Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2021 du préfet de police lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de renvoi et lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans. Par un jugement n°s 2128211, 2128247 du 25 mars 2022, ce tribunal a annulé l'arrêté contesté en tant qu'il fixe l'Afghanistan comme pays de destination et rejeté le surplus de la demande.
Par un arrêt n° 22PA01932 du 5 juillet 2023, la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel du préfet de police, annulé le jugement du tribunal administratif de Paris en tant qu'il annule partiellement l'arrêté du 20 décembre 2021 et a rejeté la demande de M. A....
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 septembre et 22 décembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du préfet de police ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Anne Sevaux et Paul Mathonnet, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Céline Boniface, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A..., ressortissant afghan, est entré en France au cours de l'année 2017. Par une décision du 28 juin 2019, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire. M. A... a été condamné le 6 avril 2021, par un arrêt de la cour d'appel de Paris devenu définitif, à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement dont douze mois assortis d'un sursis, pour des faits d'agression sexuelle sur mineur de quinze ans. Le directeur général de l'OFPRA a mis fin le 4 août 2021 à la protection accordée à l'intéressé, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2021 par lequel le préfet de police de Paris a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour pour une durée de deux ans. Par un jugement du 25 mars 2022, ce tribunal a annulé cet arrêté en tant qu'il fixait l'Afghanistan comme pays de destination et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. A.... Celui-ci se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative de Paris a, sur appel du Préfet de police, annulé les articles 3 et 4 du jugement et rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié mais pour laquelle il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'elle courrait dans son pays un risque réel de subir l'une des atteintes graves suivantes : / 1° La peine de mort ou une exécution ; / 2° La torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; / 3° S'agissant d'un civil, une menace grave et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence qui peut s'étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle et résultant d'une situation de conflit armé interne ou international ". Aux termes de l'article L. 512-2 du même code : " La protection subsidiaire n'est pas accordée à une personne s'il existe des raisons sérieuses de penser : (...) / 4° Que son activité sur le territoire constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat ; (...) ". L'article L. 512-3 de ce code dispose que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides " met également fin à tout moment, de sa propre initiative ou à la demande de l'autorité administrative, au bénéfice de la protection subsidiaire dans les cas suivants : (...) / 3° Le bénéficiaire de la protection subsidiaire doit, à raison de faits commis après l'octroi de la protection, en être exclu pour l'un des motifs prévus à l'article L. 512-2. "
3. Aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi :/ 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ;/ (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".
4. Il appartient à l'étranger qui conteste son éloignement de démontrer qu'il y a des raisons sérieuses de penser que, si la mesure incriminée était mise à exécution, il serait exposé à un risque réel de se voir infliger des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
5. En se fondant, pour juger que le préfet de police avait pu, sans méconnaître ces stipulations, fixer l'Afghanistan comme pays de destination, sur ce qu'il ne ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis ni, d'une part, que la situation de conflit armé dans ce pays, en dépit sa gravité, se caractériserait par un degré de violence tel qu'il existerait des motifs sérieux et avérés de croire qu'un civil y serait exposé, du seul fait de sa présence, à un risque de traitements inhumain ou dégradant, ni, d'autre part, que M. A... y serait personnellement exposé à de tels traitements du seul fait de son appartenance à l'ethnie Hazara ou de la durée de son séjour hors d'Afghanistan, la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé, n'a commis ni erreur de droit ni erreur de qualification juridique des faits.
6. Enfin, si M. A... soutient que la mesure contestée méconnaîtrait les articles 3 et 37 de la convention relative aux droits de l'enfant et l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce moyen est nouveau en cassation et, par suite, inopérant.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. A... est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.