Vu la procédure suivante :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision par laquelle le maire d'Auchonvillers lui a implicitement refusé le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi et d'enjoindre à cette autorité de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de huit jours, sous astreinte. Par un jugement n° 2102350 du 2 août 2023, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision litigieuse et a enjoint à la commune d'Auchonvillers de lui verser l'allocation d'aide au retour à l'emploi correspondant à la période comprise entre la date de privation de son emploi et le 19 mars 2021 en la renvoyant devant la commune pour que celle-ci procède, dans un délai de trois mois, au calcul et au versement des sommes dues à ce titre.
Par une ordonnance n° 23DA01867 du 19 octobre 2023, enregistrée le 2 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la présidente de la cour administrative d'appel de Douai a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 2 octobre 2023 au greffe de cette cour, présenté par la commune d'Auchonvillers.
Par ce pourvoi et un nouveau mémoire, enregistré le 12 janvier 2024, la commune d'Auchonvillers demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de Mme A... ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Ariane Piana-Rogez, auditrice,
- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, Goulet, avocat de la commune d'Auchonvillers et à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B... A... a été recrutée par la commune d'Auchonvillers en qualité d'agent contractuel sur un emploi d'adjoint administratif principal de deuxième classe à temps non complet pour une période d'un an, à compter du 18 février 2019. Par un arrêté du 14 octobre 2020, ce contrat a été renouvelé pour une durée de neuf mois, à compter du 18 février 2020. Elle a ensuite été maintenue dans son poste, par une décision du maire d'Auchonvillers du 19 novembre 2020, dans l'attente de la décision de la commission mixte paritaire qui a rendu un avis défavorable à sa titularisation. Par un arrêté du 9 décembre 2020, le maire d'Auchonvillers a mis fin à ses fonctions et l'a radiée des effectifs de la collectivité, à compter du 7 décembre 2020. Par un courrier du 23 février 2021, reçu le 8 mars 2021, Mme A... a demandé à la commune d'Auchonvillers le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 7 décembre 2020. Par un jugement du 2 août 2023, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision implicite par laquelle la commune d'Auchonvillers a rejeté cette demande, a enjoint à cette autorité de verser à Mme A... l'allocation d'aide au retour à l'emploi correspondant à la période comprise entre la date de privation de son emploi et le 19 mars 2021 et a renvoyé Mme A... devant la commune d'Auchonvillers pour qu'il soit procédé, dans un délai de trois mois, au calcul et au versement des sommes dues à ce titre. La commune d'Auchonvillers se pourvoit en cassation contre ce jugement. Par la voie du pourvoi incident, Mme A... demande l'annulation du même jugement en tant qu'il a limité l'injonction prononcée à la période antérieure au 19 mars 2021.
2. Aux termes de l'article L. 5424-1 du code du travail : " Ont droit à une allocation d'assurance, lorsque leur privation d'emploi est involontaire ou assimilée à une privation involontaire ou en cas de cessation d'un commun accord de leur relation de travail avec leur employeur, et lorsqu'ils satisfont à des conditions d'âge et d'activité antérieure, dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : / (...) / 2° Les agents non titulaires des collectivités territoriales (...) ". Aux termes de l'article L. 5424-2 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les employeurs mentionnés à l'article L. 5424-1 assurent la charge et la gestion de l'allocation d'assurance. Ceux-ci peuvent, par convention conclue avec Pôle emploi, pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1, lui confier cette gestion. / Toutefois, peuvent adhérer au régime d'assurance : / (...) / 1° Les employeurs mentionnés au 2° de l'article L. 5424-1 ; (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour rejeter la demande de Mme A... tendant au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi, la commune d'Auchonvillers s'est fondée sur la circonstance que l'intéressée n'avait pas transmis la décision de rejet par laquelle Pôle emploi lui aurait notifié son incompétence et l'aurait renvoyée vers la commune pour l'étude de ses droits à l'allocation d'aide au retour à l'emploi, décision sans laquelle l'employeur qui assure lui-même la charge et la gestion de cette allocation, en vertu des dispositions du 1er alinéa de l'article L. 5424-1 du code du travail, ne peut procéder à cette étude. Il ressort toutefois également des pièces du dossier soumis aux juges du fond, et notamment de l'attestation d'employeur, destinée à Pôle emploi, délivrée par la commune d'Auchonvillers à Mme A... le 14 janvier 2021, que cette commune, comme elle en avait la faculté en vertu des dispositions de l'article L. 5424-2 du même code, a adhéré au régime d'assurance chômage, à titre révocable, à compter du 1er août 2002. Par suite, en estimant que la commune n'avait pu légalement fonder son refus sur l'absence de production de la décision de rejet de Pôle emploi dès lors qu'elle n'avait pas adhéré au régime d'assurance chômage, le tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.
4. Par suite, la commune d'Auchonvillers est fondée à demander pour ce motif l'annulation du jugement qu'elle attaque, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de son pourvoi ni qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident de Mme A....
5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... une somme à verser à la commune d'Auchonvillers au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune d'Auchonvillers qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens est annulé.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi incident de Mme A....
Article 3 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif d'Amiens.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune d'Auchonvillers et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à la commune d'Auchonvillers et à Mme B... A....