Vu la procédure suivante :
La société à responsabilité limitée (SARL) Ice Thé a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 18 janvier 2019 par laquelle la maire d'Aix-en-Provence a refusé de lui accorder l'autorisation d'installer une terrasse, sur le domaine public, au droit de son établissement, situé au 57, cours Mirabeau. Par un jugement n° 1906139 du 10 juin 2021, ce tribunal a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 21MA03272 du 3 mars 2023, la cour administrative d'appel de Marseille, statuant sur appel de la société Ice Thé, après avoir annulé ce jugement et la décision attaquée, a enjoint à la maire d'Aix-en-Provence de délivrer dans un délai de deux mois à cette société l'autorisation d'occupation du domaine public qu'elle a sollicitée, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 avril et 19 juillet 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune d'Aix-en-Provence demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de la société Ice Thé la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Marc Vié, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la commune d'Aix-en-Provence et à la SCP Gaschignard, Loiseau, Massignon, avocat de la société Ice Thé ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Ice Thé a sollicité, le 12 août 2013, de la maire d'Aix-en-Provence la délivrance d'une autorisation d'occuper le domaine public au droit du local qu'elle exploite au 57, cours Mirabeau. Par un jugement du 12 mai 2016, devenu définitif après rejet, par un arrêt du 9 février 2018 de la cour administrative d'appel de Marseille, de l'appel formé par la commune d'Aix-en-Provence, le tribunal administratif de Marseille, après avoir annulé la décision implicite de rejet de la demande de cette société, a enjoint à la commune de la réexaminer. Agissant en exécution de cette injonction, la commune a de nouveau rejeté, par un courrier du 16 juin 2016, la demande d'autorisation sollicitée. Par un jugement du 21 décembre 2018, devenu définitif après rejet, par un arrêt du 3 mars 2023 de la cour administrative d'appel de Marseille, statuant sur renvoi du Conseil d'Etat après cassation d'un premier arrêt de la même cour, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette décision et enjoint à la commune de procéder à un nouvel examen de la demande de la société Ice Thé. Agissant en exécution de cette injonction, la commune d'Aix-en-Provence a une nouvelle fois refusé, le 18 janvier 2019, la délivrance de l'autorisation sollicitée. La commune d'Aix-en-Provence se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 3 mars 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, statuant sur l'appel de la société Ice Thé et après avoir annulé le jugement du 10 juin 2021 du tribunal administratif de Marseille ayant rejeté la demande de cette société tendant à l'annulation de cette décision de refus, a fait droit à cette même demande et enjoint à cette commune de délivrer à la société Ice Thé une autorisation d'occupation du domaine public dans un délai de deux mois à compter de la notification de son arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai.
2. Aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous ". Aux termes de l'article L. 2122-2 du même code : " L'occupation ou l'utilisation du domaine public ne peut être que temporaire. ".
3. Il appartient au maire de fixer, tant dans l'intérêt de la sécurité, du bon ordre et de la circulation, que dans celui du domaine public et de son affectation, les conditions auxquelles il entend subordonner la délivrance d'une telle autorisation.
4. Il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel a relevé, ainsi que l'avait également fait le jugement dont l'annulation était demandée, que la décision de refus litigieuse était fondée, d'une part, sur les motifs tirés de la méconnaissance à la fois des articles 3-2 (A1) et 3-2 (A3) du plan de sauvegarde et de mise en valeur de la commune et de l'article 19 de l'arrêté du 23 juin 2017 portant réglementation des étalages, des terrasses et de la vente ambulante installés sur la voie publique, dont les dispositions prévoient qu'aucune nouvelle terrasse ne pourra être autorisée sur certaines zones identifiées au sein du périmètre protégé par ce même plan de sauvegarde et de mise en valeur. En déduisant de la seule circonstance qu'un tel plan n'était pas opposable aux demandes ayant pour seul objet de solliciter une autorisation d'occupation du domaine public sans modification de l'état des immeubles, que le tribunal administratif avait à tort jugé qu'aucun des motifs de la décision de refus contestée n'était infondé, la cour, qui devait également vérifier si le maire pouvait légalement opposer un tel refus sur le fondement de la base légale distincte que constituait l'article 19 de l'arrêté du 23 juin 2017, a entaché son arrêt d'insuffisance de motivation.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que la commune d'Aix-en-Provence est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Ice Thé la somme que demande la commune d'Aix-en-Provence au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 3 mars 2023 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : Les conclusions de la commune d'Aix-en-Provence présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune d'Aix-en-Provence et à la société à responsabilité limitée Ice Thé.
Délibéré à l'issue de la séance du 10 octobre 2024 où siégeaient : M. Thomas Andrieu, président de chambre, présidant ; M. Jonathan Bosredon, conseiller d'Etat et M. Jean-Marc Vié, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 22 novembre 2024.
Le président :
Signé : M. Thomas Andrieu
Le rapporteur :
Signé : M. Jean-Marc Vié
Le secrétaire :
Signé : M. Aurélien Engasser