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20/12/2024 | FRANCE | N°471062

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 20 décembre 2024, 471062


Vu la procédure suivante :



Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 3 février et 19 décembre 2023 et le 29 février 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. AC... F..., Mme AS... G..., M. BB... M..., M. T... H..., Mme C... AA..., M. BD..., M. U... AB..., M. AH... AK..., Mme Z... AL..., M. BA... AN..., Mme AU... AX..., Mme AO... AW..., Mme A... Q..., Mme B... AY..., Mme BC... I..., Mme AM... R..., Mme AQ... S..., M. AD... AZ..., Mme J... AP..., Mme AV... K..., M. P... AE..., Mme AG... V..., Mme L... X..., M. D... Prud'homme, Mme Y...

N..., M. W... E..., Mme AT... AI..., M. AR... O..., M. AF... AJ......

Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 3 février et 19 décembre 2023 et le 29 février 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. AC... F..., Mme AS... G..., M. BB... M..., M. T... H..., Mme C... AA..., M. BD..., M. U... AB..., M. AH... AK..., Mme Z... AL..., M. BA... AN..., Mme AU... AX..., Mme AO... AW..., Mme A... Q..., Mme B... AY..., Mme BC... I..., Mme AM... R..., Mme AQ... S..., M. AD... AZ..., Mme J... AP..., Mme AV... K..., M. P... AE..., Mme AG... V..., Mme L... X..., M. D... Prud'homme, Mme Y... N..., M. W... E..., Mme AT... AI..., M. AR... O..., M. AF... AJ..., l'association Agir pour l'environnement, l'association Alterna'Bio, l'association nationale pour la Protection des Eaux et Rivières, l'association Arthropologia, l'association Campagne Glyphosate France, l'association Collectif Alternatives aux Pesticides 66, l'association Comité Ecologique Ariégeois, l'association Collectif Anti-OGM 66, le syndicat départemental Confédération Paysanne de l'Ariège, le syndicat départemental Confédération Paysanne de l'Aveyron, le syndicat départemental Confédération Paysanne du Lot, la fédération syndicale nationale Confédération Paysanne, l'association Environnement et santé, l'association Foll'Avoine, l'association Générations Futures, l'association HALTE OGM 07, l'association de protection des rivières ariégeoise " le Chabot ", l'association Nature et Progrès Ardèche, l'association Nature et Progrès Aveyron, l'association Nature et Progrès Tarn, la Fédération Nature et Progrès, l'association Nature Rights, l'association Notre Affaire à Tous, l'association PIG BZH, l'association Secrets Toxiques, l'association Santé Environnement Auvergne Rhône Alpes, le Syndicat national d'Apiculture, l'association SOS MSC - Association d'aide et de défense des personnes atteintes du syndrome d'hypersensibilité Chimique Multiple, l'association Terre d'Abeilles, et l'Union nationale de l'Apiculture Française demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a refusé de compléter l'arrêté du 30 juin 2017 fixant la composition et les modalités de présentation des dossiers de demandes relatives à des autorisations de mise sur le marché et à des permis d'expérimentation et de commerce parallèle de produits phytopharmaceutiques, de leurs adjuvants ou de produits mixtes, en ajoutant, parmi les pièces devant être produites par le demandeur d'une autorisation de mise sur le marché d'un produit phytopharmaceutique, les analyses de toxicité à long terme et les analyses de cancérogénicité à long terme portant sur le produit dans sa composition complète ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire de prendre les mesures règlementaires nécessaires pour mettre en conformité l'arrêté du 30 juin 2017 avec le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009, tel qu'interprété par la Cour de justice dans son arrêt Blaise e.a. (aff. C-616/17) du 1er octobre 2019, dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros à verser à chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment la Charte de l'environnement à laquelle renvoie son Préambule ;

- le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 ;

- le règlement (UE) n° 284/2013 de la Commission du 1er mars 2013 ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- l'arrêté du 30 juin 2017 fixant la composition et les modalités de présentation des dossiers de demandes relatives à des autorisations de mise sur le marché et à des permis d'expérimentation et de commerce parallèle de produits phytopharmaceutiques, de leurs adjuvants ou de produits mixtes ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Muriel Deroc, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un courrier reçu le 12 octobre 2022, M. F... et cinquante-huit autres demandeurs ont demandé au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire de compléter l'arrêté du 30 juin 2017 fixant la composition et les modalités de présentation des dossiers de demandes relatives à des autorisations de mise sur le marché et à des permis d'expérimentation et de commerce parallèle de produits phytopharmaceutiques, de leurs adjuvants ou de produits mixtes, en ajoutant, parmi les pièces devant être produites par le demandeur d'une autorisation de mise sur le marché d'un produit phytopharmaceutique et prises en compte par l'autorité administrative lors de l'étude des demandes, des analyses de toxicité à long terme et des analyses de cancérogénicité à long terme portant sur le produit dans sa composition complète. Par la présente requête, ils demandent l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de refus qui a été opposée à leur demande et qu'il soit enjoint au ministre de l'agriculture et de l'alimentation de compléter l'arrêté du 30 juin 2017 dans le sens indiqué, dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

Sur l'intervention du syndicat professionnel Phyteis :

2. Eu égard à son objet statutaire, qui est de regrouper pour la défense de leurs intérêts les personnes morales et physiques ayant pour activité la recherche, le développement, la fabrication ou la vente de produits phytosanitaires, et à la nature du litige, le syndicat professionnel Phyteis justifie d'un intérêt suffisant pour intervenir en défense, au soutien des conclusions présentées par le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire tendant au rejet de la requête. Son intervention est, par suite, recevable.

Sur la requête :

3. D'une part, il résulte des dispositions du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil que la commercialisation et l'utilisation de tels produits, sur le territoire d'un Etat membre de l'Union européenne, n'est possible qu'après approbation des substances actives, phytoprotecteurs et synergistes qu'ils contiennent par la Commission européenne, et après autorisation de mise sur le marché et d'utilisation du produit lui-même par l'autorité compétente de l'Etat membre concerné. Le 1. de l'article 29 de ce règlement énumère les exigences auxquelles le produit phytopharmaceutique doit nécessairement satisfaire pour pouvoir faire l'objet, de la part d'un Etat membre, d'une autorisation de mise sur le marché, au nombre desquelles figure, par renvoi opéré par le e) au paragraphe 3 de l'article 4 du même règlement, le fait, dans des conditions réalistes d'utilisation et selon ce qui est prévisible eu égard à l'état actuel des connaissances scientifiques et techniques, de " ne pas avoir d'effet nocif immédiat ou différé sur la santé humaine, y compris les groupes vulnérables (...) directement ou par l'intermédiaire de l'eau potable (...), des denrées alimentaires (...) ou de l'air, ou d'effets sur le lieu de travail ou d'autres effets indirects, compte tenu des effets cumulés et synergiques connus lorsque les méthodes d'évaluation scientifiques de ces effets sont disponibles (...) ". Le 6. de l'article 29 prévoit que " des principes uniformes d'évaluation et d'autorisation des produits phytopharmaceutiques " sont définis par la Commission dans des règlements adoptés selon la procédure consultative organisée par le même règlement. Enfin, l'article 33 du règlement n° 1107/2009 précise la composition de la demande d'autorisation de mise sur le marché du produit ainsi que les éléments devant être joints à celle-ci, notamment un dossier complet et un dossier récapitulatif pour chaque point des exigences en matière de données applicables au produit phytopharmaceutique, ainsi qu'à la substance active, au phytoprotecteur et au synergiste. Le 1. de l'article 37 permet aux Etats membres, lors de l'examen de la demande et si besoin, de solliciter du demandeur la fourniture d'informations complémentaires.

4. L'annexe du règlement (UE) n° 284/2013 de la Commission du 1er mars 2013 établissant les exigences en matière de données applicables aux produits phytopharmaceutiques, conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, prévoit, au titre des conditions devant être respectées par les informations fournies que " 1.2. Toute information, notamment toute donnée connue sur les effets potentiellement nocifs du produit phytopharmaceutique sur la santé humaine et animale ou sur les eaux souterraines, doit être incluse, ainsi que les effets cumulés et synergiques connus et prévus " et que " 1.12. Les informations fournies pour le produit phytopharmaceutique et pour la substance active doivent être suffisantes pour : (...) c) permettre d'évaluer les risques à court et long terme pour les espèces, populations, communautés et processus non ciblés ; (...) e) permettre une évaluation des risques de l'exposition aiguë et chronique du consommateur, y compris, le cas échéant, une évaluation du risque cumulé découlant de l'exposition à plus d'une substance active ; f) permettre une estimation de l'exposition aiguë et chronique des opérateurs, des travailleurs, des résidents et de toute autre personne présente sur les lieux, y compris, le cas échéant, l'exposition cumulée à plus d'une substance active (...) ". S'agissant des produits chimiques, il est indiqué dans la section 7 " Etudes toxicologiques ", que les " effets éventuels des composants sur le potentiel toxique de l'ensemble du mélange doivent être pris en considération " et, s'agissant des produits contenant un micro-organisme, au point " 7. Effets sur la santé humaine ", que " les éventuels effets synergiques néfastes et/ou interactions entre les substances chimiques présentes dans le produit phytopharmaceutique (...) doivent aussi être étudiés. Les données disponibles concernant tout effet néfaste possible sur la santé humaine doivent être communiquées ".

5. D'autre part, l'article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime prévoit : " Les conditions dans lesquelles la mise sur le marché et l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et des adjuvants vendus seuls ou en mélange et leur expérimentation sont autorisées, ainsi que les conditions selon lesquelles sont approuvés les substances actives, les coformulants, les phytoprotecteurs et les synergistes contenus dans ces produits, sont définies par le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 (...) et par les dispositions du présent chapitre ". Selon les dispositions de l'article R. 253-5 de ce code, les décisions relatives aux demandes d'autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques sont prises par le directeur général de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) et précédées d'une évaluation conduite conformément aux principes uniformes d'évaluation et d'autorisation mentionnés au paragraphe 6 de l'article 29 du règlement (CE) n° 1107/2009. L'article R. 253-10 du même code habilite le ministre chargé de l'agriculture à préciser par arrêté, sur proposition du directeur général de l'Agence, la composition et les modalités de présentation des dossiers de demande, et l'article R. 253-10-1 permet à l'ANSES d'exiger du demandeur, au cours de l'évaluation du produit, qu'il lui fournisse des éléments complémentaires dans les conditions prévues aux articles 33, 37, 52 et 65 du règlement (CE) n° 1107/2009.

6. L'arrêté du 30 juin 2017 en litige a été pris par le ministre chargé de l'agriculture en application de ces dispositions. Son article 2 dispose : " Toute demande d'autorisation de mise sur le marché (...) est présentée dans un dossier contenant : 1) Une lettre de demande, de transmission d'informations, de déclaration ou de notification ; 2) Le ou les formulaires exigés par les articles 3 à 9-1 ; et 3) Le cas échéant, les éléments complémentaires exigés par les articles 3 à 9-1 (...) ". L'article 5 précise, s'agissant des demandes relatives à une autorisation de mise sur le marché de produits soumises à évaluation scientifique, la dénomination du formulaire à remplir et renvoie à l'annexe III de l'arrêté s'agissant des éléments complémentaires à fournir. L'annexe III prévoit que " Le dossier est établi en application du règlement (UE) n° 284/2013 susvisé établissant les exigences en matière de données applicables aux produits phytopharmaceutiques et comporte les éléments complémentaires suivants : (...) un dossier technique constitué : (...) - du projet de rapport d'évaluation établi par le demandeur ; - des rapports d'études ".

7. Par un arrêt Blaise e.a. du 1er octobre 2019 (aff. C-616/17), la Cour de justice de l'Union européenne a estimé que les procédures conduisant à l'autorisation d'un produit phytopharmaceutique, à savoir l'approbation des substances actives et l'autorisation elle-même du produit, telles qu'elles sont prévues par le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009, doivent impérativement comprendre une appréciation non seulement des effets propres des substances actives contenues dans ce produit, mais aussi des effets cumulés de ces substances et de leurs effets cumulés avec d'autres composants de ce produit.

8. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées que le règlement (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009 opère une entière harmonisation des règles s'agissant des informations devant être transmises dans le cadre d'une demande d'approbation d'une substance active ou d'autorisation de mise sur le marché d'un produit phytopharmaceutique, lesquelles doivent, en vertu des dispositions du règlement (UE) n° 284/2013 citées au point 4 ci-dessus, d'une part, comporter toute information en possession du demandeur sur les effets potentiellement nocifs du produit et, d'autre part, permettre à l'autorité compétente de se prononcer, notamment sur les risques à court et long terme pour la santé humaine du fait d'une exposition aiguë ou chronique, y compris en cas d'exposition cumulée à plus d'une substance active et en tenant compte des éventuels effets synergiques néfastes et/ou interactions entre les substances chimiques présentes dans le produit phytopharmaceutique.

9. Par l'arrêté du 30 juin 2017, le ministre chargé de l'agriculture s'est borné à déterminer la présentation formelle que doit revêtir, en France, le dossier prévu à l'article 33 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009, en vue de la transmission à l'ANSES des informations visées au point précédent, en précisant que ces informations devaient répondre aux exigences du règlement (UE) n° 284/2013 mentionné ci-dessus. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le ministre, en refusant de compléter l'arrêté attaqué, aurait, faute de mettre à même l'ANSES de porter une appréciation complète et fiable sur les effets à long terme et cumulés de ces substances avec les autres composants du produit, méconnu les exigences du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009, ni qu'il aurait exclu la production d'analyses de toxicité et cancérogénicité à long terme des produits phytopharmaceutiques dans leur composition complète et, ce faisant, méconnu l'étendue de sa compétence.

10. En deuxième lieu, la Cour de justice de l'Union européenne, se prononçant au regard du principe de précaution garanti par les stipulations de l'article 191, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et rappelé à l'article 1er, paragraphe 4 du règlement (CE) n° 1107/2009, qui est seul applicable en l'espèce dès lors que le règlement (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009 opère une complète harmonisation des conditions et modalités d'autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques mais dont la portée garantit l'effectivité du respect du principe de valeur constitutionnelle proclamé par l'article 5 de la Charte de l'environnement dont la méconnaissance est alléguée par les requérants, a relevé, dans son arrêt Blaise e.a. précité, qu'alors même que le règlement (CE) n° 1107/2009 ne prévoit pas de manière détaillée la nature des essais, des analyses et des études auxquels les produits phytopharmaceutiques doivent être soumis avant de pouvoir bénéficier d'une autorisation de mise sur le marché, il ne dispense pas le demandeur de fournir des tests de carcinogénicité et de toxicité à long terme et qu'il appartient aux autorités compétentes, qui doivent procéder à une évaluation indépendante, objective et transparente de la demande, de vérifier que les éléments présentés sont suffisants pour écarter, à la lumière des connaissances scientifiques et techniques actuelles, le risque que ce produit présente une telle carcinogénicité ou toxicité. Il ne ressort cependant pas des énonciations de cet arrêt, par lequel la Cour a conclu à la validité du règlement n° 1107/2009, que le principe de précaution impliquerait, au-delà de la transmission, par la personne sollicitant l'autorisation de mettre sur le marché un produit phytopharmaceutique, des informations prévues par le règlement (UE) n° 284/2013 de la Commission du 1er mars 2013, rappelées au point 4 ci-dessus, la production systématique de résultats de tests de toxicité et carcinogénicité à long terme sur le produit candidat, que l'autorité évaluatrice doit néanmoins demander au cas par cas s'ils sont nécessaires à son évaluation des effets cumulés et synergiques connus et prévus, à court terme et à long terme, du produit en question, telle que requise par la réglementation communautaire mentionnée aux points 3 et 4 ci-dessus. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en refusant de compléter l'arrêté du 30 janvier 2017 en ce sens, le ministre aurait méconnu le principe de précaution ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

11. Les requérants font également valoir que la liste des coformulants interdits prévue au c) du 1. de l'article 29 du règlement (CE) n° 1107/2009, est restée vierge jusqu'en 2021, malgré la dangerosité aujourd'hui reconnue de ces substances, et qu'elle reste incomplète à ce jour, qu'il n'existe pas de données scientifiques disponibles sur les effets potentiellement nocifs d'un produit phytopharmaceutique dans sa formulation complète avant sa première mise sur le marché, qu'il n'est pas possible de pallier l'absence de tests par les données recueillies au titre des règlements (CE) n° 1907/2006 et n° 1272/2008 et que la méthode d'évaluation par additivité ou extrapolation avancée par le ministre, ainsi que les évaluations menées par l'ANSES, sont inadéquates et insuffisantes pour apprécier la toxicité d'un produit à long terme. Ces considérations, à les supposer avérées, sont sans incidence sur la légalité de la décision contestée dès lors qu'il n'en ressort pas que seule la production systématique d'études de toxicité et cancérogénicité à long terme du produit dans sa formulation complète permettrait d'assurer une mise en œuvre satisfaisante du règlement n° 1107/2009 dans le respect du principe de précaution.

12. Enfin, si les requérants se prévalent d'une méconnaissance du principe de conciliation prévu à l'article 6 de la Charte de l'environnement, ce moyen n'est, en tout état de cause, pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir, que M. F... et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision qu'ils contestent. En conséquence, doivent également être rejetées leurs conclusions tendant au prononcé d'une injonction sous astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'étant pas partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : L'intervention du syndicat professionnel Phyteis est admise.

Article 2 : La requête de M. F... et autres est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. AC... F..., premier dénommé, pour l'ensemble des requérants, à la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt et au syndicat professionnel Phyteis.

Délibéré à l'issue de la séance du 28 novembre 2024 où siégeaient : M. Stéphane Verclytte, président de chambre, présidant ; Mme Sylvie Pellissier, conseillère d'Etat et Mme Muriel Deroc, maîtresse des requêtes-rapporteure.

Rendu le 20 décembre 2024.

Le président :

Signé : M. Stéphane Verclytte

La rapporteure :

Signé : Mme Muriel Deroc

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Martinez-Casanova


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 471062
Date de la décision : 20/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 déc. 2024, n° 471062
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Muriel Deroc
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Avocat(s) : SCP GADIOU, CHEVALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:471062.20241220
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