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16/06/2025 | FRANCE | N°500250

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 16 juin 2025, 500250


Vu la procédure suivante :



Le préfet des Alpes-Maritimes a déféré au juge des référés du tribunal administratif de Nice, sur le fondement de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, la décision implicite par laquelle le maire de Beausoleil a rejeté son recours gracieux formé le 2 août 2024 à l'encontre de l'arrête du 11 juillet 2024 accordant un permis de construire à la société civile immobilière Kokoro et à la société civile immobilière Nocturne, ainsi que ce permis, en vue de la suspension de leur exécution.

Par une ordonnance n° 2406444 du 19 décembre 2024, le juge des référés du tribunal ad...

Vu la procédure suivante :

Le préfet des Alpes-Maritimes a déféré au juge des référés du tribunal administratif de Nice, sur le fondement de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, la décision implicite par laquelle le maire de Beausoleil a rejeté son recours gracieux formé le 2 août 2024 à l'encontre de l'arrête du 11 juillet 2024 accordant un permis de construire à la société civile immobilière Kokoro et à la société civile immobilière Nocturne, ainsi que ce permis, en vue de la suspension de leur exécution. Par une ordonnance n° 2406444 du 19 décembre 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a fait droit à sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 et 15 janvier 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les sociétés civiles immobilières Kokoro et Nocturne demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au titre de la procédure de référé engagée, de rejeter le déféré du préfet des Alpes-Maritimes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Les sociétés civiles immobilières Kokoro et Nocturne soutiennent que le juge des référés du tribunal administratif de Nice a entaché son ordonnance d'erreur de droit en considérant que l'avis défavorable émis par l'architecte des Bâtiments de France étant un avis conforme en application des dispositions de l'article R. 425-18 du code de l'urbanisme, le moyen soulevé par le préfet tiré de la méconnaissance de ces dispositions était de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité du permis de construire valant permis de démolir accordé, tout en regardant comme inopérante l'exception d'illégalité, soulevée en défense, dirigée contre cet avis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2025, le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation conclut au rejet du pourvoi. Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code générale des collectivités territoriales ;

- le code général des impôts ;

- le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Renaud Vedel, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bauer-Violas - Feschotte-Desbois - Sebagh, avocat aux sociétés civiles immobilières Kokoro et Nocturne ;

Considérant ce qui suit :

1. Par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article R. 811-1 du code de justice administrative selon lesquelles " toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif (...) peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance ", les dispositions de l'article R. 811-1-1 du même code prévoient que les tribunaux administratifs statuent en premier et dernier ressort sur les recours, introduits entre le 1er septembre 2022 et le 31 décembre 2027, dirigés contre : " 1° Les permis de construire ou de démolir un bâtiment comportant plus de deux logements (..) lorsque le bâtiment (...) est implanté en tout ou partie sur le territoire d'une des communes mentionnées à l'article 232 du code général des impôts et son décret d'application (...) ".

2. La commune de Beausoleil figure sur la liste annexée au décret du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts. Toutefois, il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le permis de construire accordé par le maire de Beausoleil, par un arrêté du 11 juillet 2024, aux sociétés civiles immobilières Kokoro et Nocturne et dont le préfet des Alpes-Maritimes a demandé la suspension par un déféré enregistré le 20 novembre 2024, porte sur la démolition et la reconstruction d'une maison individuelle, la démolition d'une annexe, la création d'un jardin méditerranéen avec piscine et la construction d'un parc de stationnement souterrain. Par conséquent, le projet autorisé par le permis en litige ne peut être regardé comme portant sur un bâtiment comportant plus de deux logements au sens des dispositions de l'article R. 811-1-1 du code de justice administrative.

3. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. / (...) Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. Il est statué dans un délai d'un mois. / (...) L'appel des jugements du tribunal administratif ainsi que des décisions relatives aux demandes de suspension prévues aux alinéas précédents, rendus sur recours du représentant de l'Etat, est présenté par celui-ci. ". Il résulte de ces dispositions que lorsque le juge des référés du tribunal administratif se prononce sur une demande de suspension présentée par le représentant de l'Etat en application de cet article, sa décision, qui n'entre pas dans le champ d'application des articles L. 521-1 à L. 523-1 du code de justice administrative relatifs au juge des référés statuant en urgence, est susceptible de faire l'objet d'un appel.

4. Il résulte de ce qui précède que la requête des sociétés civiles immobilières Kokoro et Nocturne tendant à l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice qu'elles attaquent présente le caractère d'un appel qui ne relève pas de la compétence du Conseil d'Etat, mais de celle de la cour administrative d'appel de Marseille. Il y a lieu, dès lors, d'en attribuer le jugement à cette cour.

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement de la requête des société Kokoro et Nocturne est attribué à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société civile immobilière Kokoro, première dénommée des requérantes et au président de la cour administrative d'appel de Marseille.

Copie en sera adressée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à la commune de Beausoleil.

Délibéré à l'issue de la séance du 6 mai 2025 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; M. Olivier Yeznikian, conseiller d'Etat et M. Renaud Vedel, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 16 juin 2025.

Le président :

Signé : M. Bertrand Dacosta

Le rapporteur :

Signé : M. Renaud Vedel

La secrétaire :

Signé : Mme Sylvie Leporcq


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 500250
Date de la décision : 16/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 jui. 2025, n° 500250
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Renaud Vedel
Rapporteur public ?: Mme Esther de Moustier
Avocat(s) : SCP BAUER-VIOLAS - FESCHOTTE-DESBOIS - SEBAGH

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:500250.20250616
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