Vu la procédure suivante :
La société Free Mobile a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution des décisions du 18 mars et du 18 avril 2024 par lesquelles le maire de la commune de Saint-André-de-la-Roche (Alpes-Maritimes), d'une part, a refusé de faire droit à sa demande de raccordement au réseau électrique pour assurer l'alimentation de la station relais de téléphonie mobile qu'elle souhaite implanter sur un terrain et, d'autre part, l'a mise en demeure de cesser immédiatement les travaux de construction d'une station relais de téléphonie mobile. Par deux ordonnances n° 2403586 et n° 2403589 du 16 juillet 2024, la juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes.
I. Sous le n° 496562, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 31 juillet et 13 août 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Free Mobile demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 2403589 du 16 juillet 2024 portant sur le raccordement au réseau électrique ;
2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-André-de-la-Roche la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
II. Sous le n° 496567, par un pourvoi et un mémoire complémentaire, enregistrés le 1er août et 13 août 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Free Mobile demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 2403586 du 16 juillet 2024 portant sur la cessation des travaux ;
2°) statuant en référé, de faire à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-André-de-la-Roche et de l'Etat la somme de 4 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Hadrien Tissandier, auditeur,
- les conclusions de Mme Dorothée Pradines, rapporteure publique,
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Spinosi, avocat de la société Free Mobile, et à la SCP Bauer-Violas-Feschotte-Desbois-Sebagh, avocat de la commune de Saint-André-de-la-Roche ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
2. Il ressort des pièces des dossiers soumis au juge des référés du tribunal administratif de Nice que, par deux décisions du 18 mars et du 18 avril 2024, le maire de Saint-André-de-la-Roche, d'une part, a refusé de faire droit à la demande de raccordement au réseau électrique de la société Free Mobile pour assurer l'alimentation de la station relais de téléphonie mobile qu'elle souhaite implanter sur un terrain et, d'autre part, a mis en demeure cette société de cesser immédiatement les travaux de construction d'une station relais de téléphonie mobile. Par deux pourvois qu'il y a lieu de joindre pour y statuer par une seule décision, cette société se pourvoit en cassation contre les ordonnances du 16 juillet 2024 par lesquelles le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant à la suspension de ces décisions sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative.
Sur le pourvoi n° 496567 :
3. Il résulte des dispositions combinées des articles R. 421-1 et R. 421-12 du code de l'urbanisme que sont soumises à la procédure de déclaration préalable la construction d'antennes-relais de radiotéléphonie mobile, de leurs systèmes d'accroche, et des locaux ou installations techniques nécessaires à leur fonctionnement lorsque soit, quelle que soit la hauteur de l'antenne, la surface de plancher et l'emprise au sol créées sont supérieures à 5 mètres carrés et inférieure ou égale à 20 mètres carrés, soit, s'agissant des antennes d'une hauteur supérieure à douze mètres, la surface de plancher et l'emprise au sol créées sont inférieures ou égales à 5 mètres carrés. Pour l'appréciation des seuils applicables à ces projets de constructions, s'agissant tant de ceux fixés au j) de l'article R. 421-9 du code de l'urbanisme, que de ceux mentionnés au c) de cet article et au a) de l'article R. 421-2, seules la surface de plancher et l'emprise au sol des locaux et installations techniques doivent être prises en compte, et non l'emprise au sol des pylônes.
4. Pour rejeter la demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 18 avril 2024 mettant en demeure la société Free Mobile de cesser immédiatement les travaux de construction d'une station relais de téléphonie mobile au motif notamment que le projet ne faisait pas l'objet d'une déclaration préalable, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a estimé que le moyen tiré de ce que le projet ne relevait pas du régime de la déclaration préalable n'était pas propre à créer un doute sérieux sur sa légalité. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait des pièces du dossier que la hauteur de l'antenne relais était inférieure à 12 mètres et que la surface de plancher et l'emprise au sol des locaux et installations techniques étaient inférieures à 5 mètres, le juge des référés a commis une erreur de droit. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, l'ordonnance attaquée doit être annulée.
5. Il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée.
6. D'une part, eu égard à l'intérêt public qui s'attache à la couverture du territoire national par les réseaux de téléphonie mobile, aux intérêts propres de la société Free Mobile qui a pris des engagements vis-à-vis de l'Etat quant à la couverture du territoire par son réseau et à la circonstance que le territoire de la commune de Saint-André-de-la-Roche n'est que partiellement couvert par le réseau de téléphonie mobile de la société requérante, la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie.
7. D'autre part, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que le moyen tiré de ce que le projet ne relevait pas du régime de la déclaration préalable au vu de son envergure limitée est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée. Il en va de même du moyen tiré de ce que la règle du retrait à 5 mètres des limites séparatives ne pouvait être utilement opposé à la société Free Mobile.
8. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, en l'état du dossier soumis au Conseil d'Etat, aucun autre moyen n'est susceptible d'entraîner la suspension de la décision attaquée.
9. Il résulte de ce qui précède que la société Free Mobile est fondée à demander la suspension de l'exécution de la décision contestée du 18 avril 2024.
Sur le pourvoi n° 496562 :
10. Pour rejeter la demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 18 mars 2024 du maire de Saint-André-de-la-Roche refusant de faire droit à la demande de la société Free Mobile de raccorder au réseau électrique la station relais de téléphonie mobile qu'elle souhaite implanter, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a estimé que compte tenu de l'interruption des travaux de construction de cette station par l'effet de la décision du 18 avril 2024 du même maire, les effets du refus de raccordement au réseau électrique n'étaient pas de nature à caractériser une urgence justifiant que l'exécution de la décision du 18 mars 2024 soit suspendue. En statuant ainsi, alors que la société Free Mobile soulevait, dans sa requête dirigée la décision du 18 avril 2024 des moyens de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté interruptif de travaux susceptible d'en justifier la suspension, le juge des référés a commis une erreur de droit. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, l'ordonnance attaquée doit être annulée.
11. Il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée.
12. D'une part, eu égard à l'intérêt public qui s'attache à la couverture du territoire national par les réseaux de téléphonie mobile, aux intérêts propres de la société Free Mobile qui a pris des engagements vis-à-vis de l'Etat quant à la couverture du territoire par son réseau et à la circonstance que le territoire de la commune de Saint-André-de-la-Roche n'est que partiellement couvert par le réseau de téléphonie mobile de la société requérante, la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie.
13. D'autre part, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que le moyen tiré de ce que le projet ne relevait pas du régime de la déclaration préalable au vu de son envergure limitée est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.
14. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, en l'état du dossier soumis au Conseil d'Etat, aucun autre moyen n'est susceptible d'entraîner la suspension de la décision attaquée.
15. Il résulte de ce qui précède que la société Free Mobile est fondée à demander la suspension de l'exécution de la décision contestée du 18 mars 2024.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-André-de-la-Roche le versement à la société Free Mobile d'une somme de 4 500 euros au titre des frais qu'elle a engagés devant le tribunal administratif et le Conseil d'Etat. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, en revanche, obstacle à ce que soit mis à la charge de cette société, qui n'est pas la partie perdante dans les présentes instances, le versement de la somme que demande la commune de Saint-André-de-la-Roche au même titre.
D E C I D E :
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Article 1er : Les ordonnances n° 2403586 et n° 2403589 du 16 juillet 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Nice sont annulées.
Article 2 : L'exécution des décisions des 18 mars et 18 avril 2024 du maire de la commune de Saint-André-de-la-Roche est suspendue.
Article 3 : La commune de Saint-André-de-la-Roche versera à la société Free Mobile une somme totale de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Saint-André-de-la-Roche tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Free Mobile et à la commune de Saint-André-de-la-Roche.