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07/02/2025 | FRANCE | N°500964

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 07 février 2025, 500964


Vu la procédure suivante :

Mme D... B..., agissant en son nom propre et au nom de ses deux enfants mineurs, E... C... F... et G... A..., a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, d'enjoindre à la Ville de Paris de la prendre effectivement en charge dans un hébergement d'urgence adapté, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 222-5 du code de l'actio

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Vu la procédure suivante :

Mme D... B..., agissant en son nom propre et au nom de ses deux enfants mineurs, E... C... F... et G... A..., a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, d'enjoindre à la Ville de Paris de la prendre effectivement en charge dans un hébergement d'urgence adapté, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles, sans délai, à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir. Par une ordonnance n° 2430356 du 16 novembre 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Paris, d'une part, l'a admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, a rejeté le surplus de sa demande.

Par une ordonnance n° 498960 du 3 décembre 2024, le juge des référés du Conseil d'Etat a, d'une part, annulé l'ordonnance du 16 novembre 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Paris et, d'autre part, enjoint à la Ville de Paris de continuer à proposer, sans solution de continuité, à Mme B... et à ses deux enfants mineurs un hébergement d'urgence conforme aux prescriptions du 4° de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles.

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 27 janvier et le 3 février 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B..., agissant en son nom propre et au nom de ses enfants mineurs, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-4 du code de justice administrative :

1°) d'enjoindre à la Ville de Paris d'exécuter l'ordonnance du 3 décembre 2024, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

2°) de mettre à la charge de la Ville de Paris la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors qu'elle-même et ses fils sont de nouveau sans hébergement et que l'un de ses fils a été reconnu handicapé ;

- la Ville de Paris n'a pas exécuté l'ordonnance du 3 décembre 2024 lui enjoignant de continuer à lui proposer, sans solution de continuité, un hébergement pérenne dès lors que son hébergement a pris fin le 27 janvier 2025 ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2025, la Ville de Paris conclut au rejet de la requête. Elle soutient que, d'une part, Mme B... et ses enfants sont pris en charge par le département du Val d'Oise et, d'autre part, ils sont hébergés depuis le 21 novembre 2024 sans discontinuité.

La requête a été communiquée à la délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement qui n'a pas produit d'observations.

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme D... B... et, d'autre part, la Ville de Paris et la délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement ;

Ont été entendus lors de l'audience publique du 3 février 2025, à 14 heures :

- le représentant de Mme B... ;

- Mme B... ;

- Me Froger, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la Ville de Paris ;

à l'issue de laquelle le juge des référés a différé la clôture de l'instruction au mercredi 5 février 2025 à 12 heures ;

Vu les mémoires après audience, enregistrés les 4 et 5 février 2025, présentés par la Ville de Paris ;

Vu le mémoire après audience, enregistré le 4 février 2025, par lequel Mme B... demande, à titre subsidiaire, d'enjoindre à la Ville de Paris d'accomplir toutes les diligences possibles, y compris en coopération avec le département du Val-d'Oise, afin de poursuivre son hébergement postérieurement au 11 février 2025 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- l'ordonnance n° 498960 du 3 décembre 2024 du juge des référés du Conseil d'Etat ;

- le code de justice administrative.

Vu la note en délibéré, enregistrée le 5 février 2025, présentée par Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". Aux termes de l'article L. 521-4 du même code : " Saisi par toute personne intéressée, le juge des référés peut, à tout moment, au vu d'un élément nouveau, modifier les mesures qu'il avait ordonnées ou y mettre fin ".

2. Par une première demande enregistrée le 15 novembre 2024, Mme B..., ressortissante ivoirienne sans domicile et titulaire d'un titre de séjour pluriannuel valable jusqu'au 25 septembre 2026, agissant en son nom propre et en celui de ses deux enfants, E... C... et G..., nés en 2018 et 2022 et dont elle assume seule la charge, a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Paris, en application des dispositions précitées de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une demande tendant à titre principal à ce qu'il soit enjoint à la Ville de Paris de la prendre effectivement en charge sans délai avec ses enfants dans un hébergement d'urgence adapté, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles. Par une ordonnance du 16 novembre 2024, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté cette demande. Sur appel de Mme B..., le juge des référés du Conseil d'Etat, par une ordonnance du 3 décembre 2024, a annulé l'ordonnance litigieuse et a enjoint à la Ville de Paris d'assurer à l'intéressée et à ses enfants mineurs un hébergement d'urgence dans les conditions prévues à l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles. Par une nouvelle demande, Mme B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat de faire application des dispositions de l'article L. 521-4 du code de justice administrative et d'assortir d'une astreinte l'injonction ainsi prononcée à l'encontre de la Ville de Paris.

3. Aux termes de l'article L. 225-5 du code de l'action sociale et des familles : " Sont pris en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance sur décision du président du conseil départemental : (...) 4° Les femmes enceintes et les mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans qui ont besoin d'un soutien matériel et psychologique, notamment parce qu'elles sont sans domicile (...) ". Il résulte de ces dispositions que la prise en charge, qui inclut l'hébergement, le cas échéant en urgence, des femmes enceintes et des mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans qui ont besoin d'un soutien matériel et psychologique, notamment parce qu'elles sont sans domicile, incombe au département. A ce titre, une carence caractérisée dans l'accomplissement de la mission dévolue au département, ou dans le cas de Paris à la Ville de Paris, de la mission qui lui incombe en application de ces dispositions peut faire apparaitre, pour l'application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale lorsqu'elle entraine des conséquences graves pour la personne intéressée. Il incombe au juge des référés d'apprécier dans chaque cas les diligences accomplies par l'administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l'âge, de l'état de santé et de la situation de famille de la personne intéressée.

4. Il résulte des pièces versées au dossier de l'instruction et des explications fournies lors de l'audience de référé que Mme B... et ses enfants font l'objet, depuis le 21 novembre 2024 et sans solution de continuité, d'un hébergement d'urgence dans des hôtels tous situés dans le Val d'Oise, à Saint-Brice-sous-Forêt, Garges-les-Gonesse, Goussainville et Argenteuil, et que Mme B... a inscrit ses enfants à l'école à Garges-les-Gonesse. En outre l'intéressée, qui est régulièrement en contact avec les services sociaux de ce département, a formé auprès de ceux-ci le 30 janvier 2025 une demande d'admission de longue durée dans un centre d'accueil situé à Ezanville, en sollicitant en ce sens une aide financière de ce département. Alors même que Mme B... avait visé le 12 juillet 2024 un document par lequel elle faisait élection de domicile au siège d'une association situé à Paris (19ème) et qu'elle fait valoir qu'elle se rend selon une fréquence non précisée à Paris (13ème) dans une autre association à caractère social, notamment pour y obtenir des bons alimentaires, il est établi que ce sont désormais les services compétents du Val d'Oise qui assurent le suivi médico-social de l'intéressée et de ses enfants. Il est notamment établi que ce département a pris en charge cette famille au regard du dispositif d'hébergement d'urgence dont bénéficient Mme B... et ses enfants en vertu des dispositions précitées de l'article L. 225-5 du code de l'action sociale et des familles, en assumant la responsabilité de les placer à l'abri et de leur fournir un soutien matériel et psychologique adéquat. La Ville de Paris n'exerçant plus cette responsabilité vis-à-vis de l'intéressée, il n'y a pas lieu de faire usage des pouvoirs reconnus au juge des référés par l'article L. 521-4 du code de justice administrative et de prononcer une astreinte à son encontre.

5. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la requête de Mme B... ne peuvent qu'être rejetées, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme D... B... et à la Ville de Paris.

Copie en sera adressée à la délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement et au département du Val d'Oise.

Fait à Paris, le 7 février 2025

Signé : Terry Olson


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 500964
Date de la décision : 07/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 fév. 2025, n° 500964
Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:500964.20250207
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