Vu la procédure suivante :
La société Prolarge a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler le marché SERV 1018, ayant pour objet la mise à disposition de plastrons de surface pour la réalisation de prestations d'entraînement au profit de la marine nationale, et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 12 786 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de son éviction irrégulière de la procédure de passation de ce marché. Par un jugement n° 1503658 du 10 octobre 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses demandes.
Par un arrêt nos 19MA05388, 19MA05422 du 25 avril 2022, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de la ministre des armées et de la société Prolarge, annulé ce jugement, rejeté les conclusions de la société Prolarge tendant à l'annulation du contrat SERV 1018 et, avant de statuer sur le montant de l'indemnité mise à la charge de l'Etat, ordonné qu'il soit procédé à une expertise économique et comptable.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 27 juin, 27 septembre et 24 novembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Prolarge demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le décret n° 2004-16 du 7 janvier 2004 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Didier Ribes, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Cécile Raquin, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Richard, avocat de la société Prolarge ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".
2. Pour demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque, la société Prolarge soutient que la cour administrative d'appel de Marseille a :
- commis une erreur de droit en rejetant comme irrecevables pour tardiveté ses conclusions tendant à contester la validité du contrat en litige et à en demander l'annulation en faisant application de la règle de recevabilité issue de la décision n° 387763 du 13 juillet 2016 rendue par l'Assemblée du contentieux ;
- commis une erreur de droit et dénaturé les faits de l'espèce en n'écartant pas l'application du délai raisonnable de recours d'un an fixé par la même décision, alors qu'il existait des circonstances particulières justifiant qu'il soit dérogé à ce délai, tirées de ce qu'elle avait introduit un premier recours en contestation de validité du contrat le 4 juin 2012 qui a été rejeté par un jugement du 17 octobre 2014 du tribunal administratif de Toulon ;
- commis une erreur de droit en refusant d'exercer tout contrôle sur la répartition des prestations entre les différents lots ;
- dénaturé ses écritures et les pièces du dossier en jugeant qu'il n'était pas établi que le pouvoir adjudicateur avait refusé d'engager la négociation ;
- dénaturé ses écritures et les pièces du dossier en jugeant qu'il n'était pas établi que la procédure de passation du marché était entachée d'un détournement de pouvoir ;
- commis une erreur de droit en s'abstenant de rechercher concrètement, en ordonnant à cette fin une mesure d'instruction, quelle avait été l'incidence des irrégularités commises lors de l'attribution des lots nos 2 et 3 quant à ses chances de remporter l'attribution de ces lots ;
- dénaturé les faits de l'espèce et les pièces du dossier en rejetant ses demandes d'indemnisation des préjudices résultant des pertes qu'elle aurait subies au titre de l'effet prescripteur et international, pour un montant de 2 080 000 euros, d'un handicap de démarrage de deux ans par rapport à la concurrence, pour un montant de 2 080 000 euros, et des pertes de financement de croissance, pour un montant de 3 120 000 euros, compte tenu des irrégularités affectant la passation du lot n° 1 ;
- commis une erreur de droit en limitant l'indemnisation de son préjudice au titre du lot n° 1 à la période allant du 23 décembre 2010 au 31 décembre 2011, puis en restreignant en conséquence la mission confiée à l'expert ;
- commis une erreur de droit en jugeant que son manque à gagner revêt un caractère certain seulement pour la quantité minimale prévue par les stipulations du cahier des clauses administratives particulières versé à l'appui du règlement de consultation, alors que le manque à gagner qu'elle subit doit être déterminé au regard du volume d'affaires effectivement réalisé par la société attributaire du marché.
3. Eu égard aux moyens soulevés, il y a lieu d'admettre les conclusions du pourvoi qui sont dirigées contre l'arrêt attaqué en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions de la société Prolarge tendant à contester la validité du contrat en litige et à en demander l'annulation. En revanche, s'agissant des conclusions dirigées contre l'arrêt attaqué en tant qu'il s'est prononcé sur le surplus de ses conclusions, aucun des moyens soulevés n'est de nature à permettre l'admission de ces conclusions.
D E C I D E :
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Article 1er : Les conclusions du pourvoi de la société Prolarge qui sont dirigées contre l'arrêt attaqué en tant qu'il s'est prononcé sur ses conclusions tendant à contester la validité du contrat en litige et à en demander l'annulation sont admises.
Article 2 : Le surplus des conclusions du pourvoi de la société Prolarge n'est pas admis.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Prolarge.
Copie en sera adressée au ministre des armées.