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30/05/2024 | FRANCE | N°474077

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 30 mai 2024, 474077


Vu la procédure suivante :



L'association Mont Transet Vent Debout, Mme G... C..., M. D... B..., la société civile d'exploitation agricole (SCEA) Elevage du Palais, M. et Mme H... E... et Mme A... F... ont demandé à la cour administrative d'appel de Bordeaux d'annuler l'arrêté de la préfète de la Creuse du 31 décembre 2019 délivrant à la société Centrale éolienne Mont de Transet une autorisation environnementale pour l'exploitation d'un parc éolien composé de cinq aérogénérateurs sur les territoires des communes de Thauron et Mansat-la-Courrière

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Par un arrêt n° 20BX01519 du 14 mars 2023, la cour administr...

Vu la procédure suivante :

L'association Mont Transet Vent Debout, Mme G... C..., M. D... B..., la société civile d'exploitation agricole (SCEA) Elevage du Palais, M. et Mme H... E... et Mme A... F... ont demandé à la cour administrative d'appel de Bordeaux d'annuler l'arrêté de la préfète de la Creuse du 31 décembre 2019 délivrant à la société Centrale éolienne Mont de Transet une autorisation environnementale pour l'exploitation d'un parc éolien composé de cinq aérogénérateurs sur les territoires des communes de Thauron et Mansat-la-Courrière.

Par un arrêt n° 20BX01519 du 14 mars 2023, la cour administrative d'appel a rejeté cette requête.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 mai et 19 juillet 2023 et le 27 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur requête ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Centrale éolienne Mont de Transet la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Laëtitia Malleret, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de M. B... et autres, et à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat de la société Centrale éolienne Mont de Transet ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 mai 2024, présentée par la société Centrale éolienne Mont de Transet ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 31 décembre 2019, la préfète de la Creuse a délivré à la société Centrale éolienne Mont de Transet l'autorisation d'exploiter un parc éolien composé de cinq aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur les territoires des communes de Thauron et de Mansat-la-Courrière. Par un arrêt du 14 mars 2023 contre lequel M. B... et autres se pourvoient en cassation, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté leur requête tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Il résulte des dispositions de l'article L. 411-1 du code de l'environnement, qui transposent en droit interne l'article 12 de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dite directive " Habitats ", que la destruction ou la perturbation des espèces animales concernées, ainsi que la destruction ou la dégradation de leurs habitats, sont interdites. Toutefois, comme le prévoient les dispositions de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, l'autorité administrative peut déroger à ces interdictions dès lors que sont remplies trois conditions distinctes et cumulatives tenant, d'une part, à l'absence de solution alternative satisfaisante, d'autre part, à la condition de ne pas nuire au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle et, enfin, à la justification de la dérogation par l'un des cinq motifs limitativement énumérés et parmi lesquels figure le fait que le projet réponde, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu, à une raison impérative d'intérêt public majeur.

3. Le pétitionnaire doit obtenir une dérogation " espèces protégées " si le risque que le projet comporte pour les espèces protégées est suffisamment caractérisé. A ce titre, les mesures d'évitement et de réduction des atteintes portées aux espèces protégées proposées par le pétitionnaire doivent être prises en compte. Dans l'hypothèse où les mesures d'évitement et de réduction proposées présentent, sous le contrôle de l'administration, des garanties d'effectivité telles qu'elles permettent de diminuer le risque pour les espèces au point qu'il apparaisse comme n'étant pas suffisamment caractérisé, il n'est pas nécessaire de solliciter une dérogation " espèces protégées ".

4. Il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que pour juger qu'une dérogation " espèces protégées " n'était pas nécessaire en l'espèce, la cour a, d'une part, s'agissant de l'avifaune, considéré que le projet litigieux ne créait pas de " risque particulier ", tout en précisant que les " impacts résiduels attendus " lors de la construction étaient " faibles et temporaires " et que les effets du projet sur la mortalité de certaines de ces espèces seraient évalués au début de la mise en fonctionnement et a, d'autre part, s'agissant des populations de chiroptères, relevé que des " suivis permettant d'estimer leur mortalité " étaient prévus et que des " mesures correctives " pourraient être ultérieurement proposées en cas de " constat d'un impact significatif ". Faute d'avoir recherché si le risque pour ces espèces pouvait ou non être regardé comme étant suffisamment caractérisé dès l'origine, notamment au vu des effets attendus sur la mortalité de certaines espèces, la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que M. B... et autres sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat et de la société Centrale éolienne Mont de Transet la somme de 1 500 euros chacun à verser à M. B... et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. B... et autres qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 14 mars 2023 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : L'Etat et la société Centrale éolienne Mont de Transet verseront à M. B... et autres la somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la société Centrale éolienne Mont de Transet au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. D... B..., représentant unique désigné pour l'ensemble des requérants, à Mme G... C..., à la société Centrale éolienne Mont de Transet et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré à l'issue de la séance du 2 mai 2024 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d'Etat et Mme Laëtitia Malleret, maîtresse des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 30 mai 2024.

La présidente :

Signé : Mme Isabelle de Silva

La rapporteure :

Signé : Mme Laëtitia Malleret

La secrétaire :

Signé : Mme Angélique Rajaonarivelo


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 474077
Date de la décision : 30/05/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 30 mai. 2024, n° 474077
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Laëtitia Malleret
Rapporteur public ?: M. Nicolas Agnoux
Avocat(s) : SCP MARLANGE, DE LA BURGADE ; SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 01/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:474077.20240530
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