qu'il a rejeté sa demande d'exécution de l'arrêt du 3 octobre 2019.
2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ".
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, d'une part, Mme D... a été admise à la retraite avant l'intervention de l'arrêt du 3 octobre 2019, empêchant sa réintégration effective dans les effectifs de l'université de Reims Champagne-Ardenne. Il en ressort, d'autre part, que l'université de Reims Champagne-Ardenne n'a pas reconstitué les droits sociaux de Mme D... au motif que celle-ci a refusé de signer les deux avenants à son contrat proposés par l'université accroissant sa rémunération, en raison d'un désaccord sur le montant de cette dernière. En estimant que ce refus faisait obstacle à la reconstitution des droits sociaux de l'intéressée, alors que cette reconstitution pouvait être effectuée par l'université sur la base de la rémunération fixée par le contrat à la date de son éviction illégale, éventuellement augmentée du montant résultant de l'application des textes retenue par l'administration, dont la contestation - le cas échéant - par la requérante relèverait d'un litige distinct de celui tranché par l'arrêt du 3 octobre 2019, et en en déduisant que Mme D... n'était pas fondée à demander que soient prescrites de nouvelles mesures d'exécution de cet arrêt, la cour administrative d'appel de Nancy a commis une erreur de droit, le moyen ainsi soulevé n'étant pas nouveau en cassation, contrairement à ce que soutient l'université.
4. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, Mme D... est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque en tant qu'il rejette sa demande d'exécution de l'arrêt du 3 octobre 2019.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'université Reims Champagne-Ardenne la somme de 3 000 euros à verser à Mme D... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font en revanche obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de Mme D... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 1er de l'arrêt du 25 novembre 2021 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, devant la cour administrative d'appel de Nancy.
Article 3 : L'université Reims Champagne-Ardenne versera la somme de 3 000 euros à Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ses conclusions présentées sur le même fondement sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme E... D..., née B..., et à l'université de Reims Champagne-Ardenne.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 décembre 2022 où siégeaient : M. Olivier Japiot, président de chambre, présidant ; M. Benoît Bohnert, conseiller d'Etat et M. Hervé Cassara, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 6 janvier 2023.
Le président :
Signé : M. Olivier Japiot
Le rapporteur :
Signé : M. Hervé Cassara
La secrétaire :
Signé : Mme Pierrette Kimfunia