La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/03/2025 | FRANCE | N°491682

France | France, Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 17 mars 2025, 491682


Vu la procédure suivante :



La société Eiffage Construction Sud-Est a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner l'office public de l'habitat Toulon Habitat Méditerranée à lui payer la somme de 60 729,49 euros hors taxes au titre du solde d'un marché public de travaux relatif à la construction de 122 logements sociaux. Par un jugement n° 2002169 du 16 février 2023, le tribunal administratif de Toulon a condamné l'office à payer à la société Eiffage Construction Sud-Est une somme de 52 517,63 euros hors taxes au titre du solde du marché

en litige, assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 février 2020...

Vu la procédure suivante :

La société Eiffage Construction Sud-Est a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner l'office public de l'habitat Toulon Habitat Méditerranée à lui payer la somme de 60 729,49 euros hors taxes au titre du solde d'un marché public de travaux relatif à la construction de 122 logements sociaux. Par un jugement n° 2002169 du 16 février 2023, le tribunal administratif de Toulon a condamné l'office à payer à la société Eiffage Construction Sud-Est une somme de 52 517,63 euros hors taxes au titre du solde du marché en litige, assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 février 2020.

Par un arrêt n° 23MA00925 du 11 décembre 2023, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel principal de l'office et appel incident de la société Eiffage Construction Sud-Est, ramené le montant de la condamnation prononcée par le jugement du 16 février 2023 du tribunal administratif de Toulon à la somme de 9 695 euros hors taxes, assortie des intérêts au taux de 8 % à compter du 19 février 2020, avec capitalisation à la date du 15 juin 2023, réformé ce jugement en ce qu'il avait de contraire à son arrêt, et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 12 février, 13 mai et 1er octobre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Eiffage Construction Sud-Est demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de l'office public de l'habitat Toulon Habitat Méditerranée et de faire droit à son appel incident ;

3°) de mettre à la charge de l'office public de l'habitat Toulon Habitat Méditerranée une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, ensemble l'arrêté du 3 mars 2014 le modifiant ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hervé Cassara, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société Eiffage Construction Sud-Est et à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat de l'office public de l'habitat de Toulon Habitat Méditerranée ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Eiffage Construction Sud-Est a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner l'office public de l'habitat Toulon Habitat Méditerranée à lui payer la somme de 60 729,49 euros hors taxes au titre du solde d'un marché public de travaux relatif à la construction de 122 logements sociaux, conclu à prix global et forfaitaire en 2015. Par un jugement du 16 février 2023, le tribunal administratif de Toulon a condamné cet office à lui verser la somme de 52 517,63 euros hors taxes, assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 février 2020. Par un arrêt du 11 décembre 2023, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur l'appel principal de l'office, ramené le montant de la condamnation prononcée par ce jugement à la somme de 9 695 euros hors taxes, assortie des intérêts au taux de 8 % à compter du 19 février 2020, avec capitalisation à la date du 15 juin 2023, et rejeté le surplus des conclusions des parties, notamment certaines conclusions de l'appel incident de la société Eiffage Construction Sud-Est. Cette société se pourvoit en cassation contre cet arrêt.

Sur l'arrêt attaqué en tant qu'il a statué sur l'appel principal de l'office public de l'habitat Toulon Habitat Méditerranée au titre des prestations supplémentaires et modificatives :

2. Aux termes de l'article 14 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux, dans sa version applicable au litige : " 14.1. Le présent article concerne les prestations supplémentaires ou modificatives, dont la réalisation est nécessaire au bon achèvement de l'ouvrage, qui sont notifiées par ordre de service et pour lesquelles le marché n'a pas prévu de prix. / (...) 14.3. Dans le cas de travaux réglés sur prix forfaitaires, lorsque des changements sont ordonnés par le maître d'œuvre dans la consistance des travaux, le prix nouveau est réputé tenir compte des charges supplémentaires éventuellement supportées par le titulaire du fait de ces changements (...) ".

3. Lorsque le titulaire d'un marché public de travaux conclu à prix global et forfaitaire exécute des travaux supplémentaires à la demande, y compris verbale, du maître d'ouvrage ou du maître d'œuvre, il a droit au paiement de ces travaux, quand bien même la demande qui lui en a été faite n'a pas pris la forme d'un ordre de service notifié conformément à ce que prévoient en principe les stipulations du cahier des clauses administratives générales. En revanche, lorsque le titulaire du marché exécute de sa propre initiative des travaux supplémentaires, il n'a droit au paiement de ces travaux que s'ils étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.

4. Il s'ensuit qu'en jugeant que les travaux modificatifs et supplémentaires dont la société Eiffage Construction Sud-Est réclamait le paiement ne pouvaient être rémunérés qu'à la condition que leur réalisation ait été prescrite par un ordre de service régulier ou, à défaut, qu'il soit établi qu'ils étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art et en retenant en l'espèce que la circonstance qu'il aient été réalisés sur l'ordre du maître d'œuvre ne suffisait pas, en l'absence d'ordre de service régulièrement émis, à ouvrir droit à leur rémunération, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que la société Eiffage Construction Sud-Est est fondée, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens qu'elle soulève contre l'arrêt qu'elle attaque en tant qu'il a statué sur l'appel principal de l'office public de l'habitat Toulon Habitat Méditerranée au titre des prestations supplémentaires et modificatives, à demander l'annulation des articles 1er et 2 de cet arrêt en tant qu'ils ont statué sur le paiement de ces prestations.

Sur l'arrêt attaqué en tant qu'il a statué sur l'appel incident de la société Eiffage Construction Sud-Est :

6. La cour administrative d'appel n'a pas méconnu la portée des écritures produites devant elle en retenant que la société Eiffage Construction Sud-Est ne contestait pas les motifs du jugement de première instance en tant qu'il avait statué sur les pénalités infligées au titre du non-respect de la planification des tâches mais seulement en tant qu'il avait statué sur l'application des pénalités de retard au titre de l'installation de la base de vie ainsi que sur le caractère cumulatif des deux pénalités infligées et a suffisamment motivé sa décision en rejetant pour ce motif les conclusions de l'appel incident de la société sur ce point.

7. Il résulte de ce qui précède que la société Eiffage Construction Sud-Est n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque en tant qu'il a rejeté certaines conclusions de son appel incident.

Sur les frais de l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Eiffage Construction Sud-Est qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre, au titre des mêmes dispositions, à la charge de l'office public de l'habitat Toulon Habitat Méditerranée, la somme de 3 000 euros à verser à la société Eiffage Construction Sud-Est.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 1er et 2 de l'arrêt du 11 décembre 2023 de la cour administrative d'appel de Marseille sont annulés en tant qu'ils ont statué sur l'appel principal de l'office public de l'habitat Toulon Habitat Méditerranée au titre des prestations supplémentaires et modificatives.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : L'office public de l'habitat Toulon Habitat Méditerranée versera une somme de 3 000 euros à la société Eiffage Construction Sud-Est au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Eiffage Construction Sud-Est et à l'office public de l'habitat Toulon Habitat Méditerranée.


Synthèse
Formation : 7ème - 2ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 491682
Date de la décision : 17/03/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01-02-01 MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS. - EXÉCUTION FINANCIÈRE DU CONTRAT. - RÉMUNÉRATION DU CO-CONTRACTANT. - INDEMNITÉS. - TRAVAUX SUPPLÉMENTAIRES. - MARCHÉ DE TRAVAUX CONCLU À PRIX GLOBAL ET FORFAITAIRE – DROIT AU PAIEMENT – TRAVAUX SUPPLÉMENTAIRES RÉALISÉS – 1) A LA DEMANDE DU MAÎTRE D’OUVRAGE OU DU MAÎTRE D’ŒUVRE – EXISTENCE, QUELLE QUE SOIT LA FORME DE LA DEMANDE – 2) A L’INITIATIVE DU TITULAIRE DU MARCHÉ – EXISTENCE, S’ILS ÉTAIENT INDISPENSABLES [RJ1].

39-05-01-02-01 1) Lorsque le titulaire d’un marché public de travaux conclu à prix global et forfaitaire exécute des travaux supplémentaires à la demande, y compris verbale, du maître d’ouvrage ou du maître d’œuvre, il a droit au paiement de ces travaux, quand bien même la demande qui lui en a été faite n’a pas pris la forme d’un ordre de service notifié conformément à ce que prévoient en principe les stipulations de l’article 14 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux (CCAG Travaux). ...2) En revanche, lorsque le titulaire du marché exécute de sa propre initiative des travaux supplémentaires, il n’a droit au paiement de ces travaux que s’ils étaient indispensables à la réalisation de l’ouvrage dans les règles de l’art.


Publications
Proposition de citation : CE, 17 mar. 2025, n° 491682
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Hervé Cassara
Rapporteur public ?: M. Nicolas Labrune
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:491682.20250317
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award