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24/07/2024 | FRANCE | N°468397

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 24 juillet 2024, 468397


Vu la procédure suivante :



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'avis des sommes à payer émis le 11 avril 2022 pour le recouvrement du solde d'un trop-perçu de revenu de solidarité active, d'un montant de 9 322,27 euros, dont la récupération a été décidée par le département des Hauts-de-Seine, et de le décharger de l'obligation de payer la somme réclamée. Par une ordonnance n° 2208952 du 24 août 2022, la présidente de la 11ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande. r>


Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistré...

Vu la procédure suivante :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'avis des sommes à payer émis le 11 avril 2022 pour le recouvrement du solde d'un trop-perçu de revenu de solidarité active, d'un montant de 9 322,27 euros, dont la récupération a été décidée par le département des Hauts-de-Seine, et de le décharger de l'obligation de payer la somme réclamée. Par une ordonnance n° 2208952 du 24 août 2022, la présidente de la 11ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 24 octobre 2022 et le 24 janvier 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de mettre à la charge du département des Hauts-de-Seine la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Lazar Sury, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Mathieu Le Coq, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet François Pinet, avocat de M. C... et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat du département des Hauts-de-Seine ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un courrier du 2 août 2019, la caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine a décidé la récupération à l'encontre de M. C... d'un indu de revenu de solidarité active d'un montant de 14 029,60 euros pour la période ayant couru depuis le 1er janvier 2016, date à compter de laquelle elle avait enregistré sa vie maritale et pris en compte les ressources de sa conjointe dans le calcul de ses droits, en lui indiquant que cette dette serait recouvrée par retenue sur les montants à échoir à partir d'août 2019. Le 11 avril 2022, le département des Hauts-de-Seine a émis un titre exécutoire pour le recouvrement de la somme, restant à payer, de 9 322,27 euros. Par une ordonnance du 24 août 2022, contre laquelle M. C... se pourvoit en cassation, la présidente de la 11ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa contestation de ce titre.

2. Aux termes de l'article L. 262-46 du code de l'action sociale et des familles : " Tout paiement indu de revenu de solidarité active est récupéré par l'organisme chargé du service de celui-ci ainsi que, dans les conditions définies au présent article, par les collectivités débitrices du revenu de solidarité active. / (...) Après la mise en œuvre de la procédure de recouvrement sur prestations à échoir, l'organisme chargé du service du revenu de solidarité active transmet (...) les créances du département au président du conseil départemental. (...) Le président du conseil départemental constate la créance du département et transmet au payeur départemental le titre de recettes correspondant pour le recouvrement (...) ". Aux termes de l'article L. 262-47 du même code : " Toute réclamation dirigée contre une décision relative au revenu de solidarité active fait l'objet, préalablement à l'exercice d'un recours contentieux, d'un recours administratif auprès du président du conseil départemental (...) ".

3. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) 1° En l'absence de contestation, le titre de recettes individuel ou collectif émis par la collectivité territoriale ou l'établissement public local permet l'exécution forcée d'office contre le débiteur. / (...) L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. (...) "

4. Il résulte de ces dispositions que le destinataire d'un titre exécutoire émis pour le recouvrement d'un indu de revenu de solidarité active est recevable à contester, à l'occasion de son recours contre cet acte, dans un délai de deux mois suivant la notification de ce dernier, le bien-fondé de la créance correspondante, alors même que la décision de récupérer cet indu serait devenue définitive. Par suite, en retenant, pour rejeter comme irrecevable la contestation par M. C... du titre exécutoire émis à son encontre, qu'il avait saisi le tribunal administratif plus d'un an après avoir eu connaissance de la décision du 2 août 2019 de récupération du trop-perçu correspondant, la présidente de la 11ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a commis une erreur de droit.

5. M. B... est ainsi fondé à demander, pour ce motif, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

7. En premier lieu, en vertu de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation. Le bordereau du titre de recettes justifiant de sa signature électronique ayant, en l'espèce, été produit en réponse à la contestation de M. C..., le moyen tiré l'irrégularité du titre qu'il conteste doit être écarté.

8. En second lieu, il résulte des dispositions citées au point 2 qu'une décision de récupération d'un indu de revenu de solidarité active prise par le président du conseil départemental ou par délégation de celui-ci ne peut, à peine d'irrecevabilité, faire l'objet d'un recours contentieux sans qu'ait été préalablement exercé un recours administratif auprès de cette autorité. Si la recevabilité d'un recours contentieux dirigé contre le titre exécutoire émis pour recouvrer un indu de revenu de solidarité active n'est pas, en vertu de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, subordonnée à l'exercice d'un recours administratif préalable, le débiteur ne peut toutefois, à l'occasion d'un tel recours, contester devant le juge administratif le bien-fondé de cet indu en l'absence de tout recours préalable saisissant de cette contestation le président du conseil départemental.

9. Il résulte de l'instruction que M. C... n'a pas exercé un tel recours préalable devant le président du conseil départemental. Le département des Hauts-de-Seine est par suite fondé à soutenir qu'il ne peut, en conséquence, contester le bien-fondé de l'indu de revenu de solidarité active pour le recouvrement duquel a été émis le titre de recette qu'il conteste.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'avis des sommes à payer du 11 avril 2022 et la décharge du paiement de la somme mise en recouvrement.

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du département des Hauts-de-Seine, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du 24 août 2022 de la présidente de la 11ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulée.

Article 2 : La requête de M. C... et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... et au département des Hauts-de-Seine.

Délibéré à l'issue de la séance du 13 juin 2024 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et Mme Anne Lazar Sury, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 24 juillet 2024.

La présidente :

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

La rapporteure :

Signé : Mme Anne Lazar Sury

Le secrétaire :

Signé : M. Mickaël Lemasson


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 468397
Date de la décision : 24/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 24 jui. 2024, n° 468397
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anne Lazar Sury
Rapporteur public ?: M. Mathieu Le Coq
Avocat(s) : CABINET FRANÇOIS PINET ; SCP PIWNICA & MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 22/08/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:468397.20240724
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