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22/05/2024 | FRANCE | N°470629

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 22 mai 2024, 470629


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 janvier et 17 juillet 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national des ingénieurs des travaux publics de l'Etat et des collectivités territoriales - Force Ouvrière (SNITPECT-FO) demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur sa demande tendant à l'annulat

ion de certaines dispositions de la note de gestion du 26 juillet 2022 relative à la mis...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 janvier et 17 juillet 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national des ingénieurs des travaux publics de l'Etat et des collectivités territoriales - Force Ouvrière (SNITPECT-FO) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur sa demande tendant à l'annulation de certaines dispositions de la note de gestion du 26 juillet 2022 relative à la mise en œuvre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) pour les agents du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires et du ministère de la transition énergétique ;

2°) d'enjoindre au ministre de remplacer les dispositions fixant les différentes valeurs de progression de l'IFSE en cas de changement de corps ou de grade d'un membre du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat par de nouvelles dispositions déterminant des valeurs équivalentes aux gains indemnitaires constatés dans le régime indemnitaire précédent ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- le décret n° 2021-1681 du 16 décembre 2021 ;

- l'arrêté du 5 novembre 2021 portant application au corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat et aux emplois d'ingénieur en chef des travaux publics de l'Etat du 1er groupe et du 2e groupe des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Muriel Deroc, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier qu'en application d'un arrêté du 5 novembre 2021, les agents membres du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat ont adhéré, de manière rétroactive à compter du 1er janvier 2021, au régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) en remplacement du régime indemnitaire dont ils étaient auparavant bénéficiaires, une décision ministérielle du 10 novembre 2021 et le décret du 16 décembre 2021 modifiant divers décrets relatifs au régime indemnitaire des corps et emplois techniques relevant du ministère de la transition écologique ayant déterminé les conditions de bascule d'un régime indemnitaire à l'autre. Par une note de gestion du 26 juillet 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et la ministre de la transition énergétique ont précisé pour l'année 2022 les modalités de gestion et de mise en œuvre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel pour les agents des ministères et ont défini, à l'annexe 4.3 de la note de gestion, les variations du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE), composante de ce régime indemnitaire, applicables en cas de changement de corps ou de grade d'un agent. Par un courrier du 29 septembre 2022, le SNITPECT-FO a saisi le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires d'une demande d'annulation de ces dispositions de la note de gestion du 26 juillet 2022, ainsi que de celles déterminant le montant du complément d'IFSE en cas d'affectation en outre-mer, en tant qu'elles s'appliquent aux agents membres du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat, qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet née du silence gardée par le ministre. Si les conclusions du SNITPECT-FO sont formellement dirigées contre la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre sur son recours administratif, celles-ci, enregistrées dans le délai de recours contentieux, doivent être regardées comme aussi dirigées contre les dispositions en litige de la note de gestion du 26 juillet 2022 en tant qu'elles se sont appliquées en 2022. Eu égard aux moyens soulevés par le requérant dans sa requête, ses conclusions doivent être regardées comme uniquement dirigées contre les dispositions de la note de litige relatives à la variation du montant de l'IFSE en cas de changement de corps ou de grade d'un membre du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat.

2. Aux termes de l'article 1er du décret du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat : " Les fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée peuvent bénéficier, d'une part, d'une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (...) dans les conditions fixées par le présent décret ". Aux termes de son article 2 : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est fixé selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'exercice des fonctions. / Les fonctions occupées par les fonctionnaires d'un même corps ou statut d'emploi sont réparties au sein de différents groupes (...) / (...) / Le nombre de groupes de fonctions est fixé pour chaque corps ou statut d'emploi par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé. / Ce même arrêté fixe les montants minimaux par grade et statut d'emplois, les montants maximaux afférents à chaque groupe de fonctions et les montants maximaux applicables aux agents logés par nécessité de service. / Le versement de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est mensuel ". Aux termes de son article 3 : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise fait l'objet d'un réexamen : / (...) / 3° En cas de changement de grade à la suite d'une promotion ". Enfin, l'article 4 de l'arrêté du 5 novembre 2021 portant application au corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat et aux emplois d'ingénieur en chef des travaux publics de l'Etat du 1er groupe et du 2ème groupe des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 fixe les montants annuels minimaux de l'IFSE pour chacun des grades et emplois des agents membres de ce corps.

3. En premier lieu, la différence de traitement qui résulte de la succession de deux régimes juridiques dans le temps n'est pas, en elle-même, contraire au principe d'égalité. Par suite, le syndicat requérant ne peut utilement soutenir, à supposer que les montants des variations appliqués au cours de l'année 2022 résultant de la note de gestion du 26 juillet 2022 soient inférieurs à ceux constatés en 2021 en application de la décision ministérielle du 10 novembre 2021 et du décret du 16 décembre 2021, que par les dispositions en litige le ministre aurait porté atteinte au principe d'égalité de traitement des agents appartenant à un même corps.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 221-5 du code des relations entre le public et l'administration : " L'autorité administrative investie du pouvoir réglementaire est tenue, dans la limite de ses compétences, d'édicter des mesures transitoires dans les conditions prévues à l'article L. 221-6 lorsque l'application immédiate d'une nouvelle réglementation est impossible ou qu'elle entraîne, au regard de l'objet et des effets de ses dispositions, une atteinte excessive aux intérêts publics ou privés en cause ". Il ne résulte pas de la seule allégation du requérant selon laquelle les dispositions en litige de la note de gestion auraient eu pour effet de réduire, par rapport à ce qui a été constaté en 2021, la variation du montant de l'IFSE en cas de changement de corps ou de grade d'un membre du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat, une atteinte excessive aux intérêts de ces agents dès lors que ces dispositions prévoient, conformément aux dispositions citées au point 2, une progression de l'IFSE en cas de changement de corps ou de grade et qu'au demeurant elles prévoient également que leur mise en œuvre sera assurée afin de garantir que le montant d'IFSE total perçu par chaque ingénieur des travaux publics de l'Etat en 2022 sera au moins égal au montant perçu en 2021. Par suite, le syndicat requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en s'abstenant de prendre des mesures transitoires en 2022, le ministre aurait méconnu le principe de sécurité juridique.

5. En dernier lieu, la note de gestion litigieuse, publiée au Bulletin officiel du ministère le 10 août 2022, n'est pas entachée de rétroactivité illégale du seul fait qu'elle fixe les règles applicables au calcul de l'IFSE à compter du 1er janvier 2022, dès lors que, même si le versement de cette indemnité est mensuel, le montant individuel de cette indemnité est calculé au titre de l'ensemble de l'année et est notifié aux agents postérieurement à la publication de la note de gestion.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le SNITPECT-FO n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions qu'il attaque. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête du SNITPECT-FO est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au Syndicat national des ingénieurs des travaux publics de l'Etat et des collectivités territoriales - Force Ouvrière (SNITPECT-FO) et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré à l'issue de la séance du 25 avril 2024 où siégeaient : M. Stéphane Verclytte, président de chambre, présidant ; M. Philippe Ranquet, conseiller d'Etat et Mme Muriel Deroc, maîtresse des requêtes-rapporteure.

Rendu le 22 mai 2024.

Le président :

Signé : M. Stéphane Verclytte

La rapporteure :

Signé : Mme Muriel Deroc

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Martinez-Casanova


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 470629
Date de la décision : 22/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 mai. 2024, n° 470629
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Muriel Deroc
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:470629.20240522
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