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22/11/2024 | FRANCE | N°473909

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 22 novembre 2024, 473909


Vu la procédure suivante :



M. et Mme E... B... C... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer, à titre principal, la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des cotisations de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 ainsi que des pénalités correspondantes et, à titre subsidiaire, la réduction des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis à concurrence de 800 euros en base. Par un jugement n° 1804921 du 19 novembre 2020, ce tribunal a rejeté leur

demande.



Par un arrêt n° 21LY00062 du 9 mars 2023, la cour ...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme E... B... C... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer, à titre principal, la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des cotisations de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 ainsi que des pénalités correspondantes et, à titre subsidiaire, la réduction des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis à concurrence de 800 euros en base. Par un jugement n° 1804921 du 19 novembre 2020, ce tribunal a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 21LY00062 du 9 mars 2023, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé ce jugement en tant qu'il a omis de constater un non-lieu à statuer à hauteur de 5 338 euros, a déclaré qu'il n'y avait pas lieu de statuer, à concurrence de 5 338 euros, sur les conclusions à fin de décharge de la majoration de 10 % afférente aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales en litige et a rejeté le surplus des conclusions de la requête d'appel de M. et Mme B... C....

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 mai 2023, 9 août 2023 et 21 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme B... C... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Vié, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. et Mme B... C... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. D... était le gérant et unique associé de la société à responsabilité limitée (SARL) Finerland, elle-même associée de la société à responsabilité limitée (SARL) Les lions du nord qui exploitait un hôtel bar-restaurant dans la station des Deux-Alpes à Mont-de-Lans (Isère) et dont elle détenait 240 parts, représentant 60 % de son capital. Par un procès-verbal du 29 janvier 2013, M. B... C... a procédé à la liquidation de la société Finerland, dont il a approuvé les comptes définitifs dégageant un boni de liquidation de 22 867 euros, et s'est attribué les titres de participation de la société Les lions du nord que détenait la première société pour un prix, mentionné dans le même acte, de 87 000 euros. A l'issue d'un contrôle sur pièces des deux sociétés, l'administration, considérant que la valeur vénale des titres cédés devait être évaluée à 209 393 euros, a estimé que le boni de liquidation était sous-évalué à concurrence de 122 393 euros et que l'insuffisance du prix de cession était constitutive d'une libéralité consentie par la société Finerland à l'intéressé, imposable entre ses mains à l'impôt sur le revenu en tant qu'avantage occulte sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts. En conséquence de la rectification de leur revenu imposable notifiée suivant la procédure contradictoire, M. et Mme B... C... ont été assujettis, au titre de l'année 2015, à un complément d'impôt sur le revenu et aux contributions sociales. M. et Mme B... C... se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 9 mars 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir constaté un non-lieu à statuer à concurrence d'un montant de 5 338 euros, a rejeté l'appel qu'ils avaient formé contre le jugement du 19 novembre 2020 du tribunal administratif de Grenoble ayant rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires auxquelles ils ont été assujettis ainsi que des pénalités correspondantes.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ". En cas d'acquisition par une société à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions, citées ci-dessus, du c de l'article 111 du code général des impôts, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du cocontractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause. La preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer et, pour le cocontractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession. Dans le cas où le vendeur et l'acquéreur sont liés par une relation d'intérêts, l'intention d'octroyer et de recevoir une libéralité est présumée.

3. La cour administrative d'appel a jugé que l'administration établissait que la cession par la société Finerland à son associé unique, M. B... C..., des titres de la société Les lions du nord avait été réalisée à un prix significativement minoré par les parties. Elle en a déduit que, dès lors que cette minoration n'était justifiée par l'existence d'aucune contrepartie et que l'intention d'octroyer une libéralité de la part de la société et de la recevoir de la part de M. D... devait être présumée, compte tenu des relations d'intérêt existant entre la société Finerland et M. B... C..., l'administration devait être regardée comme apportant la preuve de l'intention des parties, respectivement, de consentir et de recevoir une libéralité. En statuant ainsi, la cour, qui n'a pas entaché son arrêt de dénaturation des actes figurant au dossier ni ne s'est méprise sur la portée des écritures de l'administration, n'a pas commis d'erreur de droit. Elle n'a pas davantage commis d'erreur de droit en jugeant que l'avantage ainsi consenti était occulte au sens du c de l'article 111 du code général des impôts et imposable sur ce fondement.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige : " Les cotisations d'assurance maladie et maternité, d'allocations familiales et d'assurance vieillesse des travailleurs indépendants non agricoles sont assises sur leur revenu d'activité non salarié (...) Est également prise en compte, dans les conditions prévues au deuxième alinéa, la part des revenus mentionnés aux articles 108 à 115 du code général des impôts perçus par le travailleur non salarié non agricole, son conjoint ou le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité ou leurs enfants mineurs non émancipés et des revenus visés au 4° de l'article 124 du même code qui est supérieure à 10 % du capital social et des primes d'émission et des sommes versées en compte courant détenus en toute propriété ou en usufruit par ces mêmes personnes (...) ". Aux termes de l'article R. 131-2 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable : " Pour l'application du troisième alinéa de l'article L. 131-6 : (...) 3° Le montant du capital social, des primes d'émission et des sommes versées en compte courant d'associé est apprécié au dernier jour de l'exercice précédant la distribution des revenus mentionnés aux articles 108 à 115 du code général des impôts et le versement des revenus visés au 4° de l'article 124 du même code ". Il résulte, de ces dispositions que, si les revenus distribués ont en principe le caractère de revenus de capitaux mobiliers passibles de la contribution sociale sur les revenus du patrimoine, ceux mentionnés à l'article 111 du code général des impôts doivent être regardés, pour leur assujettissement aux prélèvements sociaux, uniquement comme des revenus d'activité pour leur fraction excédant 10 % du capital social et des primes d'émission ainsi que des sommes versées en compte courant.

5. Si en appel, M. et Mme C... réclamaient le bénéfice de ces dispositions au motif que les revenus que l'administration entendait taxer excédaient 10 % du capital social et des primes d'émission ainsi que des sommes versées en compte courant, ils n'ont apporté au soutien de cette affirmation aucun élément de preuve ni n'ont précisé le montant d'assiette qu'ils entendaient extourner des revenus normalement soumis à la contribution sociale sur le patrimoine. Il en résulte que la cour a pu, sans entacher son arrêt d'une contradiction de motifs ni inverser la charge de la preuve, juger, alors même qu'elle relevait que l'administration disposait des comptes définitifs de liquidation et des bilans de la société Finerland, que M. et Mme B... C... n'avaient apporté aucun élément de nature à justifier qu'une fraction des revenus distribués au titre de l'année 2012 excédait le seuil prévu à l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... C... ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. et Mme C....

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme B... C... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme E... B... C... et au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics.

Délibéré à l'issue de la séance du 10 octobre 2024 où siégeaient : M. Thomas Andrieu, président de chambre, présidant ; M. Jonathan Bosredon, conseiller d'Etat et M. Jean-Marc Vié, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 22 novembre 2024.

Le président :

Signé : M. Thomas Andrieu

Le rapporteur :

Signé : M. Jean-Marc Vié

Le secrétaire :

Signé : M. Aurélien Engasser


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 473909
Date de la décision : 22/11/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 22 nov. 2024, n° 473909
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Vié
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:473909.20241122
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